Chapitre
La forme la plus subtile, donc la moins connue, de la corruption est l’évitement : un type de corruption consistant à regarder ailleurs, à détourner le regard, et au final à jouer les candides, les naïfs, les (faux) ignorants. L’évitement est un des comportements naturels les plus ancrés chez les animaux, comme chez l’homme. L’animal qui croise le regard d’un congénère de force égale ou supérieure refuse souvent la confrontation en passant son chemin. Ce comportement est défensif et autoprotecteur : il exprime un rapport de forces et entérine une hiérarchie sociale. Ainsi, le faible marque sa soumission au plus fort, ou bien deux dominants se respectent et refusent intelligemment de livrer un vain combat. Projeté dans l’univers humain, le comportement d’évitement est parfois très lisible et évident : ce sont les passagers d’une rame de métro qui détournent le regard à l’arrivée d’une bande agressive. Mais l’évitement s’exprime parfois de façon plus diffuse et plus subtile, à travers un ensemble de signes invisibles aux néophytes mais clairs pour les initiés. Cet évitement peut résulter d’une entente cordiale et implicite, d’une complaisance assumée, qui n’a jamais eu vraiment besoin de se formaliser par un pacte. Un accommodement global, un modus vivendi s’est fait jour, sans que l’on en connaisse la genèse précise, mais les parties en présence se sont envoyé suffisamment de signes et de clins d’œil au fil des années pour que la situation leur paraisse claire : « Pas entre nous …
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- Mis en ligne sur Cairn.info le 29/10/2021
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