CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1 En 1985, la Revue Tiers Monde publiait une présentation critique de l’ouvrage d’Amartya SEN, Poverty and Famines. Les auteurs de cette note (DRAVIE, MAHIEU, REQUIER-DESJARDINS, 1985) relevaient la nouveauté de son approche du développement par les entitlements et son hétérogénéité, à la fois inspirée de la théorie de l’équilibre général et de la compréhension socio-historique.

2 Son œuvre est hétérogène, partagée entre la théorie du choix social [1] (le paradoxe du libéral-parétien, 1970) et l’analyse économique appliquée au développement (la coexistence paradoxale de la famine avec des greniers pleins, 1981). Depuis qu’il a obtenu le prix Nobel d’économie en 1998, cet économiste a considérablement élargi ses perspectives vers la philosophie morale et politique,avec un projet libéral de société  [2]. Plus généralement, le concept de « capabilité »  [3] a pris une importance cruciale dans ses écrits récents. Paul RICOEUR (2004, p. 215) évoque une « révolution conceptuelle » avec le couple droits et capabilités ou « droits à certaines capabilités » qui renforce selon lui la « conception de l’agir humain enracinée dans l’anthropologie fondamentale ».

3 À plusieurs reprises [4], SEN affirme que le problème du développement est celui du regard que nous portons sur les autres. Mais, qui sont ces autres, ces supports de dotations, de capabilité ou d’agir ? Nulle part cette question anthropologique du sujet n’est résolue, SEN employant indifféremment les concepts d’individu, d’homme, de personne ou de citoyen et adoptant plutôt une approche fonctionnelle.

4 En effet, la capabilité comme liberté reste fondée sur une question de contenu (Quoi ?) et jamais sur la question du support personnel (Qui ?). L’anthropologie philosophique [5] du sujet est absente de son œuvre, la personne restant un concept neutre sans substance. La capabilité apparaît alors comme une version faible de la capacité (section 1). L’introduction par SEN de la notion d’agency ne permet qu’une avancée très modeste dans la reconnaissance de la dimension morale de l’individu. Il ne s’agit là tout au plus que d’une extension de son analyse des capabilités qui ne modifie en rien le peu de substance du sujet. L’engagement moral reste par exemple une question de choix de contenu et ne renvoie jamais à la problématique du sujet responsable (section 2). En omettant de traiter du sujet en soi, SEN réduit considérablement le poids de la contingence des situations de choix. La prescription de la liberté de choix est alors confrontée à une faiblesse morale, dans le sens où elle ignore la possibilité d’une capabilité malveillante (section 3).

I – LA CAPABILITÉ : UNE VERSION FAIBLE DE LA CAPACITÉ SANS LE SUJET

5 Amartya SEN (1987b) affirme que sa théorie des capabilités est générale. Par contre, il ne replace jamais sa « capabilité » par rapport aux conceptions philosophiques préexistantes de la capacité ; notamment le « sujet capable » (RICOEUR, 1995, p. 30), de parler, d’agir, de s’imputer une responsabilité... et de faillir. Sujet et capacités sont indissociables. Or de ce point de vue, la capabilité apparaît comme une version faible de la capacité. Elle réduit la liberté à une question de contenu, sans jamais approfondir la question du sujet support de la liberté.

1 – La capabilité comme liberté positive

6 La capabilité, proposée par A. SEN dans ses différents travaux, repose sur la liberté effective à mettre en œuvre un mode de fonctionnement parmi ceux qui composent la vie. Dans un texte récent, et en réponse à un point de vue critique qui lui était adressé [6], SEN (2004a, p. 334) exprime clairement cette idée de capabilité comme liberté : « Capability, as a kind of freedom, refers to the extent to which the person is able to choose particular combinations of functionings (including, inter alia, such things as being well-nourished), no matter what the person actually decides to choose ». La capabilité n’est autre chose que la capacité à exercer un libre choix. L’extension du domaine de liberté constitue le fondement de l’approche et permet d’accroître la base informationnelle à prendre en compte dans une théorie de la justice.

