CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1 Les ressources naturelles ont depuis longtemps figuré parmi les explications des causes de conflits armés. Des craintes malthusiennes aux « ressources stratégiques » de sécurité nationale comme l'uranium ou le pétrole, en passant par les chasses gardées des empires coloniaux, certaines ressources ont été au cœur des préoccupations géostratégiques des puissants tout comme l'ont été celle des craintes de famines et de conflits intercommunautaires parmi les plus démunis. Entre la sécurité des riches et la peur des pauvres, l'accès aux ressources naturelles et la transformation de la nature en produits commercialisables constituent des processus profondément politiques, impliquant souvent des conflits de droits de propriété, de travail, ou de répartition des coûts et bénéfices. Parmi les conflits les plus récents, le séparatisme armé en Indonésie ou au Nigeria, les tentatives d'annexion du Koweït ou de provinces de la République démocratique du Congo, les guerres civiles en Angola ou aux Philippines, et les coups d'État en Iran ou au Venezuela incorporent tous des dimensions associées aux ressources. Le terrorisme islamique affectant actuellement les États-Unis est dans une certaine mesure un contrecoup des intérêts pétroliers occidentaux dans le golfe Persique et de la présence sur place de troupes américaines.

2 Cet article suggère que l'économie politique des ressources naturelles et leurs caractéristiques jouent un rôle significatif dans la formation et la conduite des conflits armés. Les spécificités des ressources présentent un effet un certain nombre d'enjeux et d'opportunités participant à la formation et aux pratiques de conflits armés qui leur sont caractéristiques. Territorialisées, certaines ressources entraînent des enjeux de contrôle territoriaux ne se rencontrant pas aussi systématiquement dans la plupart des autres secteurs économiques. Leur proximité géographique ou politique vis-à-vis du pouvoir central, ou bien de populations ethniques marginalisées, ou encore de frontières disputées ou très perméables peut jouer un rôle important dans la construction et la pratique d'un conflit. Le contrôle de puits de pétrole en mer requiert par exemple un coup d'État, comme fut le cas à Brazzaville, alors que celui de mines d'or alluvionnaires en zone frontalière peut être maintenu pendant de longues années par un petit mouvement insurrectionnel tel que celui de Laurent Kabila dans l'est de l'ancien Zaïre. Exportables et échangeables sur le marché international, les ressources donnent lieu à des enjeux de contrôle de filières, de voies d'acheminement, et de vente. L'implication d'une multinationale américaine fruitière dans le conflit somalien s'explique ainsi en partie par l'accès offert au marché bananier européen par le quota de la Somalie. Fournissant des rentes résultant des modes de propriété et de fixation des prix, certaines ressources jouent également souvent un rôle essentiel dans les relations entre économie et politique, au travers notamment de relations de cooptation et de patronage. Les rentes du cacao et la caisse de stabilisation des prix ont ainsi participé comme instruments importants dans les dynamiques de pouvoirs régionaux en Côte-d'Ivoire.

3 Nombre de pays dont le développement dans un contexte de paix s'est appuyé sur l'exploitation de ressources démontrent que de tels enjeux et opportunités ne prennent pas systématiquement la forme de conflits, et encore moins de conflits armés. À cet égard, la trajectoire historique, la culture politique, le contexte régional, et la place d'un pays ou d'une ressource dans l'économie mondiale jouent un rôle essentiel. Des analyses quantitatives tendent à indiquer, toutefois, que le contexte de dépendance vis-à-vis des ressources naturelles est associé avec un risque plus élevé de conflit armé. L'incorporation des ressources dans des conflits armés a également des implications sur leur déroulement. Les sections suivantes explorent les principales perspectives associant guerres et ressources ; le rôle des ressources dans le déroulement des conflits ; et l'importance de la dépendance envers les ressources dans les causes de conflits.

L'ÉCOLOGIE POLITIQUE DE LA GUERRE

4 La compréhension des relations entre ressources naturelles et guerres – qui définissent ainsi une « écologie politique de la guerre » – a été largement influencée par les perspectives des auteurs et les priorités de leurs sociétés [1]. Longtemps dominées par l'idée de « guerre de ressources » participant à la géopolitique des ressources stratégiques du moment (or, bois, ou pétrole), ces perspectives ont plus récemment intégré l'environnement et le bien-être des populations du Sud ainsi que les processus de faillite et de « criminalisation » de certains États. Il en émerge des « guerres de ressources » reflétant l'interventionnisme des puissances étrangères et des multinationales, ainsi que des guerres « environnementales », « de pillage », et « sécessionnistes » associées en partie aux caractéristiques des ressources qu'elles intègrent.

Guerres de ressources

5 Comme le remarque Peter Gleick, « les ressources naturelles ont été employées dans le passé, et le seront dans l'avenir, comme outils ou cibles de guerres, et en tant que buts stratégiques motivant les combats » [2]. La pensée occidentale stratégique vis-à-vis des ressources a été dominée par une équation reliant le commerce, la guerre et la puissance, dont les instruments principaux étaient les ressources précieuses d'outre-mer et la navigation maritime. Pendant la période mercantiliste du XVe siècle, le commerce et la guerre sont devenus intimement liés [3]. Les puissances navales ont cherché à accumuler « la richesse du monde », la plupart du temps sous forme de métaux précieux sur lesquels une grande partie de l'équilibre des forces semblait être déterminé. Puisque la puissance navale elle-même reposait en partie sur l'accès au bois de construction maritime, son approvisionnement était devenu une préoccupation essentielle des principales puissances européennes du XVIIe siècle, influençant alliances, commerce et constructions d'empires. L'Angleterre a en particulier poursuivi une politique de libre circulation maritime « à tout prix » qui amena à plusieurs interventions armées en mer Baltique.

6 La révolution industrielle et la dépendance croissante à l'égard de matériaux importés pendant le XIXe siècle amenèrent les puissances occidentales à intensifier leur contrôle des matières premières. Cela, avec beaucoup d'autres facteurs tels que leurs idéologies politiques et la soif de prestige, amena à cette grande bousculade impérialiste sur les parties encore vacantes du reste du monde [1]. Le retard de certains pays amena conjointement à une stratégie d'autarcie motivant un « espace vital » proche, ou Lebensraum, durant les époques prussienne et nazi. L'importance croissante du pétrole à partir de la Première Guerre mondiale renforça encore une perspective de vulnérabilité parmi les importateurs, qui fut largement confirmée pendant la Deuxième Guerre mondiale et la guerre froide [2].

