Le Brésil présente, sur le plan culturel un double paradoxe. Un très fort métissage et une intégration culturelle qui s’opposent à des disparités sociales majeures. Ce métissage, issu de la colonisation et de l’esclavage, contraste avec les modèles de ségrégation des pays voisins (Argentine) ou de même latitude (Afrique du Sud, Australie). Dans ces pays mis en valeur plus tardivement (xixe siècle) et dans un contexte de capitalisme industriel et non plus mercantile, l’autre n’avait aucune place, même comme esclave. Il était, au mieux exclu, au pire massacré, l’exclusion précédant souvent le massacre.
Le poids de la période esclavagiste se traduit par la présence forte, indéniable et incontournable des anciens esclaves dans la société : parlant la même langue, vivant au même rythme et priant dans les mêmes églises. L’ancienneté de la colonisation et l’intensité du métissage rendaient par ailleurs l’identification raciale particulièrement délicate. Il était dès lors très difficile, au xixe siècle, de pratiquer une politique de ségrégation, voire d’élimination physique ou administrative de la composante non blanche.
Premier paradoxe du Brésil : l’intégration poussée des « races » et des cultures ne se traduit guère dans le profil socio-économique. On rencontre ici les contrastes les plus violents entre les plus riches et les plus pauvres. Le poids de la misère, de l’analphabétisme, de la délinquance issus de l’esclavage pèse encore sur la société brésilienne, qui est l’une des plus injustes du globe…