CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1. Les prépositions : des mots-outils ?

1.1. Point de vue syntaxique

1 Au-delà des cadres théoriques, on reconnaît généralement deux types de morphèmes fonctionnant différemment dans le discours : catégories majeures vs catégories mineures, ou morphèmes lexicaux vs morphèmes grammaticaux, ou catégories lexicales pleines, ou encore mots lexicaux, vs mots-outils. Ces dichotomies, qui se recoupent dans une très grande mesure, sont notamment fondées sur des critères « quantitatif » et relationnel. Les éléments de la première sorte, tels les verbes, appartiennent à un système riche et ouvert et peuvent entretenir diverses relations syntaxiques dans la phrase, tandis que ceux de la deuxième sorte, tels les articles, relèvent d’un inventaire limité et fermé et sont cantonnés à un seul rôle syntaxique.

2 Les prépositions ont la spécificité d’être ballottées d’une catégorie à l’autre selon les écoles : vues comme des « morphèmes » grammaticaux en linguistique fonctionnelle [1], par exemple, elles sont généralement classées parmi les catégories majeures en grammaire générative [2].

3 Il est maintenant largement admis que, d’un point de vue quantitatif, les prépositions n’appartiennent pas à une classe fermée et que leur nombre est susceptible d’augmenter, en particulier grâce à des procédés morphologiques comme le transfert, cf. côté dans côté jardin, ou la composition, cf. à côté de. Cependant, d’un point de vue relationnel, si l’on s’accorde pour considérer que les prépositions mettent en relation deux éléments, certains auteurs les traitent comme des têtes de syntagme alors que d’autres les voient comme de simples intermédiaires. Dans la première approche – la plus répandue –, les nominaux précédés par les prépositions sont analysés, par suite de leur caractère obligatoire et de leur dépendance vis-à-vis d’elles, comme les compléments ou, comme l’on dit traditionnellement, les régimes, c’est-à-dire les termes régis, de celles-ci. Dans la seconde approche, il est souligné que les prépositions, sauf lorsqu’elles fonctionnent également comme adverbes, n’ont aucune autonomie fonctionnelle, ne pouvant être utilisées seules, et ne sont pas expansibles. Or,

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le syntagme étant constitué d’une combinaison d’unités significatives, son noyau ne peut être que l’élément hiérarchiquement supérieur ; cela signifie qu’il est en mesure de recevoir des expansions, ce que n’admet pas en principe une préposition qui n’est pas issue d’un adverbe [3].

5 Adopter la première ou la seconde conception amène à considérer les prépositions de par le critère relationnel respectivement comme une catégorie majeure ou comme des mots-outils.

1.2. Point de vue sémantique

6 Si l’on s’appuie – parmi d’autres – sur Dubois [4], qui inclut les prépositions dans les mots-outils, on constate qu’intervient aussi un critère sémantique dans la définition de cette dernière catégorie : les mots-outils « sont des morphèmes non autonomes qui n’ont de sens que relativement à la structure grammaticale dans laquelle ils entrent ». Autrement dit, les prépositions, en tant que mots-outils, seraient vides de sens ou, tout au moins, auraient un sémantisme faible. Or, de nombreux auteurs considèrent les prépositions comme hétérogènes d’un point de vue sémantique et voient un continuum allant (selon les termes de Spang-Hanssen) des « incolores » (« vides de sens ») aux « colorées » (« pleines de sens »).

7 Dans ce qui suit, je tenterai de montrer que les prépositions, dans le domaine notionnel du déplacement, peuvent être caractérisées sur le plan de l’aspect lexical d’une façon comparable à celle des verbes, même si elles ne se comportent pas de manière uniforme.

8 Je me restreindrai aux phrases du type SN + V de déplacement + Préposition + SN, où le premier SN renvoie à la « cible » [5] ou au repéré, localisé(e) par référence à l’entité que désigne le deuxième SN, le « site » [6] ou le repère. Les prépositions peuvent alors être comparées puisqu’elles sont insérées dans un schéma syntaxique particulier et dans un contexte sémantique de la même sorte. On verra cependant plus loin (voir 3.2.4) que je serai amenée à discuter la notion de repère ainsi définie.

