À travers l’affaire Huawei, c’est la place de la Chine dans la géographie numérique et technologique mondiale qui est en question, les États-Unis défendant leur prééminence. L’interdépendance des systèmes de production complexifie l’affaire. L’Europe, quant à elle, se contentera-t-elle d’être spectatrice du combat des puissants ?
Dans la liste des tensions entre Washington et Pékin, le 15 mai 2019 marque une rupture : de commercial, l’affrontement devient technologique et géopolitique. En inscrivant Huawei sur la Entity List du Département du Commerce américain, Donald Trump place le fleuron de Shenzhen sous un régime de sanctions contraignant celui-ci à revoir entièrement sa chaîne d’approvisionnement. Toute vente de technologie américaine à Huawei, des semi-conducteurs aux systèmes d’exploitation mobile (tel Android), est interdite sans autorisation préalable. Le décret présidentiel risque de porter un coup quasiment fatal à l’entreprise chinoise, qui dépend de ces technologies critiques pour la fabrication et la mise en service de ses smartphones et, surtout, de ses infrastructures de cinquième génération de communications mobiles (5G).
Un second décret présidentiel confère aux autorités américaines le pouvoir de bloquer toute transaction dans la sphère technologique liée, même de loin, à un « adversaire étranger » (État, entreprise ou personne physique) susceptible de compromettre les infrastructures critiques, l’économie numérique et la sécurité nationale des États-Unis…