CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1Les conflits d’aménagement locaux liés à des projets de réalisation de nouveaux équipements n’ont rien de particulièrement nouveau [1]. Même si des questions se posent aujourd’hui quant à la radicalité de certains de ces conflits, ils traduisent un mouvement plus large et plus profond de contestation sociale territorialisée, qui reste vivace en France comme dans d’autres pays dits développés.

2À travers cette contribution, nous entendons montrer en quoi la participation telle qu’elle est entendue en général en France dans le domaine des projets d’aménagement – c’est-à-dire une participation publique destinée à favoriser l’expression des citoyens – reste une réponse certes souvent nécessaire, mais à tout le moins partielle et insuffisante dans le cadre de la gestion de situations (potentiellement) conflictuelles sur des enjeux territoriaux. C’est parce qu’elle constitue une réponse incomplète que la participation publique conduit à des insatisfactions.

3Les dispositifs de participation publique mis en place par les aménageurs [2] privés ou publics en réponse aux situations conflictuelles suscitent la méfiance de nombreux chercheurs et populations, en raison non seulement de la suspicion de manipulation qui pèse sur les porteurs de projets, mais aussi en raison d’une conception idéalisée de la participation publique, conçue essentiellement comme un débat d’idées qui ignorerait les nécessaires processus d’ajustement des intérêts et les arrangements comme résultats de concessions réciproques (Boltanski, Thévenot, 1991, p. 408). Or le processus de gestion d’une situation conflictuelle territoriale repose pour partie sur des séquences de participation publique, mais pas uniquement sur elles.

4Notre propos repose sur une double expérience. D’une part, celle de travaux de recherche que nous avons conduits sur les conflits d’aménagement et leurs modes de gestion. D’autre part, celle de notre implication durant une dizaine d’années dans la conception, l’accompagnement et l’analyse de dispositifs participatifs nombreux et diversifiés sur des projets ferroviaires (ligne à grande vitesse, aménagement de lignes existantes, extension et création de gares, etc.). Nous proposons ici de porter un regard sur la place de la participation publique dans un processus de gestion d’un conflit d’aménagement à la lumière de cette expérience qui a été influencée par nos propres travaux de recherche, expérience qui en retour nous permet d’alimenter la présente réflexion.

5Après une présentation des principales attentes, interrogations et critiques de la participation publique, nous proposons une grille d’analyse des quatre principales familles de revendications des opposants aux projets d’aménagement. Cette grille d’analyse permet de mieux situer la place relative de la participation publique comme réponse aux attentes des opposants et d’expliciter les critiques et insatisfactions dont elle est régulièrement l’objet. En réponse à ces attentes, nous formulons les conditions de l’intégration de la participation publique au sein d’un processus de concertation.

La participation publique en environnement : une fausse bonne réponse ?

De l’étude du conflit d’aménagement à la participation publique

6Les conflits d’aménagement ne sont pas un phénomène nouveau. Ils existent de longue date en France et dans d’autres pays. De nombreuses monographies et analyses croisées de conflits d’aménagement ont été conduites en France à partir des années 1970, dont certaines ont été rassemblées dans des ouvrages collectifs ou dans des numéros spéciaux de revues [3]. Certains travaux ont permis de clarifier le mouvement de conflictualisation des projets d’aménagement en France ainsi que leurs résonances géographiques et territoriales, en particulier la thèse de Bruno Charlier (1999). D’autres travaux ont également tenté de mieux qualifier le mouvement et la nature des conflits d’aménagement en France et dans plusieurs pays (Dziedzicki, 2001, 2003). Patrice Melé a proposé pour sa part un panorama très complet de ces recherches conduites en France sur les conflits d’aménagement (2013b).

7À travers leur analyse des principaux programmes de recherche initiés par le Commissariat général du Plan et les ministères de l’Équipement et de l’Environnement à partir des années 1960, Stéphane Labranche et Philippe Warin nous permettent de mieux comprendre le glissement qui s’est opéré de la problématique des conflits à celle de la participation (2006). Les premiers programmes ont émergé dans un contexte de remise en question des processus technocratiques accompagnant les décisions publiques, afin de mieux comprendre ces conflits et expérimenter des dispositifs de participation des habitants en réponse à ces conflits. Ces initiatives avaient dès l’origine une visée pragmatique afin de trouver des réponses à des situations locales qui se dégradaient dans le cadre de projets d’aménagement du territoire, d’urbanisation et de rénovation urbaine en particulier. Les approches participatives se sont distinguées à partir des années 1990 des approches négociées centrées sur l’analyse des jeux d’acteurs et leurs négociations [4]. Elles se sont focalisées plus récemment sur l’analyse fine de dispositifs de participation, mais en oubliant, de l’avis des deux auteurs, les questionnements originels en matière d’amélioration des processus décisionnels sur les politiques et projets d’aménagement. À partir des années 1990, la question du conflit est en effet quelque peu laissée de côté au profit de l’analyse des dispositifs participatifs. La participation et les recherches sur ce thème s’autonomisant, la question ne semble plus être en quoi les dispositifs de participation répondent plus ou moins aux situations conflictuelles, mais celle de leur contribution à la reconfiguration de l’espace public.

Le renforcement des textes et procédures réglementaires de la participation publique

8De nombreux textes ont renforcé en France l’information et la participation du public depuis une trentaine d’années [5]. Désormais, ils s’inscrivent en particulier dans le cadre de l’application de la convention internationale d’Aarhus sur « l’accès à l’information, la participation du public au processus décisionnel et l’accès à la justice en matière d’environnement » (ratifiée par la France le 8 juillet 2002), et dans le cadre du respect de l’article 7 de la Charte de l’environnement publiée au Journal officiel de la République française le 2 mars 2005, qui stipule que « toute personne a le droit, dans les conditions et les limites définies par la loi, d’accéder aux informations relatives à l’environnement détenues par les autorités publiques et de participer à l’élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l’environnement ».

9Sans prétendre ici à l’exhaustivité, ces textes proposent des dispositifs plus ou moins précis et éphémères de participation publique, dans le cadre de procédures réglementaires ponctuelles concernant les projets d’aménagement, industriels et de protection des ressources naturelles. La loi dite Bouchardeau du 12 juillet 1983 a renforcé la procédure d’enquête publique qui sera améliorée à plusieurs reprises par la suite, à travers l’évolution de l’article L. 123-1 et suivants du Code de l’environnement. La circulaire Bianco instaure dès le 15 décembre 1992 des débats préalables sur les projets d’infrastructure de transport. Elle est suivie de la loi dite Barnier du 2 février 1995, qui crée la Commission nationale du débat public (CNDP) et le débat public sur les grands projets d’aménagement [6]. Le Code de l’urbanisme prévoit depuis 1985 une concertation avec « les habitants, les associations locales et les autres personnes concernées » dans le cadre de l’élaboration d’un certain nombre de projets et de documents de planification en urbanisme (article L.300-2). Ces procédures sont mises en place à travers des dispositifs reposant sur des outils d’information et d’expression diversifiés, allant des classiques réunions publiques, permanences d’échanges et expositions avec registres, à des outils plus spécifiques destinés à optimiser la contribution des participants à travers des formes diversifiées de dispositifs de mini-publics ou à favoriser la participation dématérialisée sur Internet (blogs, forums de discussion, utilisation des réseaux sociaux, etc.).