9 Je rappellerai d’abord [7] que l’aspect lexical des verbes se fonde sur trois caractéristiques (une de plus que de coutume lorsqu’il s’agit des catégories de Vendler), relatives à la durée, à la borne (que je remplacerai très vite par la notion de changement de lieu de référence) et à la polarité. Je m’efforcerai ensuite de montrer que ces traits sont également applicables aux prépositions ; autrement dit, que les prépositions, de par certaines propriétés sémantiques, ressemblent tout à fait à des éléments comme les verbes qui relèvent d’une classe éminemment lexicale.

2. Le mode d’action des verbes et ses traits constitutifs

2.1. Le mode d’action : définition traditionnelle

10 L’aspect, « structure interne de l’événement que la phrase dénote » [8], peut être abordé d’un point de vue grammatical, ou – comme ce sera le cas dans cet article – d’un point de vue lexical et il est alors communément appelé mode d’action ou Aktionsart. Dans cette dernière perspective, Vendler [9] distingue quatre catégories aspectuelles, dont seulement trois sont pertinentes pour le domaine notionnel du déplacement : activité, accomplissement et achèvement (il n’est pas ici question de la catégorie de l’état).

11 Guéron [10], parmi d’autres auteurs, définit les modes d’action de Vendler uniquement avec les traits [+ / – duratif ] et [+ / – borné] :

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  • activité : + duratif, – borné ;
  • accomplissement : + duratif, + borné ;
  • achèvement : – duratif, + borné.

13 Je rappellerai brièvement que les activités décrivent des procès qui se déroulent dans le temps indéfiniment, de façon homogène, tant qu’une circonstance particulière ne vient pas les interrompre. Autrement dit, les activités renvoient à des procès qui cessent uniquement du fait de facteurs pragmatiques (et non linguistiques), cf. Il a trotté. Les accomplissements, qui décrivent des événements qui évoluent au cours du temps, sont composés de plusieurs phases temporelles et possèdent intrinsèquement un terme qui doit être atteint pour qu’on puisse considérer l’événement comme accompli, cf. Il est venu. Les achèvements, enfin, décrivent un événement qui a lieu à un moment ponctuel, cf. Il est parti.

14 Les verbes et les phrases peuvent relever de ces catégories. La plupart des tests d’identification s’appliquent d’ailleurs avant tout aux phrases, mais ils valent pour les verbes par le truchement des phrases minimales (SN + V ). Ces tests sont essentiellement fondés, sous des formes diverses, sur la compatibilité avec une expression temporelle introduite par en et / ou pendant. Ainsi, pendant, dans son interprétation « standard » [11], introduit un syntagme qui précise « la mesure de la durée d’un procès non orienté vers une limite » et qui est alors compatible avec une activité, Il a trotté pendant des heures. Dans son interprétation « standard » [12], en introduit un syntagme qui exprime la « mesure de la durée d’un procès orienté vers une limite » et qui est compatible avec un accomplissement, Il est venu en dix minutes, et incompatible avec une activité, * Il a trotté en dix minutes. Dans son interprétation « rétroactive » [13], en introduit un syntagme précisant la « mesure de l’intervalle de temps entre un repère et […] l’instant de l’événement exprimé », Il est parti en dix minutes, où en dix minutes renvoie à l’intervalle de temps qui précède le départ.

2.2. Le mode d’action des verbes : nouvelle définition

2.2.1. Le changement de lieu de référence

15 Si, dans un premier temps, on ne s’intéresse qu’aux verbes, il apparaît qu’une classification reposant uniquement sur les deux traits susnommés ne rend pas compte de tous les éléments de cette classe. Ainsi, (s’)approcher, par exemple, renvoie à un procès qui, bien qu’homogène, comporte un terme, puisque l’on ne peut pas s’approcher indéfiniment d’un repère et que le procès se termine avant que le repéré ne soit en contact avec le repère. De tels verbes possèdent une borne mais elle est d’une sorte particulière, définie en négatif. Si, à la suite de Laur [14], on distingue entre localisation interne – repéré et repère, à un moment du déplacement, sont en contact, cf. Franck est allé dans la forêt – et localisation externe – repéré et repère sont toujours disjoints, cf. Franck est allé vers la plage –, cette borne peut être nommée borne externe. Autrement dit, (s’)approcher, bien que duratif et borné, n’a pas valeur d’accomplissement. On voit que la notion de borne, utilisée sans autre précision, est équivoque, dans la mesure où cette dernière peut être interne ou externe, et qu’en réalité le trait constitutif de la valeur aspectuelle se rapportant à la borne est [+ / – borné interne], et non [+ / – borné]. Il me semble donc préférable de remplacer cette notion par celle de « changement de lieu de référence » [15]. Le déplacement avec changement de lieu de référence peut être assimilé à un déplacement borné de façon interne et le déplacement sans changement de lieu de référence, à un déplacement borné de façon externe ou non borné. En l’absence de changement de lieu de référence, le repéré « ne peut être localisé différemment à deux instants différents » [16] (sic) parce qu’il se déplace dans un même endroit ; durant tout le déplacement, soit le repéré reste dans le repère, Franck a marché dans le pré, soit le repéré reste hors du repère, Franck s’est approché du pré (à la fin du déplacement, Franck est plus proche du pré, mais ne s’y trouve toujours pas).

