CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1 – Introduction

1 Au cours des années 1980, l’escalade donne lieu pour la première fois en France à des compétitions officielles. Dans le même temps, l’escalade s’institutionnalise en trouvant une place spécifique au sein de la Fédération française de la montagne (FFM). Un comité escalade est créé en 1982. Or ce processus de reconnaissance et d’intégration qui s’accompagne de la mise en place des premières compétitions a été rythmé par des tensions, des conflits notamment entre les défenseurs de l’alpinisme traditionnel et des grimpeurs subversifs au point d’engendrer une crise interne, accompagnée d’une scission au sein de l’organisation fédérale. En 1985, une Fédération française d’escalade (FFE) indépendante est fondée avec pour but de proposer une alternative à la politique menée par la FFM garante des valeurs de l’alpinisme classique.

2 L’analyse de ce phénomène de sportivisation témoigne d’un changement important dans l’histoire des pratiques ascensionnistes. L’escalade ou l’alpinisme, qui ne constituaient globalement qu’une seule et même discipline jusque dans les années 1960-1970 (Hoibian, 1995), sont toujours restés à l’écart des valeurs du monde sportif traditionnel, dans une logique de distinction en se constituant comme des « sports à part » (Hoibian, 2000). En effet, même si des rivalités ont toujours existé entre cordées, elles ne se sont jamais inscrites dans le cadre d’un modèle compétitif fédéral réglementé et standardisé. Pour les adeptes de la verticale, leur activité était « tellement plus qu’un sport » (Bonington, 1997, vii). Ainsi, il est possible d’affirmer que la dialectique identification-différenciation au monde des sports compétitifs s’est révélée comme un enjeu permanent de la construction identitaire des pratiques ascensionnistes sur un plan historique.

3 Dans une première phase, au cours des années 1970, l’escalade libre tend à s’autonomiser vis-à-vis de l’alpinisme et à s’affirmer comme une discipline à part entière (Hoibian, 1995). Pour les grimpeurs de cette époque attachés aux valeurs hédonistes et anticonstitutionnelles héritées de la révolution culturelle de mai 1968, il n’est alors pas envisageable d’instaurer des compétitions officielles. Ainsi, dans un premier temps, l’escalade s’autonomise mais demeure un « sport à part ».

4 Cette orientation « non compétitive » n’est donc pas sans fondement comme en témoignent les enjeux sociaux et la logique de distinction qui ont structuré l’histoire des pratiques ascensionnistes. Cependant, suite à la pénétration de la culture « fun » (Loret, 1995) dans le milieu de la grimpe, le développement de l’offre compétitive, de ses règles et espaces formalisés, la reconnaissance du statut de sportif de haut niveau, la création d’un poste de Directeur technique national (DTN) à la fin des années 1980 sont autant d’indicateurs tendant à démontrer le rapprochement de l’escalade avec les normes du sport compétitif.

5 Néanmoins, cette mutation a provoqué de vifs débats parmi les pratiquants et dirigeants fédéraux. En effet, en 1983, un sondage réalisé par la FFM révèle que parmi les grimpeurs qui ont renvoyé le questionnaire, 55 % sont hostiles à l’apparition des compétitions, 27 % sont réservés et seulement 13 % y sont favorables (Cahiers FFM, 1984, 4.) [1]. Pourtant, deux ans plus tard, la toute nouvelle FFE, passant outre les sentiments majoritaires apparents, se lancera dans l’organisation des premières rencontres compétitives.

6 Deux principales questions se posent alors. Comment une pratique enracinée dans la culture distinctive de l’alpinisme et défendant une éthique « hédoniste » dans les années 1970, a-t-elle pu glisser vers une certaine orthodoxie sportive ? Et comment certains responsables fédéraux ont-ils pu mettre en place les compétitions alors que la majorité de leurs mandants y étaient opposés ?

7 Des éléments de réponse à la première de ces questions ont déjà été apportés par des auteurs comme Hoibian (1995), De Léséleuc (1997) ou Aubel (2002) qui ont mis en lumière les enjeux économiques et culturels qui ont traversé le processus identitaire de l’escalade. Le travail présenté ici s’appuie sur ce corpus de connaissances déjà constitué mais en proposant une problématique différente susceptible d’enrichir la compréhension de la sportivisation de l’escalade. En effet, il se situe plus particulièrement dans le cadre d’une sociologie politique du sport. L’objectif est d’analyser le fonctionnement de l’espace fédéral, du jeu qui s’y déroule et de mesurer son influence sur l’évolution de l’offre sportive de l’activité dans sa dimension compétitive.

8 Dans ce cadre, l’intérêt de cette étude se situe à deux niveaux : contribuer à une meilleure compréhension des pratiques des adeptes de la verticale d’une part, et de l’activité sociale que constitue la politique fédérale d’autre part.

2 – Cadre d’analyse et hypothèses

9 Au regard de ces questionnements et objectifs de recherche, le concept de « champ des pratiques ascensionnistes » (Hoiban, 1995, 2000) a été mobilisé afin de saisir les positions, les conflits et les relations d’interdépendance qui ont structuré la mise en place de l’offre compétitive fédérale en matière d’escalade. Cependant, Pociello (1989, 14) définit l’escalade comme un champ social au sens de la sociologie de la culture de Bourdieu. Or, suivant l’interrogation d’Aubel (2002), existe-t-il un champ de l’escalade distinct de celui de l’alpinisme ? Si tel est le cas, et si l’on se réfère aux éléments théoriques qui s’articulent autour du concept de champ, il existerait un « effet de champ » entre l’espace de l’escalade et celui de l’alpinisme, ce qui signifierait qu’alpinistes et grimpeurs se constitueraient en deux groupes distincts jouant chacun leur propre jeu. Dès lors, les règles et le droit d’entrée propres à chacun de ces espaces seraient eux aussi spécifiques. Autrement dit, s’il existe un champ de l’escalade, les alpinistes ne participeraient plus à la lutte pour la définition légitime de l’activité. Or, dans l’élaboration de la recherche présentée, il s’est avéré que ce fut l’ensemble du monde montagnard qui s’est mobilisé autour du problème des compétitions malgré le développement récent de l’autonomie des grimpeurs libéristes. Dans ce sens, il a semblé plus adapté de conserver le concept de « champ des pratiques ascensionnistes ».

