Dans le monde, on compte trois femmes pour deux hommes obèses
(World Health Organization, 2021), cette différence étant d’autant
plus prononcée dans les pays en développement (Wells et al., 2012).
Paradoxalement, les femmes sont aussi plus nombreuses à souffrir de
dénutrition et de carences en fer dans les pays d’Asie du Sud et du Sud-Est
tels que l’Inde (Jose, 2011 ; Nubé et van den Boom, 2003). Ces tendances
suggèrent que, dans certaines régions du monde où la faim et l’obésité
coexistent, les femmes sont plus sujettes que les hommes à souffrir de la
double peine de la malnutrition, soit aussi bien de sous-nutrition que de
surnutrition. Pourtant, peu de travaux ont étudié le rôle qu’occupent les
inégalités de genre (défavorables aux femmes) dans l’émergence récente de
l’épidémie d’obésité féminine, ni dans la persistance de la sous-nutrition
féminine dans le cas des pays pauvres d’Asie. En se focalisant sur l’Inde, un
pays caractérisé par cette double peine (Kulkarni et al., 2016), cette étude
explore alors le lien entre les discriminations subies par les femmes et leur état
nutritionnel.
Les inégalités de genre sont multidimensionnelles et concernent un grand
nombre d’aspects de la vie quotidienne en Inde. Selon le classement actuel de
la Banque mondiale, l’Inde est un pays à revenu intermédiaire inférieur dans
lequel les femmes sont particulièrement désavantagées par rapport aux
hommes (Batra et Reio Jr, 2016) ; les Nations Unies l’ayant classé dans le
groupe des pays les plus inégalitaires en matière de différence de
développement humain entre hommes et femme…