7 Bien que les politiques des États importateurs et des multinationales après la Seconde Guerre mondiale aient eu tendance à chercher à stabiliser les régimes, y compris au travers d'un soutien à des dictatures meurtrières, elles ont également parfois pris la forme d'interventions clandestines de déstabilisation ou de soutien financier aux belligérants, voire d'interventions militaires directes. Le contexte de décolonisation et la compétition de la guerre froide avivèrent les enjeux commerciaux et stratégiques de contrôle des ressources, tout en multipliant les occasions et justifications d'interventions musclées. À défaut d'intervention, la perpétuation d'un climat d'insécurité autour de ressources tant convoitées a permis d'assurer un revenu considérable aux marchands d'armes notamment au Moyen-Orient. Si la fin de la guerre froide a changé en partie ce contexte, la géopolitique des ressources et ces dimensions conflictuelles n'y prennent pas moins place ; tout du moins à une échelle régionale comme en témoigne le pillage des ressources congolaises par ses voisins [3]. Notant la croissance rapide de la consommation de masse, notamment de façon récente en Asie, le politologue Michael Klare soutient que la croissance de la population et de la demande de matières premières de plus en plus rares, et dont la propriété est de plus en plus contestée, engendre une augmentation des « guerres de ressources » notamment dans le golfe Persique, la région Caspienne, et la mer de Chine [1]. Si les forces du marché et le progrès technologique peuvent atténuer certains de ces problèmes, Klare reste essentiellement pessimiste étant donné la promptitude de certains pays comme les Etats-Unis à utiliser la force militaire pour garantir leur accès aux ressources, ainsi que l'instabilité politique de beaucoup de pays exportateurs.

Guerres environnementales

8 Longtemps ignorés par ces stratégies de sécurité nationale se penchant sur la disponibilité globale de ressources essentiellement industrielles, la menace d'une dégradation environnementale rapide et son effet sur les populations sociétés locales amenèrent, à partir des années 1970, à une redéfinition du concept de sécurité en relation avec les ressources naturelles [2]. Ce concept de « sécurité environnementale » reflète non seulement une conception malthusienne des relations entres ressources et populations, mais aussi des idées d'interdépendance globale – comme les limites environnementales à la croissance récemment illustrées par les discussions sur le réchauffement planétaire global [3]. Dans cette perspective, instabilité politique et conflits armés reflètent des problèmes socio-écologiques dont les causes sont ancrées, selon les auteurs, dans la croissance effrénée de la population ou la pauvreté résultant de relations d'exploitation donnant lieu à des pratiques environnementales dévastatrices et des disparités économiques sources de conflits [4]. Incorporée au concept de « sécurité humaine », cette perspective souligne également les intérêts de sécurité des individus plutôt que ceux des États, particulièrement parmi les pauvres des pays du tiers monde [5].

9 Si la plupart des analyses inscrites dans cette perspective mentionnent d'autres facteurs de conflits et soulignent l'importance des institutions sociales gérant l'accès aux ressources, l'accent est souvent mis sur des conditions locales de démographies « explosives » et de dégradation environnementale [6]. Le cas du génocide au Rwanda en 1994 souligne l'importance relative des violences domestiques et interpersonnelles aggravées par des conflits liés à la terre et des inégalités croissantes qui prennent place dans un contexte d'accroissement rapide de la population et de capacités environnementales limitées [1]. Il faut noter toutefois l'importance d'une économie agricole nationale orientée, parfois brutalement, par le gouvernement et les institutions financières internationales vers des cultures d'exportation telles que le café ou le cacao, et les problèmes de dépendances qui s'y rattachent (cf. infra). La dépendance des élites dirigeantes rwandaises et de beaucoup de paysans à l'égard des exportations de café fut un facteur structurel de vulnérabilité politique et économique. L'effondrement des prix du café à partir du milieu des années 1980 et la faillite de l'accord international de régulation en 1989 entraînèrent un déclin des recettes d'exportation de café, de 144 millions de dollars US en 1985 à 30 millions de dollars en 1993, causant des problèmes financiers qui aggravèrent le sentiment de vulnérabilité du régime hutu et participèrent ainsi en partie à sa décision d'une « solution génocidaire » [2]. Le fait que le massacre au Burundi en 1972 de dizaines de milliers de Hutus par une armée dominée par les Tutsis ait eu lieu dans le contexte d'une longue période de stabilité des prix du café démontre cependant les limites d'un tel argument.

10 Dans ce sens, l'histoire des conditions de vulnérabilité politico-économique et environnementale de certaines populations et régimes est aussi importante. La crise à long terme de l'agriculture de subsistance dans les montagnes péruviennes résultant du déplacement des Indiens vers des terres marginales pendant la période coloniale, aggravée par la croissance de population et prolongée par des réformes terriennes inefficaces dans les années 1970, a joué un rôle important dans les motifs de l'insurrection du Sentier lumineux [3]. Le déplacement ou l'exclusion des paysans par l'agro-industrie et de mauvaises conditions de travail sur les grandes plantations ont incité la mobilisation politique et l'expansion de la lutte révolutionnaire en Amérique latine et en Asie du Sud-Est. Au Nicaragua, le statut de « sans-terre » aussi bien que la négligence de l'État et l'exclusion ou des arrangements locaux de clientélisme ont fourni une base de soutien rural pour la révolution sandiniste. Pourtant la création de fermes d'État par le régime sandiniste, au détriment de l'offre de parcelles agricoles individuelles, a renforcé les liens entre certains anciens patrons latifundistes et leurs clientèles paysannes, augmentant ainsi rapidement l'appui au mouvement Contras [4].

