CAIRN.INFO : Matières à réflexion

Introduction

1Se questionner dans les îles de l’Indo Pacifique sur les notions de « protéger » ou de gérer la nature conduit à deux aménagements vis-à-vis des habitus (Golsorkhi et Huault Lavoisier, 2006) des gestionnaires de l’environnement [1].

2En premier lieu, il s’agit de dépasser le strict cadre géographique des habitats à protéger ou gérer pour aborder les relations de connectivité physiques et biologiques qui les lient à des ensembles plus vastes : l’ensemble de l’île et ce qui l’entoure – récifs, lagon ou océan –, tout comme les biocénoses et biotopes qui s’y rattachent. Face à la grande diversité des espèces et habitats naturels rencontrés dans l’Indo-Pacifique insulaire, le cœur des réflexions gagne également à porter sur les personnes impliquées dans l’utilisation de l’espace, sur leur manière de voir les différents éléments du territoire et d’en organiser la gestion (Payri et Vidal, 2019).

3Il s’agit en second lieu de dépasser le cadre disciplinaire de l’écologie ou de la biologie des populations pour intégrer de nouvelles perspectives relevant des sciences humaines et sociales, encore trop peu mobilisées à ce jour en tant qu’outil d’aide à la gestion. Les informations apportées par l’étude des écosystèmes représentent pour les agents des collectivités en charge de la gestion de la nature une base opérationnelle incontournable qui, depuis le début des années 2000, s’attache aussi à intégrer la compréhension de la dimension humaine dans la gestion de l’exploitation des ressources dans les aires naturelles protégées (FAO, 2012). Néanmoins, pour certains gestionnaires, la tendance à considérer la gestion de l’environnement selon le rapport « prédateur-proies » perdure. Les hommes seraient alors avant tout des « forçages » sur les milieux naturels [2]. Il convient pourtant de rappeler que la gestion de l’environnement repose surtout sur une « gestion sociale », à savoir celle des rapports entre les hommes à propos de l’environnement (Weber, 2000), qui mérite d’être appréciée dès les premières réflexions de planification d’aires protégées.

4La viabilité des aires marines protégées (AMP), nombreuses dans les territoires insulaires, repose sur trois piliers que sont l’acceptabilité sociale des usagers, le financement durable par les services publics et privés et la conservation et/ou restauration des habitats par les gestionnaires (David et Thomassin, 2007 ; Thomassin et al., 2010). Accroitre l’acceptation sociale devrait donc figurer parmi les priorités à assigner à la gouvernance de toute AMP (David, 2010). En retour, ces politiques doivent être capables de se réinventer en fonction des attentes et des besoins des populations dont les avis ont de plus en plus tendance à être pris en compte. Trouver un équilibre dynamique entre, d’une part, les éléments écologiques qui justifient l’intervention publique et, de l’autre, les pratiques et les attentes des habitants/usagers apparaît donc absolument impératif pour que la protection soit effective.

5Au lieu de mener des travaux de recherches en sciences sociales a posteriori lorsque des conflits d’usage émergent sur un territoire (en lien avec la mise en place de nouvelles activités, l’apparition ou l’expansion de groupes d’usagers ou la mise en œuvre d’une nouvelle politique de gestion et/ou protection de la ressource naturelle), nous défendons la nécessité d’engager ce type de travaux ex-ante lorsque doivent s’engager des processus d’ajustement ou la création de nouvelles politiques environnementales afin d’avoir une compréhension la plus complète possible des enjeux sociaux, culturels et identitaires du territoire.

6La production et l’application des politiques de gestion environnementale gagne en particulier à être précédée de l’analyse de la diversité des valeurs accordées au territoire et des pratiques et normes de gestion déjà existantes (Barataud et al., 2018 ; Christie et al., 2003). S’y adjoignent idéalement dans une démarche de concertation l’analyse des savoirs et droits autochtones pour leur intégration dans la production de politiques de gestion (Kleiche-Dray, 2017 ; Landivar et Ramillien, 2017).

7Une sensibilisation accrue des collectivités à mobiliser des sciences humaines pour appuyer la mise en place des politiques publiques doit donc se poursuivre. De surcroît, elle requiert des chercheurs une mise à disposition adaptée des résultats de leurs études afin de répondre aux attentes des gestionnaires et assurer ainsi la conception de politiques de gestion plus ajustées aux défis de protection de la biodiversité et de maintien d’une société en bonne santé [3].

8Comment appréhender de manière sensible (Amphoux, 1999) les savoirs et valeurs sociales et culturelles accordées aux habitats et aux territoires marins de manière à les rendre utiles et compréhensibles par ceux qui construisent les politiques et les font appliquer ? Des approches disciplinaires et interdisciplinaires en sciences humaines et sociales peuvent-elles rendre compte fidèlement des réalités locales tout en les traduisant de sorte qu’elles aient une portée opérationnelle au même titre que les indicateurs déterminés par l’étude de la biologie et de l’écologie des habitats naturels ?

9Les démarches engagées dans des îles de l’outre-mer français, disposant ou non d’une autonomie relative par rapport aux normes de mise en œuvre des politiques de gestion de l’État, permettent d’examiner ces questions avec un nouveau regard. Le programme ESPAM « Espèces emblématiques, acceptation sociale, aire marine protégée », financé par la Fondation de France et la province des îles Loyauté (Nouvelle-Calédonie), ambitionne de répondre à ces questions. Déployé en Nouvelle-Calédonie et à La Réunion et reposant sur la tenue d’entretiens semi-directifs et de questionnaires, il a entre autres permis de classer et quantifier l’information qualitative fournie par le public appelé à décrire son point de vue sur le caractère emblématique des espèces marines. Ainsi, l’approche sensible qualitative a été complétée par une approche sémantique quantitative qui offre une gamme de repères commune aux deux territoires et à tous les acteurs. L’objectif opérationnel de la recherche menée est de permettre une communication facilitée par un support sémantique quantifié constituant un support au dialogue et à la construction de normes.

10Durant deux années (2018-2019), des habitants de Nouvelle-Calédonie et de La Réunion ont été interrogés sur leurs liens à la mer et sur l’importance qu’ils donnaient à certaines espèces marines. Ont en particulier été scrutées les raisons qui conduisaient les insulaires à accorder des valeurs particulières à certaines espèces. Ces informations ont été organisées en base de données et l’analyse des relations entre les données peut être visualisée par des graphiques et des cartes constituant des supports utiles pour un débat avec les gestionnaires des collectivités. Au-delà de son ambition méthodologique, le programme ESPAM a permis d’analyser les représentations que les habitants des deux territoires ont des espèces emblématiques et de comprendre les transformations touchant les rapports qu’ils entretiennent avec l’océan, le récif, le lagon et leur gestion.

11L’objectif du présent article est de démontrer comment un développement méthodologique alliant des approches qualitatives et quantitatives permet de mieux appréhender les représentations et de produire des outils de dialogue accessibles aux divers acteurs territoriaux.

12Dans un premier temps, nous décrirons comment les contextes particuliers à la Nouvelle-Calédonie et à La Réunion ont fait émerger le besoin de produire des outils méthodologiques innovants pour appuyer les collectivités publiques dans les réflexions pour la gestion des espaces naturels. En nous appuyant sur la définition sémantique de classes réalisée à l’interface des disciplines relevant de l’anthropologie, de la géographie, de la biologie, du droit et des mathématiques, nous montrerons que le fait sensible peut être normé puis quantifié, constituant ainsi une nouvelle métrologie [4] du fait social affilié aux habitats naturels protégés. Nous décrirons ensuite les premiers résultats que la recherche a pu mettre en avant sur les liens à la mer qu’entretiennent les insulaires de La Réunion et de la Nouvelle-Calédonie. Nous examinerons en particulier la diversité des espèces animales porteuses de sens dans les deux territoires ultramarins et discuterons des raisons de leur caractère emblématique attribué par la population. L’analyse de la fréquence des classes de raisons invoquées apporte un nouvel éclairage de la dimension sociale attachée à la faune marine. Son possible impact dans l’ajustement et l’acceptation des politiques de conservation sera analysé. Enfin l’opportunité de cette approche dans l’évolution de la gestion du milieu marin sera posée.