2.2.2. La polarité

16 On a vu qu’il était nécessaire de préciser la nature de la borne ; il semble en être de même pour sa place. Ainsi, fuir, duratif et borné, n’est pas un accomplissement : s’il est duratif, et décomposable en plusieurs phases dans la mesure où il possède une borne, il ne comprend pas de terme à atteindre pour pouvoir être considéré comme accompli, puisque la limitation ne se situe pas à la fin, mais au début.

17 Il paraît important, par conséquent, de caractériser la valeur aspectuelle à l’aide d’un trait supplémentaire, la « polarité » [17], qui renvoie à la relation entre un repéré et un lieu lors d’un déplacement. Si ce lieu est antérieur au déplacement, la polarité est dite initiale ; si ce lieu est concomitant au déplacement, la polarité est dite médiane ; enfin, si ce lieu est postérieur au déplacement, la polarité est dite finale. Dans l’attribution de la polarité verbale, le lieu est implicite, sémantiquement impliqué par le verbe, cf. Franck est parti : le verbe partir a une polarité initiale ; Franck a marché : le verbe marcher a une polarité médiane ; Franck est arrivé : le verbe arriver a une polarité finale.

18 Le verbe fuir ne peut donc être rangé dans les accomplissements parce qu’il est initial. On ne trouve en effet parmi ces derniers que des verbes finaux, cf. venir, ou médians, cf. passer. De même, les verbes duratifs de non-changement de lieu de référence ne sont pas tous des activités ; ils doivent en outre être médians, cf. marcher. Le verbe (s’)approcher, final, n’est pas non plus une activité, cf. aussi s’éloigner, verbe duratif de non-changement de lieu de référence, mais initial.

19 Je propose donc de redéfinir, pour les verbes, les modes d’action de Vendler avec les traits [+ / – duratif], [+ / – changement de lieu de référence] et [polarité initiale / médiane / finale] :

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  • activité : + duratif, – changement de lieu de référence, polarité médiane ;
  • accomplissement : + duratif, + changement de lieu de référence, polarité médiane ou finale ;
  • achèvement : – duratif, + changement de lieu de référence, polarité initiale ou finale [18].

21 Les propriétés relatives, en sus de la durée, à la présence ou l’absence de bornes sont donc insuffisantes pour définir le mode d’action verbal. Il semble préférable de recourir à la notion de changement de lieu de référence, et nécessaire d’introduire la notion de polarité, ce qui équivaut à prendre en considération la nature (interne ou externe) et la position des bornes.

3. Pour une valeur aspectuelle des prépositions

3.1. Les prépositions « intrinsèquement dynamiques » [19]

22 Je vais tout d’abord essayer de montrer qu’au moins certaines prépositions, celles qui se construisent presque exclusivement avec un verbe de déplacement et sont désignées comme « intrinsèquement dynamiques » par Borillo [20], cf., par exemple, de, depuis, jusqu’à, vers, en direction de, etc., sont susceptibles de recevoir des traits relatifs non seulement à la polarité mais aussi au changement de lieu de référence et à la durée, définitoires pour les verbes du mode d’action.

3.1.1. La polarité

23 Dans le cas des prépositions, la polarité renvoie à la relation s’établissant, lors d’un déplacement, entre le repéré et le repère (il ne s’agit pas, comme pour les verbes, d’un lieu implicite), cf. Franck est descendu jusqu’au centre ville : la préposition jusqu’à a une polarité finale parce que le repéré Franck est dans le repère centre ville après le déplacement. La propriété de polarité n’est attribuée par Laur [21] qu’aux prépositions « intrinsèquement dynamiques ». C’est pourquoi, dans un premier temps, je me cantonnerai à ce groupe.