11 Paradoxalement, les « guerres environnementales » ne se rattachent pas exclusivement à une dégradation écologique, comme il est le plus souvent fait mention dans ces analyses, mais plutôt à une transformation du paysage socio-écologique, qu'elle soit positive ou négative. Une situation d'amélioration environnementale donne parfois lieu à une capture des ressources ainsi accessibles ou améliorées par voie de manipulation d'une identité nationale ou politique. L'escalade de conflits intercommunautaires entre la Mauritanie et le Sénégal en 1989 trouve, entre autres, sa source dans un projet européen d'irrigation des terres agricoles du bas fleuve Sénégal qui donna lieu à la manipulation des titres de propriétés permettant une exclusion des populations « sénégalaises » de la rive mauritanienne au profit de notables « mauritaniens » [1]. Des craintes similaires de la part de certaines populations et politiciens sud-soudanais vis-à-vis du canal de Jonglei qui devait assécher des zones humides essentielles à l'économie locale figurent parmi les motivations publiques d'une reprise de la guerre au début des années 1980 [2]. De telles dynamiques s'observent aussi au niveau micro-économique : les accusations de « soutien à la guérilla » des paysans colonisateurs de la frontière agricole colombienne permettent aux milices paramilitaires d'opérer un transfert des terres nouvellement défrichées aux latifundistes ou trafiquants de drogue qui les rémunèrent [3]. S'inscrivant souvent dans le cadre d'une consolidation du pouvoir des élites locales ou nationales, ces stratégies de contrôle des ressources peuvent engendrer des conflits qui seront adressés, sinon résolus par la violence. La manipulation de la législation de la terre par Siyad Barre en Somalie visant à consolider son régime aggrava les conflits fonciers et figure parmi les dynamiques sociales qui ont conduit aux guerres de factions dévastant la Somalie durant les années 1990 [4].

12 Les critiques d'un modèle de « guerres environnementales » ont aussi souligné l'importance des relations inégales de puissance dans les sociétés locales et l'économie politique globale, particulièrement au niveau des secteurs pétroliers et miniers, mais aussi pour les cultures de rentes [5]. Enracinée dans les histoires et relations sociales locales, la violence est donc spécifique aux sites où elle prend place, tout en étant connectée à des processus plus larges de transformation matérielle et de relations de pouvoir [6].

Guerres de pillages

13 Avec la fin de la guerre froide, l'analyse des conflits armés se concentra plus sur les mécanismes et conséquences internes de guerres redevenues largement « civiles ». L'argument de motivations économiques prenant le pas sur des considérations idéologiques en matière de conflits prit une forme plus concrète au vu des pratiques de prédations de nombreux seigneurs de guerre [1]. La prolongation de la guerre en Angola et au Cambodge, ainsi que les nouvelles guerres au Liberia puis en Sierra Leone, démontrèrent pour certains que la guerre n'était plus un mode de règlement des conflits ou de victoire politique, mais plutôt une forme d'accumulation économique. Etant donné l'absence générale de soutien des puissances étrangères comme le manque fréquent de soutien populaire pour la guerre, les pratiques commerciales ou prédatrices des belligérants ne reflètent pas forcément leur « cupidité », mais parfois plutôt leur mode d'adaptation à un contexte économique redéfini par le nouveau contexte international.

14 Si les ressources naturelles n'ont pas le monopole dans les économies de ces « guerres de pillage », elles constituent souvent une clef de voûte compte tenu de la fréquente pauvreté de l'économie locale. L'accès aux revenus dérivés des ressources naturelles représente non seulement le moyen d'acheter des armes et de financer une armée, mais aussi la récompense du contrôle d'un État ou tout du moins d'un territoire. Dans cette perspective, une rébellion fait ainsi figure de banditisme à grande échelle reflétant non seulement la déliquescence de l'État, mais aussi les conditions géologiques ou écologiques, et les possibilités de profits qui peuvent leur être associées. Après l'échec de sa tentative de renversement du gouvernement à Monrovia en raison de l'interposition de troupes régionales sous l'égide de la CEDEAO, Charles Taylor a néanmoins réussi à établir un contrôle relatif de secteurs tels que le bois de construction, le caoutchouc et le fer, notamment en utilisant les infrastructures du port de Buchanan et la complicité de la Côte-dTvoire [2]. S'établissant en seigneur de guerre selon un modèle qui n'est pas sans rappeler le gouvernement auquel il s'attaquait, Taylor a étendu son régime prédateur à la Sierra Leone voisine, où son soutien du front uni révolutionnaire (RUF) lui fournit un accès au secteur diamantaire, dont une partie transitait illégalement depuis longtemps déjà, par le Liberia. De même, aux Philippines, la taxation du secteur forestier a longtemps soutenu nombre de groupes insurgés [1].

15 La présence de diamants, de pétrole, ou de bois précieux constituerait donc un terrain particulièrement favorable aux conflits armés et à leur prolongation. Si une telle perspective est simpliste, elle suggère néanmoins que des facteurs tels que les caractéristiques des ressources, celles de leur exploitation, et leur situation géographique peuvent être importants dans les dynamiques de certains conflits et les comportements de groupes armés [2]. Comme le suggère David Keen, des violences économiquement motivées sont plus probables de la part de groupes rebelles quand des revenus consistants peuvent être tirés de ressources naturelles exploitables avec une technologie minimale et en l'absence de gros investissements ou de contrôle de l'appareil d'État et de sa légitimité internationale [3]. La situation géographique et géopolitique des ressources est aussi importante. La proximité de frontières internationales de pays soutenant la guérilla ou ayant des intérêts dans leur économie, une topographie escarpée, une couverture végétale dense, des infrastructures de transports difficile à contrôler (aéroports de brousse, pistes nombreuses) forment tous des facteurs facilitant l'accès de groupes rebelles aux revenus issus des ressources. Le tableau 1 présente une estimation de l'accessibilité de forces rebelles aux revenus provenant des ressources, au travers de leur exploitation, de vols, ou de mécanismes d'extorsion.

TABLEAU 1

Accessibilité de forces rebelles aux ressources [4]

tableau im1

Accessibilité de forces rebelles aux ressources [4]

16 En raison de leur forte accessibilité par des forces rebelles, les diamants alluviaux ont sans surprise acquis la réputation d'être « le meilleur ami de la guérilla » [1]. Leur exploitation artisanale facilite en effet l'exploitation illégale par des réseaux de « creuseurs », commerçants, troupes armées, et des autorités civiles et militaires complices. Exploitation minières, vol et extorsion sont communs dans des zones de diamants alluvionnaires répartis sur des centaines de kilomètres carrés et dont la sécurité militaire est difficile à garantir ; ils peuvent permettre de viabiliser économiquement des groupes de guérilla, ou des troupes gouvernementales opérant indépendamment, sur le long terme. Petits, légers, anonymes, faciles à dissimuler, de grande valeur, et commercialisables internationalement, les diamants se prêtent également bien à la contrebande et aux trafics. Ils représentent donc aussi une monnaie de choix pour le trafic d'armes, le blanchiment d'argent et le financement d'activités clandestines, y compris celles de groupes terroristes tel qu'Al-Qaeda [2]. La facilité de transport et de contrebande des diamants ainsi que la complicité d'entreprises internationales, de groupes criminels et des marchés internationaux facilitent d'autant l'émergence de chefs de guerre et la prolongation des conflits armés.

