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Les trillions sont déjà là. « Corriger le tir » par l’intervention publique

1 MED : Le financement des Objectifs de développement durable (ODD), adoptés en septembre 2015, requiert des montants colossaux. Comment peut-on mobiliser de tels financements ? N’est-ce pas illusoire ?

2 Hubert de Milly : Les annonces de « besoin de financement » du développement ont refleuri depuis quelques mois avec l’adoption des ODD par la communauté internationale. « Financer les ODD » est devenu le mot d’ordre, et pour cela il faudrait « passer des billions aux trillions [1] ». Cela n’a pourtant guère de sens.

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  • Sur 70 à 80 « trillions » créés par an dans le monde (RNB mondial), près de 30% sont d’ores et déjà épargnés/investis, dont la moitié dans les pays en développement (PED), soit près de 10 T$. Plus que les estimations les plus hautes du « coût des ODD » dans ces pays.
  • Cet investissement est essentiellement domestique. Les investissements directs étrangers (IDE) annuels vers les PED ne représentent qu’un demi- « trillion » (495 milliards en 2014, chiffre CNUCED).
  • L’investissement n’est pas contraint par la ressource financière : il existe de très importantes liquidités disponibles, et les taux d’intérêt sont très faibles. Les trillions sont déjà là.
  • Ainsi donc, « la finance est au Sud », et il est souhaitable qu’elle y reste. La lutte contre la fuite des capitaux et l’évasion fiscale constitue une priorité, universellement reconnue.

4 De plus, le « coût des ODD » n’a pas de sens. Il s’agit de la même erreur que le chiffrage des Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) en 2005 (Millenium Development Project, animé par Jeffrey Sachs) : les ODD ne « s’achètent » pas, ils se produisent. Il s’agit d’orienter l’activité et les investissements dans le sens des ODD. Les ODD ne coûtent pas, ils rapportent. Alors quel est aujourd’hui le véritable « problème » du financement du développement ? C’est que cet investissement massif, et l’activité mondiale en général, ne vont justement pas dans le sens décrit par les ODD.

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  • Quelle que soit la quantité d’épargne mondiale disponible, elle ne se dirige pas spontanément vers les projets de développement de long terme, ni vers les pays les plus pauvres (règlementations financières plus restrictives avec l’Accord de Bâle III [2], manque d’incitations, forte aversion au risque dans les pays pauvres, rendement escompté du capital jugé peu attractif au regard du risque). Des pays et des populations en sont exclus, notamment les pays les moins avancés (PMA), où, de plus, l’épargne est faible. Les écarts géographiques se creusent. L’extinction de l’extrême pauvreté en 2030 n’est en rien garantie.
  • L’investissement n’est à 90% pas « vert », le « contenu carbone » de la croissance ne diminue pas suffisamment pour éviter le dérèglement climatique. La biodiversité est sacrifiée. L’investissement ne crée ni assez d’emploi, ni des conditions de travail décentes.

6 Il ne s’agit donc pas de « financer les ODD », mais de « corriger le tir » de l’économie mondiale dans le sens des ODD. Orienter l’économie, corriger les « défaillances de marché », c’est le rôle de la puissance publique, aussi bien à l’échelle nationale qu’à l’échelle internationale (voir annexe 1). Ce rôle comporte deux facettes :

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  • Un rôle de régulation : créer ou réviser les politiques publiques et les cadres réglementaires nationaux pour rendre la croissance possible, verte et inclusive. Particulièrement pour les PMA, mais aussi dans les pays les plus développés, le cadre réglementaire est souvent inadapté à l’émergence de la finance verte.
  • Un rôle de financement de ces politiques et des investissements qui y sont liés, quand nécessaire.

Les apports publics sont loin d’être négligeables

8 MED : Mais ce financement public du développement international, que vous évoquez, ne représente qu’à peine plus de 1% de l’investissement mondial. N’est-ce pas le signe d’une marginalisation inéluctable des acteurs publics ?