7 La différence essentielle entre liberté positive et liberté négative, empruntée à Isaiah BERLIN (1969), est au cœur de l’œuvre de SEN. Elle est réaménagée par Richard DWORKIN (1977) dans Taking Rights Seriously. La liberté positive représente ce qu’une personne peut accomplir, indépendamment des contraintes imposées par les autres, en particulier les institutions. Cette liberté positive fait fi des obligations et sous-estime le calcul afférent. A-t-elle un sens ? La liberté négative insiste au contraire sur ces entraves à la liberté. La liberté positive est plus large que la liberté négative et donc l’atteinte à la liberté positive n’atteint pas forcément la liberté négative, évidemment ! Aussi évident est le fait qu’on ne peut séparer les deux, mais c’est la conception additive de la liberté positive qui intéresse SEN, celle qui inclut les droits et la capacité à les convertir en ressources réelles.

8 Cette distinction permet à SEN de se démarquer, aussi bien de la conception libertarienne qui ne retiendrait, selon lui, que la liberté négative, ou de RAWLS qui en reste à son catalogue des biens premiers sans augmenter sa conception de la liberté, aux droits et à la capacité de conversion ; sans que le coût personnel de ces droits par rapport à une communauté, les obligations, soit abordé.

9 Cependant, dans cette optique, la liberté est fortement restreinte à la liberté de choix et la théorie du développement qui en découle est extrêmement fonctionnelle. Elle ne comporte pas de sujet et réduit la base de la liberté à une permission de choisir certaines alternatives (MAHIEU, 2006). En ce sens, si SEN pose la question Equality of What ?, il ne pose pas les questions Equality of Who ? Entre qui ? Or, il ne peut y avoir de liberté sans sujet support de celle-ci.

2 – La liberté sans déontologie de la personne

10 L’approche par la capabilité ne nie pas l’existence du sujet, mais le restreint à un individu sans visage, un individu parmi d’autres, anonyme. Les êtres humains sont alors facilement assimilables à une catégorie spécifique d’animaux et lescapabilités peuvent être étendues aux animaux eux-mêmes (NUSSBAUM, 2004)  [7]. Cette approche oublie qu’il ne peut y avoir de liberté sans sujet. Or, ce sujet capable est la personne, « capable d’imputation contrairement aux choses » (KANT, 1796). La question première est « qui », « qui parle ? », « qui est capable ? ». La capacité est un préalable anthropologique ; l’homme est un « sujet capable ». Il a une capacité à parler, à faire et surtout à s’imputer une responsabilité. La responsabilité est intersubjective et fait donc appel à l’autre. Ma responsabilité est ma « capacité à tenir parole » et constitue une règle.

11 L’approche proposée par SEN se réduit à associer des droits/libertés à un sujet sans substance. Il omet la responsabilité pourtant au cœur de l’approche phénoménologique de la personne (BALLET, DUBOIS, MAHIEU, 2007). Et si les individus ont des droits moraux que l’on ne peut nier sans les priver de quelque chose de valeur (SEN, 1984), ces droits ou capabilités sont associés aux individus comme les caractéristiques sont attachées aux choses [8]. L’important serait finalement les libertés que possèdent ou non ces individus et non qu’ils soient libres ou non !

12 Une telle approche est très problématique dès qu’elle prend un caractère normatif et programmatique pour les politiques de développement. La libération de l’individu de ses contraintes sociales est un vieux projet, dont le courant utilitariste a été un des plus ardents défenseurs. En ce sens, SEN se situe dans la même optique radicale que l’utilitarisme, recherchant le bonheur des individus en les libérant des normes sociales. RICOEUR (2004, p. 210) souligne d’ailleurs que « SEN ne se situe pas dans un lignage kantien mais dans celui de l’utilitarisme de langue anglaise ». Dans une optique d’analyse descriptive et positive, cette approche apporte indéniablement un éclairage pertinent sur les situations de pauvreté et de développement ; mais dès qu’elle prend une tournure prescriptive, elle propose un saut méthodologique qui n’est pas sans conséquence  [9]. L’hypothèseceteris paribus de l’analyse descriptive permet en effet de concevoir l’approche comme une facette permettant une meilleure compréhension du phénomène étudié. Mais en faire découler une analyse prescriptive d’accroissement des libertés devient un tout autre projet. Vouloir libérer l’individu de son imprégnation sociale revient à nier l’existence de l’hypothèse ceteris paribus et constitue un saut méthodologique difficilement acceptable (cf. la fameuse guillotine de HUME). Il s’agit là d’une différence fondamentale entre certains écrits de SEN résolument descriptifs tels que Poverty and Famines (1981) et des écrits plus récents totalement prescriptifs tels Development as Freedom (1999a).