17 Environ la moitié des pays producteurs de diamants alluviaux ont été affectés par des conflits armés depuis le début des années 1990 [3]. Si aucun de ces conflits ne trouve vraiment son origine dans le contrôle des diamants, les belligérants y ont trouvé une manne économique particulièrement lucrative. En Angola, l'exploitation de diamants pourrait avoir fourni jusqu'à 3 milliards de dollars de revenus au mouvement rebelle UNITA dirigé par Jonas Savimbi pendant les années 1990 [4]. De même, le contrôle des régions diamantifères du Liberia et de la Sierra Leone a permis à certains mouvements rebelles de gagner plusieurs centaines de millions de dollars au cours de la même période [5]. En République démocratique du Congo, plusieurs factions rebelles fonctionnent comme intermédiaires d'intérêts d'Ougandais et de Rwandais dans le contrôle des diamants de la région de Kisangani, alors que le gouvernement congolais a accordé aux militaires zimbabwéens certaines de ses meilleures concessions de diamants dans la région de Mbuji-Mayi en échange de leur appui [1].

18 Si l'accès aux revenus des diamants alluvionnaires est relativement facile, et partage ainsi certaines caractéristiques avec d'autres ressources « diffuses » (c'est-à-dire réparties sur de larges territoires), pour d'autres ressources plus « concentrées » et plus difficiles à exploiter ou à transporter, l'accès aux revenus se fait essentiellement soit par le biais du contrôle de l'État, soit par le biais de sabotages d'infrastructures, de chantages ou d'enlèvements pour ce qui est des ressources. C'est le cas, par exemple, de l'exploitation pétrolière à terre ou des métaux non précieux. De même, en l'absence d'autres sources financières, le contrôle de zones pétrolières en mer ne semble pas laisser d'autre choix aux groupes rebelles qu'une prise de pouvoir dans la capitale – permettant ainsi le plus souvent une reconnaissance internationale, notamment de la part des compagnies pétrolières. Le conflit en République du Congo en 1997 s'est ainsi essentiellement concentré sur le contrôle de la capitale, épargnant les installations pétrolières de Pointe-Noire [2]. Si de tels conflits se devraient d'être brefs, compte tenu de leurs objectifs, leur prolongement est souvent le résultat de dynamiques de pillages « populaires » et de manipulation identitaires, ainsi que d'un soutien externe à la partie rebelle. De nombreux groupes armés ont en effet bénéficié d'avances de la part d'acteurs commerciaux ou politiques désireux d'appuyer l'un des camps dans la perspective d'une victoire éventuelle, voire tous les camps afin de se couvrir quelle que soit l'issue du conflit.

Guerres sécessionnistes

19 La présence de population économiquement ou politiquement marginalisée par le gouvernement sur les lieux d'exploitation de ressources peut faciliter le soutien à un mouvement de guérilla, mais aussi des mouvements locaux, notamment sécessionnistes. C'est le cas pour de riches ressources difficiles à contrôler en dehors d'un appareil d'État : les groupes d'opposition locaux ont alors intérêt à participer à la formation d'un mouvement sécessionniste. Bien que des groupes locaux d'opposition puissent trouver difficile, voire impossible de contrôler ces ressources ou d'en tirer des revenus par le vol ou l'extorsion, leur simple existence et la mythologie économique qui les entoure, les exactions associées à leur exploitation, ainsi que la répartition des coûts et bénéfices peuvent se révéler des motifs puissants dans la justification et la mobilisation d'une opposition armée ; la perspective de futurs revenus fournit une source additionnelle de motivation.

20 Si la plupart des tentatives de sécession ont une base historique indépendante des ressources, les changements socio-économiques associés à leur développement peuvent renforcer un tel mouvement. Ce fut le cas, par exemple, du phosphate au Sahara occidental, dont l'exploitation « permit la montée en force d'un mouvement nationaliste moderne, plaçant ses vues sur la création d'une nation-État indépendant » [1]. Les Sahraouis ont identifié la perspective d'un pays économiquement viable ou même prospère, et la prétention simpliste que le Maroc visait à capturer leur richesse minérale récemment découverte a servi à mobiliser la résistance armée. Les mouvements armés sécessionnistes peuvent également émerger autour de la redistribution des impacts économiques, sociaux et environnementaux liée au développement commercial des ressources. Le mouvement sécessionniste à Aceh, en Indonésie, est historiquement enraciné au sultanat indépendant, qui a régné jusqu'à ce que le Néerlandais l'ait militairement défait à la fin du XIXe siècle. Pourtant la formation du mouvement de libération d'Aceh (GAM) a coïncidé au début des années 1970 avec la déclaration d'exploitation des réserves principales de gaz, et la déclaration d'indépendance du GAM en 1976 dénonçait le détournement de 15 milliards de dollars de revenu annuel au profit exclusif des « Javanais néo-colonialistes » [2]. L'expropriation des terres et l'exploitation des forêts par des entreprises dominées par les Javanais ont encore aggravé le conflit.

21 De même, l'histoire du séparatisme dans l'île de Bougainville en Papouasie Nouvelle-Guinée est fondée sur un fort particularisme géographique et identitaire. Pourtant, les demandes des politiciens locaux pour un « statut spécial » pendant la période de transition du pays vers l'indépendance, y compris en matière d'allocations budgétaires, portaient clairement sur la signification économique de la mine d'or et de cuivre de Panguna, principale richesse de l'île représentant aussi environ 15 % du revenu national. Les objectifs sécessionnistes du chef de file Francis Ona en 1989 étaient eux aussi liés à l'activité minière, demandant une compensation financière et la fermeture de la mine [3]. Ona, un ancien arpenteur de mine, est un habitant local, mais ne détenant pas de titre foncier dans le secteur du bail d'exploitation minière, il avait été écarté des mécanismes de compensation des communautés locales. Bien que ses motivations personnelles puissent se comprendre comme un conflit terrien familial dans la culture Nasioi, son analyse résonna néanmoins fortement dans toute la communauté locale, la répression par des forces gouvernementales entraînant l'escalade d'un conflit qui fit près de 10 000 victimes au cours des années 1990 [1].