10D’autres textes ont créé et renforcé le principe d’instances permanentes de participation d’habitants dans les villes en fonction de certains seuils de population, afin que ses représentants soient consultés sur les politiques engagées ou à engager (conseil ou comité de quartier, ateliers d’Agenda 21, etc.). Il existe également des instances permanentes à vocation essentiellement informationnelle réunissant des collèges de participants (élus, administrations, associations/riverains), créées dans le cadre du fonctionnement d’une installation industrielle ou d’une zone à risques (Commission locale d’information – CLI – à laquelle s’ajoute parfois la surveillance – CLIS – ou la concertation – CLIC) et des instances d’accompagnement d’une politique territoriale spécifique telles que la Commission locale de l’eau (CLE) dans le cadre de l’élaboration d’un Schéma d’aménagement et de gestion de l’eau (SAGE) [7].

11Ces textes, procédures et instances sont le résultat d’un besoin de renouvellement des modes de décision publique dans un contexte de crise de la représentation politique, de remise en cause des élites et de controverses environnementales internationales, qui ont conduit à vouloir responsabiliser et à donner davantage de place aux citoyens dans l’élaboration des décisions qui les concernent (Duran, Thoenig, 1996 ; Lascoumes, Le Galès, 2012).

La remise en cause d’une participation insuffisante et sous influence de la délibération

12L’ensemble de ces textes traduit une institutionnalisation de la participation publique. Celle-ci procède d’un double objectif, d’un double usage. La participation peut être considérée comme un moyen au service de la gestion d’une situation, dans une logique managériale. Il s’agit de la réponse apportée par le législateur aux conflits d’aménagement, la participation étant alors un mode d’action proposé dans une logique gestionnaire de politiques publiques et de situations complexes pour lesquelles les modes de régulation historiques fondés sur la production de l’action publique montrent leurs insuffisances (Duran, Thoenig, 1996 ; Rui, 2006, p. 77 ; Fourniau, 1996). La participation peut aussi être considérée comme une fin, afin de renforcer le rôle des citoyens dans la prise de décision publique, dans le sens d’une démocratie (plus) participative en raison d’un contexte de recomposition de l’action publique, liée dans de nombreux pays à un bouleversement des rapports de force entre l’État et la société civile, autour notamment de l’enjeu de la maîtrise de l’expertise (Dupuy, Halpern, 2009). Dans le second cas, c’est la délibération [8], proposée par un certain nombre de chercheurs (Blatrix, 2012) comme modèle idéal de conduite des échanges entre les individus et tournée vers la qualité des échanges, qui devient plus importante que l’expression du plus grand nombre de participants.

13L’impératif participatif s’est rapidement transformé en France en un « impératif délibératif » (Blondiaux, Sintomer, 2002 ; Blatrix, 2012). La délibération a été vue comme une nouvelle manière de préparer et de penser collectivement des décisions complexes. Les attentes des spécialistes de la délibération, que ne sont pas les aménageurs, reposent sur le principe d’une discussion équitable fondée sur la coopération et l’argumentation entre un maximum de personnes concernées par une décision. La délibération permettrait ainsi de produire de l’information nouvelle, d’intégrer de nouveaux acteurs (notamment les groupes les plus défavorisés) et de les renforcer (empowerment), et ainsi de rééquilibrer les rapports de force, d’enrichir la réflexion des personnes et de contribuer à la formation de l’opinion à travers une montée en généralité, d’éclairer les décideurs, etc. (Blondiaux, 2008 ; Blondiaux, Sintomer, 2002 ; Blondiaux, Fourniau, 2011) [9] ou encore de renforcer la prise en compte des enjeux environnementaux (Barbier, Larrue, 2011). De nombreux dispositifs au service de la participation publique ont été ainsi mis en place en France et étudiés du point de vue de la capacité de la délibération à produire ces effets, qui se font le plus souvent encore attendre (Blondiaux, Fourniau, 2011, p. 22). Ces dispositifs se sont développés à la faveur de l’émergence et du renforcement d’une communauté militante de professionnels de la démocratie participative, au sein des collectivités locales tout particulièrement (Nonjon, 2005).

14Dans le cadre d’une lecture « ascendante » de la délibération (Pellizzoni, 2013), de nombreuses critiques ont été adressées à ces démarches participatives et aux travaux de recherche qui, dans leur grande majorité, ont porté sur les scènes institutionnelles de débat public qu’elles contribuent à valoriser (Gourgues, Rui, Topçu, 2013). Si un bilan critique de ces recherches est souhaité (Blondiaux, Fourniau, 2011, p. 21), ce sont aussi certains chercheurs qui se voient parfois reprocher d’influer sur la fabrique d’une demande sociale de participation et de promouvoir une certaine idéologie délibérative afin d’influencer les dispositifs participatifs mis en place par les décideurs publics – la participation comme moyen devenant une fin à travers des dispositifs normés et considérés a priori comme vertueux (Blatrix, 2012).

15Ces critiques portent avant tout sur l’intention manipulatoire des aménageurs qui recourraient à la participation dans le sens d’une « démocratie formatée » (Blondiaux, 2008, p. 140), afin de prévenir et contenir les réactions hostiles dans un débat conçu comme pacifié et exempt de conflits à travers leur maîtrise des thèmes, du format, de la nature des participants et de la portée des débats (Rui, 2006 ; Gourgues et al., 2013, p. 12-17 ; Pellizzoni, 2013). Les autorités publiques multiplieraient ainsi les « détours participatifs » et développeraient une « machine de participation » à travers la multiplication de dispositifs participatifs comme ressource de gouvernement (Gourgues, 2012, p. 7). Sont dénoncées en particulier la déconnexion persistante entre dispositifs participatifs et prises de décision, la maîtrise, le plus souvent par l’aménageur, du cadre de la participation qu’il organise [10], l’utilisation de dispositifs participatifs essentiellement dans le but de repérer les opposants et leurs arguments pour mieux les contourner ensuite, et la volonté de stabiliser ses réseaux d’acteurs (Blondiaux, 2008, p. 136-140 ; Blondiaux, Sintomer, 2002, p. 31-33). L’application fonctionnaliste des dispositifs de participation s’inscrirait ainsi dans un objectif d’acceptation/acceptabilité sociale qui, pensée et mise en œuvre comme une simple technique de gestion des conflits sociaux, serait avant tout un instrument au service des aménageurs en recherche d’une nouvelle légitimité, dans un contexte de contestation qu’ils entendent stabiliser sans changer le système décisionnel en place. Les dispositifs de participation traduiraient en ce sens la capacité de l’État et des acteurs sectoriels à s’adapter aux protestataires dans la recomposition de l’action publique territoriale (Dupuy, Halpern, 2009, p. 715) et à étendre leurs « facultés de contrôle » dans un objectif de « pacification politique » (Blondiaux, Fourniau, 2011, p. 19-20). Au-delà des seuls dispositifs de participation publique, les forums hybrides [11] « sauvages » sont également dénoncés pour la maîtrise des rapports de force par les aménageurs, qui manipulent ce type d’arène en verrouillant la scène d’expression (Callon, Lascoumes, Barthe, 2001, p. 210 et s.).