Deux territoires ultramarins face des défis socio-environnementaux

Généricité et spécificité physique et socio-économique de La Réunion et de la Nouvelle Calédonie

13D’une superficie de 2 500 km2, La Réunion est l’unique île océanique de l’océan Indien au volcanisme toujours actif [5]. Son émergence récente (2 à 3 millions d’années) explique son relief montagneux très escarpé qui culmine à une altitude de 3 069 m (figure 1). Le corollaire de cette géomorphologie est un étroit plateau continental, avec des fonds marins dépassant rapidement 4 000 m de profondeur, et une colonisation corallienne récente datée de 8 500 ans, les formations récifales et les plages associées n’occupant que 25 km de linéaire sur les 200 km de côtes que compte l’île (Mirault et David, 2009 ; Montaggioni, 1978). D’une superficie de 18 576 km2, l’archipel de la Nouvelle-Calédonie se compose d’une île principale dénommée « Grande Terre », détachée du Gondwana vers la fin du crétacé, et de neuf autres îles habitées dont quatre constituent les îles Loyauté. Avec une Z.E.E. de 1,4 millions de km2, 1 500 km linéaires de récif barrière, totalisant 1 750 km2 et un lagon de 16 800 km2, la Nouvelle Calédonie représente un milieu récifal d’intérêt mondial (figure 2). La Réunion et La Nouvelle Calédonie s’affirment ainsi par leur spécificité géomorphologique et leur position géographique, de part et d’autre du foyer de la biodiversité dans la province biogéographique indopacifique.

Figure 1 : La Réunion, carte de situation et statut de protection des espaces marins. Réalisation : S. Delebecque / Reunion Island, location map et protection status about marine areas

Figure 0

Figure 1 : La Réunion, carte de situation et statut de protection des espaces marins. Réalisation : S. Delebecque / Reunion Island, location map et protection status about marine areas

Sources : IFREMER, Agence des aires marines protégées, OFB, GEBCO, DITTT, Natural Earth

Figure 2 : Nouvelle-Calédonie, carte de situation et statut de protection des espaces marins. Réalisation : S. Delebecque / New Caledonia, location map and protection status about marine aeras

Figure 1

Figure 2 : Nouvelle-Calédonie, carte de situation et statut de protection des espaces marins. Réalisation : S. Delebecque / New Caledonia, location map and protection status about marine aeras

Sources : IFREMER, Agence des aires marines protégées, OFB, GEBCO, DITTT, Natural Earth

14Cette spécificité s’exprime aussi en matière de démographie. La Réunion abritait en 2017 853 659 habitants et sa population devrait atteindre le million d’habitants en 2037 (Merceron, 2017). La population se concentre à 82 % sur la frange littorale où la densité à l’hectare est de 3 à 4 fois supérieure à la densité moyenne, les Hauts de l’île qui occupent 67 % du territoire étant très faiblement peuplés. Comparativement, la pression démographique en Nouvelle-Calédonie peut être considérée comme faible. La population calédonienne a atteint en 2019 271 407 habitants répartis inégalement entre les trois provinces (203 144 en province Sud, 49 910 en province Nord et 18 353 aux îles Loyauté) et se concentrant la région du Grand Nouméa pour 67 % (ISEE 2019).

15À La Réunion comme en Nouvelle Calédonie, le tourisme était considéré avant la pandémie de Covid 19 comme un secteur économique d’avenir. En 2018, 574 000 touristes se sont rendus dans l’île de La Réunion (Anonyme, 2019). Le parc hôtelier de l’île se concentre principalement sur St Denis et la côte ouest. En 2007, cette dernière a accueilli près de la moitié des nuitées sur l’île (Mirault et David, 2008). En Nouvelle Calédonie, la stratégie de développement touristique a pour objectif l’accueil de 200 000 touristes et de plus d’un million de croisiéristes à l’horizon 2053 [6]. C’est une ambition remarquable compte tenu de la faible croissance observée durant les dernières décennies (Gay, 2020) [7]. Seul le tourisme de croisière présente un développement significatif mais ne concerne que Nouméa, l’île des Pins, Lifou et Maré. À La Réunion et en Nouvelle Calédonie, le secteur économique du tourisme s’appuie sur la préservation des écosystèmes (Dumas et Cohen, 2019).

Penser la gouvernance pour des populations développant des liens forts avec les habitats marins protégés

16La mise en place d’aires marines protégées [8] s’inscrit dans la démarche internationale de l’Agenda 21 et de la Convention sur la Biodiversité Biologique, tous deux adoptés lors du Sommet de la Terre à Rio en 1992 (Feral, 2012). Néanmoins l’histoire de la mise en protection comme les processus de gouvernance engagés diffèrent sur les deux territoires.

17L’idée de protéger les récifs de La Réunion par la création d’une AMP a été émise pour la première fois au début des années 1980 lorsque les premières thèses d’écologie récifale ont montré un changement majeur de l’écosystème, les algues progressant au détriment des formations coralliennes (Bouchon, 1978 ; Faure, 1982 ; Ribes 1978). Département français, La Réunion bénéficie d’une délégation de compétences définie par la décentralisation. Les collectivités ont en charge la protection des espaces naturels. Mais ce n’est qu’en 1997 que le processus de création d’un « parc marin » s’est matérialisé (David et al., 2009). Regroupant les formations récifales de sept communes littorales et géré par une association du type loi 1901, le parc marin a perduré durant dix ans, jusqu’à la création par décret ministériel en mai 2017 de la Réserve Naturelle Marine de La Réunion (RNMR). Celle-ci assure la gestion et la protection d’un espace marin littoral de 35 km2, dont 5 % ont le statut de réserve intégrale et 45 % celui de protection renforcée (Thomassin, 2011). En raison de l’importance que revêt le récif de La Réunion pour les petits pêcheurs vivriers et récréatifs (Mirault et David, 2006), les problèmes d’acceptation sociale ont dominé les premières années de la RNMR (Thomassin et al., 2010 ; Thomassin et David, 2014). Au moment où cette acceptation allait en s’améliorant, à partir de 2011, une vingtaine d’attaques de requins bouledogues ont conduit à un effondrement de la fréquentation du littoral, portant préjudice à l’économie et aux relations sociales entre les usagers du lagon, notamment les surfeurs et les défenseurs de l’environnement marin (Lemahieu et al., 2017 ; Taglioni et Guiltat, 2015). Cette « crise requin » a impacté par ricochet l’acceptation sociale de la réserve marine rendue responsable par certains usagers, très actifs sur les réseaux sociaux, de la prolifération des requins bouledogues et des attaques qui en ont découlé (Cillaurren et David, 2017).

18Collectivité ultramarine sui generis, la Nouvelle-Calédonie est engagée dans un processus de décolonisation négociée depuis les années 1980 (le second référendum pour l’indépendance a eu lieu le 5 octobre 2020 et le troisième est prévu le 12 décembre 2021). Elle construit son avenir en tentant de composer avec les différents enjeux socio-économiques qui la caractérisent (en particulier l’industrie minière et métallurgique, le tourisme, le développement agricole et halieutique), une population diversifiée en termes d’appartenance communautaire et métissée – les Kanak, premiers occupants du pays forment 39 % de la population [ISEE 2014] – , et des enjeux écologiques essentiels, dans le sud de la Grande terre, l’endémicité de la biodiversité terrestre peut atteindre les 95 % (Richer de Forges et Pascal, 2008).

19L’inscription en 2008 de 15 808 km2 de barrière récifale et de lagon au Patrimoine mondial de l’Unesco a accru par 35 la superficie initialement protégée de 446 km2 (David et al., 2010 ; David, 2018). Composé de six biens, deux dans chaque province, ce patrimoine assure à la Nouvelle Calédonie une visibilité internationale dans le domaine de la protection des habitats coralliens et de leurs biocénoses. Cette lisibilité s’est accrue en avril 2014 avec la création du Parc naturel de la Mer de Corail sur l’ensemble de la ZEE de la Nouvelle-Calédonie, soit 1 394 millions de km2 (figure 2).

