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L’accueil très favorable du livre de Christophe Guilluy par la presse, la télévision et les acteurs politiques, et le cirque médiatique de la polémique provoquée par la publication récente (début novembre 2013) de cinq rapports sur l’intégration et les inégalités sociales me paraissent pouvoir être assemblés et examinés de concert. Ils constituent en effet deux symptômes qui confirment qu’une partie de la société française souffre d’un mal redoutable : la mélancolie – dont Freud a bien montré le caractère dévastateur. Je vais me permettre de consacrer un éditorial double et quelque peu encoléré à cette question.
L’ouvrage de Christophe Guilluy, qui est à la géographie contemporaine ce que la littérature de gare est à Marcel Proust, est à analyser non pour ce qu’il apporte à la connaissance, c’est-à-dire rien, tant il travestit à longueur de page par des interprétations oiseuses et simplistes la signification de réalités spatiales complexes et au demeurant déjà bien analysées, depuis longtemps, par des travaux autrement plus solides, qui ne l’ont pas attendu pour penser les effets des territorialisations contemporaines des groupes sociaux, mais pour les imaginaires réactionnaires qu’il cristallise. Il a rencontré un large écho parce que ses sombres descriptions d’une fracture territoriale due à la croissance urbaine contemporaine ont fixé la douleur de la disparition d’une trame géographique bien aimée. La mélancolie est ici celle de la France d’antan, celle des campagnes, des villages, des bourgs, des petites villes, celle qui résiste dans ses communes dite…
Auteur
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Géographe, auteur de l’Avènement du Monde. Essai sur l’habitation humaine de la Terre, Paris, Le Seuil, 2013.
- Mis en ligne sur Cairn.info le 01/08/2016
- https://doi.org/10.3917/tu.004.0012
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