16Mais cette instrumentalisation n’est pas toujours possible [12] et ces dispositifs sont tout de même utilisés, détournés, critiqués par les groupes mobilisés, voire sont désertés et donc délégitimés, ce qui permet au final l’émergence de formes de mobilisations et d’expressions nouvelles (Blondiaux, 2008, p. 142 et s. ; Blondiaux, Sintomer, 2002, p. 34), ainsi que l’émergence d’effets imprévus (Rui, 2006 ; Mermet, 2007). De plus, au-delà du constat et de la dénonciation du précadrage par l’aménageur des thèmes et des modalités du débat, de l’existence d’un système politico-administratif préexistant et rigide, de jeux d’acteurs qui savent s’adapter pour perdurer, etc., l’enjeu est désormais de reconnaître et prendre en compte l’« encastrement » des dispositifs participatifs dans un système d’action qui les contraint (Barbier, Larrue, 2011, p. 91-94) et de dépasser la dénonciation de la ruse et de la manipulation (Gourgues et al., 2013). En outre, des effets organisationnels, qui sont parfois difficiles à appréhender de l’extérieur, sont observés chez certains porteurs de projets qui ont la capacité d’évoluer à travers leur apprentissage de la participation. Les risques d’instrumentalisation existent (Simard, 2006) et sont inhérents à l’appropriation et à la transformation d’un outil par toute organisation (Chiapello, Gilbert, 2013) ; mais ces effets organisationnels révèlent également des changements profonds et durables chez certains aménageurs dans la manière de penser leur action (Dziedzicki, 2007).

17De nombreuses critiques portent ainsi sur les ambitions irréalistes adressées à la délibération, reposant sur une vision trop naïve et idéaliste (Mermet, 2006). La délibération ignorerait d’une part les calculs stratégiques de chaque participant, ce qui rend illusoire le principe même d’une discussion rationnelle qui fonde la délibération, et tente d’autre part d’atténuer les conflits alors qu’ils sont nécessaires à la vitalité de l’espace public, et donc à la dynamique démocratique (Callon et al., 2001, p. 210 ; Sintomer, 1999, p. 379-381 ; Blondiaux, 2008, p. 136-138 ; Neveu, 2011 ; Gourgues et al., 2013 ; Simard, 2006). L’idée est désormais largement partagée par de nombreux chercheurs et experts qu’il convient de dépasser la dualité enchantement/désenchantement à l’adresse de la délibération (Gourgues et al., 2013), en s’intéressant à l’ensemble des scènes possibles d’échange de la participation et à leurs interactions, et non plus uniquement aux scènes publiques et formelles (Barbier, Larrue, 2001, p. 73 ; Blondiaux, Fourniau, 2011, p. 20-21 ; Mermet, 2007, p. 379).

La participation publique : une réponse centrale mais incomplète aux revendications des opposants

18Les critiques précédentes tiennent selon nous à de nombreuses ambiguïtés quant aux objectifs qui sont adressés à la participation publique. Ces ambiguïtés peuvent être identifiées à partir des principales critiques et attentes des opposants à des projets d’équipement. Après la proposition d’une grille de lecture de ces critiques et attentes, nous discutons de la pertinence de la participation publique comme réponse à celles-ci, puis, à partir de notre expérience chez un maître d’ouvrage, nous proposons de l’inscrire dans un processus plus large de concertation afin de renforcer ses effets en termes d’action publique.

Quatre familles de revendications possibles pour chaque situation conflictuelle

19La grille présentée en figure 1 propose une lecture simplifiée [13] des revendications exprimées par les populations locales à l’endroit d’un projet d’aménagement qu’elles contestent. Elle s’inspire de celle proposée par Michael L. Poirer Elliott dans le cadre de son analyse de conflits dans le domaine du « planning » en urbanisme aux États-Unis (1988, p. 161 et s.), que nous avons adaptée et complétée en tenant compte des nombreux travaux conduits en France et dans d’autres pays sur les conflits d’aménagement [14]. Ces conflits expriment une combinaison de quatre dimensions conflictuelles qui sont plus ou moins présentes lors d’un conflit et qui peuvent évoluer au cours de la dynamique de celui-ci (voir figure 1).

Figure 1

Quatre familles de revendications dans les conflits d’aménagement

Figure 1

Quatre familles de revendications dans les conflits d’aménagement

20Le conflit fondé sur les incertitudes traduit la perception de risques potentiels liés à la décision de réaliser un équipement. Les risques de dommages pour la nature, le cadre de vie (nuisances sonores, visuelles ou olfactives) et la santé, ainsi que leurs impacts sur la valeur foncière des propriétés, apparaissent généralement comme les premiers arguments avancés par les opposants. Un sentiment d’injustice lié à la perception d’une distribution inéquitable des bénéfices et inconvénients du futur équipement est exprimé : les populations riveraines devraient supporter des désagréments d’un équipement dont les bénéfices reviendraient au reste de la collectivité. L’importance de ce type de conflit a donné naissance à l’acronyme disqualifiant de NIMBY [15].

21Le conflit substantiel traduit un désaccord sur le contenu de la décision à venir, en termes de nature et de bien-fondé du projet. Ce sont les choix de politiques publiques qui sont questionnés. Exprimé notamment à travers les acronymes NIABY (Not in anyone’s backyard) ou BANANA (Build absolutely nothing anywhere near anyone), l’équipement ne doit être construit nulle part, soit parce que sa technologie présente des risques pour la santé publique, soit parce qu’il relève d’une politique publique dont les orientations sont remises en question. Ce conflit traduit une montée en généralité des arguments, destinée en particulier à sortir de la posture disqualifiante de NIMBYste et à mobiliser les décideurs et l’opinion publique.

22Le conflit structurel exprime une contestation de ce qui fonde les décisions. Il remet en cause la légitimité de la décision politique et de l’action publique territoriale. Il exprime la perte de monopole par les décideurs sur la propriété des problèmes à traiter, et en particulier sur la définition de l’intérêt général que l’administration ne serait plus seule à définir – celui-ci relevant d’autres points de vue considérés comme tout aussi légitimes, ceux de citoyens souhaitant participer aux décisions qui les concernent. Dans sa forme la plus extrême, ce conflit peut traduire une nouvelle forme de conflit social, telle que les « luttes urbaines » contre une politique de production de l’urbain se voulant rationnelle et humaniste, mais considérée comme un instrument favorisant la reproduction des rapports sociaux de production (Castells, 1975 ; Simmie, 1974). Il peut aussi traduire une remise en cause de la représentation démocratique à travers l’expression d’une revendication de participation plus directe aux décisions politiques, celle d’une démocratie plus participative, comme une fin en soi, indépendamment des enjeux locaux exprimés à travers le conflit. Enfin, ce type de conflit peut traduire aussi une remise en cause de la légitimité de l’expert et de son expertise, l’instrumentalisation de l’expertise par les décideurs pour fonder leurs décisions étant dénoncée très régulièrement par les populations locales.