24 Aussi bien le verbe que la phrase peuvent être affectés par les traits relatifs au changement de lieu de référence et à la durée. D’un point de vue méthodologique, considérant qu’une propriété de la phrase se retrouve au moins dans l’un des éléments qui la constituent, je poserai que les traits de la préposition peuvent être dégagés, d’une part quand verbe et phrase se caractérisent par des traits différents, d’autre part par le rapprochement deux à deux de phrases pour lesquelles seule la préposition change, si cette modification de la préposition s’accompagne d’un changement de trait(s) au niveau de la phrase [22]. Il s’agit en fait, par la procédure de commutation, d’appliquer les tests d’identification, au-delà des phrases et des verbes, aux prépositions, puisque celles-ci ont avec les verbes une « différence essentielle […], elles ne font pas énoncé » (Hagège [23]).

3.1.2. Le changement de lieu de référence

25 Dans certains cas, verbe et phrase sont dotés de traits contradictoires. Par exemple, dans Il est venu vers la piscine, la phrase renvoie à un non-changement de lieu de référence (incompatibilité avec une expression temporelle introduite par en) alors que le verbe exprime un changement de lieu de référence ; dans Il a marché jusqu’à la piscine, la phrase renvoie à un changement de lieu de référence (compatibilité avec une expression temporelle introduite par en) alors que le verbe exprime un non-changement de lieu de référence. Dans ces exemples, la propriété de la phrase relative au changement de lieu de référence n’est pas imputable au verbe. J’en déduis qu’elle est ici déterminée par la préposition, ce qui m’a amenée à étendre la propriété de changement de lieu de référence à la classe des prépositions [24]. De même, si l’on contraste Il a marché jusqu’à la piscine, où la phrase renvoie à un changement de lieu de référence, et Il a marché le long de la piscine, où la phrase renvoie à un non-changement de lieu de référence, la préposition (le long de) apparaît comme responsable de la modification du trait et, partant, comme porteuse de la propriété de non-changement de lieu de référence, dans la mesure où le nom de repéré, le verbe et le nom de repère ont été maintenus.

3.1.3. La durée

26 Les prépositions « intrinsèquement dynamiques », qui renvoient à un parcours, peuvent être le plus souvent décrites comme duratives. Le rapprochement deux à deux de phrases pour lesquelles seule la préposition change permet aussi de préciser le trait relatif à la durée, cf. Elle est allée jusqu’au square / Elle est allée au square : le trait ici non duratif de à apparaît a contrario, par contraste avec jusqu’à. En effet, seul jusqu’à insiste sur le parcours, à renvoyant dans ce contexte à l’aboutissement du parcours, cf. Elle n’est pas allée au square, où tout déplacement est nié (à moins que la négation ne porte sur la destination), vs Elle n’est pas allée jusqu’au square dont on infère : Elle s’est arrêtée en chemin. On pourrait contraster de même Elle est venue depuis le square et Elle est venue du square : de est non duratif.

27 Les trois traits constitutifs de la valeur aspectuelle pour les verbes peuvent donc être accordés aux prépositions « intrinsèquement dynamiques ». Il semble par conséquent possible d’attribuer – au moins – à ces prépositions une valeur aspectuelle, si l’on pose que la correspondance établie, pour les verbes, entre les trois traits (polarité, durée, changement de lieu de référence) et une valeur aspectuelle, vaut de la même façon pour les prépositions.

28 Par exemple, le long de, préposition médiane, durative et de non-changement de lieu de référence, est ainsi dotée de la valeur d’activité ; jusqu’à, préposition finale, durative et de changement de lieu de référence, a valeur d’accomplissement ; il suffit à de d’être non duratif pour obtenir valeur d’achèvement. Une préposition comme depuis, initiale, durative et de changement de lieu de référence, n’entre pas tout à fait dans la catégorie des accomplissements, pour les mêmes raisons que son homologue verbal fuir (voir 2.2.2) : elle est composée de plusieurs phases, mais ne comprend pas de terme à atteindre puisque sa limitation se situe au début, et non à la fin. Une préposition comme vers, finale, durative et de non-changement de lieu de référence, ne peut, à la façon de (s’)approcher, entrer dans la classification de Vendler.