20Étant donné les spécificités administratives et territoriales de la Nouvelle-Calédonie, les trois provinces de la Nouvelle-Calédonie et la Nouvelle-Calédonie elle-même sont chacune compétentes sur leur territoire en matière de gestion de l’environnement (David et David, 2014). Elles expérimentent d’ailleurs diverses approches pour construire des politiques environnementales plus ajustées aux enjeux sociaux et écologiques locaux (Citré, 2019 ; Sabinot et Bernard, 2016). L’objet de cet article n’étant pas de les détailler, seuls trois points seront mis en avant. Le premier est que l’Article 46 de la Loi organique (1999) qui définit le rôle des provinces en matière de gestion de l’environnement précise aussi que « les provinces prennent, après avis du conseil coutumier concerné, les dispositions particulières nécessaires pour tenir compte des usages coutumiers ». L’indispensable dialogue entre l’institution provinciale et les autorités coutumières kanak est ainsi formalisé par écrit, et appliqué en suivant différents procédures et arrangements dans les codes de l’environnement de chacune des provinces. Le second point est que les six biens du Patrimoine mondial intègrent des aires protégées provinciales et qu’ils s’accompagnent de comités de gestion composés d’une grande diversité d’acteurs représentant la diversité associative, ethnique, institutionnelle et socioprofessionnelle des provinces. Le troisième fait marquant concerne les importantes discussions et négociations relatives aux usages de la zone et à la confrontation entre des représentations sociales territoriales diverses qui ont marqué la création du Parc naturel de la Mer de Corail (Dégremont et Sabinot, 2020). Aujourd’hui, le comité de gestion du Parc de la mer de Corail est composé de quatre collèges – institutionnel, socioprofessionnel, coutumier et société civile – et est doté d’un conseil scientifique. Un des objectifs du plan de gestion est de parvenir à articuler les attentes sociales, économiques et coutumières pour assurer un zonage pertinent du parc et une bonne protection du patrimoine.

21Sur l’île de La Réunion comme sur l’archipel de la Nouvelle-Calédonie, les travaux qui ont été le support de la production des normes de gestion des espaces protégées mentionnés plus haut ont largement étudié la biodiversité exceptionnelle et/ou vulnérable à protéger et se sont principalement appuyés sur des études décrivant les habitats, la diversité biologique et mettant en avant le besoin de les protéger des pressions anthropiques. L’argumentaire visant à valoriser l’effet réserve auprès des populations riveraines des AMP et les bénéfices induits par leur création font principalement état de l’amélioration de la biodiversité. L’intérêt porté aux bénéfices socio-économiques est moindre, mais ce constat n’est ni spécifique de la Réunion [9], ni de la Nouvelle-Calédonie (Chaboud et al., 2009).

22Ainsi, même si l’objectif de la conservation du patrimoine naturel relève de l’intérêt général et que des connaissances scientifiques établies guident les réglementations nécessaires, la gouvernance des aires marines protégées ne peut oblitérer l’acceptation sociale (David, 2019). Une politique de gestion portée et coconstruite avec les populations des territoires concernés requiert, pour être efficiente, au moins un accord a minima et, dans l’idéal, une inclusion réelle des habitants. En Nouvelle-Calédonie, l’établissement d’aires marines protégées et la constitution de comités de gestion locaux, particulièrement encouragée dans le cadre de l’inscription des lagons dans la catégorie « patrimoine naturel » de l’Unesco, ont constitué un tournant dans l’implication des habitants dans les processus de décision relatifs aux territoires mis en protection (délimitation, choix de gouvernance, etc.). Cette gouvernance a l’ambition d’être locale et globale en positionnant la Nouvelle Calédonie sur la scène internationale comme un acteur majeur de la conservation de la biodiversité récifale.

23À La Réunion, l’action des scientifiques lanceurs d’alerte relayée par l’ONG Vie Océane qu’ils ont créée pour peser sur la vie publique a été déterminante (David et al., 2009). Bien qu’il n’y ait pas de comités de gestion locaux, les gestionnaires œuvrent à entretenir des liens réguliers avec les usagers du récif tels que les associations de pêcheurs ou les clubs de plongée. L’objectif est de consolider localement une gouvernance participative afin de mettre en exemple la Réserve Marine comme une expérience réussie de conservation du patrimoine naturel dans un environnement soumis à une forte pression anthropique.

24Malgré cette démarche progressive et globalement acceptée, les gestionnaires des aires marines protégées en Nouvelle Calédonie et à La Réunion restent soumis à des difficultés d’application des réglementations. C’est pourquoi, ils sont demandeurs de méthodes innovantes pour ajuster les politiques environnementales et leur mise en œuvre dans le but de favoriser et pérenniser leur acceptation.

25Ils font en particulier souvent face à des conflits entre l’exploitation et la protection de certaines espèces considérées comme emblématiques et peinent à endiguer des phénomènes de braconnage (dugongs, tortues, poissons de récifs, requins…) et à éviter des tensions entre les personnes à propos d’une espèce.

26C’est dans ce cadre que notre équipe de chercheurs s’est constituée pour tenter, selon une approche transversale, d’interroger la gestion des territoires marins via les espèces marines dites « emblématiques ». Cette démarche intégrant plusieurs disciplines, associant données qualitatives et mesures quantitatives, a l’ambition d’analyser selon cette double approche la fonction du caractère emblématique des ressources vivantes dans la mise en place de la protection d’espaces naturels.

Une démarche croisant les approches disciplinaires

27Avoir une connaissance fine des réalités locales et en rendre compte est une ambition que partagent anthropologues et géographes, entre autres chercheurs relevant des sciences humaines et sociales. La mise à disposition de nos travaux se fait via des articles scientifiques, des ouvrages, des conférences durant des événements scientifiques. Elle se fait également sur les territoires où nous travaillons via des rapports de recherche, des restitutions orales aux populations, aux agents techniques des collectivités, aux élus, etc. Toutefois, ces modes de restitutions peuvent s’avérer insuffisants pour être rapidement mobilisés par les acteurs en charge de la production et de la mise en œuvre des politiques de gestion de l’environnement.

28Pour que des travaux de recherche soient appropriés par les agents des collectivités, cela requiert qu’ils soient bien compris et donc pensés en amont pour répondre attentes et aux besoins explicites, voire implicites (Antona et al., 2007). Pour y parvenir, il est pertinent que chercheurs et gestionnaires territoriaux coconstruisent la problématique de recherche, puis lorsque cela est possible, que les résultats soient traduits dans des formes pertinentes pour les acteurs qui les mobiliseront. En matière de gestion des aires marines protégées, les acteurs des collectivités sont habitués à accompagner leur suivi et leur prise de décision d’indicateurs quantitatifs et qualitatifs renseignant l’état de la ressource, les usages, et de manière grandissante la gouvernance (Sicard, 2013). C’est pourquoi nos expériences dans les îles, de l’Outremer en particulier, nous ont conduit à engager une réflexion méthodologique très en amont qui se positionne à l’interface des disciplines afin de quantifier des représentations sociales portant sur le territoire marin et construire une métrique ou échelle de valeurs du lien construit par la société avec le milieu marin. Cette métrique s’appuie sur une détermination de la sensibilité de l’usager vis-à-vis du lagon et en particulier des valeurs qu’il accorde aux espèces marines caractéristiques de l’endroit.

Une analyse sensible des réalités locales

29L’analyse sensible d’une réalité territoriale, qu’il s’agisse de la description d’un paysage ou de son aménagement (Amphoux, 1999 ; Herbillon et Pouységur, 1996) permet d’appréhender une réalité complexe qui demande une approche holistique. Le contexte territorial créé par la présence d’espèces perçues comme emblématiques intègre les fondamentaux de l’analyse sensible, soit l’association, par un observateur, de la description matérielle des objets et de l’interprétation de leur existence. Subjectivité et objectivité sont les piliers de cette analyse.