23Le conflit de procédure remet en cause la manière dont un processus de décision est conduit. Ce sont particulièrement les procédures administratives qui sont dénoncées : les populations s’en sentent exclues, en raison de leur propension à contrôler l’information et à reposer, d’une part, sur une rationalité exclusivement technique maîtrisée par les aménageurs et urbanistes et, d’autre part, sur des procédures découpées en étapes successives selon une logique linéaire laissant peu de place à l’échange pour, in fine, altérer la capacité des individus à influer sur les décisions. C’est ainsi l’absence de transparence des processus de décision et l’absence de dialogue entraînant un sentiment de dépossession de la part des populations qui sont exprimées. Cette absence est liée tout particulièrement à la faiblesse des modalités de participation publique. Celle-ci est vue par les populations comme une concession tolérée par les décideurs dans une logique d’adhésion au projet d’aménagement, et reléguée le plus souvent en fin de processus, c’est-à-dire une fois que le projet est abouti du point de vue technique et du point de vue de son implantation territoriale (critique principale adressée à l’enquête publique). En outre, les modalités de la participation reposent essentiellement sur l’information et la consultation à travers le recueil d’avis dans des registres ou lors de réunions publiques dont les limites sont connues de longue date [16]. La population concernée considère alors qu’elle est mise devant le fait accompli, que la participation revêt un caractère alibi, et elle témoigne de son indifférence ou manifeste son hostilité à cette occasion.

24Nous avons déjà montré l’intérêt de recourir à cette grille de lecture pour identifier les arguments des opposants dans un conflit d’aménagement (Dziedzicki, 2001, 2003). Les figures suivantes illustrent le type et l’intensité des revendications exprimées à l’occasion de deux conflits d’aménagement que nous avons analysés :

25Le principe de la réalisation de ce projet d’usine d’incinération de déchets dangereux dans la vallée du Rhône (voir figure 2) n’est pas contesté, puisque celle-ci viendrait remplacer une décharge insalubre dont se plaint la population locale (faible conflit substantiel), et les décideurs (élus et entreprise) sont peu mis en cause (faible conflit structurel). Mais après une absence de consultation de la population sur ce projet (conflit de procédure), celle-ci est invitée à s’exprimer, ce qu’elle fait en exprimant de manière véhémente ses inquiétudes sur la toxicité des futurs rejets de l’usine (fort conflit fondé sur les incertitudes).

Figure 2

Un exemple de revendications autour d’un projet d’usine d’incinération de déchets dangereux

Figure 2

Un exemple de revendications autour d’un projet d’usine d’incinération de déchets dangereux

26Le deuxième exemple est celui d’un projet de section routière de la Francilienne (voir figure 3). Ce projet est attendu par la grande majorité de la population (faible conflit substantiel), mais certaines décisions de collectivités et les études de l’administration de l’Équipement sont contestées (conflit structurel). Les inquiétudes exprimées sur les impacts de la future infrastructure sur une zone récréative d’importance sont très fortes (fort conflit fondé sur les incertitudes), tandis que des milliers de personnes dénoncent le caractère alibi de la consultation qui est organisée à l’occasion d’une procédure d’enquête publique (fort conflit de procédure).

Figure 3

Un exemple de revendications autour d’un projet autoroutier

Figure 3

Un exemple de revendications autour d’un projet autoroutier

27L’identification de ces revendications permet ainsi de comprendre les attentes particulières des populations. Si l’intention de l’aménageur est d’y répondre afin de trouver une issue constructive à un conflit (cf. infra), chaque situation conflictuelle locale appelle en fait un ensemble de réponses adaptées à ces attentes spécifiques. Les deux situations présentées ci-dessus appellent par conséquent des réponses adaptées et différentes.

28Cette grille de lecture permet également de suivre l’évolution des arguments des opposants en fonction de la mise en place des réponses qui sont apportées par l’aménageur, et d’apprécier ainsi leurs effets, comme cela a été réalisé par d’autres auteurs [17].

29Les controverses médiatisées qui ont émergé récemment en France sur un certain nombre de projets (aéroport Notre-Dame des Landes, barrage de Sivens, Center Parcs de Roybon, etc.) traduisent particulièrement l’expression du conflit de procédure (dénonciation de procédures de participation publique réduites au seul respect de la réglementation et déconnectées des processus décisionnels), du conflit substantiel (dénonciation des politiques publiques qui supportent ces projets) et du conflit fondé sur les incertitudes (NIMBY). Ces controverses traduisent surtout l’expression du conflit structurel de la part de personnes constituées en réseaux, qui dénoncent les fondements du modèle de développement de notre société et en particulier le pouvoir jugé comme discrétionnaire des autorités publiques. Ces opposants, les ZADistes [18], trouvent là un lieu d’expression d’une contestation plus large. L’intensité de cette expression du conflit structurel est particulièrement nouvelle, même si elle concerne une minorité de projets et de conflits, mais elle appelle forcément de nouvelles formes de réponse.

Quelles réponses aux revendications des opposants ?

30Le conflit est un processus, une transaction sociale, qui comporte plusieurs formes d’interaction, que sont les phases d’affrontement, d’évitement, d’échanges, de négociation, de débats au sein de scènes plus ou moins ouvertes (Beuret, 2012, 2013 ; Melé, 2013b ; Mermet, 2006). Pour sortir de ce type de situation, il existe également une diversité de formes d’interaction possibles, que traduisent les modes d’action suivants : l’évitement, la concession, la décision autoritaire, le recours à l’arbitrage d’un tiers individuel (juge, expert, etc.) ou d’un groupe (par le vote), la négociation, la coopération et la relation contractuelle (Carpenter, Kennedy, 1988, p. 18 et s. ; Dupont, 1994, p. 26 et s. ; Freund, 1983, p. 24 ; Mermet, 1992, p. 153 ; Mermet, 1998). Une partie de ces modes d’action est tournée vers la recherche de la victoire absolue et l’appropriation de l’ensemble des gains (jeu à somme nulle), une autre partie est tournée vers le partage des gains (jeu à somme positive). Dans le premier cas, il s’agit d’un conflit destructeur et dans le second, d’un conflit constructif (Deutsch, 1991) ou « créateur » (Freund, 1983, p. 115). Le conflit constructif relève d’un processus de consensus qui « sert davantage à tolérer les conflits qu’à les supprimer » (Moscovici, Doise, 1992, p. 89) afin de transformer les représentations des individus en une unique représentation sociale (p. 246).

31Au niveau de l’individu (ou d’un groupe), cette transformation des représentations s’exprime à travers l’évolution de ses postures stratégiques, conscientes ou non : l’évitement, l’accommodement, la compétition et la coopération. Dans une situation d’interaction entre individus, il existe en effet quatre principales stratégies comportementales, résultat de la combinaison entre l’attention accordée à ses propres intérêts et celle accordée à ceux des autres (voir figure 4).

