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J’ai consacré mon éditorial du numéro 1 de Tous urbain à la question de la « dérive iconique de l’architecture » et j’aimerais poursuivre la réflexion. Franco La Cecla a écrit un pamphlet remarqué sur cette dérive. Il y dénonce la collusion des « archi-stars » et du marketing, leur transformation en logos supports de marque ; il fustige une pratique architecturale dont « l’objectif est de supplanter la ville réelle par une ville virtuelle et télégénique ». Il estime que l’architecture contemporaine dématérialise les villes en les vidant « de leur chair que sont les pierres et les habitants et de les transformer en purs cristaux liquides ». Même si l’ouvrage de Franco La Cecla vise souvent juste, on peut trouver un peu outré un certain nombre de ses charges.
L’orientation de ma critique est un peu différente. En vérité, je trouve que Franco La Cecla, comme beaucoup de critiques virulents de l’architecture contemporaine, se fonde sur la mythologie d’une pratique architecturale « pure » qui n’a jamais existé et recycle au passage le poncif de l’architecte démiurge, seul à même de comprendre l’habitation urbaine. De ce point de vue, tant le discours promoteur de l’architecture-marque que celui de sa dénonciation au nom d’un retour aux sources du métier commettent l’erreur de surestimer le poids et le rôle de l’architecture et de ses praticiens dans l’organisation urbaine contemporaine. Il s’agit là au demeurant d’une erreur comparable à celle que commettent les ingénieurs lorsqu’ils pensent qu’une bonne infrastructure ou un bon équipement technique suffit à traiter un problème…
Auteur
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Géographe, auteur de l’Avènement du Monde. Essai sur l’habitation humaine de la Terre, Paris, Le Seuil, 2013.
- Mis en ligne sur Cairn.info le 01/08/2016
- https://doi.org/10.3917/tu.002.0020
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