22 Dans une certaine mesure, la géographie et les caractéristiques des ressources et de leur exploitation peuvent influencer le type de conflit armé, et sa viabilité. L'argument n'est pas que les conflits dans les pays producteurs de pétrole ne peuvent être que des sécessions ou des coups d'État. Toutefois, de par leur géographie, leurs caractéristiques physiques et commerciales, ainsi que leur potentiel discursif, les matières premières participent au contexte dans lequel se définissent les mobilisations politiques, les stratégies, les tactiques, et les capacités des belligérants.

Ressources et déroulement des conflits armés

23 L'importance du contrôle des ressources a souvent un impact direct sur les zones de déploiement des groupes armés et l'intensité des combats. Complétant des stratégies de guérilla fondées sur une mobilité élevée, les groupes rebelles cherchent ainsi à établir des bases solides ou des zones de forte insécurité dans les régions de production ou sur les itinéraires de transport. Les troupes de gouvernement essayent généralement d'empêcher ceci par des mesures de contre-insurrection à l'encontre notamment des populations civiles qui sont déplacées vers des zones de regroupement sous surveillance. Dans beaucoup de cas, les troupes de gouvernement s'associent au pillage. L'effet global des ressources naturelles dans de tels contextes est cependant ambigu. Les ressources peuvent intensifier des confrontations au niveau des zones d'importance économique. Cela s'est produit en Sierra Leone dans les meilleurs secteurs d'extraction de diamants et au Cambodge dans les zones de stockage de bois.

24 Si les revenus de ces ressources permettent d'augmenter l'armement et le recrutement des groupes armés, le peu d'affrontements opposant les belligérants reflète parfois paradoxalement leurs préoccupations commerciales. Alors que le contrôle d'une zone de production demande souvent un affrontement militaire, l'exploitation et la commercialisation des ressources peuvent requérir un arrêt des hostilités, voire une complicité entre adversaires. Le transport de billes de bois au Cambodge et leur importation par la Thaïlande ou le Vietnam demandaient ainsi une collaboration des différentes factions contrôlant les forêts, les routes, et les relations diplomatiques [2]. Le gouvernement cambodgien permit ainsi aux compagnies thaï d'exploiter du bois en territoire Khmer rouge à condition de payer non seulement des taxes, mais aussi de généreuses commissions alimentant la corruption des dirigeants. Les groupes Khmer rouges percevaient bien sûr des taxes de ces compagnies qui étaient déterminantes pour la viabilité financière du mouvement. De même les soldats gouvernementaux rackettaient les compagnies travaillant en zones rebelles. Tant que le gouvernement et les rebelles tiraient bénéfice de cette situation, aucun des deux bords ne souhaitait vraisemblablement changer le statu quo. Quand les profits prennent priorité sur les objectifs politiques, la victoire n'est pas forcément un but si la guerre fournit à la fois moyens et impunité à ceux qui en profitent. Une telle situation tend ainsi souvent à prolonger les conflits de « faible intensité » qui n'épargnent malheureusement pas les civils – comme l'ont démontré les violences perpétrées à l'encontre des populations civiles par l'UNITA ou le RUF, tous deux bénéficiant de larges revenus diamantaires. Il ne s'ensuit pas automatiquement, cependant, qu'une guerre aurait un impact plus bénin sur des populations en l'absence de ressources. En effet, les belligérants en manque de revenus risquent d'intensifier leur prédation des populations civiles.

25 Au-delà de ces effets financiers et militaires, les ressources peuvent également prolonger des conflits en fournissant des réseaux d'appui politique et logistique, au travers notamment d'une « diplomatie privée » s'attachant plus aux intérêts commerciaux d'un pays, d'une compagnie ou de la caisse personnelle d'un dirigeant qu'à ceux de la paix. Les diamants de L'UNITA ont non seulement permis au mouvement rebelle d'acheter des armes, mais aussi un appui de la part de certains dirigeants régionaux. De même, grâce en partie à son contrôle du pétrole, le gouvernement angolais a rapidement gagné la faveur des principales puissances occidentales une fois qu'il était établi que L'UNITA avait non seulement perdu les élections en 1991, mais aussi les moyens de gagner le conflit militairement. De façon plus générale, de tels revenus marginalisent les intervenants multilatéraux et les donateurs qui pourraient autrement influencer un règlement négocié et pacifique de la guerre au travers d'incitations économiques. Même si nombre d'autres facteurs sont entrés en jeu, le contraste entre le succès du processus de paix au Mozambique, un pays largement démuni de ressources, et les échecs répétés des tentatives en Angola est flagrant.

26 La présence de ressources au cœur de l'économie des conflits influence aussi l'organisation et la cohésion interne des mouvements armés et par ce fait le cours et la durée des conflits. Des revenus provenant de l'extérieur, comme ce fut le cas durant la guerre froide, permettent de consolider un mouvement car ils peuvent être plus facilement centralisés par les dirigeants qui trouvent en leur redistribution un moyen de contrôle de leurs subordonnés [1]. En revanche, un flot de ressources allant de la base vers les dirigeants d'un mouvement, comme c'est le cas avec le contrôle des ressources diffuses tels que les diamants alluvionnaires et le bois par les unités et commandants locaux, peut faciliter une fragmentation du mouvement. À moins que les dirigeants du mouvement ne puissent monopoliser ces secteurs par le biais de la fourniture d'armes et de munitions, ou du contrôle des infrastructures et des marchés du trafic de ressources, le risque d'autonomisation des subalternes, et donc le risque de fragmentation du mouvement sont réels. La multiplication des factions dans des conflits comme celui du Liberia trouve ainsi sa source non seulement dans les divisions ethniques et l'ego des commandants, mais aussi la diversité des ressources locales [2]. Le risque de corruption à l'intérieur même du mouvement, surtout quand il s'agit de transferts de diamants, par exemple, peut miner la confiance entre les membres d'un groupe armé. Plus généralement, ce modèle de flot de revenus est susceptible d'affaiblir la discipline et les chaînes de commandement des mouvements armés. Comme le souligne un commandant Khmer rouge :

27 « Le problème du financement du mouvement par le commerce [plutôt que par la Chine] c'était d'empêcher une explosion du mouvement, car tout le monde aime faire des affaires et les soldats risquaient de négliger le combat pour celles-ci. » [3] 

28 Afin d'empêcher une telle fragmentation, le mouvement Khmer rouge appuyait financièrement les familles des soldats au front et contrôlait strictement les mouvements commerciaux et frontaliers. Cela ne l'empêcha pas de subir toutefois de nombreuses défections de la part d'unités dont les intérêts commerciaux ne se conciliaient pas avec les intérêts du mouvement.