10 L’analyse en termes de champ procède en trois étapes articulées entre elles (Bourdieu, 1992). Tout d’abord, il s’agit d’étudier la position du champ considérée par rapport à celle du pouvoir et donc de questionner son autonomie. En effet, dans son travail sur « les politiques sportives en France », J.-P. Callède (2000) souligne la nécessité de prendre en compte le rôle fondamental de l’État dans l’organisation des activités sportives. Ce dernier, conçu comme un « méta-champ » (Bourdieu, 1992, 86-87), est doté d’un capital étatique le rendant capable d’exercer son pouvoir sur les différents champs qui l’entourent et dont il se préoccupe. Le champ sportif n’est pas externe à ce processus, comme en témoigne l’existence d’un ministère de la Jeunesse et des Sports (MJS) chargé de la tutelle des fédérations sportives (Chifflet, 1990 ; Miège, 2000). Dans ce cadre, il peut être postulé que les pouvoirs publics, par le biais de leurs prérogatives (accords de statuts ou de subventions, intervention d’un médiateur politique…), ont participé à la structuration de l’offre compétitive d’escalade. L’interrogation est portée sur le degré d’autonomie des offreurs fédéraux vis-à-vis de la politique étatique. De plus, il est nécessaire de souligner que l’autonomie d’un champ est un enjeu de lutte qui participe à la structuration du champ (Defrance, 1995, 2000). Dès lors, la mise en lumière des enjeux relatifs à l’autonomie du champ des pratiques ascensionnistes vis-à-vis de la politique sportive étatique sont susceptibles de participer à la compréhension des stratégies fédérales en matière d’escalade.

11 Parallèlement à ces données politiques, les enjeux économiques qui ont traversé le champ des pratiques ascensionnistes n’en demeurent pas moins des éléments déterminants pour en comprendre le fonctionnement. En effet, si « la pénétration du sport par les phénomènes économiques est une tendance lourde de la vie sociale aujourd’hui » (Andreff & Nys, 1986, 1), le monde des libéristes est concerné par ce processus, comme l’ont montré Aubel et Ohl (2004) et les données communiquées par M. Raspaud (1991) : le nombre des Structures artificielles d’escalade (SAE) est passé de 25 en 1981 à 600 en 1989, les ventes des chaussons ainsi que celles des cordes ont été multipliées par trois entre 1984 et 1988. Le développement d’un tel marché, auquel participent bon nombre de fabricants français de matériel, incite à postuler l’existence d’enjeux économiques dans l’évolution de l’offre de l’escalade. Dans ce sens, il peut être fait l’hypothèse que l’instauration de la compétition, la symbolique portée par les nouveaux champions désignés ont constitué un support potentiel pour les stratégies économiques des dirigeants fédéraux visant une meilleure santé financière de leur organisation ou pour les agents commerciaux privés qui pouvaient y voir un vecteur de communication vers un plus large public. Ainsi, ce sont les rapports entretenus entre les agents fédéraux et ceux du secteur privé qui sont ici soulevés. Comme précédemment avec les enjeux politiques, c’est le degré d’autonomie des activités de grimpe qui sera envisagé mais cette fois vis-à-vis de l’influence plus ou moins prégnante de la sphère marchande.

12 La deuxième étape de l’analyse consiste à établir « la structure objective des relations entre les positions occupées par les agents ou les institutions qui sont en concurrence dans le champ » (Bourdieu, 1992, 80) en centrant l’analyse sur la place de l’espace fédéral dans cet ensemble. Or les résultats du sondage réalisé en 1983 (cf. supra), qui déclare la majorité des grimpeurs hostiles à la compétition, incitent à s’interroger sur le degré de représentativité de la fédération dans la définition de sa politique sportive lorsqu’elle organise trois ans plus tard sa première compétition officielle. Dans leur statut, les fédérations présentent une mission de délégation qui « correspond au transfert de pouvoir par lequel un mandant autorise un mandataire à signer à sa place, à agir à sa place, à parler à sa place, lui donne une procuration, c’est-à-dire la plena potentia agendi, le plein pouvoir d’agir sur lui » (Bourdieu., 1984, 49). Si, sur le site Internet de la fédération, il est déclaré : « La FFME, votre fédération, est un peu tout ce que vous êtes et tout ce que vous faîtes. », en a-t-il été ainsi lors de la mise en place très controversée des compétitions ? La problématique issue de cette question porte sur la dialectique entretenue entre le marché de l’offre et de la demande sportive. Au regard des faits exposés concernant la sportivisation de l’escalade, il est possible de défendre l’hypothèse selon laquelle l’offre fédérale en matière de compétition a été déterminée par une logique spécifique en partie indépendante des prises de position majoritaires des grimpeurs. L’espace de l’offre sportive pourrait alors trouver une certaine forme d’homologie avec le champ politique tel que le conçoit P. Bourdieu (2000, 35) et qui peut se définir comme « un microcosme, une sorte de monde séparé, de monde à part, fermé sur lui-même, en grande partie, pas complètement, sinon la vie politique serait impossible […]. C’est dans ce petit monde, ce microcosme que se joue un jeu tout à fait particulier dans lequel s’engendrent des intérêts particuliers. » La mise en évidence de cette homologie serait alors synonyme de l’existence d’enjeux spécifiques à l’espace fédéral ; enjeux qui pourraient rendre compte de l’intelligibilité des stratégies et des décisions des dirigeants lorsqu’elles sont soumises à des contraintes et des objectifs éloignés des revendications des mandataires. Dans ce sens, l’analyse du degré d’autonomie du sous-champ où s’articulent les positions des dirigeants fédéraux au sein du champ des pratiques ascensionnistes et de l’ensemble du système sportif, se présente comme un axe primordial pour saisir les fondements de l’offre compétitive.

13 La dernière étape de la démarche consiste à analyser les habitus des agents à l’intérieur du champ « en tant que principe générateur et organisateur de représentations et de pratiques » (Bourdieu, 1980, 88) et à les mettre en relation avec la trajectoire des agents à l’intérieur du champ. Il s’agit de souligner le rôle important des cultures qui se confrontent au sein du champ de l’escalade et plus spécifiquement à l’intérieur de la fédération qui est, elle aussi, productrice de « micro-cultures » spécifiques (Gasparini, 2000). En effet, « c’est toute l’histoire du jeu, tout le passé du jeu qui est présent dans chaque acte du jeu » (Bourdieu, 1984a, 116). Un dirigeant d’une soixantaine d’années ayant pratiqué et défendu l’alpinisme « classique » n’a certainement pas la même représentation de la compétition d’escalade qu’un collègue d’une quarantaine d’année qui a consacré sa vie sportive quasi exclusivement à l’escalade libre. Si cet exemple peut paraître quelque peu réducteur et simpliste, l’hypothèse de l’existence de clivages culturels au sein de la fédération est néanmoins plausible lorsque l’on considère sa scission en 1985. C’est donc dans ce cadre d’une « histoire politique et culturelle » (Sirinelli, 1999) qu’il est possible d’appréhender, dans le débat sur les compétitions, les différentes visions du monde, cultures et forces en présence en tant que pôles antagonistes structurant le jeu du champ de l’escalade.

3 – Méthodologie

14 Suivant l’ensemble de cet éclairage théorique, la méthodologie employée s’est basée sur des sources écrites ainsi que des sources orales. Elles ont toutes deux fait l’objet d’une analyse de contenu construite à partir des axes problématiques développés précédemment : le degré d’autonomie du champ des pratiques ascensionnistes vis-à-vis des sphères politique et économique, le degré d’autonomie de l’espace fédéral au sein du champ des pratiques ascensionnistes et l’identification des clivages culturels qui se sont manifestés dans la lutte pour la définition légitime de l’escalade. La grille de lecture issue de la coordination de ces axes connectés entre eux a permis d’analyser les faits et discours traitant des compétitions d’escalade et plus largement de l’identité de la discipline dans la période étudiée. De cette manière, il a été possible de rendre compte de la dynamique du champ des pratiques ascensionnistes et de ses enjeux à travers la mise en lumière des différentes prises de position des agents qui, dans leur interdépendance, ont structuré la genèse de l’offre compétitive fédérale.