13 Du point de vue de la mesure, la « révolution » des capabilités a des effets limités. La capabilité n’est qu’une mesure complémentaire du niveau de vie par rapport au revenu monétaire (FUSCIO, 2005) et donne des estimations de lapauvreté du même ordre (LACHAUD, 2002). La liberté comme choix d’opportunités est un classique de l’économie sans grande portée critique. Sans anthropologie du sujet, elle n’a qu’une valeur fonctionnelle.

14 La capabilité n’est qu’une version faible de la capacité. La capacité désigne en priorité l’aptitude à s’imputer une responsabilité. Cette responsabilité est un ensemble de droits et obligations que reconnaît la personne et qui la fonde. Cette capacité est première car elle fonde le sujet de droit, lui donnant une identité personnelle et collective. Il s’agit pour RICOEUR (2004) de la capacité d’un agent humain à se désigner lui-même comme l’auteur de ses actes.

15 Hans JONAS (1998, p. 76) rappelle que « l’homme est le seul être connu de nous qui puisse avoir une responsabilité.... » ; la responsabilité le fonde ontologiquement. Il est alors trivial d’évoquer la « personne responsable ». Il s’agit d’une tautologie car la personne se fonde sur la responsabilité et à son tour la responsabilité dépend de la personne.

16 La liberté est alors issue de l’obligation. Une telle conception est centrale dans l’œuvre de KANT (1997, p. 110) : « C’est en vérité une chose remarquable qu’on puisse être d’autant plus libre qu’on est contraint moralement. » Or, cette conception de la responsabilité est niée dans la théorie de l’action, en particulier de l’agency.

3 –Agency, bien-être et responsabilité

17 SEN (1987a) introduit la notion d’agency pour désigner la capacité d’agir ou puissance d’agir des individus. Cette notion permet de faire la distinction entre la réalisation du bien-être (well-being achievement) et la réalisation de la capacité d’action (agency achievement). Elle permet ainsi de dépasser le cadre de la stricte mesure du bien-être (SEN, 1987b). Cependant, cette notion apparaît comme une simple extension de la capabilité, sans jamais donner plus de sub-stance au sujet. Elle laisse entièrement de côté la question de la capacité des individus à rendre compte de leurs actes et donc à être responsables ; capacité pourtant essentielle dans la détermination de leur bien-être.

a – L’agency: une simple extension de l’approche par les capabilités

18 L’agency est étroitement liée à la notion d’engagement [10] : « Respecter l’aspect “action”, c’est admettre qu’il est approprié de dépasser l’aspect ‘‘bien-être’’ pour aborder les valeurs et engagements de l’individu ».

19 Cependant, l’introduction de l’agency par SEN ne modifie pas radicalement le schéma de son approche par les capabilités, elle ne fait que la compléter. Elle accroît les dimensions de la liberté à prendre en compte sans que la responsabilité individuelle n’intervienne réellement. L’engagement d’un individu ne donneen ce sens guère plus de substance au sujet puisqu’il n’est pas relié à sa responsabilité, mais découle simplement d’un choix libre pour ses actions engagées.

20 L’agency est alors réductible à une théorie de l’action en tant que théorie de l’origine d’un mouvement, de la causalité ou des conséquences ou encore de l’intention. Par exemple, pour MACKIE (1977), si l’acte de B est une réponse « condamnable » à l’action de A, A peut être tenu pour plus ou moins responsable, par exemple en fonction de l’automaticité de la réponse de B à A. Dans ce cadre, la responsabilité de la personne n’est qu’une partie des causes de son action, ces causes pouvant être elles-mêmes en partie des évènements  [11]. Cette théorie écarte la question du sujet en se focalisant sur un traitement impersonnel sous forme d’une relation de cause à effet. À la limite, il n’existe pas de différence entre l’homme qui bouge la main et le lapin qui remue la patte. Cette théorie de l’action cherche à se libérer de la contrainte de la philosophie morale (NEUBERG, 1991). En ce sens, ajouter des choix d’engagement aux choix des individus par rapport à leur bien-être n’implique pas de reposer la question du sujet de l’action. Le sujet reste fondamentalement défini par les libertés qui lui sont associées, y compris les libertés de choisir des actes qui vont à l’encontre de son bien-être.

21 Il nous semble, de ce point de vue, que la notion d’agency telle qu’elle est proposée, entre autres, par SEN, ne donne pas suffisamment de substance au sujet des actions. La responsabilité est uniquement une responsabilité sociale et collective, mais non une responsabilité individuelle. D’ailleurs RICOEUR (2004, p. 211) souligne à juste titre que « la marque de SEN, en tant qu’économiste dans cette grande discussion est d’avoir associé l’idée de liberté à celle de choix de vie d’une part, à celle de responsabilité collective d’autre part ». Et plus loin « c’est ainsi que la liberté individuelle, comprise comme liberté de choix de vie, devient une responsabilité sociale » (ibid., p. 213).