RESSOURCES, DÉPENDANCE ET DÉLIQUESCENCE DES ÉTATS

29 Si l'intégration des ressources dans le déroulement des conflits armés est relativement bien documentée et fait l'objet d'un large consensus, il n'en va pas de même vis-à-vis des ressources et des causes de conflits. Bien que la disponibilité de ressources puisse fournir des éléments de motivation économique et de capacités militaires, elle n'explique pas les causes du conflit en soit. De nombreux pays relativement riches en ressources ne font pas face à une guerre perpétuelle, et les conflits armés restent plutôt l'exception que la règle. Certaines tendances toutefois peuvent être observées parmi ces pays, et particulièrement ceux qui en sont économiquement et politiquement dépendants. En d'autres termes, au-delà du facteur de disponibilité des ressources, comptent le degré de dépendance et le contexte institutionnel des pays concernés. Une analyse des relations entre matières premières et conflits armés doit donc se placer dans une perspective historique de l'économie mondiale ainsi que du développement économique et politique de ces derniers.

30 Une analyse quantitative des facteurs de conflits indique qu'une dépendance relative vis-à-vis des exportations de matières premières est corrélée avec un plus grand risque de guerre. D'après les auteurs de cette étude, les économistes Paul Collier et Anke Hoeffler, le risque de guerre est maximal quand la proportion d'exportations des produits primaires atteint 26 % du produit intérieur brut (PIB), avec un risque de 23 % comparé à 0,5 % pour un pays semblable mais sans exportation de produits primaires [1]. La diminution du risque pour un niveau de dépendance plus élevé est interprétée par les auteurs comme reflétant la forte capacité d'autodéfense des États très dépendants. Plusieurs de ces États sont en effet des producteurs de pétrole, non seulement en position de financement de services de sécurité intérieure et de défense relativement efficace, mais aussi capables d'acheter une certaine stabilité politique par la corruption d'adversaires politiques potentiels ainsi qu'une paix sociale au travers de mesures populistes ou de cooptation. Comme le souligne l'ancien PDG d'Elf-Aquitaine, Loïc Le Floch-Prigent, « le président gabonais aimait bien financer son opposition. C'était sa manière à lui d'avoir un pays calme » [2]. Les « pétrocraties » n'ont bien sûr pas l'exclusivité de ces pratiques de patronage, la disponibilité de rentes d'autres matières premières et leur contrôle centralisé (direct ou indirect) par l'État en favorisant dans une certaine mesure l'exercice. Examinant plus généralement la disponibilité des ressources, plutôt que le niveau de dépendance, le politologue Indra de Soysa constate qu'une abondance de ressources renouvelables dans les pays pauvres et de ressources non renouvelables dans tous les pays augmente la probabilité du conflit armé [3]. En revanche, une pénurie de ressources renouvelables ne semble pas associée à un risque plus important de conflit armé. Il convient toutefois de rappeler que cette simple dichotomie entre ressources renouvelables et non renouvelables pour expliquer ces relations – notamment entre ressources et des conflits d'échelles différentes, tels que les microconflits de l'eau et les conflits internationaux du pétrole – ne couvre pas la diversité des relations entre ressources et conflits, ni les causes et formes de ces derniers.

Dépendances et distorsions économiques

31 Bien que l'exploitation de ressources puisse fournir une source valable d'emplois directs et indirects, de devises étrangères, aussi bien que des transferts technologiques, plusieurs études empiriques ont démontré qu'une dépendance vis-à-vis des ressources naturelles peut compromettre la croissance et la structure de l'économie, avec des conséquences négatives pour la majorité de la population et la stabilité du pays [1]. L'économie associée à cette dépendance peut être compromise par un certain nombre de facteurs, y compris une grande vulnérabilité face aux termes d'échanges, inflation et surévaluation de la monnaie locale (le « mal néerlandais » en référence aux effets économiques de la croissance du secteur gazier en Hollande), un haut niveau d'inefficacité dans les investissements dû à la subvention de projets politisés, et des difficultés de gestion budgétaire.

32 Depuis les années 1970, la volatilité et/ou la baisse des prix de la plupart des matières premières primaires ont sensiblement réduit la croissance économique des pays producteurs. Il apparaît que ni les politiques gouvernementales ni la qualité de la gouvernance n'ont influencé de manière significative un tel ralentissement économique généralisé [2]. Les prix en baisse ont favorisé une stratégie de réduction des coûts dans les industries concernées. Les fréquents transferts fiscaux de revenus de ces industries vers d'autres secteurs ont également affecté leur viabilité par le biais d'un manque d'entretien et d'investissement, précipitant ainsi une faillite des plus grandes entreprises et leur remplacement par de plus petites unités concentrant leurs activités sur les réserves les plus accessibles et les plus profitables. Beaucoup de pays africains, en particulier, ont ainsi perdu leur position sur le marché international par manque de « compétitivité ». En réponse, quelques pays ont subventionné leurs industries, au prix d'une aggravation du déficit fiscal et d'une dépression des cours de matières premières internationaux [1].

33 En raison d'une mauvaise gestion, de la corruption, et de termes d'échanges défavorables, les prêts contractés par des pays exportateurs en des temps plus sereins ont souvent créé une dette élevée et une baisse considérable du revenu par habitant. Après une décennie de hausse des prix du pétrole, la chute des prix de 52 $ à 15 $ par baril au milieu des années 1980 a fragilisé la plupart des économies des pays producteurs et compromis le système politique de certains. En Arabie Saoudite, la croissance économique n'a pas suivi le pas de la croissance démographique, avec pour résultat un fort déclin du revenu par habitant, un accroissement des inégalités entre la famille royale et la population, et un soutien croissant à des formes d'opposition comme le fondamentalisme et le terrorisme – indirectement promus par le biais d'une concentration de l'éducation nationale et de l'aide internationale sur la religion.