29 On peut cependant remarquer que la proposition d’associer, pour les prépositions, aux trois traits relatifs à la polarité, à la durée et au changement de lieu de référence, une valeur aspectuelle à l’identique des verbes, est vérifiable dans certains cas, ce qui, d’axiome, l’amène alors à être reconsidérée comme hypothèse.

30 Il a été souvent noté que l’introduction d’un syntagme prépositionnel est susceptible d’avoir une incidence sur l’interprétation aspectuelle de la phrase, cf. Il a marché, où la phrase a valeur d’activité, vs Il a marché jusqu’à la piscine, où la phrase a valeur d’accomplissement : le verbe et la phrase se caractérisent ici par des valeurs aspectuelles différentes. Il s’agit dans une large mesure de cas où le verbe a valeur d’activité.

31 La valeur aspectuelle de phrases comportant un verbe d’activité est par conséquent susceptible de renseigner sur les propriétés des prépositions compatibles avec ce dernier. La relation établie entre les trois traits et la valeur aspectuelle pour les prépositions est vérifiée puisque, là où l’on prête valeur d’activité à la préposition, la phrase a valeur d’activité, cf. Il a marché le long de la piscine, et que, là où l’on prête valeur d’accomplissement à la préposition, la phrase a justement valeur d’accomplissement. De plus, la phrase est inclassable sur le plan de l’aspect lexical lorsque la préposition est associée à un faisceau de traits ne correspondant pas à une catégorie aspectuelle, cf. ? Il a marché vers la piscine pendant des heures, * Il a marché vers la piscine en dix minutes, ou cf. ? Il a marché depuis la piscine en dix minutes. Dans tous ces cas, la préposition fait donc bien plus qu’influencer la valeur aspectuelle de la phrase : elle la dicte totalement.

3.2. Les prépositions « contextuellement dynamiques » [25]

32 Les prépositions « intrinsèquement dynamiques » apparaissent toujours (à quelques exceptions près [26]) dotées des mêmes traits, qui valent dans tous les contextes. Pour d’autres prépositions, il semble intéressant de prendre en compte des traits contextuels. En effet, comme le dit Gosselin :

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la signification individuelle de chacun des éléments d’un énoncé, si elle est clairement isolable, ne peut pas toujours être calculée de façon indépendante de celle des autres éléments [27].

3.2.1. La polarité

34 Comme il a été dit (voir 3.1.1), la propriété de polarité n’est attribuée par Laur [28] qu’aux prépositions « intrinsèquement dynamiques » [29]. À la manière de Laur [30] qui accorde une polarité contextuelle à quelques verbes (par exemple, la polarité de descendre et de monter est soit initiale, soit finale), j’ai proposé d’introduire la notion de polarité contextuelle [31] pour les prépositions qui se combinent aussi bien avec un verbe statif qu’avec un verbe de déplacement, cf., par exemple, à, dans, sur ou encore derrière, près de, sous, etc. En effet, dans ce dernier emploi, où elles sont dites « contextuellement dynamiques » [32], ces prépositions apportent un renseignement quant au déplacement, puisqu’elles indiquent dans tous les cas un lieu non initial. Selon les contextes, elles ont une polarité médiane ou finale : Elle a marché dans le centre ville / derrière le square (polarité médiane) vs Elle est allée dans le centre ville / derrière le square et Elle est partie dans le centre ville / derrière le square (polarité finale). On peut déjà noter que cette polarité ne correspond pas nécessairement à celle du verbe : dans la dernière paire d’exemples, le verbe (partir) est initial et les prépositions introduisent un lieu final.

3.2.2. Le changement de lieu de référence

35 Le trait relatif au changement de lieu de référence apparaît corrélé avec celui relatif à la polarité pour la plupart des prépositions contextuellement dynamiques. Par exemple, dans les prépositions de localisation interne, à, dans et sur médians expriment un non-changement de lieu de référence, et à, dans et sur finaux, un changement de lieu de référence. Cette remarque s’applique également à de nombreuses prépositions de localisation externe, mais nécessite une clarification préalable, notamment de la notion de repère (voir 3.2.4) ; je ne traiterai donc pas tout de suite le rapport entre polarité et changement de lieu de référence pour ce deuxième groupe de prépositions. M’appuyant sur Mittwoch [33] qui écrit « I can see no reason why a particular lexical item or phrase should not be marked plus or minus for a particular feature », je propose ici de doter la plupart des prépositions « contextuellement dynamiques » de traits contradictoires se réalisant alternativement.