30En Nouvelle Calédonie, les études ethnographiques contribuent depuis le xixe siècle à mieux comprendre les sociétés vivant sur le territoire calédonien (Barrau, 1983 ; Godelier, 1984 ; Haudricourt, 1964 ; Leenhardt, 1930). Depuis les années 1980, géographes et anthropologues ont engagé des études s’intéressant aux transformations sociales et territoriales du littoral et plus particulièrement aux usages pratiqués dans le lagon (Bodmer, 2011 ; David, 2008 ; Dumas, 2009 ; J.-B. Herrenschmidt, 2002 ; Leblic, 2005, 2008 ; Le Duff, 2018 ; Mallet et al., 2019 ; Teulières-Preston, 2000). Certains auteurs questionnent plus spécifiquement les politiques environnementales, souvent à des échelles locales (Teulières-Preston 1992 ; Horowitz 2004 ; Herrenschmidt et Léopold 2006 ; Horowitz 2008 ; Faurie 2011 ; Le Meur et al. 2012 ; Dégremont 2015 ; Cornier et Leblic 2016 ; Horowitz 2016 ; Sabinot et Bernard 2016 ; Gonson et al. 2017).

31Depuis 2013, des études en anthropologie et en géographie ont été réalisées en lien très étroit avec les collectivités provinciales en charge de la gestion de l’environnement, voire à leur demande, et ont permis de mieux saisir les difficultés rencontrées par leurs agents ainsi que les malentendus, décalages de points de vue, et tensions émergeant dans chaque localité à propos de la gestion de l’environnement marin (Projets Cogérons [10], PAMPA [11], BEST Corail [12], LIVE [13], PêchePro-PN [14], Suivi de la pêche informelle [15]).

32À La Réunion, les premières études en sciences sociales portant sur le milieu côtier ont été réalisées dans le cadre du programme Environnement de la Commission de l’Océan Indien (1995-2000) et du programme de recherche Environnement littoral, biodiversité et ressources marines dans le sud-ouest de l’océan Indien (1999-2001) conduit par l’université de La Réunion. Sur la période 2002-2008, elles ont débouché sur un ouvrage collectif sur le territoire littoral (Cherubini, 2004), deux projets de recherche portant sur respectivement sur la valeur socio-économique des récifs coralliens de La Réunion (David et Mirault, 2003 ; Mirault et al., 2006 ; Mirault et al., 2002 ; Mirault et David, 2006, 2008) et la gestion intégrée des littoraux (David et al., 2009 ; Lointier et al., 2005) et trois thèses de doctorat (Lilette, 2007 ; Mirault, 2007 ; Picard, 2001). La création de la Réserve Naturelle Marine de La Réunion en 2007 a été l’occasion de dresser un diagnostic socio-économique de l’état initial de la RNMR parallèlement au diagnostic écologique (Thomassin et David, 2008). Cette étude s’est prolongée de 2008 à 2010 par l’élaboration d’indicateurs visant à définir “l’effet réserve” dans le cadre du projet PAMPA (Indicateurs de la performance d’aires marines protégées pour la gestion des écosystèmes côtiers, des ressources et de leurs usages) tant d’un point de vue biologique (Tessier et al., 2011) que socio-économique (Thomassin et al., 2010, 2011 ; Thomassin et David, 2014). Dans une île haute comme La Réunion, la mise en place des AMP n’est qu’une condition nécessaire mais non suffisante à la préservation de l’écosystème corallien et de ses fonctionnalités. Elle doit être combinée à une ambitieuse gestion intégrée des zones côtières. Ce constat a conduit à la réalisation en 2011 et 2012 du projet « Faisabilité pour un suivi socio-économique des récifs coralliens de l’outre-mer français », financé par l’Initiative Française pour les Récifs coralliens (IFRECOR), dans lequel le chantier Réunion occupe une place centrale (David, 2012). Ce développement d’une gestion holistique des relations bassins versants/littoral a été complété de 2012 à 2015 par la mise en œuvre d’un suivi de la fréquentation et des usages des littoraux coralliens de la RNMR (Lemahieu et al., 2013, 2017) aujourd’hui inscrit dans l’OSU-Réunion. Sept ans après la création de la RNMR et le diagnostic socio-économique de l’état initial de la réserve, il a été jugé nécessaire de dresser un bilan de l’effet « réserve » en évaluant son acceptation sociale (Cillaurren et David, 2017 ; David et Cillaurren, 2016).

33À La Réunion comme en Nouvelle Calédonie, la gestion des aires protégées reste en demande d’une adhésion croissante des populations et d’une reconnaissance de la dimension patrimoniale plus partagée. L’espèce emblématique telle que définie par l’INPN [16] est un concept qui lie l’Homme à La Nature. Par ailleurs, chaque individu à sa propre acception du qualificatif emblématique. C’est pourquoi, les liens entre espèces emblématiques et acceptabilité des règles de gestion et des aires protégées ont été explorés dans le cadre du programme ESPAM, dans l’objectif ultime d’appuyer les gestionnaires dans leurs pratiques.

34La section suivante présente les résultats d’une des étapes constituée de simples questionnaires soumis à la population lors de réunions ou de rencontres publiques.

Une analyse quantitative supportée par une grille codée de la représentation des espèces emblématiques

35L’expression quantifiée d’une information qualitative peut être comprise comme une « passerelle » utile à l’interdisciplinarité. Elle permet ainsi d’associer les mesures et comptabilités d’objets avec leur description. Ces deux composantes d’un paysage informatif ont été identifiées en Nouvelle Calédonie et à La Réunion.

36573 personnes ont été interrogées sur la base d’un questionnaire systématique conduit de la même manière à La Réunion (93 pers.) et en Nouvelle-Calédonie (382 pers.) [17]. Il s’agissait pour chacun de mentionner les espèces qui ont un caractère emblématique/important et d’indiquer pourquoi elles l’étaient [18]. Les enquêtés étaient invités à formuler eux-mêmes les réponses sous un format complètement libre afin de conserver la sensibilité et l’individualité de chaque répondant. Une troisième question permet au répondant de qualifier le lien qu’elle a avec le milieu marin. Les 3255 réponses obtenues ont été répertoriées dans une base donnée relationnelle sous PostgreSQL [19]. Chaque mention d’animal est rattachée dans la base de données à une clé qui la relie aux métadonnées sur l’entretien (date, lieu, etc.) et sur un individu (l’anonymat est conservé tout en maintenant la connaissance de la liste de toutes les espèces citées par même individu).

37Chacune des informations accompagnant une citation d’espèce a été rattachée à un ou plusieurs domaines thématiques. Pour produire une liste commune des domaines aux deux territoires, un atelier méthodologique collectif s’appuyant sur les données collectées à La Réunion et en Nouvelle-Calédonie a été organisé fin 2017. Huit chercheurs relevant de différentes disciplines étaient présents. Dans une démarche interdisciplinaire, intégrant pour chaque représentation avancée par la personne enquêtée les approches anthropologiques, biologiques, géographiques, juridiques et statistiques, un code thématique a été attribué. Une liste de codes commune à La Réunion et à la Nouvelle Calédonie a été identifiée de manière itérative.

38Décrire l’évolution du thésaurus constitué permet de comprendre les difficultés inhérentes à la catégorisation d’explications libres rédigées par les enquêtés et les précautions à prendre pour aboutir à un thésaurus le plus robuste possible. Celui-ci est constitué in fine de 22 domaines thématiques principaux classant ainsi les raisons justifiant le caractère emblématique des espèces citées [20].

39Lors du premier atelier, sur 430 raisons citées par les répondants dans les questionnaires, 159 regroupements ont d’abord été obtenus à un premier niveau de classification, et ont été rattachés aux réponses via un identifiant renvoyant au thésaurus. La seconde étape a été de classer ces différents regroupements dans des domaines thématiques. Cette procédure pose la difficulté du choix des frontières sémantiques. Si une définition interdisciplinaire du domaine thématique peut être produite de manière collégiale, son application demande toujours un ajustement pour nombre de déclarations. La définition de ces domaines thématiques s’est construite ainsi de manière itérative comme un modèle mathématique. Depuis le premier atelier, plus de 2 500 citations nouvelles ont été ajoutées et rattachées à un ou plusieurs des 22 domaines thématiques choisis (le premier niveau de classification qui comportait 159 regroupements de raisons en comporte désormais 201 tous rattachés à un des 22 domaines thématiques), et aucune difficulté d’encodage n’a été rencontrée.