15 Les documents écrits mobilisés sont constitués des Cahiers de la FFM au nombre de 9 entre 1981 et 1987 et dans lesquels sont présentées les activités qui se sont déroulées au sein de la vie fédérale pendant cette période. Puis ont été consultées la revue La Montagne et Alpinisme (MA, revue officielle du Club alpin français, CAF) et les revues privées Montagnes Magazine (MM) et Alpinisme et Randonnée (A&R).

16 Suite à la collecte des informations rassemblées dans ce corpus, il a été fait appel, à titre complémentaire, à la méthode biographique en tant qu’« instrument de documentation historique » (Peneff, 1990, 6). Une série de quatre entretiens semi-directifs a donc été réalisée auprès d’agents ayant été repérés dans les sources écrites comme occupant une position déterminante dans la genèse de l’offre fédérale. Ces derniers sont B. Renard, président de la Commission escalade au sein de la FFM (1982-1985), président du GHM (1980-1984), puis président de la FFE (1985-1987), J.-P. Fésafond, président du GHM (1984-1990) et membre de la direction nationale du CAF au cours des années 1980, Y. Ballu, chargé de mission pour les activités de montagnes au sein du ministère de la Jeunesse et des Sports durant l’ensemble de la période étudiée, et enfin P. Traynard, président de la FFM (1981-1985). C’est suite à l’éviction de ce dernier que s’est créée la FFE dissidente.

4 – Résultats

17 L’expérience française en matière de compétition d’escalade débute à Yalta en URSS En janvier 1980, Mikhail Anoufrikov, secrétaire général de la fédération d’alpinisme de l’URSS est en visite en France où il déclare à propos d’escalade : « Nous désirons que soient créés des championnats internationaux » (A&R, 15, janvier 1981, 17). Il invite alors la FFM à envoyer une délégation de grimpeurs français en Crimée pour participer à une compétition à laquelle les Soviétiques s’adonnent déjà depuis plusieurs années. En 1982, la Commission escalade accepte cette invitation et y envoie trois des meilleurs grimpeurs. Émergent alors de vives polémiques au sein du monde alpin quant au bien-fondé de la pratique compétitive. Ce débat va mettre en lumière la structure des différentes cultures alpines qui, en entrant en concurrence, ont participé à la lutte pour la définition légitime de l’escalade. Ces confrontations culturelles ont révélé la prégnance des enjeux politiques et économiques dans l’élaboration de l’offre compétitive. C’est donc l’ensemble de ces prises de position interdépendantes et de leurs déterminants qu’il faut désormais saisir.

• La compétition et ses vertus

18 La Commission fédérale de montagne de la FSGT se prononce en 1983 pour la compétition organisée, car il s’agit, selon elle, du « seul moyen de tuer le mythe du surhomme alpiniste qui empêche beaucoup de jeunes d’accéder à ce sport » (MM, 49, mars 1983, 22). Cette prise de position voit dans l’escalade et la mise en place des compétitions une porte d’entrée pour un large public vers les activités de montagne et la possibilité de mettre fin à la domination du modèle de l’alpinisme classique, qui véhicule une dimension élitiste et distinctive. Ce dernier est assimilé à une discipline qui impose un droit d’entrée important pour ses pratiquants qui doivent posséder un capital culturel particulier leur permettant de déchiffrer les codes qui structurent l’activité. La FSGT, en poursuivant son objectif de vulgarisation des loisirs montagnards, estime que les performances, les critères d’excellence de l’escalade doivent être clarifiés pour être compris par le plus grand nombre. Dans cette logique, le spectacle, l’ouverture au public, les classements générés par les compétitions, contrairement aux règles informelles et codées de l’émulation, sont l’occasion de briser les barrières culturelles du milieu alpin. Ainsi, la FSGT se positionne sans ambiguïté en faveur des compétitions d’escalade qui, à ses yeux, s’apparentent à une alternative face à la logique séculaire distinctive et donc sélective de l’univers des pratiques ascensionnistes.

19 Avant l’instauration des premières compétitions, la FSGT est quasiment le seul groupement formel qui se soit positionné ouvertement en leur faveur. Cependant, certains des arguments qu’elle a avancés se sont retrouvés dans les propos de quelques agents isolés mais surtout dans le discours de Y. Ballu, représentant du MJS, qui lui aussi a participé activement au débat dans les colonnes de la presse spécialisée. En 1982, à son retour de Yalta, où il a accompagné les grimpeurs français, il déclare : « L’escalade n’est jamais qu’un sport comme les autres » (MM, 45, novembre 1982, 34). La même année, il publie un rapport dans lequel est évoquée la possible habilitation de la FFM pour organiser des compétitions d’escalade. Les arguments qu’il développe alors dans le but de légitimer les compétitions gravitent autour de plusieurs thèmes.

20 Tout d’abord, elles sont l’occasion, de par leurs potentialités spectaculaires et médiatiques, d’ouvrir le microcosme des grimpeurs vers une plus large population, bref de développer le capital symbolique de l’activité au sein de l’espace des sports : « Ça aussi, c’est une incitation, une opération de promotion ! » (MM, 36, janvier 1982, 31). De plus, il voyait dans la compétition la possibilité pour les grimpeurs de haut niveau d’aller vers une forme de professionnalisation leur permettant de se consacrer exclusivement à leur passion, grâce notamment aux ressources financières dégagées par les sponsors et à l’obtention du statut de sportif de haut niveau. Ce dernier est d’ailleurs revendiqué par la Fédération pour l’escalade mais aussi pour l’alpinisme et les expéditions à partir de 1983. Or les Pouvoirs publics rejettent cette demande un an plus tard, « avec la remarque que l’escalade, notamment en raison de la participation à la compétition de Yalta, pourrait être plus facilement acceptée que les deux autres disciplines » (Cahiers FFM, décembre 1984, 6). Cette réponse met en lumière un des critères fondamentaux de l’aide de l’État en matière d’activités physiques et sportives. En effet, sans présenter au préalable des compétitions formalisées, une discipline ne peut bénéficier du statut de sportif de haut niveau. B. Renard, président de la Commission escalade, l’avait bien compris lorsqu’il relate les propos qu’il tenait lors des réunions du comité directeur de la FFM : « Si on y croit, à l’escalade, c’est un statut qu’il faut obtenir du ministère pour les escaladeurs mais il faut des compets » (Renard, entretien, 2002). D’ailleurs, le discours de Y. Ballu est éloquent à ce sujet : « L’État accepte de mettre la main à la poche parce qu’on considère que l’athlète qui consacre une partie de sa vie à acquérir un niveau d’excellence dans sa spécialité, on lui doit quelque chose. Pourquoi ? Parce qu’il nous rapporte des médailles. C’est tout bête » (Ballu, entretien, 2002). Or le modèle de l’émulation propre à l’escalade libre, selon l’orientation hédoniste, ne pouvait répondre à ces exigences.