9 : Les apports publics internationaux aux PED répertoriés par le Comité d’aide au développement (CAD) de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), concessionnels ou non, se sont élevés en 2014, en flux brut, à 245 milliards $US, moitié moins que les IDE (495 milliards $US) [3]. Dans les PMA, ils sont fortement concessionnels, font le double des IDE, et la moitié des ressources fiscales locales (voir annexe 2). Ils sont donc loin d’être négligeables en volume.

10 Ils restent relativement faibles par rapport à l’investissement mondial, et c’est normal : l’aide publique au développement (APD) n’a jamais eu pour objet de réaliser à elle-seule le développement des PED, ni dans le cadre des OMD, ni auparavant. Une telle situation de monopole du financement relève du mythe. Les seules exceptions ont pu avoir lieu dans certains PMA :

11 soit parce qu’en effet l’activité économique et l’investissement hors APD y étaient quasiment nuls, d’où d’ailleurs la faiblesse du développement, malgré l’APD ;

12 soit parce que cette activité et ces investissements échappaient aux statistiques, intervenant essentiellement dans le secteur informel.

13 Petits par nature mais non négligeables, les apports publics internationaux dans les PED sont-ils suffisants en volume ? Quelle « bonne » valeur du ratio APD/IDE pour s’orienter vers les ODD ? L’ampleur des « problèmes » qualitatifs décrits ci-dessus laisse penser que ce ratio reste aujourd’hui insuffisant.

14 À supposer que le coût de la « correction du tir » soit proportionnel à l’investissement, le besoin de financements publics internationaux va continuer à croître substantiellement dans les années qui viennent.

15 MED : Quel est plus précisément le rôle de ces apports publics internationaux dans les PED, rôle qui les rend aussi importants malgré leur petite taille par rapport aux investissements privés ?

16 HM : Conçus à l’origine pour combler un déficit d’épargne domestique dans les PED, l’APD et les autres apports publics ont vu leur rôle évoluer avec le temps. Ils remplissent aujourd’hui quatre fonctions indispensables, en grande partie qualitatives, correspondant à quatre types d’aide.

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  1. La substitution, en principe temporaire, aux ressources domestiques et aux transferts internationaux privés absents ou défaillants, reste une fonction importante, dans les pays les plus pauvres. C’est l’image de l’APD traditionnelle, contribuant comme elle le peut aux services sociaux et productifs de base, ou fournissant l’aide budgétaire, voire humanitaire dans les situations les plus extrêmes (conflits, effondrement de l’État,…). Si la pauvreté recule globalement, l’occurrence des situations de fragilité et de crise ne semble guère diminuer dans les faits, et ce type d’aide ne semble donc pas devoir disparaître.

18 L’amélioration du contexte, à travers l’appui aux réformes et au renforcement institutionnel, à l’émergence d’acteurs locaux, à la définition des politiques publiques, est sans doute aujourd’hui la fonction essentielle. Cela inclut le développement de la fiscalité, nationale et locale, et des réseaux bancaires, pour permettre d’utiliser davantage les ressources domestiques. Cet appui concourt à améliorer le rendement escompté du capital dans les PED, à favoriser un cadre règlementaire lisible à long terme et à diminuer le risque pour les investisseurs privés. C’est le domaine de l’assistance technique, des projets pilotes, des aides budgétaires ciblées, en accompagnement de politiques et de processus « transformationnels ». Ce n’est pas forcément très onéreux, mais ce sont des domaines difficiles, soumis aux conditions politiques locales, à l’évolution des rapports de force internes, qui sont des sujets sensibles.

19 Lorsque l’épargne mondiale ne vient pas spontanément dans un PED, l’aide publique peut « aller la chercher ». Les agences d’aide qui ont un statut de banques de développement [4] se financent sur les marchés internationaux, et mobilisent ainsi les liquidités disponibles, d’origine privée, en volumes significatifs. Ces transferts sont à destination de pays et de secteurs, notamment dans les pays à revenu intermédiaire (PRI), où l’accès aux marchés financiers internationaux reste difficile ou onéreux, malgré des niveaux de développement relativement élevés.