40La base de données obtenue compile aujourd’hui 3 480 citations d’animaux rattachées à des domaines spécifiant l’importance que revêt l’animal pour chaque répondant. Sont aussi intégrées des données sur l’animal cité (nom scientifique, noms français courant et vernaculaire), le répondant lui-même (âge, sexe, lieu d’habitation, etc.), l’entretien (date, lieu). Tout type de requête peut ensuite être formulé afin d’obtenir des résultats chiffrés à partir de considérations sensibles et présente l’avantage d’être traduisible en représentations graphiques.

Des résultats clefs pour intégrer les représentations des espèces emblématiques dans la gestion des aires marines protégées

Une diversité spécifique révélatrice de la territorialité du caractère emblématique

41Le premier résultat significatif concerne la fréquence de citation des espèces considérées comme emblématiques. En effet, à la question « Quelle espèce marine est emblématique pour vous ? », 137 espèces (ou groupes d’espèces) sont citées. La figure 3 [21] représente la fréquence de citations d’espèces en Nouvelle Calédonie et à La Réunion. Le grand nombre d’espèces citées et l’irrégularité des fréquences de citation témoignent de la richesse des représentations du monde marin par les enquêtés.

Figure 3A : Représentation du nombre de citations par espèce ou groupe d’espèces (taille proportionnelle au nombre de citations) pour La Réunion (A). Ici : espèces ou groupes d’espèces citées au moins 2 fois comme emblématiques à La Réunion (n = 201*) / Illustration of the number of citations by species or group of species (size proportional to the number of citations) for Reunion Island (A)

Figure 2

Figure 3A : Représentation du nombre de citations par espèce ou groupe d’espèces (taille proportionnelle au nombre de citations) pour La Réunion (A). Ici : espèces ou groupes d’espèces citées au moins 2 fois comme emblématiques à La Réunion (n = 201*) / Illustration of the number of citations by species or group of species (size proportional to the number of citations) for Reunion Island (A)

* Chiffre correspondant aux citations prises en compte dans le graphique (espèces citées au moins 2 fois). En tout, 201 mentions d’animaux ont été collectées auprès des 93 personnes.

Figure 3B : Représentation du nombre de citations par espèce ou groupe d’espèces (taille proportionnelle au nombre de citations) pour la Nouvelle-Calédonie (B). Ici : espèces ou groupes d’espèces citées au moins 10 fois comme emblématiques en Nouvelle Calédonie (n = 2694*) / Illustration of the number of citations by species or group of species (size proportional to the number of citations) for New Caledonia (B)

Figure 3

Figure 3B : Représentation du nombre de citations par espèce ou groupe d’espèces (taille proportionnelle au nombre de citations) pour la Nouvelle-Calédonie (B). Ici : espèces ou groupes d’espèces citées au moins 10 fois comme emblématiques en Nouvelle Calédonie (n = 2694*) / Illustration of the number of citations by species or group of species (size proportional to the number of citations) for New Caledonia (B)

* Chiffre correspondant aux citations prises en compte dans le graphique (espèces citées au moins 10 fois). En tout, 2694 mentions d’animaux ont été collectées auprès des 480 personnes.

42Même si 80 % des citations ne concernent qu’un groupe limité d’espèces, les agents en charge de la gestion territoriale ont été surpris par la grande diversité des espèces citées. Ce résultat ouvre le débat sur la complexité du lien des populations locales avec le milieu marin. Il suggère notamment le besoin d’intégrer cette diversité dans la réglementation, la sensibilisation et la protection, de manière à prendre en compte la diversité des valeurs sociales et culturelles associée à la représentation des espèces emblématiques. Axer la mise en place d’une aire protégée sur la diversité des espèces qui comptent pour la population riveraine est une stratégie qui ne peut favoriser que son acceptation sociale.

43Cette diversité est plus marquante en Nouvelle Calédonie (43 espèces ou groupes d’espèces) qu’à La Réunion (26 espèces ou groupes d’espèces). Pour les deux territoires, les baleines, les tortues et les requins sont les trois espèces les plus communément citées comme emblématiques. En revanche, les dauphins à La Réunion et le dugong en Nouvelle Calédonie sont les deux espèces affichant une spécificité territoriale dans leur caractère emblématique.

Une diversité de représentations porteuse d’une gestion négociée

44La citation d’espèces ou groupes d’espèces emblématiques est toujours associée aux raisons attribuées à leur caractère emblématique. Les figures 4A et 4B présentent 22 thèmes expliquant ce caractère en Nouvelle Calédonie et 19 à La Réunion. En Nouvelle-Calédonie, la consommation, le lien à une organisation socio-symbolique et la menace pesant sur l’espèce s’imposent comme les indicateurs prépondérants du caractère emblématique. À La Réunion, l’observation des caractéristiques physiques de l’espèce, le souci de sa protection et la symbolique de l’animal sont les trois raisons principales attachées à l’attribution du caractère emblématique.

Figure 4A : Nombre d’espèces ou de groupes d’espèces référencées par leur affiliation aux domaines thématiques décrivant le caractère emblématique en Nouvelle-Calédonie (n = 3680) / Number of species or groups of species referenced by their affiliation to the thematic field describing the emblematic character in New Caledonia (n = 3680)

Figure 4

Figure 4A : Nombre d’espèces ou de groupes d’espèces référencées par leur affiliation aux domaines thématiques décrivant le caractère emblématique en Nouvelle-Calédonie (n = 3680) / Number of species or groups of species referenced by their affiliation to the thematic field describing the emblematic character in New Caledonia (n = 3680)

Figure 4B : Nombre d’espèces ou de groupes d’espèces référencées par leur affiliation aux domaines thématiques décrivant le caractère emblématique à La Réunion (n = 318) / Number of species or groups of species referenced by their affiliation to the thematic field describing the emblematic character in Reunion Island (n = 318)

Figure 5

Figure 4B : Nombre d’espèces ou de groupes d’espèces référencées par leur affiliation aux domaines thématiques décrivant le caractère emblématique à La Réunion (n = 318) / Number of species or groups of species referenced by their affiliation to the thematic field describing the emblematic character in Reunion Island (n = 318)

45Quel que soit le territoire concerné, nous avons observé que pour 16 des 137 espèces citées, entre 15 et 22 raisons différentes justifiant leur caractère emblématique ont été listées. La baleine est l’animal auquel les Réunionnais et les Calédoniens interrogés accordent le plus de valeurs différentes. Suivent par ordre décroissant les espèces ou familles suivantes : tortue, dugong, requin, dawa, poissons, picot, corail, dauphin, napoléon, raie, crabe, loche, poisson-perroquet, carangue et tricot rayé. Il est très rare qu’une seule raison confère à un animal son caractère important ou emblématique (0,8 % des citations).

46Les acteurs de la protection de l’environnement avec lesquels nous avons travaillé étaient curieux de savoir quelles étaient les raisons énoncées par la population, afin, notamment, de confronter ces opinions avec leurs observations de la représentation populaire des animaux emblématiques.

47En Nouvelle-Calédonie, l’intérêt culinaire (espèces consommées et appréciées) est la raison la plus fréquemment avancée (20 % des taxons cités). Cette catégorie thématique regroupe toutes les réponses mentionnant la consommation de l’espèce citée : sa chair est appréciée ; sa consommation est bénéfique pour la santé ; elle est recherchée pour une cérémonie coutumière. Cette primauté de l’intérêt culinaire dans les réponses rappelle que la mer a un rôle nourricier primordial, un rôle de « garde-manger », et qu’il est essentiel de ne pas oublier ce rôle dans les politiques de gestion, y compris lorsqu’il s’agit d’espèces marines vulnérables.

48Si les agents présents lors des restitutions, ont été peu surpris par ce résultat, étant donné la place de choix accordée aux produits de la mer dans les habitudes culinaires locales, ils ont en revanche été étonnés que la deuxième raison la plus invoquée soit non pas d’ordre écologique mais d’ordre culturel (les réponses liées à une organisation socio-symbolique). Cette catégorie regroupe toutes les réponses faisant référence à une loi coutumière, à des règles claniques, ou à des savoirs et savoir-faire traditionnels.