21 Ainsi, même si, selon Y. Ballu, le problème de la compétition est « un débat éthique dans lequel l’État n’a pas à intervenir » (MM, 46, décembre 1982, 6), les prises de position du ministère par son intermédiaire ainsi que les modalités d’attribution des aides aux sportifs de haut niveau, basées exclusivement sur le critère compétitif, sont autant d’éléments pour considérer l’État comme une institution qui participe au jeu du champ des pratiques ascensionnistes. En effet, les Pouvoirs publics n’ont certes pas pris part directement aux prises de décisions fédérales mais leur influence ne peut être négligée. Cette dernière témoigne donc de la relativité de l’autonomie du champ des pratiques alpines vis-à-vis du champ du pouvoir étatique.

22 Ainsi, à partir des prises de position respectives de la FSGT et du MJS, ont été dégagés les fondements et principaux arguments qui ont structuré les discours et les stratégies en faveur des compétitions d’escalade. Cependant, dans la première moitié des années 1980, cette vision du monde de la grimpe est bien loin de faire l’unanimité dans le milieu montagnard, où sont encore nombreux ceux qui se déclarent hostiles à toute réglementation sportive de leur discipline.

• « Le manifeste des 19 » : un symbole du refus de la compétition

23 « Le manifeste des 19 » (A&R, 75, mars 1985, 12) est un texte signé par 19 grimpeurs de haut niveau en 1985. Alors que les premiers projets de compétition en France voient le jour, il symbolise les prises de position adoptées par leurs opposants les plus radicaux. Sur le thème du spectacle et de sa capacité à faire connaître la discipline auprès du grand public, les signataires de ce texte soulignent les risques d’appauvrissement de l’identité de l’escalade dans la mesure où, pour « être connue à grande échelle, il faut à la compétition un paramètre de mesure facilement compréhensible par le plus grand nombre. […] L’escalade moderne est trop complexe (libre, à vue, travail, solo, etc.) pour porter des jugements définitifs » (A&R, 75, mars 1985, p.12). Suivant cette vision, les non-initiés sont donc perçus comme un public ne disposant pas de la culture nécessaire pour pouvoir apprécier à leur juste valeur les réalisations des grimpeurs. Dans ce sens, la compétition, en tant que tentative de vulgarisation, est apparentée à un danger pour la conservation de la richesse de la discipline. Toutes les mesures susceptibles d’être prises pour mettre en spectacle l’activité et la rendre accessible aux émotions des profanes se présentent alors comme une atteinte aux fondements de la discipline.

24 De plus, dans le discours des opposants à la compétition, c’est la place de l’escalade au sein de l’espace des activités physiques qui est mise en jeu. La vision défendue est celle « d’une escalade comme refuge face à certains archétypes de notre société, comme opposition à tous ces sports jugés, arbitrés, chronométrés, officialisés et trop sournoisement étatisés » (A&R, 75, mars 1985, 12). Les défenseurs de cette position refusent que leur activité se transforme en « un sport comme les autres », synonyme pour eux de règles rigides, d’athlètes dopés, de « magouilles » financières, etc. Ils revendiquent l’adjonction du qualificatif « libre » à leur discipline, comme le montre le courrier d’un lecteur d’Alpinisme et Randonnée : « L’escalade me semble être un des derniers bastions de la liberté. Assez des organisateurs en mal de structures ! Pas de figures imposées, pas de performances stériles, pas de trophée, pas de normalisation, pas de stars ! Que l’on nous laisse les parcours improvisés, notre imagination, nos rêves… » (A&R, 52, février 1983, 20-21). Le modèle de l’émulation informelle et de l’escalade libre des années 1970, décrit par O. Hoibian (1995), est ainsi défendu dans une stratégie visant à conserver une distinction, considérée comme l’essence de l’activité, vis-à-vis des autres sports traditionnels, distinction qui atteint son paroxysme dans certains discours, comme celui de B. Fara, témoignant de la symbolique attachée aux compétitions organisées : « J’ai horreur des sports populaires, de l’aspect marchands de frites et compagnie. Le populo, c’est odieux ! » (MM, 52, juin 1983, 39).

25 Ainsi, à partir de l’analyse de ses deux positionnements antagonistes, il a été possible d’appréhender une partie des axes de force qui structurent le champ des pratiques ascensionnistes au niveau de l’« espace d’indécision » que constitue la compétition. Il s’agit désormais d’éclairer la position plus consensuelle qui s’est exprimée au sein de la commission escalade de la FFM.

• La compétition en débat au sein de la FFM

26 Dès sa constitution, la Commission escalade engage une réflexion sur l’éventuelle organisation de compétitions. Conjointement aux positions extrêmes telles que celles du « manifeste des 19 » et de la FSGT, elle développe, au début des années 1980, un point de vue « intermédiaire » qui considère l’apparition des compétitions comme inéluctable quelles que soient les vertus ou les perversions qu’elle est susceptible d’engendrer. Il s’agit de faire face à une certaine fatalité en adoptant une attitude de gestion et de contrôle du développement du phénomène. Cependant, cette conviction est loin de faire l’unanimité à l’intérieur de la FFM. Alors qu’elle détient l’habilitation du ministère depuis 1982 pour décerner le titre de champion de France, cette dernière ne mettra en place aucune compétition officielle avant 1985. Durant cette période, ce sont les rassemblements internationaux de haut niveau qui tiennent lieu de comparaison des performances entre grimpeurs, ceci, sans aucun règlement standardisé. Ils constituent un premier pas vers l’ouverture du monde de l’escalade aux spectateurs et vers la multiplication des échanges internationaux formels. Dans le processus de sportivisation de l’activité, ils peuvent être considérés comme l’étape qui précède la naissance des compétitions qui demeurent, entre-temps, un objet de réflexion et de débat au sein de la fédération.

27 En effet, en 1984, malgré les résultats du sondage cité plus haut, le comité de direction de la FFM vote en faveur de l’organisation de compétitions. Cette décision provoque aussitôt de vives réactions qui accusent la fédération de ne pas assurer sa mission démocratique de représentativité. Or il est exact que les raisons de la décision fédérale ne s’appuient pas sur la prise en compte des motivations des pratiquants. B. Renard s’est exprimé clairement sur ce point : « Dès lors qu’elle [la fédération] entendait s’intéresser à l’escalade, c’était une nécessité d’être offensif là-dessus, de conduire le mouvement plutôt que de le subir. Parce que le subir, ça voulait dire tout simplement un couple sponsors-médias, échappant à tout contrôle fédéral » (Renard, entretien, 2002). En fait, les orientations politiques fédérales ont été structurées par des enjeux économiques et culturels auxquels participaient des agents qui, jusqu’alors, ne concourraient pas directement à l’offre en matière d’escalade. Les médias, les fabricants de matériel d’escalade, les magasins d’articles de montagne avaient tout intérêt, dans une stratégie à visée commerciale, à soutenir l’orientation vers la compétition susceptible à terme de constituer une vitrine publicitaire inédite (Aubel et Ohl, 2004). D’ailleurs, la fédération, dans ses Cahiers de décembre 1984, explicite cette concurrence d’un nouveau genre. Malgré une hostilité déclarée envers la compétition, elle souligne le risque d’un développement extérieur qui échapperait à son contrôle. Dans ce sens, elle établit un répertoire des manifestations prévues, en dehors de sa tutelle, pour l’année 1985. Ces dernières relèvent d’initiatives du Club alpin français (CAF), de l’UNSS, du Crédit Agricole, d’Antenne 2, de la Compagnie des guides de Chamonix, et représentent ainsi une menace pour le monopole fédéral en matière de gestion des activités de montagne.