Figure 4

Le modèle du double intérêt : quatre principales stratégies possibles (Rubin, Pruitt, Kim, 1994)

Figure 4

Le modèle du double intérêt : quatre principales stratégies possibles (Rubin, Pruitt, Kim, 1994)

32Le conflit est le résultat de la confrontation de deux stratégies de compétition, au sens où chacun entend maximiser ses intérêts et néglige ceux de l’autre. La sortie constructive d’un conflit correspond à l’adoption de stratégies orientées vers la coopération, ce qui suppose que les individus évoluent d’une stratégie de compétition vers une stratégie de coopération. Comme en témoigne la figure 4 [19], cette évolution nécessite de réduire l’attention accordée à ses propres intérêts, mais surtout d’accorder une réelle attention aux intérêts de l’autre – ce qui constitue l’enjeu majeur de la gestion d’un conflit constructif. C’est pour cette raison qu’il est nécessaire que les conditions soient réunies pour que cet effort soit mutuellement réalisé, ce qui nécessite le plus souvent que les autres stratégies aient été épuisées et qu’elles aient montré leurs limites.

33En proposant ici des pistes de réponses aux revendications des opposants [20], nous nous inscrivons dans une logique de valorisation du conflit dans son orientation constructive, afin de favoriser l’évolution des stratégies individuelles d’une posture de compétition vers une posture de coopération, ce qui signifie que ces pistes de réponse doivent favoriser l’attention accordée aux intérêts de l’autre, de la part du maître d’ouvrage, mais aussi de la part des opposants.

34Il convient cependant de garder à l’esprit qu’ à défaut d’être géré dans une optique constructive, le conflit peut être « traité » par d’autres modes d’action possibles favorisant l’hostilité et la recherche de la victoire sur l’autre. S’ils ne remplissent pas leur objectif, ces modes d’action alimentent la spirale du conflit et peuvent générer des situations inextricables qui conduisent les protagonistes en dernier recours, et généralement après une période importante d’absence de communication mutuelle, à se tourner au final vers des modes d’action qui respectent davantage l’autre et ses intérêts [21].

35Pour chacun des quatre types de revendications des opposants décrits précédemment, nous proposons les principes qui doivent orienter les réponses à leur apporter, suivis de celles qui sont mises en place en France, sans prétendre néanmoins ici à l’exhaustivité ni pouvoir les présenter de manière détaillée.

36Les réponses au conflit fondé sur les incertitudes sont destinées à réduire les impacts potentiels ou réels d’un projet sur son environnement et à réduire les inquiétudes liées à ceux-ci. Elles se sont traduites tout particulièrement par le renforcement des garanties en termes de prise en compte de la protection du cadre de vie et de la nature par le projet, et la recherche de son moindre impact. L’étude d’impact sur l’environnement (EIE) a été ainsi créée dans la deuxième moitié des années 1970 à partir de l’expérience étasunienne. Puis ses prescriptions ont progressivement été renforcées, l’EIE étant désormais le plus souvent obligatoire dans un dossier d’enquête publique sur un projet d’importance – en particulier depuis la loi du 12 juillet 2010 qui renforce à ce titre les articles L.123.1 et suivants du Code de l’environnement. De manière plus générale, le législateur a renforcé depuis une quarantaine d’années les exigences en matière d’études d’environnement, bien qu’elles demeurent souvent considérées comme insuffisantes par les populations. Depuis quelques années, l’application pour un nombre de projets de plus en plus important du principe « Éviter, Réduire, Compenser les impacts sur les milieux naturels » (ERC) consiste à ce que les études de conception d’un projet, qu’elles soient techniques ou environnementales, intègrent très en amont les zones sensibles afin de les éviter, de réduire au maximum les impacts du projet si l’évitement n’est pas possible, et enfin de compenser les impacts restants. Afin de renforcer les exigences sur la qualité des études réalisées sur un projet, l’Autorité environnementale (AE) a été créée en 2009 au sein du Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD). La création de l’AE permet d’introduire, pour les projets soumis à EIE, un « garant qui analyse la bonne prise en compte des enjeux environnementaux par le maître d’ouvrage » [22], qui rend public un avis consultatif et qui peut conseiller le maître d’ouvrage. Cela contribue à renforcer les exigences attendues en réponse aux attentes des populations en termes d’impacts du projet sur leur cadre de vie et sur la nature. De manière plus classique, l’organisation de visites de sites d’équipements similaires à celui projeté, afin de réduire les inquiétudes liées à un défaut de connaissance, vient compléter l’éventail des réponses possibles à ce type de conflit, bien que cette réponse s’adresse uniquement à quelques dizaines de personnes le plus souvent. Lorsqu’il n’y a pas d’autre solution, l’indemnisation pour le préjudice causé ou l’achat du bien foncier (à l’amiable, par préemption ou expropriation) qui est touché par l’aménagement reste l’ultime solution afin de compenser sur le plan financier les impacts du projet qui n’ont pas pu être évités.

37Les réponses au conflit substantiel consistent à favoriser la discussion sur la politique publique qui sous-tend le projet, à interroger et expliciter ses orientations. Ce débat peut conduire à un rapprochement des points de vue à l’issue d’un processus de délibération, éventuellement à une remise en question du projet voire des orientations d’une politique publique. Cependant, cette issue est rare dans la mesure où ce type de conflit repose tout particulièrement sur des conflits de valeurs et des positions souvent inconciliables et non négociables (par exemple les antinucléaires à l’occasion d’un projet de centrale nucléaire, les militants écologistes à l’occasion d’un projet de barrage hydraulique destiné à l’irrigation agricole, etc.). Si les conditions d’une discussion objectivée sont réunies à travers la présence des interlocuteurs pertinents et des décideurs, en amont de l’élaboration d’un projet voire dans le cadre de l’élaboration des plans et programmes, avec une animation de la discussion par un tiers indépendant, etc., l’enjeu n’est pas tant le résultat de cette discussion, certes important, que l’existence même de ce débat qui répond à un besoin des opposants d’exprimer et de confronter des points de vue argumentés dans le cadre d’un processus de délibération bien cadré. Ce type de débat est possible à l’occasion d’une enquête publique organisée sur un document de planification territoriale qui détermine les futurs usages des espaces à l’échelle communale, intercommunale, voire régionale, si les conditions d’organisation de l’enquête publique le permettent. Il l’est beaucoup moins dans le cadre d’une enquête publique conduite sur un projet, car celle-ci est organisée tardivement dans son processus d’élaboration. Ce débat existe aujourd’hui essentiellement pour les projets d’infrastructure d’enjeu national à travers l’organisation depuis 1997 de débats publics par la CNDP. Le Code de l’environnement impose que le débat public aborde la question de l’opportunité du projet (article L.121-1 et suivants), ce qui doit conduire à interroger des orientations de politiques publiques. Ce débat d’opportunité occupe une place inégale d’un débat public à l’autre, en raison d’une part de la volonté, de la capacité d’animation et de la latitude d’action dont disposent les organisateurs, et d’autre part de la capacité du maître d’ouvrage et des participants à être à l’écoute et à ne pas rester figés sur leurs positions, ce que permet difficilement une scène publique qui favorise la théâtralisation des jeux de rôles.