49À La Réunion, les trois raisons principales constitutives du caractère emblématique sont l’observation de l’espèce, sa valeur représentative du territoire et son besoin de protection (figure 4B). Ces trois caractères qualifient principalement les cétacés et les tortues observés depuis toujours dans la sous-région mais néanmoins menacés. Les tortues marines en particulier ont été surexploitées et sont représentées dans la culture créole, notamment dans les contes (Houarau et Dardet, 2012). Les cétacés sont présents saisonnièrement et leur passage représente une attraction pour les Réunionnais.

50Cette diversité de valeurs attribuées au caractère emblématique d’une espèce ou groupe d’espèces étaye le besoin de prendre en compte la diversité dans une gestion durable. C’est pourquoi, même lorsque l’urgence oriente la gestion sur la sauvegarde d’une espèce menacée, la sensibilisation des usagers ne peut oblitérer la place accordée à la biodiversité.

Des attributions variées du caractère emblématique

51La dimension socio-symbolique accordée aux espèces marines en Nouvelle-Calédonie est très importante. Si ce caractère est souvent associé à des spécificités du milieu kanak, toutes les communautés y font référence tant ce trait culturel kanak est connu. Ainsi, si l’on s’intéresse à la liste des espèces citées pour des raisons socio-symboliques (figure 5A), on s’aperçoit que près de la moitié des citations (49 %) concerne uniquement deux espèces, la tortue et le napoléon. Cela témoigne de la place particulière qui leur est attribuée culturellement et induit implicitement que cette importance identitaire soit prise en compte dans les politiques environnementales. Par comparaison, dans le domaine culinaire, près de la moitié des citations (59 %) est constituée de neuf espèces différentes, et aucune ne représente plus de 10 % des réponses (figure 5B).

Figure 5A : Représentation du nombre d’espèces citées au moins 4 fois pour des raisons socio-symboliques en Nouvelle-Calédonie (n = 379) / Illustration of the number of species cited at least 4 times for socio-symbolic reasons in New Caledonia (n = 379)

Figure 6

Figure 5A : Représentation du nombre d’espèces citées au moins 4 fois pour des raisons socio-symboliques en Nouvelle-Calédonie (n = 379) / Illustration of the number of species cited at least 4 times for socio-symbolic reasons in New Caledonia (n = 379)

Figure 5B : Représentation du nombre d’espèces citées au moins 4 fois pour des raisons culinaires en Nouvelle-Calédonie (n = 597) / Illustration of the number of species cited at least 4 times for culinary reasons in New Caledonia (n = 597)

Figure 7

Figure 5B : Représentation du nombre d’espèces citées au moins 4 fois pour des raisons culinaires en Nouvelle-Calédonie (n = 597) / Illustration of the number of species cited at least 4 times for culinary reasons in New Caledonia (n = 597)

52La prise en compte de la dimension culturelle est omniprésente dans la construction des politiques de gestion en Nouvelle Calédonie et se retrouve dans plusieurs articles des codes de l’environnement provinciaux – dérogation possible pour la capture de tortues pour des cérémonies (Sabinot et Bernard 2016), primauté accordée dans le code de l’environnement de la province des îles Loyauté à l’articulation des dimensions sociales et environnementales [22], etc. Nos résultats confortent l’importance de ce positionnement et ont conduit au financement par la province des îles Loyauté d’un volet ESPAM ciblé sur leur territoire pour nourrir l’écriture toujours en cours de leur code de l’environnement.

53La figure 6 présente les espèces ou groupes d’espèces citées à la Réunion selon les trois domaines thématiques cités le plus fréquemment, identifiés dans la figure 4B comme l’observation de l’espèce (13 %), la valeur représentative de l’espèce pour le territoire (11 %) ainsi que son besoin de protection (10 %).

Figure 6 : Représentation du nombre d’espèces citées au moins deux fois à la Réunion pour des raisons liées à leur observation, à leur besoin de protection et à la capacité de l’animal de représenter le territoire (n = 87) / Illustration of the number of species cited at least twice in Reunion Island for reasons related to their observation, their need for protection and the animal’s ability to represent the territory (n = 87)

Figure 8

Figure 6 : Représentation du nombre d’espèces citées au moins deux fois à la Réunion pour des raisons liées à leur observation, à leur besoin de protection et à la capacité de l’animal de représenter le territoire (n = 87) / Illustration of the number of species cited at least twice in Reunion Island for reasons related to their observation, their need for protection and the animal’s ability to represent the territory (n = 87)

54Quatre groupes d’espèces concentrent 62 % des affiliations aux domaines emblématiques majoritairement mobilisés. En dépit de cette diversité restreinte, près du tiers des citations (38 %) décline 11 taxons différents. C’est un schéma comparable à celui observé en Nouvelle Calédonie. Pour les deux territoires, l’attribution du caractère emblématique se décline selon deux niveaux. Au premier niveau prédominent trois à quatre grands groupes d’espèces qui sont considérés comme emblématiques pour le territoire (baleine, tortue, requin et dauphin à la Réunion ; tortue, requin et baleine en Nouvelle-Calédonie). Au second niveau, les enquêtés mentionnent toutes les espèces ou groupe d’espèces qu’ils considèrent comme attachés au territoire. On observe alors une grande diversité dans les citations du second niveau. Ainsi, l’attribution du caractère emblématique, initialement restreinte à quelques espèces, devient moins restrictive et témoigne du lien développé par une population avec son territoire.

55À ce stade, le travail des gestionnaires à l’échelle territoriale mérite de prendre en considération et d’étudier plus avant cette diversité sous-jacente affiliée au caractère emblématique le plus souvent évoqué.

Une attribution du caractère emblématique potentiellement exclusive

56Les figures 7 et 8 présentent les domaines emblématiques cités pour la baleine et le poisson-perroquet en Nouvelle Calédonie.

57Pour ces deux espèces, les domaines emblématiques sont très bien identifiés et particuliers à chacune de ces espèces ou groupes d’espèces. Ainsi les baleines sont caractérisées comme emblématiques par les répondants car ils l’observent avec attention et s’attachent à en décrire le comportement. Dans une moindre mesure leur caractère emblématique est affilié à une organisation socio-symbolique et leur statut d’espèce menacée. Ces caractères emblématiques sont partiellement liés au fait que les baleines sont des espèces migratrices, temporairement présentes dans les eaux de Nouvelle Calédonie.

58L’attribution d’un caractère exclusif expliquant l’emblématisme apparaît de manière beaucoup plus évidente pour le poisson-perroquet, groupe d’espèces résident du récif calédonien (figure 8). Son caractère emblématique apparaît dominé par sa qualité culinaire.

Figure 7 : Représentation des domaines thématiques associés à la baleine en Nouvelle-Calédonie (n = 199) / Illustration of thematic fields related to whales in New Caledonia (n = 199)

Figure 9

Figure 7 : Représentation des domaines thématiques associés à la baleine en Nouvelle-Calédonie (n = 199) / Illustration of thematic fields related to whales in New Caledonia (n = 199)

Figure 8 : Représentation des domaines thématiques rattachés au poisson-perroquet en Nouvelle-Calédonie (n = 129) / Illustration of thematic fields related to parrotfish in New Caledonia (n = 129)

Figure 10

Figure 8 : Représentation des domaines thématiques rattachés au poisson-perroquet en Nouvelle-Calédonie (n = 129) / Illustration of thematic fields related to parrotfish in New Caledonia (n = 129)

59Les figures 9 et 10 présentent les domaines emblématiques affiliés aux baleines et aux tortues à La Réunion.

Figure 9 : Représentation des domaines thématiques associés à la baleine à La Réunion (n = 49) / Illustration of thematic fields related to whales in Reunion Island (n = 199)

Figure 11

Figure 9 : Représentation des domaines thématiques associés à la baleine à La Réunion (n = 49) / Illustration of thematic fields related to whales in Reunion Island (n = 199)

Figure 10 : Représentation des domaines thématiques associés à la tortue à La Réunion (n = 47) / Illustration of thematic fields related to the turtle in Reunion (n = 47)

Figure 12

Figure 10 : Représentation des domaines thématiques associés à la tortue à La Réunion (n = 47) / Illustration of thematic fields related to the turtle in Reunion (n = 47)

60Le caractère emblématique attribué à la baleine à La Réunion est la résultante de l’observation de ces espèces (de leurs caractères physiques principalement, mais aussi de la fréquence de leur présence), des relations développées avec l’animal et du besoin de protection de cette espèce (figure 9). Pour la tortue, le besoin de protection (figure 10) est un paramètre inhérent à l’histoire du territoire. En effet, les tortues marines sont partie intégrante de la culture réunionnaise et ont été lourdement exploitées. Leur disparition a été incitatrice à la mise en place d’une protection institutionnalisée qui fait l’objet d’une acceptation sociale très bien implantée.