22 Amartya SEN traite de la responsabilité sociale en accord avec sa théorie du choix social. Dans ce cadre, des individus utilisent à leur guise les ressources et saisissent les opportunités. Cette liberté a ses conséquences : chacun est responsable de l’usage qu’il a effectué de sa liberté. ROEMER (1996) et FLEURBAEY (1996) évoquent clairement ce cadre : chacun, s’il est libre d’utiliser ses capabilités, aura une responsabilité individuelle vis-à-vis de la société ; laquelle déterminera, en dernier ressort, la « responsabilité sociale ». La responsabilité ne concerne que la responsabilité a posteriori par rapport à sa situation et non la responsabilité a priori que l’on peut avoir par rapport à la situation des autres. Cette responsabilité égocentrique est la forme la plus controversée de la responsabilité  [12].

23 La substance du sujet des actes n’a finalement guère d’importance dans ce cadre, puisque ce qui est en jeu n’est pas la responsabilité de ce sujet, mais laresponsabilité de la collectivité à l’égard de la liberté de ce sujet. Une telle optique serait certes défendable si elle ne passait pas à côté d’un élément essentiel dans la compréhension du bien-être de la personne : sa capacité à être responsable.

b –Agency, bien-être et capacité à être responsable

24 La notion d’agency permet de dépasser le cadre strict de l’analyse du bien-être, mais ce faisant elle oublie que la capacité d’action engagée a aussi un impact sur le bien-être. SEN reconnaît ce problème, mais semble l’écarter. Citons un passage, un peu long, mais relativement significatif de ce point de vue :

25

« Admettre qu’il existe une distinction entre l’aspect “action” et l’aspect “bien-être” d’une personne ne nous oblige pas à considérer que la réussite de la personne en tant qu’agent doit être indépendante, ou complètement séparable, de sa réussite sur le plan du bien-être. Une personne peut très bien s’estimer plus heureuse et plus prospère parce qu’elle a accompli ce qu’elle désirait accomplir – peut-être en faveur de sa famille, de sa communauté, de sa classe, de son parti ou d’une autre cause. À l’inverse, il est tout à fait possible que le bien-être d’une personne diminue sous l’effet de la frustration, si elle n’arrive pas à accomplir ce qu’elle désirait en tant qu’agent, même si cette action n’est pas en rapport direct avec son bien-être. » (SEN, 1987a/1993, p. 41).

26 SEN reconnaît donc le problème que soulèvent l’interdépendance de la capacité d’action et la question du bien-être. Mais il l’écarte immédiatement pour se focaliser sur la justification de la différence. Il intègre ainsi l’agency à son approche de la capabilité comme socle de la liberté sans tirer les conséquences de l’interdépendance entre la capacité d’action et le bien-être.

27 Or, il nous semble que cette interdépendance soulève une difficulté par rapport à l’approche par les capabilités puisqu’elle suppose de soulever le voile des libertés posé sur le sujet et de s’interroger sur sa capacité à être responsable. Elle renvoie ainsi à la question de la personne responsable et au lien avec son bien-être.

c – Bien-être et responsabilité

28 Considérer la responsabilité individuelle pourrait bien modifier les conclusions de certaines analyses réalisées à partir des capabilités. Ainsi, le niveau de bien-être de certaines personnes est conditionné à la réalisation de leur capacité à être responsable, à assumer leurs obligations.