28 En fait, si la fédération a résisté pendant plusieurs années dans son refus des compétitions, elle est allée à l’encontre de cette conviction première sous la pression de son environnement extérieur. L’escalade, au cours des années 1980, bénéficie d’une aura qui dépasse largement le microcosme montagnard comme en témoigne un article paru dans la revue Alpinisme et Randonnée (86, mars 1986, 26-31) sous le titre : « La montagne en proie au star système ». Patrick Edlinger y est décrit comme la figure emblématique de ce phénomène, celui que la majorité des Français connaissent comme le « blond aux cheveux longs qui grimpe en solo dans des voies dures » (A&R, 86, mars 1986, 27). De même, Lynn Hill, grimpeuse américaine de haut niveau, prête ses talents sportifs à la réalisation d’une publicité pour la marque automobile Volvo. Désormais, « les grimpeurs font vendre ». Dans ce contexte, il est clair que les enjeux économiques et les stratégies des agents du secteur marchand ont participé à l’évolution de l’escalade au cours des années 1980, notamment en encourageant la formalisation des compétitions. Ainsi, c’est en grande partie dans le but de préserver son autonomie par rapport aux nouveaux entrants dans le champ des pratiques alpines que la FFM a décidé en 1984 de prendre en charge le phénomène compétitif. Cependant, à cette date, les divisions sont fortes au sein de la fédération. Elles conduiront quelques mois plus tard à sa scission. L’analyse du processus qui a mené à cette décision controversée s’avère révélatrice de la logique complexe de la structuration de l’offre sportive qui ne s’élabore pas uniquement à partir des demandes et débats internes à la sphère des pratiquants. Dans le cas présent, elle s’inscrit dans un espace fédéral aux enjeux spécifiques, qui souvent sont perçus comme illégitimes par les profanes qui ne participent pas à son élaboration.

29 En fait, la genèse de l’offre compétitive a été rythmée par des enjeux culturels opposant les grimpeurs et leurs représentants par l’intermédiaire de leurs prises de position divergentes. Cependant, l’État et les agents du secteur privé ont eux aussi participé à la construction identitaire de l’escalade. En entrant dans le jeu de l’espace de production des loisirs sportifs, ils en ont modifié la structure. Ils ont alors engendré chez les dirigeants sportifs des stratégies de lutte pour préserver l’autonomie du champ des pratiques alpines. Or ce nouveau paysage du monde de l’escalade a fortement influencé l’organisation des futures compétitions et a été à l’origine d’importants conflits politiques à l’intérieur de la FFM, ceux-ci ayant entraîné sa scission. Il s’agit donc à présent, de se pencher sur un autre facteur explicatif des évolutions de l’escalade, à savoir, les orientations politiques en concurrence au sein de la Fédération.

• La FFM et la FFE : deux conceptions politiques opposées

30 En 1985, une compétition officielle sous forme expérimentale a eu lieu les 25, 26 et 27 mai à Vallon-Pont-d’Arc (Ardèche). Il faut attendre la création de la FFE, qui dépose ses statuts le 15 novembre 1985, pour voir se développer le phénomène sous son égide. Or cette instauration s’est inscrite dans une vive critique de la fédération traditionnelle, non seulement quant à la politique menée en matière d’escalade mais aussi de manière plus générale par rapport à son système organisationnel interne. À travers l’escalade et ses mutations, c’est la légitimité des stratégies des offreurs sportifs de l’univers montagnard dans leur ensemble qui a été mise en jeu au cours des années 1980.

31 Pour étudier les clivages qui ont structuré la scission fédérale, elle-même à l’origine du développement des compétitions, il s’agit d’analyser dans un premier temps les raisons qui sont au fondement de la création subversive de la FFE.

• La position hégémonique du CAF à l’intérieur de la Fédération : un élément déterminant de la scission

32 Selon P. Traynard (entretien, 2002), président de la FFM jusqu’en décembre 1984, cette dernière est sous la domination du CAF qui y impose ses choix politiques. En effet, en possédant 78 % de la population adhérente à la FFM en 1985, le CAF, de par ses représentants, dispose d’une large majorité lors des votes effectués au sein des assemblées générales de la Fédération. Cette situation n’est pas nouvelle car, dès la création « officielle » de la FFM en 1945, le CAF rassemble la grande majorité des effectifs du monde associatif des pratiques ascensionnistes (Malbos, 2004, 136). Or, jusqu’au début des années 1970, Lucien Devies, président de la FFM (1948-1973) et du CAF (1948-1951, 1957-963, 1966-1970) était parvenu à « gouverner en évitant les rapports majorité/minorité » (Malbos, 2004, 142) en limitant le nombre des mandats du CAF au sein de la FFM (Chapoutot 2004, 151). Cependant, suite à l’élection de J.-C. Meyer à la direction du CAF en 1973, cette règle est remise en question, ce qui provoque une crise au sein de la FFM liée à l’hégémonie cafiste (Malbos, 2004, 142). En 1981, c’est cette même « querelle d’appareil », telle que la désigne J. Malbos (2004, 142), qui est à l’origine de la formation du Groupe de liaison des associations de montagne (GLAM), qui regroupent des clubs de montagnes dont les effectifs ne peuvent rivaliser avec ceux du CAF. Les fondateurs du GLAM décrivent la Fédération comme « un machin » qui « malheureusement ne représente plus grand-chose » (MM, numéro spécial « Blocs et falaises », mai 1985, p. 26). Le discours de B. Renard (entretien, 2002) converge dans ce sens : « Le CAF, ce qu’il voulait, c’était une Fédération croupion qui soit le reflet direct de ses propres conceptions. » Cependant, il décrit P. Traynard comme ayant « une vision ambitieuse » de la politique sportive, en opposition avec le pouvoir des cafistes majoritairement hostiles aux transformations que nécessitaient les évolutions de l’activité. Or, en décembre 1984, à la quasi-surprise générale, P. Traynard n’est pas réélu, ce qui provoque la démission de la plupart des membres de la Commission escalade qui quittent la FFM. Pour eux, ce sont les représentants du CAF qui sont à l’origine de cette éviction. Dans l’analyse des raisons qui ont provoqué son rejet, le président sortant, qui avait encouragé, en accord avec la Commission escalade, la décision d’organiser des compétitions, rejoint cette position lorsqu’il déclare : « Le Club alpin était encore dominé par des gens de l’ancienne génération où on faisait de l’alpinisme pur et dur, un sport gratuit dans lequel on n’attendait rien, et surtout pas une espèce de classement qui laisserait supposer qu’il y aurait des prix, etc. Ça n’est pas passé du tout. La vieille garde du Club alpin a poussé des gros cris et moi j’ai été battu sur ce point-là : les compétitions » (Traynard, entretien, 2002). Cet événement engendre une consternation chez des gestionnaires fédéraux de l’activité, qui décident alors de créer la FFE qui est placée sous la présidence de B. Renard. Ce dernier fait le constat suivant : « Il y avait le CAF qui pouvait bloquer toute décision de par son poids. Si on voulait représenter activement le monde escalade, il fallait passer à des statuts différents qui permettent à la nouveauté d’avoir un pouvoir de décision beaucoup plus grand. C’est là qu’il y a eu, non pas collusion, mais convergence d’intérêt entre les grands clubs, non CAF, et la vision que j’introduisais avec l’escalade qui, tous les deux, appelaient un mode de fonctionnement différent de la Fédération » (Renard, entretien, 2002). La FFE s’inscrit donc dans la contestation de l’hégémonie du CAF qui a œuvré à empêcher toute politique remettant en question les valeurs traditionnelles de l’association centenaire. Dans cette perspective, c’est logiquement que la plupart des membres du GLAM ont rejoint la FFE.