36 Dans le cas où à, dans et sur sont médians, leur trait relatif au changement de lieu de référence peut être dégagé par le rapprochement deux à deux de phrases (voir 3.1.2), cf. Elle a marché dans le centre ville / sur le fil (non-changement de lieu de référence), vs Elle a marché jusqu’au centre ville / jusqu’au fil (changement de lieu de référence) : les prépositions à, dans et sur apparaissent porteuses du trait de non-changement de lieu de référence. On procède de même pour à, dans et sur finaux : Elle est venue au square (changement de lieu de référence), vs Elle est venue vers le square (non-changement de lieu de référence).

37 On voit que les verbes médians de non-changement de lieu de référence imposent généralement (mais pas toujours, voir 3.2.4) la polarité médiane et le trait de non-changement de lieu de référence à la préposition, cf. Elle a marché dans le centre ville. Les verbes finaux, mais aussi initiaux, de changement de lieu de référence sont quant à eux associés à à, dans, sur finaux de changement de lieu de référence, cf. Elle est entrée dans le square et Elle est sortie dans le square : à la fin du déplacement, le repéré est dans le square.

38 Ces propriétés contextuelles peuvent être rapprochées des « traits afférents contextuels » de Rastier [34] qui sont actualisés par instruction contextuelle. On assiste, en effet, dans ce qui précède, à une propagation de traits du verbe à la préposition. Dans le cas où un verbe initial de changement de lieu de référence impose les traits final et changement de lieu de référence à la préposition, on est autorisé à parler plus précisément de propagation du trait relatif au changement de lieu de référence. C’est alors la corrélation posée entre polarité et changement de lieu de référence qui permet de rendre compte de l’apparition d’un trait de polarité qui ne se retrouve nulle part ailleurs dans la phrase. Ce cas révèle que les traits, tout au moins contextuels, sont parfois hiérarchisés.

3.2.3. La durée

39 Lorsque les prépositions ont une polarité médiane, elles décrivent alors presque toujours un parcours (à quelques exceptions près [35]) et on peut en déduire qu’elles reçoivent le trait duratif, cf. Elle a marché dans le centre ville. À l’inverse, quand elles ont une polarité finale, leur trait non duratif apparaît a contrario (voir 3.1.3) ; on opposera ainsi Elle est allée au square et Elle est allée jusqu’au square, ou encore Elle est allée dans le centre ville et Elle est allée jusqu’au centre ville.

40 Ces constatations valent aussi pour la plupart des prépositions de localisation externe, cf. d’une part Elle a marché derrière le square (traits médian et duratif pour la préposition) ; d’autre part Elle est allée sous la table (traits final et non duratif), vs Elle est allée jusqu’à la table.

3.2.4. Changement de lieu de référence et prépositions de localisation externe : vers une redéfinition de la notion de repère ?

41 Comme il a été dit (voir 3.2.2), la plupart des verbes médians de non-changement de lieu de référence imposent la polarité médiane et le trait de non-changement de lieu de référence à la préposition. Le verbe courir, qui, de façon isolée, a valeur d’activité (et comporte donc les traits médian et de non-changement de lieu de référence), cf. Il a couru pendant des heures, constitue un cas à part. En effet, il exprime la manière de déplacement tout en se rapprochant des verbes de vitesse de déplacement qui, eux, généralement, sont finaux et renvoient à un changement de lieu de référence, dans la mesure où ils minimisent le parcours et insistent sur son aboutissement. Le verbe courir est susceptible de participer à des phrases ambiguës, cf. Franck a couru sur la plage : changement de lieu de référence possible, lorsque la préposition s’y prête, c’est-à-dire lorsque cette dernière est dotée d’une double polarité potentielle et, partant, de deux traits, relatifs au changement de lieu de référence, contradictoires et se réalisant alternativement. Lorsque Franck a couru sur la plage est interprété comme renvoyant à un changement de lieu de référence, on se trouve dans le cas type où cette propriété est déterminée par la préposition, n’étant pas imputable au verbe.

42 On voit alors que cette ambiguïté n’est pas réservée aux phrases comprenant une préposition « contextuellement dynamique » de localisation interne, mais qu’elle en affecte aussi beaucoup qui comportent une préposition de localisation externe. Ainsi, les phrases Il a couru derrière le square ou Il a couru sous la table[36] sont susceptibles de renvoyer à un changement de lieu de référence, puisqu’elles sont compatibles avec une expression temporelle introduite par en, cf. Il a couru derrière le square / sous la table en dix minutes.

