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Je suggérais, dans mon éditorial précédent, que la réflexion sur l’anthropocène incite à changer les cadres habituels de la pensée. En tant que géographe, cela me conduit à relancer l’interrogation sur une vieille question : comment appréhender le processus d’humanisation de la planète et quelles conséquences en inférer en matière de conduite des activités humaines, qui permettrait de garantir une habitabilité pour tous de l’espace terrestre ? En la matière, j’avais insisté, dans le dossier du numéro 8 de Tous urbains, sur l’importance qu’il fallait accorder à la problématique de la vulnérabilité des espaces humains. À mon sens, les habitats humains, du local au global, sont tous et toujours-déjà vulnérables, c’est là leur caractéristique.
L’habitation humaine est fragile, menacée en raison même de ce qu’elle est. Si, durant de nombreuses décennies, les enthousiasmes liés à la croissance économique et les certitudes prométhéennes qui accompagnaient le développement des nouvelles ingénieries de construction ont occulté cette réalité élémentaire, depuis quelques années, la vulnérabilité est devenue un enjeu cognitif, culturel, politique à toutes les échelles d’espaces et temps — on étudie autant la vulnérabilité des individus que celle des sociétés, des habitats humains, des systèmes économiques, etc.
On peut alors concevoir l’anthropocène comme le moment culturel et esthétique réflexif, où les (des) individus et les (des) sociétés humaines (re)prennent conscience, sur un mode inquiet, de leur condition vulnérable — à la fois, en même temps et intégralement globale et locale —, de leur implication directe dans cette vulnérabilité systémique et transcalaire et de la nécessité conséquente de redéfinir de nouvelles façons d’habiter la Terre…
Auteur
- Mis en ligne sur Cairn.info le 01/08/2016
- https://doi.org/10.3917/tu.013.0012
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