38Quant au conflit de procédure, le renforcement du droit à l’information et à la participation du public en constitue la réponse pragmatique. C’est en ce sens que l’on peut parler de conception managériale de la participation. Elle s’est traduite en France par le renforcement des modalités d’information et d’expression des populations lors de l’enquête publique et, en amont de celle-ci afin de répondre à ses insuffisances, par le développement de dispositifs participatifs. La CNDP joue à ce titre un rôle majeur à travers l’organisation de débats publics sur des grands projets d’aménagement et à travers les « concertations recommandées » sur des projets de taille plus modeste qu’elle a particulièrement développées depuis plusieurs années. De nombreuses collectivités ont mis également en place depuis quelques années des dispositifs ad hoc de participation de leurs habitants sur une partie de leurs projets. Quelques rares maîtres d’ouvrage ont développé des démarches destinées à favoriser la participation de différents publics au cours des étapes d’élaboration de leurs projets, en particulier au cours des étapes préparatoires à un débat public, puis pour poursuivre les échanges durant plusieurs mois ou années à l’issue de celui-ci [23]. Mais multiplier les dispositifs participatifs ne suffit pas à répondre aux critiques des opposants qui portent aussi sur la sincérité de ces dispositifs. Celle-ci suppose que le cadre et les objectifs en soient clarifiés, que le respect de ces derniers par le maître d’ouvrage et les participants soit garanti, et que le porteur de projet valorise la participation en s’engageant à prendre en compte les informations et remarques exprimées par les participants. L’enjeu de clarification et de la garantie du cadre et des objectifs a favorisé l’émergence du « tiers garant » que sont la CNDP et les commissions particulières qu’elle désigne, ainsi que des personnes auxquelles elle confie de plus en plus ce rôle (il existe également quelques initiatives de collectivités locales et de maîtres d’ouvrage ayant mis en place des garants). Cet enjeu a donné aussi lieu parfois au développement de chartes de la participation/concertation qui contiennent des règles du jeu et des engagements mutuels, chartes qui ont d’autant plus de valeur lorsqu’elles sont élaborées de manière collective. Rendre compte des résultats de la participation a aussi été un objectif renforcé depuis plusieurs années : certains maîtres d’ouvrage réalisent désormais des bilans détaillés, en répondant le plus explicitement possible aux questions posées par les participants et en clarifiant leur position – bilans qui sont rendus publics et annexés au futur dossier d’enquête publique. Les tiers garants rendent aussi compte de la participation dans des documents rendus publics et annexés au dossier d’enquête publique. Le législateur a également renforcé le devoir de réponse pour le maître d’ouvrage à l’issue d’un débat public. En effet, la loi Barnier du 2 février 1995 qui créait la CNDP et le débat public ne prévoyait pas de décision du maître d’ouvrage à l’issue du débat. Grâce à Internet, la publication par le maître d’ouvrage et/ou par la CNDP d’informations sur le projet, d’études réalisées, de bilans des dispositifs participatifs et des principales décisions contribue à rendre plus transparents les processus décisionnels.

39Les réponses au conflit structurel sont peu nombreuses, car il est délicat de faire évoluer les mécanismes décisionnels et les décideurs à travers des actions directement orientées vers eux, la résistance au changement étant exacerbée à ce niveau. En revanche, nous avons pu constater à l’occasion de nombreux dispositifs participatifs mis en place sur des projets ferroviaires qu’il est possible de répondre indirectement et au moins partiellement aux attentes des opposants par le biais de certaines réponses apportées aux trois autres types de conflit. Ainsi, la participation constructive d’un décideur à des débats d’opportunité peut contribuer à renforcer sa légitimité auprès de certains opposants. Une plus grande transparence et une capacité à rendre compte publiquement des résultats d’un dispositif participatif peuvent à la fois favoriser une plus grande confiance dans ce dispositif (et incidemment dans le porteur de projet), et contribuer à des prises de décision mieux objectivées par les différentes contributions et par conséquent davantage reconnues comme fondées. Un dispositif participatif dans lequel les participants sont associés aux réflexions conduites sur les études du projet, dans lequel leurs connaissances sont mobilisées et considérées par les personnes responsables des études, contribue à produire de l’expertise collective de meilleure qualité et qui sera considéré comme plus légitime par les opposants. La mise en place de dispositifs de mini-publics permet de consulter et de former des panels de citoyens qui produisent de l’expertise dans leurs constats et recommandations [24]. Le rôle d’expert aujourd’hui dévolu à l’Autorité environnementale contribue également à améliorer les études et à renforcer la légitimité des décisions qui reposent sur elles (ou à les fragiliser si l’avis de l’AE n’est pas suffisamment pris en considération). Les possibilités existent désormais en matière de mobilisation d’une expertise (plus) indépendante [25], bien que cette formule entretienne le schéma habituel de la confrontation (d’experts) plutôt que le dialogue.

40Ces réponses sont déjà ainsi en partie mises en œuvre en France. Elles sont néanmoins rarement conçues et appliquées de manière coordonnée dans le cadre d’un processus de réponse global et cohérent, ni associées étroitement au processus de conduite des études d’un projet et aux décisions successives qui ponctuent sa définition puis sa réalisation. Certains projets ferroviaires ont cependant fait l’objet de démarches très ambitieuses dans ce sens. Les prérogatives et actions de la CNDP semblent être également progressivement renforcées pour s’inscrire dans cette perspective. Mais l’actualité médiatique témoigne de projets d’aménagement pour lesquels les réponses précédentes sont négligées. L’enjeu en France nous semble être en priorité la mise en cohérence des réponses existantes et l’inscription des dispositifs participatifs dans un processus plus large, un processus de concertation.

La participation publique au service de la concertation : une proposition indécente ?

41La grille de lecture des principales revendications et les réponses qu’elles appellent permettent de mieux comprendre le rôle que joue la participation du public comme réponse aux conflits d’aménagement et, surtout, le rôle qu’elle ne peut pas jouer, à tout le moins lorsqu’elle est conçue et analysée de manière isolée d’un processus de concertation plus large.

42Cette grille suggère deux ambiguïtés dans la conception que des observateurs et des populations peuvent avoir de la participation publique, ce qui permet d’expliquer selon nous au moins pour partie les critiques qui lui sont adressées.

43La première ambiguïté réside dans l’objectif auquel la participation publique est censée répondre. D’un côté, elle répond au conflit de procédure en tant que moyen afin de satisfaire aux besoins d’expression et de transparence formulés par des populations ; d’un autre côté, elle peut constituer une réponse au conflit structurel, comme une fin, dans le sens d’une démocratie plus participative afin que les citoyens aient davantage de pouvoir décisionnel. Cette réponse duale est à l’origine de confusions dans les attentes exprimées à l’égard de la participation publique [26] et est source d’insatisfactions.

44La seconde ambiguïté réside dans les attentes majeures de la part de populations et d’observateurs à l’égard d’un dispositif participatif, alors que celui-ci est conçu en général comme réponse au seul conflit de procédure. L’objectif des textes législatifs et réglementaires qui renforcent la participation du public est de favoriser l’information et l’expression des populations concernées par un projet. Mais ces textes et les dispositifs auxquels ils donnent lieu ne sont pas pensés de manière systémique afin de répondre aux différentes attentes exprimées à travers les trois autres types de conflits. En d’autres termes, la participation publique ne peut répondre à toutes les attentes. Ainsi, ce n’est pas tant la participation publique qui doit être questionnée et critiquée, que le processus dans lequel elle s’inscrit.