20 Enfin, les transferts publics jouent souvent un rôle d’entraînement du secteur privé vers des pays et des secteurs peu attractifs. Il s’agit de toutes les formes de cofinancement, qui permettent un certain partage de risque. Le secteur public joue un rôle « pionnier », en finançant des pays ou des secteurs pour lesquels il n’existe aucun marché.

21 Ces quatre types d’aide ne s’excluent pas :

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  • On associe, par exemple, facilement le premier type aux PMA, mais la réalité y est souvent plus proche du type « 2 », et les PMA recèlent aussi de nombreuses opportunités d’investissements dans les infrastructures et pour des fonds privés, pour peu que leurs transferts soit facilités (type 3).
  • À l’inverse, le Mexique, pays destinataire de flux internationaux importants, a un taux de pression fiscale de 15% seulement, comme un PMA à très faible gouvernance, et reste demandeur d’appuis institutionnels.
  • Les transferts publics peuvent inciter les investisseurs privés (type 4), mais ce sont surtout les bons projets qui les font venir. D’où le besoin, pour identifier des projets, d’études préalables, et, plus généralement, de bonnes politiques, d’un contexte institutionnel favorable, et de renforcement des maîtrises d’ouvrage (aide de type 2).

23 MED : Pour assumer ces différents rôles, et face à la variété des demandes et des acteurs, quels types d’instruments financiers est-il nécessaire de mettre en place ?

24 HM : L’ensemble des institutions du financement public international du développement déploie une palette diversifiée d’outils financiers, adaptés aux acteurs des interventions et à leurs besoins spécifiques.

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  • Les financements des PMA et des pays en crise relèvent de transferts non remboursables, ou fortement concessionnels, alors que ceux des PRI relèvent davantage de prêt moins, ou pas, concessionnels, ainsi que d’autres instruments « non-dons » (garanties, prises de participation,…), ou de dons associés à de tels instruments.
  • De même, les deux premiers « types d’aide » (substitution, amélioration du contexte) sont essentiellement financés par des dons, alors que les troisièmes et quatrièmes (facilitation des transferts internationaux pour financer l’investissement et le financement des infrastructures) concernent principalement des prêts, des garanties ou des prises de participation.
  • De ce fait, l’APD au sens strict [5] (160 milliards $US bruts en 2014) est composée de dons à 85%, mais la quasi-totalité des Autres apports du secteur public (AASP) (60 milliards $US bruts en 2014, voir annexe 2) est constituée d’instruments financiers proches du marché.

26 Avec l’adoption des ODD, et notamment de l’ODD 16, qui met le besoin d’institutions de qualité au cœur de l’agenda du développement, et avec la reconnaissance d’améliorer ces institutions « à tous les niveaux » (depuis l’international jusqu’au plus local), les agences de financement du développement sont amenées à préciser davantage la nature des outils d’intervention dont ils disposent dans le champ de la gouvernance, aux différents niveaux visés : financements budgétaires globaux ou sectoriels, mobilisations d’assistance technique et renforcement des capacités. Il s’agit en particulier :

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  • de renforcer les capacités des pays au niveau central, en appuyant la mise en place de cadres réglementaires et législatifs : code des investissements, droit des affaires, fiscalité, accroissement des ressources publiques domestiques, gestion macro-économique, gestion de la soutenabilité de la dette,…
  • de soutenir les acteurs locaux : les collectivités locales, les systèmes financiers, les organisations non gouvernementales (ONG)/autres institutions de la société civile (voir question ci-après), les entreprises publiques, le secteur privé et ses représentations.
  • de promouvoir les coalitions d’acteurs, par exemple autour de la gestion d’une ressource commune (approche par les « communs »), approche de création institutionnelle par la base.
  • de catalyser des cofinancements. Exemple des fonds fiduciaires de l’Union européenne (UE) [6]
  • de mieux prendre en compte les effets prévisibles des interventions de toute sorte sur la construction institutionnelle (notion de « co-bénéfice gouvernance »).

