B.M. : Bonjour Daniel Zagury, et merci pour ce temps que vous nous accordez, tourné vers votre parcours, votre expérience, votre regard sur la psychiatrie. Pour commencer, une première question : comment vous est venue la vocation pour la psychiatrie ?D.Z. : Quand j’étais au Lycée, j’étais attiré par la biologie, pour des raisons quasi transféren- tielles. J’avais assisté en classe de troisième à une conférence de Jean Rostand, le fils d’Edmond Rostand, qui était le fameux « biologiste de la grenouille ». Dans les années 60, il était célèbre et il avait un tel talent, un tel humour, une telle passion communicative que le collégien que j’étais s’est dit qu’il allait faire de la biologie. J’avais à la fois des intérêts littéraires et scientifiques, mais je n’étais pas assez bon en math pour réussir une grande école scientifique, pas assez bon en lettres pour entrer à Normale Sup. Cette vocation croisée littéraire et scientifique m’a conduit vers la psychiatrie.
Je me suis tourné assez naturellement vers les études de médecine. Adolescent, je lisais Freud, cela me passionnait. Je pense que je n’aurais pas fait un très bon somaticien. Si je mobilise mes souvenirs d’étudiant, les urgences, le fait d’être en position imaginaire de pouvoir de vie ou de mort, cela m’angoissait trop. Il faut ajouter le bouillonnement de mai 1968, l’antipsychiatrie, les grands débats et Henri Ey. J’ai eu une rencontre manquée avec Henri Ey, avec lequel j’avais pris rendez-vous pour ma thèse, mais il est décédé à ce moment-là…