45Les insatisfactions adressées à la participation publique persisteront tant que celle-ci sera mise en œuvre et analysée sans que soit clarifiée la dualité de ses objectifs, et tant qu’elle sera mise en œuvre et analysée de manière déconnectée des autres réponses à apporter au conflit d’aménagement. Cela suppose d’adopter une vision objectivée du conflit et des réponses qu’il appelle, en inscrivant la participation publique et les autres réponses dans un processus de concertation.

46Le processus de concertation est tourné vers la recherche d’une solution commune entre des parties qui trouvent davantage d’intérêt à « sortir » du conflit en évoluant vers une posture de coopération. Ce processus ne repose pas en permanence sur l’esprit d’un dialogue coopératif, mais bien sûr un « continuum de pratiques, des consultations les moins exigeantes aux pratiques les plus coopératives » (Mermet, 2006, p. 76), une « coopération conflictuelle » (Melé, 2013a, p. 17). Le processus de concertation repose sur une mobilisation et une articulation des différentes réponses que nous avons évoquées, en les adaptant en fonction de chaque situation et de différents publics (et parfois dans le cadre d’arènes de discussion fondées essentiellement sur des négociations entre un nombre limité de participants). Il rend possible le pesage des tenants et aboutissants d’un projet fondé a minima sur le modèle de concertation « Proposer, Écouter, Requalifier » (PER) afin d’éviter de reproduire le modèle traditionnel et historique de concertation « Décider, Annoncer, Défendre » (DAD), qui n’a de concertation que le nom et qui se traduit par le « forçage » du projet et la poursuite du conflit (Mermet et al., 2004). Ce processus de concertation constitue un cadre cohérent qui s’inscrit dans le temps en accompagnant l’élaboration et la réalisation d’un projet d’aménagement à travers des séquences de participation qui s’adressent à différents types de publics en fonction des problématiques abordées. La concertation doit être ainsi considérée comme la modalité de mise en pratique du principe philosophique de participation, la participation publique n’étant qu’une partie de cette modalité. Les réponses sur lesquelles il repose correspondent aux six critères d’organisation (en termes de précocité, de degré d’ouverture et de qualité et de continuité des contributions) et aux trois critères de déroulement des forums hybrides (conditions d’accès aux débats, transparence et traçabilité des débats, et clarté des règles du jeu) (Callon et al., 2001). Elles ont également des correspondances avec les principes exposés dans les neuf articles de la Charte de la concertation de 1996 créée à l’initiative du ministère de l’Environnement [27], même s’ils sont orientés vers l’ajustement d’un projet d’aménagement et insuffisamment vers la possibilité de son abandon [28].

47La participation publique fait ainsi partie intégrante de la concertation qui l’inscrit dans la réponse systémique qu’elle apporte. Elle nourrit la concertation qui, en retour, consolide son rôle, tout particulièrement à travers les réponses qu’elle apporte de manière indirecte au conflit structurel et sa capacité à ouvrir les « délibérations confinées » et leurs « effets de filtrage et de construction réciproque des interlocuteurs » (Gaudin, 1999, p. 209-210). Le processus de concertation constitue dans ces conditions le cadre d’intégration et de valorisation de la participation publique.

Conclusion

48L’analyse des controverses autour de projets d’aménagement a été quelque peu délaissée à partir des années 1990 en France, au profit d’analyses qui ont davantage porté sur des scènes institutionnalisées de participation du public mises en place afin de répondre à ces situations. Ces analyses ont permis de mieux comprendre les apports de ces scènes, mais aussi d’en relativiser la portée sur les systèmes décisionnels. À partir de l’identification de quatre principales familles de revendications des opposants aux projets d’aménagement, nous avons proposé des pistes de réponse à ces attentes et critiques. La diversité de ces réponses permet également de mieux comprendre le rôle à la fois central et partiel de la participation publique dans toute démarche de gestion d’une situation conflictuelle. Nous avons alors proposé de mettre à nouveau la question du conflit d’aménagement et de sa gestion au centre de la réflexion, et de considérer le processus de concertation comme cadre ensemblier des réponses à apporter aux attentes des opposants. Ce cadre permet de valoriser la participation publique en l’inscrivant davantage dans un processus décisionnel.