29 Par exemple, les conséquences mineures de la famine du Sahel de 1974 se comprennent par les relations communautaires (CALDWELL et CALDWELL, 1987), notamment les relations villes-campagnes, les individus les moins vulnérables ayant assumé leurs obligations de transfert vis-à-vis des plus vulnérables. Dès que l’on fait appel à la communauté, les droits ne sont pris en compte que par rapport à la satisfaction préalable des obligations (MAHIEU, 1989). Plusieurs enquêtes menées en Côte d’Ivoire durant les années 1980 s’interprètent à l’aune de cette perspective. Par exemple, les résultats de l’enquête de la Banque mondiale sur les standards de vie en 1985-1986 montrent qu’à Abidjan, le revenu augmente de 7,5 % et que la consommation diminue de 4,5 %. Inversement, pour la mêmepériode, dans les zones rurales, le revenu diminue de 3 % tandis que la consommation augmente de 2 %. Or, la baisse de la consommation en zone urbaine n’a que peu de sens, compte tenu de la faiblesse du revenu moyen et de l’importance des besoins. De même, dans les zones rurales, ce mouvement ne peut être expliqué par une désépargne. Ces mouvements paradoxaux peuvent en fait être interprétés comme le résultat de transferts ville - campagne soulignant l’importance des obligations des urbains à l’égard des ruraux (MAHIEU, 2001). Dans le même ordre d’idée, toujours en Côte d’Ivoire, MAHIEU et ODOUNFA (1988, 1989), dans le cadre d’une enquête sur les conditions de vie, soulignent que plus de 30 % des personnes enquêtées subissent des charges communautaires, i.e. réalisent des transferts, supérieurs à leur revenu nominal. Elles se trouvent alors contraintes de trouver d’autres sources de revenu, soit par des travaux complémentaires, soit par la mise au travail des enfants, soit encore par la corruption. Ces résultats soulignent que, pour ces personnes, le fait d’assumer leurs obligations influe directement sur leur bien-être.

30 Ces résultats ne sont pas des particularismes locaux, mais se retrouvent universellement sous des formes variées. À titre d’exemple, en France, la solidarité au sein des familles touchées par la crise économique durant les années 1980 montre le rôle significatif des retraités dans l’aide à l’ensemble des autres membres (STANKIEWICZ, 1985). Ou plus récemment, les générations « sandwichs » assument une double responsabilité, d’une part, à l’égard des plus âgés avec l’augmentation de l’espérance de vie et, d’autre part, à l’égard des plus jeunes, dont la situation en termes de placement sur le marché du travail s’est fortement dégradée (ATTIAS-DONFUT, 1995).

31 Dans tous les cas, le fait d’assumer ses responsabilités constitue un préalable et conditionne fortement le bien-être des personnes. L’approche par la capabilité, en faisant l’impasse sur la responsabilité de la personne, écarte du même coup un volet important de la compréhension du niveau de bien-être. L’analyse de la liberté ne peut se passer de celle de la responsabilité. Il ne s’agit pas là de la responsabilité de la collectivité à l’égard des libertés individuelles, mais de la responsabilité de la personne.

3 – La faiblesse morale de la liberté de choix

32 La capabilité assimilée à une liberté de choix devient chez SEN le cœur des politiques de développement. Mais si l’homme est resitué dans son contexte, la capabilité n’est pas bonne en soi. Elle est le propre d’une personne responsable et fragile qui peut être amenée à choisir rationnellement une utilisation malveillante de sa liberté.

a – Choix et responsabilité

33 Le caractère nécessairement salvateur de la liberté de choix est particulièrement exprimé chez SEN (2006) sur la question de l’identité. Bien sûr, il n’oublie pas le contexte dans lequel se forge l’identité ; il précise d’ailleurs qu’il ne s’agit pas de passer d’une situation de non-identité (nowhere) à une situation d’identité (somewhere) mais d’une identité à l’autre. Mais en faisant du choix del’identité un accroissement positif des libertés, il prend une position prescriptive. Il se focalise sur l’idée que l’identité est contrainte et que cette contrainte génère des discriminations, des violences et autres phénomènes affectant négativement les individus et les sociétés. Il laisse totalement de côté le choix rationnel d’individus responsables dans un contexte donné. Les décisions en matière d’identité, le passage d’une situation d’identité à une autre, résultent aussi de choix rationnels dont les conséquences ne sont pas nécessairement bonnes en soi. Elles peuvent être à l’origine de violences et de discriminations (BALLET, MAHIEU, RADJA, 2007). En minimisant l’importance de la responsabilité personnelle, SEN oublie que le choix des identités peut résulter des responsabilités que des individus ont ou se donnent à l’égard d’autres.