43 Rappelons que la notion de changement de lieu de référence s’applique à la relation entre repéré et repère (voir 2.2.1). Le déplacement s’effectue avec changement de lieu de référence si le repéré passe d’un endroit à un autre. Autrement dit, soit le repéré n’était pas dans le repère et s’y trouve à la suite du déplacement, soit le repéré était dans le repère et ne s’y trouve plus à la suite du déplacement. Le déplacement s’effectue sans changement de lieu de référence si le repéré se déplace sans quitter un endroit pour un autre endroit, sans explicitement franchir une « frontière », sans « rupture géographique » : soit le repéré reste dans le repère, soit le repéré reste hors du repère, durant tout le déplacement.

44 Or, stricto sensu, si l’on s’en tient à la définition du repère précédemment adoptée (voir 1.2), les phrases Il a couru derrière le square et Il a couru sous la table renvoient à un non-changement de lieu de référence – puisque le repéré reste hors du repère, respectivement square et table, durant tout le déplacement –, ce que contredit pourtant la compatibilité avec une expression temporelle introduite par en. En fait, est ici considérée une portion d’espace rapportée soit à un lieu (« entité matérielle fixe » [37]) tel que square, soit à un objet (« entité matérielle [généralement] mobile » [38]) tel que table. Les phrases Il a couru derrière le square et Il a couru sous la table signifient respectivement « Il a couru dans l’espace derrière le square » et « Il a couru dans l’espace sous la table ». Le déplacement du repéré entraîne un changement de relation spatiale avec une zone, non pas désignée dans ce cas par le nom de repère square ou table[39], mais par la totalité du syntagme prépositionnel, derrière le square ou sous la table. On est donc amené, ou bien à redéfinir le repère comme le référent du syntagme prépositionnel (lorsque la préposition est « contextuellement dynamique » ; il n’est pas ici question des cas où la préposition est « intrinsèquement dynamique »), ou bien à redéfinir la notion de changement de lieu de référence qui ne s’applique plus à la relation entre repéré et repère, mais entre repéré et une autre portion d’espace. Cette redéfinition est particulièrement nécessaire quand il s’agit de prépositions de localisation externe puisqu’il y a alors absence de correspondance référentielle entre le syntagme prépositionnel et le nom de repère, cf. sous la table vs table : l’espace sous la table n’est pas une partie de la table. Elle est de bien moindre conséquence pour les prépositions de localisation interne car il existe un recouvrement référentiel partiel entre le syntagme prépositionnel et le nom de repère, cf. sur la table vs table : la zone de localisation correspond à une partie d’objet, l’espace sur la table est une partie de la table.

45 Polarité et changement de lieu de référence apparaissent donc corrélés pour la plupart des prépositions contextuellement dynamiques [40], et pas seulement pour les prépositions de localisation interne comme l’on pouvait a priori le penser.

46 Les trois traits constitutifs de la valeur aspectuelle pour les verbes peuvent être accordés aux prépositions « contextuellement dynamiques », si l’on admet que ces dernières comportent des traits contradictoires se réalisant alternativement. Il semble par conséquent également possible d’attribuer à ces prépositions une valeur aspectuelle, si l’on pose que la correspondance établie, pour les verbes, entre les trois traits (polarité, durée, changement de lieu de référence) et une valeur aspectuelle, vaut de la même façon pour les prépositions. Par exemple, les prépositions à, dans, sur, ou derrière, près de, sous, lorsqu’elles sont médianes, duratives et de non-changement de lieu de référence, sont dotées de la valeur d’activité. Quand les prépositions de localisation interne, mais aussi la plupart des prépositions de localisation externe comme derrière et sous, sont finales, non duratives et de changement de lieu de référence, le trait non duratif leur confère valeur d’achèvement.