Notes

  • [1]
    Notre propos porte sur un type particulier de conflit territorialisé, le conflit d’aménagement, au sens d’un conflit localisé sur un espace/un territoire particulier. Le conflit d’aménagement témoigne d’une situation locale complexe liée à un projet d’équipement ou à un équipement existant qui a des effets potentiels ou existants sur l’environnement local (cadre de vie, santé humaine, protection de la nature) : infrastructure de transport, installation industrielle, équipement de production ou de transport énergétique, installation de traitement des déchets ou des eaux, équipement culturel ou de loisir, projet d’urbanisme, lieu d’accueil de personnes en difficulté (personnes atteintes du VIH, consommateurs de drogues, etc.). Ces situations sont caractérisées à la fois par l’expression d’une hostilité (en tout cas ressentie comme telle par certaines personnes) et par une publicisation de cette situation (au sens de public dispute).
  • [2]
    Le terme aménageur est utilisé ici au sens large, c’est-à-dire toute organisation qui est responsable de l’élaboration et de la réalisation d’un aménagement : maître d’ouvrage, entreprise, collectivité. Nous emploierons aussi l’expression de « porteur de projet » (Mermet et al., 2004).
  • [3]
    À notre connaissance, le premier ouvrage de référence rassemblant plusieurs contributions sur les conflits d’aménagement a été édité par l’association Germes : Germes, 1979, « Environnement-conflits-participation », Les Cahiers du GERMES, no 2, Paris, 272 p.
  • [4]
    La négociation est « une forme de communication bilatérale destinée à produire un accord entre des gens qui possèdent à la fois des intérêts communs et des intérêts opposés » (Fisher, Ury, 1993, p. 14). Elle repose sur un ensemble d’échanges qui constituent à la fois une composante essentielle du conflit, en même temps qu’ils sont le passage nécessaire à sa sortie, à l’exception des cas de conflits extrêmes (Deutsch, 1991 ; Freund, 1983 ; Mermet, 1987 ; Schelling, 1986).
  • [5]
    Pour un panorama des principaux textes de loi qui traitent de la participation du public, voir G. Monédiaire, 2011, « La participation du public organisée par le droit : des principes prometteurs, une mise en œuvre circonspecte », Participations, no 1, p. 134-154.
  • [6]
    Qui seront renforcés par la loi démocratie de proximité du 27 février 2002, puis par la loi dite Grenelle 2 du 12 juillet 2010 qui introduit également une « concertation préalable à l’enquête publique associant le public » et la possibilité pour l’aménageur de conduire une concertation après un débat public, avec ou sans l’intervention d’un garant (articles L. 121-1 et suivants du Code de l’environnement).
  • [7]
    Sur ce point, voir notamment Barbier et Larrue (2011.
  • [8]
    La délibération, telle que proposée par Jürgen Habermas, est une discussion qui repose sur une rationalité communicationnelle fondée sur la critique et l’échange d’arguments dans l’espace public qui permettraient de dépasser la subjectivité initiale de chacun afin de rendre possible l’entente et l’accord raisonnés des citoyens, le consensus (Sintomer, 1999). Pour une lecture des multiples conceptions de la délibération et de la participation, et de leurs interactions, voir Sintomer, 2011.
  • [9]
    Sur les effets potentiels, voir notamment Blondiaux et Fourniau (2011, p. 24 et s).
  • [10]
    Même si la figure du tiers organisateur et garant de la participation s’est renforcée avec la création et le renforcement du rôle du commissaire enquêteur, l’intervention à l’initiative de la CNDP de Commissions particulières du débat public (CPDP) et plus récemment de personnalités qualifiées comme garantes de la concertation.
  • [11]
    Les forums hybrides sont des espaces publics comme scènes d’échanges ouvertes à un maximum de groupes concernés par une politique ou un projet.
  • [12]
    Notamment lorsque ce sont des tiers qui organisent la participation (CNDP/CPDP, garant, commissaire enquêteur, etc.).
  • [13]
    Au sens où elle ne prétend pas exprimer l’ensemble des possibles en matière de revendications de populations opposées à une opération d’aménagement.
  • [14]
    Nous présentons ici une synthèse de ce qui caractérise chacune de ces quatre familles d’arguments. Pour une lecture plus détaillée de ces familles ainsi qu’une présentation de l’ensemble des travaux conduits en France et à l’étranger qui nous ont servi à constituer le contenu de ces familles, voir Dziedzicki (2001, 2003).
  • [15]
    Pour Not in my back yard (pas dans mon jardin). Cette expression a été utilisée pour la première fois par Michael O’Hare, en 1977, dans le numéro 25 de la revue Public Policy. On trouve également les acronymes LULU (Localy unwanted land uses) et NOOS (Not on our street).
  • [16]
    Les limites des réunions publiques (hearings) ont été mises en exergue dès les années 1970 en raison de leur propension à créer des confrontations stériles autour d’objets sur lesquels la marge de manœuvre reste faible, de l’expression d’une partie seulement de la population et en particulier des couches sociales moyennes, ces réunions relevant davantage d’une routine procédurale que d’une réelle volonté d’associer le public aux projets qui les concernent (Webler, Renn, 1995).
  • [17]
    Voir notamment le rapport de l’association Décider Ensemble, 2011, Analyse des pratiques de la concertation en France, 215 p.
  • [18]
    ZAD : zone à défendre.
  • [19]
    Les flèches hachurées sont de nous.
  • [20]
    Ces pistes sont présentées ici en regard des principales critiques et attentes des opposants. Néanmoins, les arguments des opposants ne sont pas les causes d’un conflit, ils n’en sont que l’expression. Un conflit d’aménagement est le résultat de trois types de mécanismes conflictuels, de natures interpersonnelle, territoriale et publique, et chacun d’eux appelle des réponses spécifiques. Pour plus de détails sur ce point, voir Dziedzicki (2001, 2006).
  • [21]
    Le forum hybride « n’émerge qu’au prix de conflits souvent violents » (Callon et al., 2001, p. 210).
  • [22]
    CGEDD, Plaquette de présentation de l’Autorité environnementale, 4 p., http://www.cgedd.developpement-durable.gouv.fr/presentation-r169.html (accès le 26/09/2015).
  • [23]
    Cela a été une orientation forte de la politique de dialogue développée à partir de 2006 par Réseau ferré de France (devenu SNCF Réseau le 1er janvier 2015) afin que des séquences de participation accompagnent les étapes de conduite des études de ses projets ferroviaires les plus controversés avant et après des débats publics. Pour les étapes post-débat depuis 2006, une autre innovation a consisté à développer systématiquement le rôle de tiers garant, en lien avec la CNDP.
  • [24]
    À l’instar d’autres domaines et d’autres pays, en particulier à partir des premières expériences de Planungszelle développées par Peter Dienel en Allemagne dès les années 1970 (Dziedzicki, 2001, p. 341).
  • [25]
    Expertise financée par la CNDP dans le cadre d’un débat public, par une autorité (ministère ou collectivité) dans le cas d’un conflit majeur, ou par le porteur de projet à travers une somme qu’il attribue à une association d’opposants afin qu’elle commandite sa propre étude auprès d’experts et sur une problématique qu’elle a choisis.
  • [26]
    Ce qui peut être le cas par exemple de dispositifs de mini-publics lorsque leurs objectifs ne sont pas clairement définis et communiqués.
  • [27]
    Charte de la concertation du Ministère de l’Aménagement du Territoire et de l’Environnement, 1996, 3 p. Cette charte propose un cadre souple pour la conduite de concertations locales sur des projets d’aménagement, en complément du cadrage législatif et plus rigide du débat public sur les grands projets d’équipements. Sur les intérêts et limites de cette charte, voir Ollivier-Trigalo et Piechaczyk (2001).
  • [28]
    Un processus de concertation peut conduire à l’abandon d’un projet en fonction notamment de la justesse des arguments développés par des opposants, s’ils sont argumentés et fortement relayés afin qu’ils pèsent dans les débats, ce qui suppose que le dispositif de participation publique s’inscrive dans un processus de concertation tel que nous l’avons défini.
Français

On assiste en France et dans d’autres pays à la récurrence des conflits d’aménagement depuis plusieurs dizaines d’années. La principale réponse à ces situations proposée par les pouvoirs publics et les aménageurs repose sur la mise en place de démarches de participation publique se fondant sur des dispositifs d’information et d’expression des populations concernées. À partir des critiques majeures adressées à la participation publique, nous proposons une grille d’analyse des principales attentes exprimées par les opposants aux projets d’aménagement afin d’expliciter ces critiques et de proposer des pistes de réponse. Celles-ci s’inscrivent dans la mise en place d’un processus de concertation permettant de mieux valoriser la participation publique.

Mots-clés

  • conflit d’aménagement
  • environnement
  • participation
  • délibération
  • concertation
  • négociation
  • France

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Jean-Marc Dziedzicki
Jean-Marc Dziedzicki traite des enjeux de conflits d’aménagement et de concertation depuis une vingtaine d’années. Il a contribué à la mise en place et au développement durant une dizaine d’années de la politique de concertation et de débat public de Réseau ferré de France (devenu SNCF Réseau depuis le 1er janvier 2015). Il a conduit également des travaux de recherche sur les conflits d’aménagement, la médiation environnementale et le débat public. Il intervient sur ces questions dans plusieurs universités. Parmi ses publications :
Dziedzicki J.-M., 2001, Gestion des conflits d’aménagement de l’espace : quelle place pour les processus de médiation ?, Thèse de doctorat en Aménagement de l’espace et urbanisme, Université de Tours, 442 p.
Dziedzicki J.-M., 2013, « Une conception renouvelée de la gouvernance territoriale à travers une plus grande participation du public et des parties prenantes », in L. Vodoz et al., Les horizons de la gouvernance territoriale, Presses polytechniques et universitaires romandes, p. 286-296.
Mis en ligne sur Cairn.info le 22/01/2016
https://doi.org/10.3917/parti.013.0145
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