Des fonds publics pour soutenir les acteurs locaux du développement

28 MED : Vous mentionnez les collectivités locales, la société civile, les entreprises, les coalitions d’acteurs. Ne s’éloigne-t-on pas du domaine traditionnel de financement de l’aide internationale, qui passe essentiellement par les gouvernements centraux, forts soucieux de leur indépendance ?

29 HM : Plusieurs catégories d’acteurs locaux, quelque peu négligés par la communauté internationale, ont vu, en effet, leur importance soulignée depuis 2015 par les ODD et la Conférence d’Addis-Abeba sur le financement du développement. Il faut citer, en particulier :

30 Les collectivités territoriales, au contact direct des populations et responsables du bon fonctionnement des services publics : eau et assainissement, transport public, logement, services sociaux. Leurs politiques d’investissement, par exemple en matière de mobilité urbaine, est également un élément clef de la réduction des émissions de gaz à effet de serre.

31 Les institutions financières locales : banques nationales de développement (Banque nationale de développement économique et social (BNDES) brésilienne, Banque ouest-africaine de développement (BOAD), Development Bank of South-Africa (DBSA), etc.), banques de développement agricole, fonds d’investissements, institutions de microcrédit et autres systèmes bancaires locaux. Ce sont les premiers financeurs des investissements portés par les acteurs de l’économie, par exemple les collectivités et les entreprises locales, et ceux qui connaissent le mieux leurs besoins.

32 : représentations professionnelles, organisations de gestion ou de cogestion de filières (exemple : coton en Afrique de l’Ouest), syndicats, associations d’usagers de la santé et de parents d’élèves, la presse et ses associations, et toutes formes d’associations et d’ONG.

33 L’aide internationale peut appuyer :

34 les premières pour accroître leurs capacités fiscales, technique, légale, organisationnelle, de vision stratégique, de planification, et pour accéder à des ressources additionnelles (émissions d’obligations sur les marchés, prêts directs par les banques de développement internationales), en tenant compte de leurs capacités d’endettement.

35 les secondes, par des prises de participation, des lignes de crédit à long terme subventionnées, des garanties de prêts, et de l’assistance technique.

36 les troisièmes, en renforçant leurs capacités pour s’organiser et pour dialoguer avec les autorités.

37 Il ne s’agit pas de court-circuiter l’appareil d’État central, mais de permettre aux acteurs locaux, lorsque la gouvernance du pays le permet, de mettre en œuvre les politiques publiques décidées par le pays, et de les faire évoluer. Les collectivités sont parfois relativement jeunes et/ou manquent de compétences, mais cela ne doit pas être une justification pour refuser de leur reconnaître des responsabilités étendues. Au contraire, c’est une raison pour concentrer sur elles, sur leur gouvernance, l’appui de l’aide internationale. Le meilleur apprentissage, c’est le « learning by doing ».

Développer des outils publics de démultiplication financière

38 MED : Vous avez mentionné l’effet d’entraînement des financements publics vis-à-vis des financements privés. Quelles sont les perspectives pour démultiplier ce type d’effet ?

39 : La plupart des prêts d’APD constituent déjà une intermédiation bancaire efficace, permettant de « lever » des fonds privés et de les diriger, sous forme publique, vers les pays où ils ne vont pas spontanément, ou bien à des taux prohibitifs. Les prêts publics peuvent, de plus, donner lieu à toutes formes de cofinancement et de « mixage » (« blending »), augmentant encore leur effet de mobilisation. Avec les outils de « mixage prêts/dons », la mobilisation de dons vient compléter ou améliorer les conditions des prêts, et permet de mieux s’adapter au niveau de développement des pays et à la rentabilité des secteurs et des projets, notamment par le biais :

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  • d’une concessionnalité renforcée des financements et
  • du financement d’activités de renforcement de capacités/assistance technique/formation.

