Article
Sur le quai Rive neuve, en ce point névralgique du Vieux-Port où la mer est en ville, un étrange dispositif urbain a été installé ; une sorte de parasol géant dont le plafond est une surface parfaitement réfléchissante qui permet aux passants de se voir, comme en un miroir. La métaphore est facile : Marseille ose enfin se regarder en face, retrouvant dans le nouveau visage de son centre-ville quelque chose d'une dignité perdue. Les groupes s'arrêtent, les flashes fusent, l'atmosphère est bon enfant. Un peu plus loin, le petit train touristique prend le départ pour son énième périple, du Panier à Notre-Dame-de-la-Garde. Depuis qu'il circule, il n'a connu qu'un incident notable, lorsque les gamins du Panier déguisés en Indiens, décidant de jouer jusqu'au bout le jeu de l'attaque du train, avaient bombardé les passagers d'œufs et de farine. Le monde entier s'en était indigné.
Les promenades du Port ont enfin été rendues aux piétons qui peuvent désormais y voir la mer de près. Jusqu'en 2012, en effet, les sociétés nautiques, associations de plaisanciers installées tout autour du Vieux-Port, en interdisaient l'accès et condamnaient le piéton à circuler sur un trottoir étroit le long de lourdes barrières en bois. L'indiscret pouvait parfois apercevoir sur le quai quelques messieurs en bras de chemise prenant l'apéritif avec force gestes et rires, le dos ostensiblement tourné aux passants. Il a fallu presque cinquante ans pour que soit levé ce privilège et la confiscation de l'espace urbain qu'il impliquait…
Auteurs
- Mis en ligne sur Cairn.info le 13/05/2015
Veuillez patienter...