33 Ainsi, la scission fédérale qui se déroule sur le terrain de l’escalade, présente des fondements qui dépassent les simples préoccupations disciplinaires. En effet, elle est la manifestation d’un amalgame entre les débats sur les choix à prendre en matière d’escalade et ceux qui concernent plus généralement les orientations politiques d’une fédération légitime. Dans ce sens, la gestion du phénomène compétitif met en lumière les axes de clivage qui ont structuré le conflit entre deux conceptions de l’élaboration de l’offre sportive montagnarde : celle d’une FFM dominée par le CAF et celle de la FFE. Celles-ci peuvent être appréhendées dans leurs différences et leurs interactions, à travers les enjeux économiques et politiques, soulignés précédemment, qui, au cours des années 1980, ont restructuré le champ de l’escalade et donc appelé les dirigeants sportifs à se positionner envers eux.

• Les rapports avec le ministère de la Jeunesse et des Sports : un espace de désaccord

34 En janvier 1982, suite à la proposition de Y. Ballu d’obtenir auprès du MJS la création d’un poste de DTN, le comité directeur de la FFM déclare : « On peut dire que, si chacun estime indispensable de demander au ministère concerné un tel directeur, tout le monde y voit le risque d’une mise en cause de l’indépendance de la FFM vis-à-vis des pouvoirs publics » (Procès verbal du Comité directeur, séance du 23 janvier 1982, FFM Informations, avril 1982). Or il semblerait que cette position ait été conservée jusqu’à la création de la FFME qui connaît son premier DTN uniquement à la fin des années 1980. D’ailleurs, J.-P. Frésafond, président du GHM, dirigeant du CAF et de la FFM en 1985 déclare : « Ce qui est dramatique, c’est la volonté de mainmise sur notre fédération, de Monsieur Ballu par le salarié Le Bian interposé. La FFM doit être dirigée librement par les responsables élus à tous les niveaux » (Frésafond, entretien, 2002). Lorsqu’il développe ce point de vue au cours de l’entretien, il souligne les perversions du professionnalisme des offreurs sportifs, dans la mesure où ce sont avant tout leurs objectifs de carrière qui conditionnent leurs initiatives apparentées à du « business ». Cette conception, qui est aussi celle défendue par le CAF dans les colonnes de sa revue La Montagne et Alpinisme, véhicule les valeurs du désintéressement et du bénévolat qui sont incompatibles avec le statut salarié des fonctionnaires du ministère.

35 À l’inverse, B. Renard (entretien, 2002) tient un tout autre discours : « La fédération, c’était quand même des amateurs bénévoles. Mais là, quand il faut aller au charbon, trouver les partenariats institutionnels adéquats, mener une politique de conseil sur la stratégie de construction de murs, ce n’est pas un bénévole qui vient. » Pour lui, les évolutions de l’escalade, l’émergence de nouveaux enjeux et agents à l’intérieur du champ nécessitent une expertise et une importante disponibilité pour les dirigeants sportifs dont la professionnalisation lui semble inéluctable. Or, si à l’intérieur de la FFM, cette démarche était bloquée par l’opposition des défenseurs des vertus du bénévolat, la FFE, dès sa création, a placé l’acquisition d’un personnel technique permanent comme une de ses préoccupations premières. Sa volonté d’engager une relation de partenariat avec le ministère de tutelle va dans ce sens. L’aide des cadres délégués par l’État est perçue comme une nécessité dans la gestion des activités de montagne.

36 Ainsi, deux modèles politiques sont en concurrence autour du clivage bénévolat-professionnalisme. L’autonomie du champ des pratiques alpines vis-à-vis des Pouvoirs publics est au centre du débat. Pour les uns, le ministère doit rester en dehors de la genèse de l’offre sportive ; c’est le point de vue dominant à l’intérieur du CAF et de la FFM. Pour les autres, représentés par la FFE, il est considéré comme un partenaire potentiel et comme une source de soutien bénéfique. Ces deux partis présentent par ailleurs des oppositions toutes aussi divergentes en ce qui concerne les rapports fédéraux entretenus avec le secteur privé.

• Logique associative et logique entrepreneuriale en concurrence

37 Comme souligné plus haut, l’escalade représente, au cours des années 1980, un marché commercial important qui s’inscrit dans le contexte de la « culture fun » (Bozonnet, 1987 ; Loret, 1995) et du « culte de la performance » (Ehrenberg, 2001). Des entreprises voient leur intérêt dans le mariage de leur image à celle de la grimpe. Pour la FFM, ce phénomène n’est pas pris en considération. Les premiers rassemblements de grimpeurs de haut niveau au début des années 1980 ne font appel à aucun sponsor. Leur financement est interne à la Fédération avec l’aide des subventions du MJS. Au contraire, la FFE, dès sa création, annonce sa volonté de recourir à des financements diversifiés incluant le sponsoring et les ressources issues de la vente de ses produits et prestations. De plus, elle souligne une position d’ouverture très large sur les médias. Elle se dote d’une attachée de presse et organise des compétitions qui voient se multiplier les partenaires privés. Les publicités tapissent les falaises ou les structures artificielles. Les maires des communes sont très intéressés pour accueillir ces manifestations qui sont source de promotion pour leur localité. La FFE s’ouvre donc au maximum de partenaires qu’attire le produit escalade, ceci dans un but de développement de la discipline. Elle se situe dans une stratégie entepreneuriale inédite dans l’univers des pratiques montagnardes. Mais, selon B. Renard (entretien, 2002), « qu’une fédération se mette à jouer un rôle médiatique, qu’on commence à pactiser avec les sponsors qui étaient le diable quand même, qu’on crée des compétitions, tout ça, c’était absolument opposé au système de valeurs du CAF ». Ce dernier désigne le danger de transformer l’escalade en « valeur marchande ». Une fois de plus, c’est la culture du désintéressement qui est mise en avant. Elle sous-entend la préservation du microcosme alpin et de son autonomie, synonyme de fermeture du milieu associatif sur lui-même.