61En Nouvelle Calédonie, comme à La Réunion, les raisons attribuées au caractère emblématique d’espèces migratrices apparaissent plus diversifiées que celles attribuées aux espèces résidentes ou ayant développé un lien fort avec le territoire.

62L’analyse de la diversité spécifique attachée au domaine emblématique le plus évoqué et celle des raisons attribuant le caractère emblématique à une espèce mettent en lumière les valeurs d’existence et d’usage des récifs coralliens. Les valeurs d’existence représentent un lien immatériel au territoire ; elles sont le corollaire des valeurs d’usage qui matérialisent ce lien. Ces deux types de valeurs coexistent à des degrés divers dans le caractère emblématique attribué par la population.

Perspectives méthodologiques pour accompagner la construction des politiques de gestion

63Dans les deux territoires, les agents techniques des services en charge de la gestion de l’environnement ont pour beaucoup suivi des formations en biologie, en foresterie, en halieutique ou en écologie ; ils n’ont pas toujours de formations en concertation [23] et très rarement en sciences sociales. Ce contexte fait émerger des défis pour les sciences sociales afin de non seulement pouvoir les éclairer sur ce qui se passe sur leur territoire, mais aussi pour leur proposer des supports de dialogue utiles aux échanges qu’ils engagent entre eux, entre services, comme à ceux réguliers menés avec les citoyens, en particulier dans le cadre de la mise en place d’aires protégées. Pour l’heure, ce besoin n’a été satisfait que de manière très imparfaite via la mise en place de protocoles internationaux de type SocMon – Global Socioeconomic Monitoring Initiative for coastal management – (Pena et al., 2014) qui visent plus à mobiliser l’information collectée localement pour du rapportage à l’échelle internationale que pour la gestion locale de l’environnement (David et Quod, 2018 ; Malleret-King et al., 2006 ; Wongbusarakum et al., 2008).

64L’élaboration d’un thésaurus interdisciplinaire permettant la classification des représentations est une construction innovante. Elle a aussi l’ambition d’être interterritoriale et de constituer un outil pertinent de l’analyse sensible des relations sociétés-natures par le prisme du concept d’espèce emblématique. Elle apporte sa contribution à l’élaboration d’une gouvernance.

65L’assurance d’une gouvernance de la protection de la biodiversité est inséparable du maintien d’une société en bonne santé dans les îles (voir aussi Sabinot, Herrenschmidt, et al., 2019). Pour assurer cela, mieux intégrer les valeurs sociales, culturelles et économiques aux côtés des valeurs écologiques portées aux espèces marines et aux habitats est un préliminaire. Lorsqu’une interdiction formelle de prélèvement d’une espèce est nécessaire d’un point de vue biologique au risque de la voir disparaître, reconnaître la valeur alimentaire ou socio-symbolique aux côtés des autres valeurs permet de placer le débat sur des considérations en adéquation avec les représentations et les habitudes variées des personnes concernées, et de réfléchir collectivement tant aux réglementations à mettre en place qu’à la sensibilisation à construire.

66Le thésaurus, outil sémantique interdisciplinaire, permettant la quantification des représentations aide à la visualisation des contextes sociaux, écologiques et économiques. Il permet de rendre compte de la diversité des valeurs et d’engager les dialogues voire les négociations nécessaires aux choix de politiques qui ont le plus de chance d’être acceptés et suivis. Le temps requis pour créer et ajuster la base de données n’est pas négligeable mais la méthode de collecte et d’analyse étant convaincante, cela nous invite à poursuivre au-delà… Dans son article sur les fondements de la mesure, Volken (2007) concluait qu’en « sciences sociales, les attributs construits sont souvent l’expression d’une démarche spécifique, autour d’un problème localisé dont l’intérêt n’est pas purement scientifique, mais comporte des retombées dans d’autres domaines, politiques, économiques, environnementaux ou culturels. » C’est effectivement pour répondre à des défis d’intégration de spécificités des sociétés dans une politique environnementale multi-scalaire que, pour notre exemple, nous avons cherché à traduire une partie de ces spécificités sous une forme quantitative. La base de données que nous avons constituée peut être renseignée par de nouveaux questionnaires et pourra toujours être interrogée de diverses manières, en ciblant par exemple un territoire, une espèce marine, ou encore une génération de répondants. Les questionnaires simples listant les espèces emblématiques et les raisons qui justifient cette importance pour chaque répondant sont rapides à mettre en œuvre (une vingtaine de minutes sans besoin d’assistance) et désormais rapides à intégrer dans la base de données, quel que soit le lieu où le questionnaire est complété. L’ambition affichée, soit s’appuyer sur l’observation des représentations et des usages territoriaux pour penser les normes de gestion des espèces concernées et des aires protégées envisagées, est suffisamment générique pour que la méthode développée puisse être mise en œuvre sur une grande diversité de territoires pour produire des politiques de gestion environnementale plus ajustées aux contextes sociaux et culturels locaux.

Article reçu le 1er avril 2020 ; définitivement accepté le 31 août 2021 • Suivi éditorial : Céline Barthon