34 SEN reconnaît certes les obligations, mais uniquement comme corollaires des droits-liberté. Ainsi, la section consacrée aux obligations dans un article récent (SEN, 2004a, p. 338) commence par : « I turn from rights to correlative duties ». Et une phrase plus loin « Since freedoms are important, people have reason to ask what they should do to help each other in defending or promoting their respective freedoms ». La responsabilité des individus découle directement des droits-libertés des autres. Ces obligations ne sauraient constituer un impératif catégorique. « The recognition of obligations in relation to the rights and freedoms of all human beings need not, thus, be translated into preposterously demanding command » (SEN, 2004a, p. 340). SEN se réfère à propos de ces obligations à la notion kantienne d’obligations imparfaites. L’existence d’obligations est le résultat de droits-libertés préalables, et dont l’importance suggère, plus que prescrit, que les individus fassent leur possible pour contribuer au développement de ces droits-libertés. En fait, la responsabilité est surtout celle de l’État ou de la société à l’égard de l’individu, à tel point que la liberté individuelle devient elle-même l’objet de la responsabilité sociale, i.e. la responsabilité de la société ou de l’État (SEN, 1991, 1996). Et lorsqu’il reconnaît l’interdépendance mutuelle des individus, il en conclut certes à leurs obligations mutuelles (SEN, 1996/1999b, p. 91) : « L’idée de dépendance mutuelle ne peut que conduire à celle de responsabilités mutuelles. Je crois qu’il n’y a rien de particulièrement mystérieux à reconnaître que les membres de la société, de la même façon qu’ils tirent bénéfices de leurs interactions, doivent aussi accepter la nécessité profonde de leurs obligations mutuelles ». Mais les obligations mutuelles découlent de la conciliation de la liberté de chacun. Pour reprendre la typologie de DWORKIN (1977), l’approche par la capabilité se situe dans la catégorie des approches par les droits en opposition avec la catégorie d’approche par les obligations. Les deux catégories d’approche proposent des séquences radicalement différentes entre droits et obligations. Pour la première, les droits fondent les obligations, qui en sont donc dérivées ; tandis que pour la seconde, les obligations fondent la liberté.

35 Une interprétation kantienne de l’obligation, en cohérence avec la seconde catégorie d’approche, inverse la séquence liberté-responsabilité pour donner la priorité à la responsabilité, la liberté en étant cette fois dérivée. La liberté s’entend alors comme liberté « intérieure » au sens que lui donne ARENDT (1958). L’homme est seul capable de se créer librement des contraintes internes et de ne pas réagir uniquement aux contraintes externes. Le devoir précède le bien-être ; non un devoir imposé mais un devoir comme capacité d’obligation envers soi-même etles autres. L’homme est alors une personne responsable et cette personne responsable doit être « construite » pour éprouver la liberté. La capacité à librement s’auto-contraindre constitue la personne responsable et fait qu’elle devient digne en tant que personne autonome ayant rempli ses devoirs. La personne qui se libère en assumant ses obligations est un thème central dans de nombreuses sociétés (par exemple en Afrique, MAHIEU, ODOUNFA, 1988) et la plupart des religions. Par exemple dans l’Islam, les croyants n’assument pas le jeûne comme une contrainte, mais comme la preuve de leur liberté. L’économie avec SEN continue d’opposer un individu, soit disant libre, à la personne, concept central des religions et des grandes morales.

b – Les capabilités malveillantes

36 On doit à RICOEUR (1988) d’avoir élargi la réflexion sur la responsabilité au problème du Mal, en particulier par sa réflexion sur la faillibilité. La fragilité de la personne la rend vulnérable et par suite de disproportions faillible, créant la possibilité du Mal. La malveillance peut intervenir à différents niveaux : exclusion, agression, etc. Elle pose des problèmes à la théorie économique (cf. HARSANYI, 1995), compte tenu du dogme d’hédonisme.

37 L’analyse proposée par SEN limite le rôle de la contingence de la relation interpersonnelle et le risque d’une libération des capacités les plus meurtrières, faute de prendre en compte la malveillance. Elle oublie que le sujet peut se comporter rationnellement de manière bienveillante ou malveillante. Renforcer les capabilités et donc les modes de fonctionnement n’indique rien sur les choix des individus et l’utilisation de leurs capabilités. Et il n’y a aucune raison d’exclure les utilisations les plus monstrueuses.

38 Il suffit de reconnaître pour cela que la capacité à faire est liée à l’identité et que son usage peut être discriminant par le sujet, à savoir une personne dans un contexte social. Par exemple une communauté pourra être dévalorisée, niée, sinon détruite avec la meilleure conscience, au nom de la responsabilité vis-à-vis de son groupe d’adhésion. La capacité à faire le mal est liée à l’affirmation de son identité contre celle des autres. Capacité à faire le mal et capacité à être sont reliées dialectiquement. Ma propension à détruire les autres sera d’autant plus forte qu’ils seront « dénaturés » ; ainsi ma liberté à participer au crime sera facilitée par les caractéristiques des autres : étoile jaune, ruban bleu, taille, mentions spéciales sur les papiers d’identité. La capacité à détruire est ainsi libérée et rationalisée par la capacité à « re-créer » l’identité, cette double capacité pouvant être facilitée par l’appareil d’État.