38 En fait, l’apparition des compétitions d’escalade a mis au jour des enjeux économiques qui ont affecté les stratégies des offreurs fédéraux qui, selon leur position, y ont vu, soit une menace des fondements identitaires des pratiques de montagne, soit une opportunité pour leur développement. Les positions occupées respectivement sur ce point par la FFM et la FFE (cf. tableau 1) témoignent des axes de force qui sont intervenus dans la structuration du champ des pratiques ascensionnistes au niveau des orientations politiques de l’offre sportive.

Tableau 1

FFM et FFE : deux politiques fédérales antagonistes

Autonomie et fermeture
Stratégie de conservation
Ouverture vers l’environnement
Stratégie de subversion
Culture du bénévolat (non aux fonctionnaires dans les associations sportives).
L’État est un partenaire qui doit rester extérieur au champ.
Fermeture au secteur économique (sponsors, médias).
Une fédération dirigée par le CAF.
Une fédération au service de la tradition alpine et cafiste.
Logique associative traditionnelle.
Nécessaire professionnalisme des dirigeants et cadres sportifs.
L’État est un partenaire intégré au champ.
Ouverture affirmée vers les investisseurs privés.
Une fédération qui représente toutes les associations qui la constituent.
Une fédération à la politique ambitieuse orientée vers le changement.
Logique entrepreneuriale.
FFM et CAF FFE, GLAM

FFM et FFE : deux politiques fédérales antagonistes

Conclusion

39 Au regard de l’ensemble de ces résultats, la sportivisation de l’offre d’escalade a été structurée principalement par des enjeux culturels, économiques et politiques où différents groupes d’agents porteurs de façons de voir le monde alpin propres se sont affrontés autour du problème des compétitions. La tradition distinctive de « sport à part » des pratiques ascensionnistes a été remise en question par les promoteurs de l’orthodoxie sportive. De cette lutte, ce sont ces derniers qui, malgré leur situation minoritaire, sont sortis vainqueurs par la création des compétitions en 1985 et leur développement au sein de la FFE de 1986 à 1987. Or, s’il n’est pas possible de conclure à une pénétration des normes sportives chez tous les grimpeurs, le segment compétitif de l’offre a continué son développement dans les années suivantes. En effet, 1988 voit se dérouler les premiers championnats de France et la mise en place d’un circuit de coupe du monde. De même en 2001, l’Union internationale des associations d’alpinistes (UIAA) se dote d’un conseil nommé International Competition Climbing (ICC), dont l’objectif est d’œuvrer pour l’introduction de la discipline aux Jeux Olympiques. La cascade de glace et le ski-alpinisme deviennent eux aussi compétitifs. Ainsi, il semblerait que ce soit l’évolution de l’escalade qui ait constitué la première marche du processus de sportivisation des pratiques ascensionnistes.

40 Pour appréhender ce phénomène, la question de l’autonomie en tant qu’enjeu de lutte au sein du champ a permis de repérer les changements de structure de celui-ci et leurs fondements avec l’entrée ou les tentatives d’entrée de nouveaux agents qui ont modifié les règles du jeu et donc participé à l’évolution identitaire de la grimpe. Cette problématique s’est révélée heuristique pour saisir l’espace d’interaction dans lequel s’est insérée la genèse de l’offre compétitive d’escalade. Autrement dit, elle a permis de mieux saisir la nature et l’influence des relations qu’a entretenues l’offre d’escalade avec les champs économique, politique et avec l’ensemble du champ des pratiques ascensionnistes.

41 Tout d’abord, les enjeux relatifs à l’autonomie du champ des pratiques ascensionnistes ont pu être observés dans les prises de position des agents du champ vis-à-vis de la pénétration d’enjeux économiques inédits. Ces derniers se sont révélés primordiaux en s’amalgamant avec le développement d’une conception entrepreneuriale de l’organisation fédérale en tant que « paradigme de performance », phénomène qui, selon A. Ehrenberg (2001), a touché l’ensemble des sphères sociales et le paysage imaginaire français au cours des années 1980. Dans ce sens, l’évolution compétitive de l’escalade a été un des terrains où se sont révélés les clivages entre la culture traditionnelle sportive avec ses valeurs de désintéressement, bénévolat, etc., et les revendications de professionnalisation et d’ouverture au marché économique du milieu associatif. Cette configuration conflictuelle a structuré l’identité de l’univers montagnard non seulement en jouant un rôle important dans l’apparition des compétitions mais aussi dans la réorganisation de l’offre fédérale en 1987, avec la mise en place de la FFME, qui met fin à la scission tout en laissant pénétrer en son sein les professionnels et les agents du MJS.

42 D’ailleurs le MJS, par l’intermédiaire de ses prérogatives (statut haut niveau, habilitation, mise à disposition de personnel) et de son représentant Y. Ballu, a participé à la genèse de l’offre compétitive. Son intervention a suscité des prises de position dont l’enjeu principal était le degré d’autonomie du champ des pratiques ascensionnistes vis-à-vis du champ du pouvoir. Cet enjeu a été lui aussi déterminant pour comprendre les conflits qui ont mené à la scission fédérale.

43 Ce point souligné, les déterminants de l’apparition des compétitions peuvent être complétés par l’analyse du caractère spécifique de l’espace fédéral, qui est doté d’une axiomatique originale et particulière dont les rouages et les enjeux sont parfois peu perceptibles pour les profanes. Les relations avec le ministère, les sponsors, les jeux de pouvoirs internes illustrés par le problème d’hégémonie du CAF, se présentent comme autant d’éléments qui témoignent de la spécificité ou de l’autonomie relative du jeu fédéral. La fédération peut alors se définir comme une sphère relativement autonome dans l’univers sportif ; autonomie relative qui a permis d’expliquer les décalages entre les décisions des dirigeants et les revendications des grimpeurs concernant la légitimité des compétitions.

44 Ainsi, même si cette recherche centrée sur l’espace des dirigeants sportifs ne prétend pas à la mise en lumière exhaustive des facteurs liés à la sportivisation de l’escalade, elle a tenté d’éclairer les mécanismes de fonctionnement de l’offre et de la demande en matière d’activités physiques et sportives. Or, comme le souligne O. Aubel (2002), le processus de sportivisation des sports dits californiens ne touche pas uniquement le milieu de la grimpe. La planche à voile, le snowboard sont devenus des disciplines olympiques, le vol libre possède son équipe de France… Dans ce sens, l’analyse du cas de l’escalade, dans ses spécificités, pourrait aussi permettre de participer à l’éclairage de l’évolution de ces pratiques.