Notes

  • [1]
    Ces habitus sont largement conditionnés par la formation académique en écologie des gestionnaires de la nature et par les pratiques de gestion de leurs aînés (Gilbert David et Thomassin, 2007).
  • [2]
    Yves Fouquart (2011) définit le forçage comme « une action qui agit sur un système dynamique et peut perturber son état d’équilibre ». Ce terme est souvent utilisé par gestionnaires et écologues pour parler de l’action anthropique perturbatrice des écosystèmes équilibrés.
  • [3]
    La bonne santé sociale peut, entre autres, être mesurée par un indice de Santé Sociale ou ISS crée en 1980 et mis à jour tous les ans par le Fordham Institute for Innovation in Social Policy. Institute for Innovation in Social Policy : Vassar College, Box 529 : Poughkeepsie, NY 12604 : 845.452.7332 [http://iisp.vassar.edu/ish.html].
  • [4]
    La métrologie est l’art de la mesure ; elle s’applique à toute pratique et a pour objectif de pérenniser une échelle de valeurs descriptives (Bahaly R. et al., [https://amisdelamesure.metrodiff.org/atous/partie1/art1.shtml]).
  • [5]
    Autre île de point chaud, la Grande Comore se situe dans le Canal du Mozambique.
  • [6]
  • [7]
    Depuis vingt ans, le nombre de touristes séjournant sur le territoire s’est stabilisé à 100 000 par an.
  • [8]
    L’agence française des aires marines protégées a été créée en 2006. En 2016, elle a été intégrée à l’Agence française pour la biodiversité (AFB) qui a fusionné en 1er janvier 2020 avec l’Office national de la chasse et de la faune sauvage pour devenir l’Office français de la biodiversité (OFB).
  • [9]
    On notera cependant que la Réserve Naturelle de La Réunion est la première AMP de France dont l’étude de faisabilité a associé un diagnostic biologique et un diagnostic socio-économique (Thomassin et David, 1998).
  • [10]
    Léopold, 2011 ; Léopold et al., 2013.
  • [11]
    Gilbert David et al., 2013.
  • [12]
    Hilmi et al., 2014.
  • [13]
    Bernard et al., 2014.
  • [14]
    Sabinot et al., 2019.
  • [15]
    Fossier et al., 2019.
  • [16]
    Une définition d’espèce emblématique est proposée par l’inventaire national du patrimoine naturel (INPN) qui la définit comme « une espèce sauvage ayant une importance culturelle, religieuse, parfois économique pour l’Homme, dans une région donnée ».
  • [17]
    La passation des questionnaires a été réalisée sous deux formes principales et a visé à collecter les points de vue de personnes de tout âge répartis sur les deux territoires. 93 questionnaires à La Réunion et 480 questionnaires en Nouvelle-Calédonie ont été complétés individuellement sur fiche dans le cadre de rassemblements de personnes initiés par l’équipe (rencontres publiques dans les communes annoncées quelques jours avant dans la presse et par affichage) ou organisé par ailleurs (rencontre sportive de jeunes, assemblée générale d’associations, journée festive, cours universitaires, animation scolaires…). 11 communes réparties dans les trois provinces de la Nouvelle-Calédonie et 2 communes de la Réunion ont été concernées par ces ateliers. Par ailleurs, 98 questionnaires ont été soumis aux personnes avant chaque entretien individuel semi-directif visant à collecter des informations qualitatives plus approfondies. Pour ne pas biaiser les résultats, aucune autre question n’était posée avant de poser les trois questions du questionnaire.
  • [18]
    En plus des 93 questionnaires conduits de cette manière à La Réunion, 361 autres questionnaires ont été réalisés dans un second temps à La Réunion en suivant une approche inversée (des catégories de valeurs étaient proposées et les répondants étaient invités à lister des espèces portant cette valeur à leurs yeux). Ce travail sera mobilisé a posteriori et n’a pas fait l’objet d’une démarche similaire en Nouvelle-Calédonie pour le moment.
  • [19]
    PostgreSQL est un puissant système de base de données relationnelle objet à code source ouvert [https://www.postgresql.org/].
  • [20]
    Les 22 domaines, ou classes de raisons justifiant le caractère emblématique des espèces, sont les suivants : espèce avec qui une relation personnelle a été établie / espèce bizarre ou originale / espèce consommée et appréciée / espèce décrite par ses traits physiques / espèce décrite par son comportement / espèce dotée d’un rôle écosystémique important / espèce dotée d’une valeur marchande / espèce endémique / espèce indicateur écosystémique / espèce liée à l’imaginaire (contes, légendes, mythes…) / espèce liée à une activité (pêche, plongée….) / espèce liée à une organisation socio-symbolique (cérémonie coutumière, pêche traditionnelle, savoir-faire…) / espèce liée au monde invisible (légendes, totems, esprits sacrés…) / espèce marquée par sa présence saisonnière / espèce médiatisée / espèce menacée / espèce mystérieuse ou peu connue / espèce protégée ou à protéger / espèce remarquée pour sa rareté ou son abondance (présence) / espèce représentative d’un espace / espèce utilisée comme objet ou matériau / espèce vectrice de « crise » (conflits, gratte, accidents…) / explication imprécise.
  • [21]
    Ces représentations graphiques ont été pensées pour être présentées en grand format (poster, projection…). Dans la version initiale, un dessin représentant chaque animal est reporté, de façon proportionnelle, dans la case correspondante. Ici, pour faciliter la lecture dans un tel format, les dessins ont été supprimés.
  • [22]
    L’article 110.1 du Livre 1, titre 1, chapitre 1 du code débute ainsi : « l’environnement naturel est indissociable des pratiques culturelles et des règles coutumières localement applicables ».
  • [23]
    On observe néanmoins depuis quelques années la tenue au sein des collectivités de formations courtes à la concertation ou de Diplôme d’Université intégrant des enseignements en géographie ou anthropologie utile à la gestion (Observation personnelle).
Français

Comment appréhender de manière sensible les savoirs, les valeurs sociales et culturelles accordées aux animaux et aux territoires marins en Nouvelle-Calédonie et à La Réunion et les rendre utiles et compréhensibles par ceux qui construisent les politiques et les font appliquer ? Des approches disciplinaires et interdisciplinaires en sciences humaines et sociales peuvent-elles rendre compte fidèlement des réalités locales tout en les traduisant de sorte qu’elles aient une portée opérationnelle au même titre que les indicateurs déterminés par l’étude de la biologie et de l’écologie des habitats naturels ? Cet article entend répondre à ces deux questions qui ont animé les chercheurs du programme ESPAM (Espèces emblématiques, acceptation sociale, aire marine protégée) financé par la Fondation de France.
Nous démontrons comment un développement méthodologique alliant des approches qualitatives et quantitatives permet de mieux appréhender les valeurs culturelles et sociales accordées au milieu marin et de produire des outils de dialogue accessibles aux divers acteurs territoriaux. Nous présentons les contextes des deux territoires ultramarins qui ont fait émerger le besoin de produire des outils méthodologiques innovants, décrivons la démarche interdisciplinaire mise en œuvre et partageons quelques résultats illustrés des visuels produits à destination des populations et des gestionnaires. Le lecteur pourra entre autres découvrir les 137 espèces identifiées comme emblématiques sur les terrains d’étude ainsi que les raisons qui conduisent les populations de ces îles à considérer ces espèces comme plus importantes que d’autres.

  • île
  • représentation
  • aire marine protégée
  • indicateur
  • science impliquée
  • approche intégrée
English

Emblematic species and sea management, pluridisciplinary insights in human sciences and new methodological approachs in Indopopacific region

How can the knowledge, social and cultural values attributed to animals and marine territories in New Caledonia and Reunion be understood in a sensitive manner and made useful and understandable by those who construct and enforce policies? Can disciplinary and interdisciplinary approaches in the humanities and social sciences accurately reflect local realities while translating them in such a way that they have the same operational significance as the indicators determined by the study of the biology and ecology of natural habitats? This article aims to answer these two questions, which have motivated the researchers of the ESPAM program (Emblematic Species, Social Acceptance, Marine Protected Area) funded by the Fondation de France.
We show how a methodological development combining qualitative and quantitative approaches allows us to better understand cultural and social values according to marine environment and to produce dialogue tools accessible to various territorial actors. We present the contexts of the two overseas territories that gave rise to the need to produce innovative methodological tools, describe the interdisciplinary approach implemented, and share some of the results illustrated by the visuals produced for the population and managers. Among other things, the reader will be able to discover the 137 species characterized as emblematic in the study areas as well as the reasons that lead the populations of these islands to consider these species as more important than others.

  • representation
  • island
  • marine protected areas
  • indicator
  • implied science
  • integrated approach
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Catherine Sabinot
Auteure correspondante, ESPACE-DEV, IRD, Université de Montpellier, Université des Antilles, Université de Guyane, Université de la Réunion, Université de la Nouvelle-Calédonie, Centre IRD de Nouméa, BPA5 98848 Nouméa Cedex, Nouvelle-Calédonie (catherine.sabinot@ird.fr)
Solène Delebecque
ESPACE-DEV, IRD, Université de Montpellier, Université des Antilles, Université de Guyane, Université de la Réunion, Université de la Nouvelle-Calédonie, Centre IRD de Nouméa, BPA5 98848 Nouméa Cedex, Nouvelle-Calédonie (solene.delebecque@ird.fr)
Espérance Cillaurren
ESPACE-DEV, IRD, Université de Montpellier, Université des Antilles, Université de Guyane, Université de la Réunion, Université de la Nouvelle-Calédonie, Maison de la télédétection, Montpellier, France (esperance.cillaurren@ird.fr)
Camille Fossier
ESPACE-DEV, IRD, Université de Montpellier, Université des Antilles, Université de Guyane, Université de la Réunion, Université de la Nouvelle-Calédonie, Centre IRD de Nouméa, BPA5 98848 Nouméa Cedex, Nouvelle-Calédonie (camille.fossier@ird.fr)
Gwenaëlle Pennober
ESPACE-DEV, Université de Montpellier, IRD, Université des Antilles, Université de Guyane, Université de la Réunion Bat S4A, Campus Universitaire du Moufia, Université de La Réunion, La Réunion (gwenaelle.pennober@univ-reunion.fr)
Estienne Rodary
GRED, IRD, Université de Montpellier, Montpellier, France (estienne.rodary@ird.fr)
Gilbert David
ESPACE-DEV, IRD, Université de Montpellier, Université des Antilles, Université de Guyane, Université de la Réunion, Université de la Nouvelle-Calédonie, Maison de la télédétection, Montpellier, France (gilbert.david@ird.fr)
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Mis en ligne sur Cairn.info le 13/12/2021
https://doi.org/10.4000/norois.11164
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