39 Cette « re-création identitaire ou ethnique » a souvent une base économique forte. Elle accompagne en général une crise économique : chômage massif et hyperinflation (Allemagne), densité excessive sur des terres rurales pauvres (Rwanda/Burundi), conflits fonciers entre propriétaires « indigènes » et exploitants « allogènes » (Afrique de l’Ouest). Dans de tels contextes, les préférences malveillantes se développent ; elles expriment des frustrations et des envies « négatives » vis-à-vis d’un autre peuple jusqu’à la « solution finale » : l’exclusion de ces autres personnes par la déportation ou la mort. Économiquement, cela permet de diminuer la pression sur les ressources, de diminuer les chargesrécurrentes des autres et de s’approprier leurs professions et leurs biens. Le conflit identitaire réalise ainsi une nouvelle allocation des richesses et des droits de propriété. En ce sens, le génocide comme forme extrême de conflit identitaire est un crime social organisé qui, en termes de coûts/bénéfices, démontre sa rentabilité. Dans le cadre d’une éthique du Mal, le conflit identitaire permet de libérer ses capacités, par exemple de développer la supériorité de son identité (to be) et de développer sa capacité économique (to do) dans le cadre d’un crime largement impuni.

40 Tenir compte de cette re-création identitaire dans des contextes économiques particuliers permet de comprendre comment des hommes ordinaires pratiquent des discriminations et développent des exclusions, voire deviennent des génocidaires. En tant que personne appartenant à un groupe spécifique, j’ai une responsabilité à l’égard de ce groupe. Parce que je pense appartenir à ce groupe, je suis enclin à agir pour sa préservation qui est aussi celle de mon identité.

41 Si la capacité, au sens évoqué précédemment, comme capacité à répondre de ses actes, conduit à un sujet capable de s’identifier, d’être respecté et digne d’estime. Si elle lui permet de départager le Bien du Mal dans certains cas, elle implique aussi la responsabilité à l’égard de la communauté et peut produire les pires exactions envers les « allogènes », ceux n’appartenant pas à cette communauté. Dans certains cas, elle implique des conflits moraux. Par exemple, au moment de massacrer son semblable, comment arbitrer entre le mot d’ordre politique (la responsabilité à l’égard de sa communauté même si elle est monstrueuse) et le respect de la personne (tu ne tueras point) ?

42 Quoiqu’il en soit, le fait de penser le sujet dans sa contingence communautaire rappelle qu’il est fragile et que cette fragilité dans sa responsabilité peut l’amener au pire des crimes. Se développe une éthique du Mal au nom de la conviction que l’autre cherche le mal ; une histoire a eu lieu dans le rapport à l’Autre et un contexte social « éthiquement marqué » précède mon choix. « Toute praxis nouvelle s’insère dans une pratique collective marquée par les sédimentations des œuvres antérieures déposées par l’action de nos prédécesseurs » (RICOEUR, 1988, p. 135).

43 Renforcer une capacité, décrétée « bonne » par l’expert, peut alors renforcer l’insécurité humaine : migrations, exclusions, crimes, génocide. On ne doit pas isoler la capacité du contexte dans lequel elle est utilisée. La littérature sur les capabilités abonde de listes de principes édictés dans l’éthique du Bien. Elle rejoint la littérature sur le développement qui s’inscrit dans une téléologie du Bien. Mais cette littérature oublie que dans certains contextes et au-delà de certains seuils, les capabilités peuvent être au service du Mal. Elle oublie la faillibilité du Sujet, sa capacité à faire le Mal en développant son identité face à l’autre, et cela jusqu’au génocide. SEN (2006) traite de la relation entre l’identité et la violence de façon structurale : l’identité est plurielle et le fait d’exagérer une deses composantes est susceptible de générer de la violence. Il n’aborde pas la relation entre le « sujet capable » de violence, et son identité. Ce contexte du Mal et de la faute permet de comprendre la capacité comme imputation de la responsabilité d’une personne fragile et faillible. Il est donc autant question de mal-développement de la personne et de la société a priori que de recherche du bien. La capacité sans référence anthropologique peut devenir un outil de destruction et de mort, renforçant l’insécurité, en omettant la contingence du sujet.

