Le déclin du patriarcat au profit de rapports plus égalitaires entre les protagonistes du lien social continue d’étendre ses conséquences dans toutes les sphères de la vie humaine de nos sociétés dites « modernes ». Moins de domination des hommes sur les femmes, des pères sur les mères et les enfants, des patrons sur les ouvriers, etc. L’idéal démocratique d’une relation d’égal à égal quels que soient le sexe, le statut générationnel ou la condition sociale, est devenu l’horizon rêvé d’une harmonie enfin possible, y compris en famille. La négociation supplante la domination/soumission, l’affiliation l’institution, et le contrat l’autorité. Aussi le représentant traditionnel de cet ordre justement nommé « patriarcal », à savoir le père, dont l’homme revêt la parure bon gré mal gré, a-t-il mauvaise presse ! Exit le père chef de famille – nécessaire, autoritaire, dominateur : de celui-là, on peut se passer. Et le grand ménage a commencé il y a belle lurette : quand on a coupé la tête du roi, dira Balzac ! La patron est désormais un collaborateur ou un associé, le maître a la tête à l’envers (Stromae est le verlan de maestro) et l’enfant s’invite à la table des négociations !
Mais il se peut que nous ayons jeté le bébé avec l’eau du bain en évidant une place pour se débarrasser de celui qui l’occupait, mal, en supprimant la fonction pour rejeter celui qui l’incarnait, violemment. Et c’est alors que le père vient à manquer…
Les rêves d’émancipation n’ont pas de limite, qui mettent au rebut la personne du père à mesure que l’engendrement se libère de la nécessité de circonvenir aux exigences de l’accouplement hétérosexuel…