Notes

  • [1]
    Les modalités de réalisation de ce sondage sont détaillées dans les Cahiers FFM de 1984 (p. 4). Cependant, il ne s’agit pas ici d’analyser la validité des résultats quant à leur représentativité. Ces données de terrain témoignent uniquement des sources d’information dont disposaient les dirigeants fédéraux pour percevoir l’opinion de leurs mandants quant à la légitimité des compétitions dans le monde de l’escalade.
Français

Résumé

Au cours des années 1980, sous l’impulsion des instances fédérales, l’escalade française voit la création de ses premières compétitions malgré une apparente opposition massive de ses pratiquants ; elle rompt ainsi avec sa tradition distinctive qui l’avait jusque-là tenue à l’écart des valeurs de l’orthodoxie sportive. Or ce processus de sportivisation a été structuré par de vifs conflits au sein du monde montagnard et notamment au niveau de l’offre institutionnelle. Avec la création en 1985 de la dissidente Fédération française d’escalade à la vision entrepreunariale, la Fédération française de la montagne défendant sa traditionnelle logique associative est scindée. Deux conceptions politiques de la gestion des pratiques alpines s’opposent et s’amalgament avec le débat sur la légitimité des compétitions. Ainsi, à travers l’analyse de ce phénomène et des enjeux culturels, politiques et économiques qui l’ont traversé, il s’agit non seulement d’apporter des connaissances relatives à l’évolution identitaire de l’escalade mais aussi de mieux comprendre le fonctionnement de l’offre fédérale en tant qu’espace aux enjeux spécifiques susceptibles d’expliquer les décalages éventuels entre les aspirations respectives de l’offre et de la demande sportive.

Mots-clés

  • escalade
  • compétition
  • offre sportive
  • champ
  • autonomie
English

Abstract

During the 1980’s, under the aegis of the mountain sports federations, the first French climbing competitions were set up despite a visible and massive opposition of climbers. So, climbing has broken with its distinctive and main traditional sporting values. Then, in the mountain world and notably in the institutional supply, some animated conflicts had structured the genesis of this sportification process. In 1985, the dissident Fédération française d’escalade was created to claim an enterprise management while the Fédération française de la montagne, defending a traditional associative policy, split up. Two political conceptions of climbing management had come up against each other and had merged in the debate about the legitimacy of competitions. Therefore, by the way of the analysis of this phenomenon and its cultural, political and economic stakes, the aim of this study is, on the one hand to develop knowledge about the evolution of climbing identity and, on the other hand to understand better the working of federal supply as an area with specific stakes which are capable of explaining the potential gaps between the respective aspirations of sport supply and demand.

Keywords

  • climbing
  • competition
  • sports supply
  • field
  • autonomy
Deutsch

Zusammenfassung

In den 80er Jahren werden in Frankreich auf Veranlassung von Verbandsinstanzen die ersten Kletterwettkämpfe durchgeführt, trotz einer offensichtlich massiven Opposition der Aktiven. Das Klettern bricht damit mit seiner traditionellen Sonderstellung, die es bisher von den orthodoxen Werten des Sports fern hielt. Dieser Prozess der Versportung war durch lebhafte Konflikte unter den Bergsteigern, besonders im Bereich institutioneller Angebote, gezeichnet. l’orthodoxie sportive. Mit der Gründung des abweichlerischen Französischen Kletterverbandes (Fédération Française d’Escalade) 1985, der eine unternehmerische Perspektive vertritt, wird der Französische Bergverband (Fédération Française de la Montagne), der die traditionelle Sichtweise des Vereins verteidigt, gespalten. Zwei politische Konzeptionen hinsichtlich der Verwaltung der alpinen Praktiken stehen sich gegenüber und vermengen sich in der Debatte über die Legitimität der Wettkämpfe. Bei der Analyse dieses Phänomens und den kulturellen, politischen und ökonomischen Machtkämpfen, die es begleiten, geht es nicht nur darum Kenntnisse zur Entwicklung der Identität des Kletterns beizutragen, sondern auch darum, das Verbandsangebot als ein Raum von spezifischen Kämpfen zu verstehen, die es ermöglichen eventuelle Abweichungen zwischen den jeweiligen Zielsetzungen von Angebot und Nachfrage im Sport zu erklären.

Schlagwörter

  • Klettern
  • Wettkampf
  • Sportangebot
  • autonomes Feld
Italiano

Riassunto

Nel corso degli anni 1980, sotto l’impulso delle istanze federali, la scalata francese vide la creazione delle sue prime competizioni, malgrado una apparente massiccia opposizione da parte dei suoi praticanti; essa rompe così con la tradizione distintiva che l’aveva fino a quel momento tenuta lontano dai valori dell’ortodossia sportiva. Ora, questo processo di sportivizzazione è stato strutturato da aspri conflitti in seno al mondo alpino e particolarmente a livello dell’offerta istituzionale. Con la creazione, nel 1985, della dissidente Fédération Française d’Escalade con una visione imprenditoriale, si scindeva la Fédération Française de la Montagne che difendeva la sua tradizionale logica associativa. Due concezioni politiche della gestione delle pratiche alpine si oppongono e si amalgamano con il dibattito sulla legittimità delle competizioni. Così, attraverso l’analisi di questo fenomeno e delle poste in gioco culturali, politiche ed economiche che l’hanno attraversata, si tratta non solamente di apportare delle conoscenze relative all’evoluzione identitaria della scalata ma anche di comprendere meglio il funzionamento dell’offerta federale in quanto spazio alle poste specifiche suscettibili di spiegare gli scostamenti eventuali tra le aspirazioni rispettive dell’offerta e della domanda sportiva.

Parole chiave

  • autonomia
  • campo
  • competizione
  • offerta sportiva
  • scalata
Español

Resumen

Durante los años 1980, bajo el impulso de la directiva federal, a pesar de una aparente oposición masiva de los practicantes, aparecen las primeras competiciones en la escalada francesa; rompe así con su tradición distintiva que hasta ahora la tenía apartada de los valores de la ortodoxia deportiva. Ahora bien, este proceso de « sportivisación» fue estructurado por vivos conflictos entre el mundo montañés y, mas precisamente, al nivel de la oferta institucional. Con la creación en 1985 de la disidente Federación Francesa de Escalada con una visión de empresa, la Federación Francesa de la Montaña defendiendo su tradicional lógica asociativa, se divide en dos partes. Dos concepciones políticas de la gestión de las prácticas alpinas se oponen y se funden con el debate sobre la legitimidad de las competiciones. Así pues, a través del análisis de este fenómeno y lo que está en juego a los niveles culturales, políticos y económicos, se trata no sólo de llevar conocimientos relativos a la evolución idéntitaria de la escalada sino también de comprender mejor el funcionamiento de la oferta federal como un espacio en el que lo que está en juego se revela específico y susceptible de explicar los posibles desfases entre las aspiraciones respectivas de la oferta y la demanda deportiva.

Palabras claves

  • escalada
  • competición
  • oferta deportiva
  • autonomia

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Aurélien Gloria
Michel Raspaud
Laboratoire SENS,
UFR-APS,
Université Joseph Fourier, Grenoble 1
BP 53
39041 Grenoble Cedex 9
Cette publication est la plus récente de l'auteur sur Cairn.info.
Mis en ligne sur Cairn.info le 01/02/2006
https://doi.org/10.3917/sta.071.0099
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