CAIRN.INFO : Matières à réflexion

On observe depuis plusieurs décennies un rapprochement des pratiques des femmes et des hommes en matière de sexualité. Cela dit, leurs biographies affectives et sexuelles restent fortement marquées par le genre ; que l’on pense aux injonctions différenciées à l’adolescence (Clair, 2012 ; Dafflon, 2015), à l’initiation à la sexualité (Bajos, Rahin et Lydié, 2016) ou encore à la persistance d’asymétries quant au plaisir sexuel (Andro et al., 2010 ; Santelli, 2018), cet « opérateur hiérarchique du genre, mais aussi des sexualités » (Legouge, 2016 : 461). Si les femmes sont aujourd’hui davantage socialisées au désir et à la sexualité récréative, la « norme d’hétérosexualité reproductive » reste prégnante et « [celles] qui ont eu un nombre élevé de partenaires sont conscientes de la désapprobation qui pèse sur elles » (Santelli, 2018). Il a en outre été montré que certains écarts entre femmes et hommes s’accroissent au fil de l’âge, ces derniers maintenant plus fréquemment une activité sexuelle après 70 ans. Le baromètre de Santé publique France relève ainsi que seules 14,9 % des femmes célibataires âgées de 70-75 ans ont eu des rapports sexuels dans les douze derniers mois, contre 56,9 % de leurs homologues masculins de la même tranche d’âge (Bajos, Rahin et Lydié, 2016). Cette différence résulte notamment de l’intériorisation de rôles sexuels façonnés par des représentations associant sexualité féminine à l’affectivité et à la conjugalité, et sexualité masculine au désir et à ses manifestations physiques…

Français

Le cancer et ses traitements peuvent sensiblement affecter la sexualité des patient·e·s. Cette question centrale est encore peu prise en charge par les soignant·e·s, notamment par les infirmier·ère·s pourtant situé·e·s en première ligne du contact clinique. Les femmes âgées sont particulièrement impactées par ce manque d’attention. C’est sur la base d’une enquête qualitative auprès d’infirmier·ère·s que l’article relate les modalités de ce différentiel genré et montre combien les soignant·e·s contribuent à la reproduction, au sein de l’espace sanitaire, de stéréotypes découlant de rapports sociaux de sexe et d’âge qui ont cours dans l’espace social global. Portée par la conviction que les sciences sociales ont pour vocation de dévoiler les rapports sociaux de domination avant de fournir des armes intellectuelles pour les combattre, la seconde partie de l’article formule des pistes d’action afin d’infléchir les représentations et les pratiques de la sexualité dans les soins.

Marion Braizaz
Marion Braizaz est sociologue à la Haute école de santé Vaud, HES-SO. Ses intérêts portent sur les pratiques et les représentations du corps au prisme du genre. Après avoir étudié le rapport des femmes et des hommes à l’apparence (Enfance Famille Générations, Tracés, Ethnologie française), elle travaille sur les habitudes corporelles des ex-sportif·ve·s de haut niveau (Sciences sociales et sport). Récemment, elle a participé à une recherche traitant de la place de la sexualité dans les soins de santé (Genre, sexualité et société, Travail et Emploi).
HESAV/HES-SO, avenue de Beaumont 21, 1011 Lausanne, Suisse.
Kevin Toffel
Kevin Toffel est sociologue à la Haute école de santé Vaud, HES-SO. Ses intérêts portent sur les rapports sociaux dans le monde de la santé au travers des professions, de la sexualité et du corps. Dans le prolongement de ses recherches sur la profession infirmière (Profession & Professionalism, Revue française d’administration publique) et les effets des dispositions sociales sur les pratiques professionnelles (Émulations, Actes de la recherche en sciences sociales), il étudie les tenants de la sexualité dans les soins (Genre, sexualité et société, Travail et Emploi).
HESAV/HES-SO, avenue de Beaumont 21, 1011 Lausanne, Suisse.
Angélick Schweizer
Angélick Schweizer, chargée de cours à l’Université de Lausanne, est spécialisée dans l’étude de la sexualité. Après un doctorat en psychologie qui traite des discordances médecins-patientes face à l’abord de la sexualité en consultation gynécologique, elle a suivi une formation en sexologie clinique à l’Université de Genève. Spécialiste des méthodes qualitatives et mixtes, ses domaines de recherche traitent de la relation médecin-patient·e, de l’intégration de la santé sexuelle dans les soins, et de la santé communautaire.
UNIL, Bâtiment Géopolis, Quartier Mouline, 1015 Lausanne, Suisse.
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Mis en ligne sur Cairn.info le 08/07/2022
https://doi.org/10.3917/nqf.411.0032
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