34 En matière de dette, la situation financière de la République du Congo (Brazzaville) est caricaturale en ce domaine, et explique en partie les violences qu'a connu le pays dans les années 1990. Pays producteur de pétrole potentiellement prospère, le Congo avait au début des années 1990 un des rapports dette/habitant parmi les plus élevés d'Afrique. Quand les prix du pétrole se sont effondrés au milieu des années 1980, le gouvernement a évité une restructuration massive de son appareil d'État en empruntant sur ses revenus pétroliers futurs. Des prix toujours relativement bas placèrent le gouvernement dans l'impossibilité de payer ses fonctionnaires dans un contexte de transition démocratique difficile qui dégénéra en conflit ouvert, une première fois en 1993, puis en 1997. Un processus semblable de diminution des revenus minéraux, aggravé par une corruption et une mauvaise gestion flagrantes, joua un rôle significatif dans le conflit libérien et sa répercussion régionale. La décision du président libérien Tolbert en 1979 d'augmenter le prix du riz importé afin de limiter les subventions alimentaires en provenance des secteurs d'exportations minérales déclencha des émeutes et des pillages dans la capitale, qui fournirent l'excuse, un an plus tard, d'un coup d'État qui marqua le « début de la fin » pour cette région [2]. Une baisse de revenus entraîna un endettement affaiblissant le gouvernement de Sierra Leone dès les années 1980, le fragilisant au vu du conflit dans le Liberia voisin et motivant une opposition plus forte à l'intérieur du pays. Dans le contexte d'une démocratisation difficile et d'une crise économique en partie précipitée par la chute des prix du cacao et la liquidation des fonds de stabilisation des produits dictés par le FMI et la Banque mondiale, le sujet de la citoyenneté de la main-d'œuvre agricole « saisonnière » a été politiquement instrumentalisé dans le conflit qui a gagné la Côte-d'Ivoire vers la fin des années 1990. Dans ces trois cas, la fragilité de l'État était en partie due à sa dépendance économique et politique vis-à-vis des matières premières.

35 Dans un tel contexte de dépendance, la gestion politique de la rente au travers du budget officiel ou de la distribution de la corruption a des effets considérables. Ironiquement, la « bonne gestion » de la corruption peut s'avérer un facteur important de stabilité politique que les réformes de démocratisation, privatisation et libéralisation peuvent gravement remettre en cause, notamment par la transformation d'une corruption monopolistique de redistribution dictée par une logique de cohésion d'État en une corruption compétitive d'appropriation suivant une logique individualiste de court terme [1]. Même sans corruption, une politique populiste menée dans le cadre d'une forte dépendance envers un faible nombre de matières premières affaiblit souvent les capacités de l'État quand les politiques de croissance à long terme sont abandonnées au profit de demandes immédiates de la population. La divergence se créant entre les aspirations populaires d'une part, les pratiques et moyens de l'État de l'autre, est ainsi susceptible d'aggraver des tensions.

Dépendance et contexte politique

36 La dépendance envers les ressources naturelles est largement associée à des régimes autocratiques ; plusieurs facteurs jouent à cet égard un effet négatif en matière de démocratie et de qualité de gouvernance. La disponibilité des revenus alloués au gouvernement lui permet de poursuivre une politique de patronage envers la population, créant ainsi un effet de rente qui lui évite les négociations avec la population et la construction institutionnelle nécessaires dans le cas des économies diversifiées. L'effet répressif des revenus permet aussi de financer les frais de sécurité du régime en place et d'adresser ainsi par la force ou la menace d'éventuelles pressions démocratiques. Une économie d'enclave fondée sur quelques matières premières ne provoque pas souvent les changements socioprofessionnels et culturels qui tendent à promouvoir la démocratie et une société civile prospère, créant ainsi un effet de « non-modernisation ». Les mouvements de population, tels que l'urbanisation rapide, les changements de modes de vie et d'organisation sociale associés avec un boom économique peuvent toutefois accélérer un mouvement de changement social et des demandes de représentation politique. Une étude quantitative par le politologue Michael Ross confirme chacun de ces effets dans le cas des exportateurs de pétrole, un effet rentier et, à un moindre degré, un effet de non-modernisation dans le cas des exportateurs de minéraux non combustibles [1].

37 Il n'est pas surprenant qu'une telle situation puisse influencer la marche de l'État et les stratégies de pouvoir des dirigeants (et des aspirants). Au-delà de l'importance financière des revenus tirés des ressources, les spécificités des modes de contrôle et de redistribution de ces ressources et de leurs revenus jouent aussi un rôle essentiel dans les dynamiques de pouvoir. Comme le soulignent ainsi François Misser et Olivier Vallée, on peut non seulement parler de pétrocraties au Moyen-Orient et de narcocraties en Amérique latine, mais aussi de « gemmocraties » définies par l'économie politique du diamant en Afrique. En raison des caractéristiques du diamant, les élites dirigeantes ont ainsi fréquemment développé des modes d'appropriation détachés de l'appareil légal et institutionnel de l'État, et créé des mécanismes parallèles de participation et de contrôle, s'étendant au-delà du secteur privé dans le domaine clandestin.

38 Si de telles pratiques, mêlant corruption et contrebande, peuvent être interprétées comme une criminalisation du Sud, et notamment des régimes africains, il convient de noter que ces économies reflètent aussi dans une large mesure une économie politique de la survie et de l'opportunisme associée aux caractéristiques des ressources concernées [2].

39 L'émergence de ces « entités chaotiques ingouvernables » reflète une situation de déliquescence du « formel » dans laquelle les tactiques de survie « légales » n'ont plus lieu d'être [3]. Dans une mondialisation néo-libérale coupable, ou du moins largement indifférente à l'effondrement des rentes « traditionnelles » de nombreux pays du Sud, le retranchement des acteurs locaux sur des niches économiques et politiques tels qu'immigration illégale, trafics, et ethnicisation de l'insécurité ne serait pas surprenant. Tant pour les creuseurs des mines de diamants que pour les politiciens qui sont supposés les diriger, l'instrumentalisation du désordre et de la violence répond à une misère où se sont inscrits l'histoire largement imposée du Sud et l'impact des ajustements structurels, de la dégradation des termes d'échange, et du désintérêt des anciens « États patrons », en dehors de quelques ressources encore « stratégiques » [1].

