Les années de guerre ont été une période d’investissements importants de la France pour le développement de l’Algérie, via la Caisse des dépôts et ses filiales. Les politiques de logement et d’équipement furent une arme dans le conflit, mais aussi un vecteur de circulation d’hommes et de pratiques entre métropole et colonie, alors que l’aménagement du territoire était au cœur des préoccupations de l’État. L’expérience imprègne le développement de l’Algérie bien après 1962.
Quand Charles de Gaulle prend les rênes du pouvoir en 1958, il déclare, à propos de la situation en Algérie : « Un économiste va m’arranger tout cela ! ». Si le président du Conseil exprime ainsi son intention de rétablir le rôle des autorités civiles, il indique également son idée d’un nécessaire investissement économique pour gagner la guerre. L’ambition n’est pas mince. Elle n’est d’ailleurs pas partagée par tous, mais elle est promue au plus haut niveau de l’État, sous la Cinquième République, comme avant, sous la Quatrième. Depuis 1945, les stratégies visant à légitimer la colonisation dans les territoires et départements d’outre-mer prennent un tournant décisif. L’accent mis sur la « mission civilisatrice » s’exprime de manière croissante à travers le développement économique et la promesse que la France apportera un niveau de vie plus élevé à ses sujets coloniaux.
En Algérie, cette mise en valeur coloniale est largement influencée par la planification qui se développe alors en métropole. Ce chevauchement entre logique coloniale et politique de développement territorial est d’autant plus fort que l’Algérie est constituée de départements juridiquement français, affectés par la nécessaire mutation de l’Algérie française mais aussi par les débuts de l’intégration européenne…