4. Conclusion

47 J’espère avoir montré que les prépositions participant de phrases du type SN + V de déplacement + Préposition + SN pouvaient toutes être dotées, à titre intrinsèque ou contextuel, des traits de polarité, de changement de lieu de référence et de durée, constitutifs pour les verbes de valeurs aspectuelles. J’ai proposé de caractériser ces prépositions du point de vue du mode d’action en posant que la correspondance établie pour les verbes entre ces trois traits et une valeur aspectuelle valait également pour les prépositions. Il conviendra de vérifier par d’autres études que les considérations développées ici peuvent être étendues à des emplois non spatiaux des prépositions. Enfin, il semble souhaitable de s’interroger sur le statut des trois traits définitoires du mode d’action, et de se demander notamment dans quelle mesure ceux-ci sont garants de la « lexicalité » d’une classe : les critères identificatoires discriminant éléments lexicaux et « mots-outils » peuvent-ils être d’abord d’ordre sémantique, ou ne doivent-ils pas être en priorité syntaxiques ?

Notes

  • [1]
    Voir la citation de Feuillard-Aymard 1989, p. 233, dans l’introduction de ce numéro.
  • [2]
    Voir la citation de Tellier 1995, p. 41, dans l’introduction de ce numéro.
  • [3]
    Feuillard 1997, p. 20.
  • [4]
    Dubois 1994, p. 207.
  • [5]
    Vandeloise 1987.
  • [6]
    Ibid.
  • [7]
    Cf. Rossi 1999.
  • [8]
    Guéron 1993, p. 6.
  • [9]
    Vendler 1967.
  • [10]
    Guéron 1993, p. 6.
  • [11]
    François 1989.
  • [12]
    Ibid.
  • [13]
    Ibid.
  • [14]
    Laur 1991.
  • [15]
    Laur 1991 et 1993.
  • [16]
    Laur 1991, p. 67.
  • [17]
    Boons 1985 et 1987.
  • [18]
    Sauf exceptions (voir Rossi 1999), il n’existe pas de verbes d’achèvement médians, puisque cette polarité indique un parcours, associé à du duratif.
  • [19]
    Borillo 1998.
  • [20]
    Ibid.
  • [21]
    Laur 1991 et 1993.
  • [22]
    Je reprends un raisonnement développé dans Rossi 1999.
  • [23]
    Faits de langues 1997, p. 6.
  • [24]
    Cf. Rossi 1997.
  • [25]
    Borillo 1998.
  • [26]
    Cf. Rossi 1999.
  • [27]
    Gosselin 1997, p. 106 et 107.
  • [28]
    Laur 1991 et 1993.
  • [29]
    Borillo 1998.
  • [30]
    Laur 1991, p. 71.
  • [31]
    Rossi 1994.
  • [32]
    Borillo 1998.
  • [33]
    Mittwoch 1991, p. 75.
  • [34]
    Rastier 1987.
  • [35]
    Voir Rossi 1999.
  • [36]
    Pour un approfondissement des propriétés du repère, voir Rossi 1999.
  • [37]
    Borillo 1998.
  • [38]
    Ibid.
  • [39]
    Cf. par exemple Borillo 1998, p. 39.
  • [40]
    On ne peut évoquer, dans le cadre de ce travail, le cas de la préposition de localisation externe près de qui, laissant grande place à l’appréciation subjective, ne délimite pas nettement une portion d’espace et pour laquelle, donc, la corrélation entre polarité finale et changement de lieu de référence se vérifie moins bien.
Français

Résumé :

On souhaite montrer que les prépositions participant de phrases du type SN + Verbe de déplacement + Préposition + SN reçoivent, à titre intrinsèque ou contextuel, des traits constitutifs de l’aspect lexical chez les verbes. Si la correspondance établie pour les verbes entre ces traits et une valeur aspectuelle vaut également pour les prépositions, ces dernières – au moins en emploi spatial dynamique – peuvent être caractérisées du point de vue de l’aspect lexical. Autrement dit, sur un plan sémantique, les prépositions peuvent être rapprochées de ces unités éminemment lexicales que sont les verbes, ce qui inciterait à ne pas les considérer comme des « mots-outils ».

English

This paper tries to show that the features defining lexical aspect in verbs can be applied, either as intrinsic or contextual ones, to prepositions appearing in sentences such as : NP + Verb of movement + Preposition + NP. If it is accepted that these features are associated with an aspectual value in the same way as for verbs, a lexical aspect can be attributed to prepositions – at least when they refer to movement. In other words, prepositions are quite comparable to verbs on a semantic level and could therefore be considered, in this respect, as lexical units.

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Nathalie Rossi-Gensane
Université François-Rabelais, Tours
Mis en ligne sur Cairn.info le 28/03/2013
https://doi.org/10.3917/ss.003.0131
Pour citer cet article
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