Notes

  • [*]
    UMR C3ED (IRD-UVSQ), Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines.
  • [1]
    - La théorie du choix social est, depuis CONDORCET et DE BORDA, un jeu sur des normes logiques (les propriétés de la relation d’ordre choisie) et éthiques (comportement démocratique et social).
  • [2]
    - Dans le sens anglo-saxon de libéral bien sûr.
  • [3]
    - Nous utilisons le terme de « capabilité » pour traduire celui de « capability » plutôt que celui de « capacité » parce que, comme nous le développerons, la capabilité est une version faible de la capacité au sens philosophique.
  • [4]
    - « Ce qui compte en réalité, c’est le regard que nous avons les uns pour les autres » (Amartya SEN, in Le Monde, 27/101998).
  • [5]
    - L’anthropologie philosophique a trait à la question du sujet (qui suis-je ?), l’altruisme, au type de relation qu’il mène avec l’autre.
  • [6]
    - Il s’agit de la critique émise par Susan OKIN (2003).
  • [7]
    - Voir l’essai concernant le statut moral des animaux.
  • [8]
    - On peut ainsi concevoir que l’approche par la capabilité se situe à la fois en rupture avec la théorie économique usuelle, mais également en continuité puisque cette théorie, depuis LANCASTER (1966), raisonne non plus sur des biens mais sur des caractéristiques de ces biens.
  • [9]
    - RICOEUR (2004) souligne d’ailleurs que la notion de « droits à certaines capabilités » que l’on trouve chez SEN constitue bien une tentative de dépassement de l’opposition entre prescriptif et descriptif.
  • [10]
    - En s’appuyant sur les travaux d’EDGEWORTH, SEN distingue l’engagement de la compassion. Voir SEN (1977).
  • [11]
    - Voir notamment la discussion de DAVIDSON (1993) sur la théorie de l’action.
  • [12]
    - L’unanimité parétienne est requise par ailleurs sur l’existence ou non d’une responsabilité sociale. Si un membre du groupe est forcé d’accepter une redistribution, la solution n’est pas viable. L’unanimité est ici non un consensus mais la conséquence des deux conditions précédentes. Il faut donc un Panopticon et un Ministère de l’Amour qui caractérisent une société totalitaire ; cette société est dictatoriale et implique l’unanimité. La responsabilité sociale, doublée d’un consensus, est invoquée par SEN et de nombreux auteurs, mais elle n’échappe pas au dilemme liberté/justice. Cela montre, du point de vue de l’éthique positive (BALLET, BAZIN, 2006), que la responsabilité n’est pas bonne en soi et dépend du contexte.
Français

L’approche par les capabilités proposée par A. SEN a été considérée comme une révolution dans l’analyse du développement et, en particulier, de la pauvreté. Si elle a exercé une influence sur les indicateurs du développement, elle pose néanmoins la question de la conception sous-jacente du sujet. Cet article montre que la conception de la personne utilisée par SEN est insuffisante et qu’il pratique un individualisme très standard. Cette approche est d’autant plus problématique qu’elle n’est pas simplement compréhensive, mais aussi normative. En ne tenant pas compte de la fragilité de la personne, son analyse aboutit finalement à une faiblesse morale.

Mots clés

  • Amartya SEN
  • personne
  • capabilité
  • responsabilité
  • agency
  • identité
  • individu
  • malveillance
Español

Capabilidad y capacidad en el desarrollo : repensar el sujeto en la obra de Amartya SEN

El enfoque de las capabilidades propuesto por A. SEN fue considerado como una revolución en el análisis del desarrollo y, en particular, en el de la pobreza. Si bien ejerció una influencia sobre los indicadores de desarrollo, plantea la cuestión de la concepción subyacente del sujeto. Este artículo muestra que la concepción de la persona utilizada por SEN es insuficiente y que practica un individualismo muy estándar. Este enfoque es aún más problemático dado que no es simplemente comprensivo sino también normativo. Al no considerar la fragilidad de la persona, su análisis desemboca finalmente en una debilidad moral.

Palabras clava :

  • persona
  • capabilidad
  • responsabilidad
  • agency
  • identidad
  • individuo
  • hostilidad

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Jérôme BALLET
François-Régis MAHIEU  [*]
  • [*]
    UMR C3ED (IRD-UVSQ), Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines.
Mis en ligne sur Cairn.info le 01/01/2010
https://doi.org/10.3917/rtm.198.0303
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