CONCLUSION

40 En l'absence d'une économie développée et d'institutions d'État fortes, de riches ressources sont paradoxalement susceptibles d'avoir des conséquences néfastes sur l'économie, la gouvernance, et les relations entre dirigeants et populations, ces derniers attendant beaucoup de cette « manne venue du ciel ». Bien que ce « don de Dieu » ne se transforme pas forcément en « malédiction des ressources », c'est un refrain que les chercheurs travaillant sur ces questions rencontrent fréquemment auprès des populations concernées. Si cette « malédiction » ne vient pas des ressources mais plutôt des dirigeants, la disponibilité de ces revenus et la dépendance qu'elle entraîne tend à structurer les choix de ces derniers et à former des coalitions puissantes entre élites domestiques et intérêts commerciaux étrangers qui affaiblissent grandement la responsabilité politique envers les populations locales.

41 Accaparant les revenus de ces ressources pour les placer au cœur d'un ordre politique consolidant leur pouvoir, les dirigeants négligent souvent la consolidation de l'État et de la démocratie, se mettant ainsi à la merci de termes d'échanges aléatoires, de distorsions économiques, et de frustrations populaires. De leur coté les intermédiaires commerciaux ont souvent misé sur les dictatures pour assurer la « stabilité » nécessaire à la protection de leurs investissements. Commentant la situation au Nigeria à la suite de la pendaison d'activistes des zones pétrolières par le régime de Sani Abacha, un représentant d'une compagnie étrangère affirmait qu'une dictature peut fournir la stabilité dont une compagnie pétrolière a besoin pour ces investissements [2]. Cette « stabilité », cependant, est de plus en plus remise en cause du fait des pressions internationales et domestiques de démocratisation, ainsi que d'une situation économique en dégradation.

42 Dans ce contexte de transition qui marque nombre de pays depuis la fin des années 1980, la violence armée devient souvent – ou du moins reste – un moyen d'action politique, d'accumulation économique, ou simplement de survie. Derrière cette forme de violence s'en trouvent d'autres, telles que celles de la paupérisation, de l'exploitation et de la négligence. Plutôt que de parler de « guerres de ressources », il convient donc de comprendre cette multiplicité de violences dont la brutale expression physique sous la forme de guerre en devient à la fois l'aboutissement et l'instrument.

Notes

  • [*]
    Université de Colombie britannique.
  • [1]
    Pour une explication du concept d'écologie politique de la guerre, voir Le Billon, 2001.
  • [2]
    Gleick, 1991.
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  • [2]
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  • [1]
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  • [2]
    Le Billon, 2001.
  • [3]
    Keen, 1998.
  • [4]
    Prix approximatif dans les pays producteurs dans les années 1990, adapté de Auty, How natural resources can generate civil strife, Geopolitics (sous presse), et entretien avec Gavin Hayman, Global Witness, Londres, juin 2002.
  • [1]
    Cette expression fait référence à la chanson de Marilyn Monroe, Les diamants sont le meilleur ami de la femme. On peut distinguer deux principales sources de diamants : pipes volcaniques (kimberlites), et dépôts alluviaux.
  • [2]
    Farah, 2001 
  • [3]
    Liste : Angola, Afrique du Sud, Brésil, Côte-d'Ivoire, Ghana, Guinée, Guyana, Liberia, Namibie, République démocratique du Congo, République d'Afrique centrale, Sierra Leone, Tanzanie, Vénézuela, Zimbabwe (les pays affectés par des conflits sont soulignés).
  • [4]
    Global Witness, A Rough Trade : The Role of Companies and Governments in the Angolan Conflict (London, Global Witness, 1998).
  • [5]
    Smillie, Gberie, Hazleton, 2000.
  • [1]
    Voir Monnier, Jewsiewicki et de Villers (ed.), 2001 ; Dietrich 2002 ; et les rapports des panels d'experts des Nations unies.
  • [2]
    Pourtier, 1998.
  • [1]
    Hodges, 1983.
  • [2]
    Nazaruddin, in Joo-Jock et Vani (ed.), 1984.
  • [3]
    Polomka, 1990. Voir aussi Boge, 1999.
  • [1]
    Claxton, 1998.
  • [2]
    Voir les rapports de Global Witness ; Lechervy, 1996 ; Le Billon, 2000.
  • [1]
    Sauf si les intervenants étrangers ou leurs alliés régionaux veulent garder eux-mêmes un contrôle de l'opposition armée en finançant plusieurs mouvements concurrents – comme ce fut le cas en Afghanistan durant les années 1980.
  • [2]
    Pour une analyse de l'économie de guerre du Liberia, voir de Montclos, 1996.
  • [3]
    Interview avec l'auteur, Pailin, janvier 2001.
  • [1]
    Collier et Hoeffler, 2001. Cette analyse se fonde sur 52 guerres entre 1960 et 1999.
  • [2]
    Couve, 2003.
  • [3]
    De Soysa, 2002.
  • [1]
    Sachs et Warner, 1995 ; Leite et Weidmann, 1999 ; Ross, 2001. Un argument contraire est presenté par Davis, 1995.
  • [2]
    Dehn, 2000.
  • [1]
    Auty (ed.), 2001.
  • [2]
    Les exportations de minerai de fer représentaient 40% du PIB en 1975 ; voir Ellis, 1999.
  • [1]
    Le Billon, 2003.
  • [1]
    Ross, 2001.
  • [2]
    Bayart, Ellis, Hibou, op. cit.
  • [3]
    De Rivero, 1999.
  • [1]
    Chabal et Daloz, 1999 ; Clapham, 1996.
  • [2]
    Kenneth A. Rodman, Sanctions Beyond Borders : Multinational Corporations and US Economic Statecraft (Lanham MD, Rowman & Littlefield, 2001).
Français

Nombre de conflits armés dans le tiers monde sont financés par des matières premières. Dans un contexte d'affaiblissement des rentes géostratégiques de la guerre froide, l'importance relative de ces revenus augmente. Le contrôle des ressources, de leurs territoires et des réseaux de commercialisation influence les stratégies des groupes armés, le déroulement des conflits et leur résolution. Toutefois, qualifier ceux-ci de « guerres de ressources » motivées par la cupidité des combattants est simplificateur. Les intérêts commerciaux étrangers, le contexte de dépendance vis-à-vis des matières premières, débouchant parfois sur une déliquescence des États, sont autant d'éléments majeurs à prendre en compte.

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Philippe Le Billon [*]
  • [*]
    Université de Colombie britannique.
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Mis en ligne sur Cairn.info le 01/01/2012
https://doi.org/10.3917/rtm.174.0297
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