41 L’Union européenne possède une forte expérience en la matière. Dans le cadre financier 2007-2013, environ 2 milliards $US de subventions communautaires, injectés dans des facilités de mixage, ont accompagné 15 milliards $US de prêts des institutions financières publiques européennes, concessionnels et non concessionnels, et l’ensemble a pris place dans 42 milliards $US d’investissements, en partie issus de sources privées.

42 Le cadre financier 2014-2020 de l’UE comporte des facilités de mixage à hauteur de 3,2 milliards $US, auxquels s’ajoutent les montants alloués au mixage dans les programmes indicatifs nationaux. L’ensemble représente 4 à 5% du budget d’APD européen. Avec le même effet de levier, environ 80 milliards $US d’investissements totaux seront réalisés.

Un besoin de volonté politique, pour des politiques favorables

43 MED : L’aide publique au développement a donc, au total, un grand rôle à jouer sur le chemin vers les ODD, mais les budgets qui lui sont attribués n’augmentent guère. La promesse historique, faite en 1970 par les pays développés, de consacrer 0,7% de leur PIB au développement des pays pauvres, n’a jamais été respectée…

44 HM : Les financements publics internationaux du développement ne se limitent pas à l’aide publique au développement (voir annexe 1), mais celle-ci y reste majoritaire, et son volume est dépendant des choix budgétaires faits par les pays dits développés, et non des seuls besoins et des opportunités des pays en développement. Les choix budgétaires reflètent, en grande partie, le poids des lobbys pro-aide internationale dans les différents pays, ainsi que l’importance donnée aux engagements internationaux. Les situations sont en train d’évoluer de façon inattendue en Europe, avec certains bailleurs traditionnellement vertueux (par exemple, les Pays-Bas) qui souhaitent diminuer leur APD, le Royaume-Uni qui est, au contraire, depuis 2013, le premier pays du G5 à atteindre la cible historique de 0,7%, et l’Allemagne, qui est sur une pente ascendante. En France, la situation médiocre (0,37% du RNB, en forte baisse au cours de la décennie) reflète le peu de poids politique du sujet au moment des arbitrages budgétaires. Ceci est à relier à la faiblesse des ONG de développement international, qui dans tous les pays développés constituent la principale composante de l’opinion publique en faveur de l’aide.

45 MED : Au-delà de l’APD, au-delà des autres apports financiers publics internationaux, quelles sont les politiques publiques des pays développés qui peuvent aider les pays pauvres à participer pleinement aux ODD ?

46 HM : Les ODD consacrent l’intégration des dimensions du développement (aucun secteur n’est oublié), et remettent ainsi en relief l’importance de la question dite de la « cohérence des politiques pour le développement » : depuis les années 1960, on sait que le meilleur appui au développement que les pays riches peuvent apporter aux pays plus pauvres, ce ne sont pas les transferts financiers, même fortement concessionnels, mais la gestion de nombre de politiques internes d’une façon qui soit favorable aux PED : ouverture commerciale, transferts de technologie, accueil de migrants, sécurité, stabilité macro-économique, lutte contre l’évasion fiscale et les activités illicites… Un rapport du Comité économique et social européen de 2015 estime que l’Union européenne a plutôt régressé que progressé en termes de cohérence de ses politiques vis-à-vis du développement international et de la production de biens publics mondiaux. Sont concernées par cette critique les politiques communautaires en matière de commerce, d’agriculture, d’emploi, de protection sociale, de climat, d’énergie, d’environnement, de transport, de santé, de protection du consommateur, de développement régional et urbain, de migration, et de lutte contre la corruption et le blanchiment d’argent. C’est-à-dire pratiquement toutes.

47 Ni la Conférence d’Addis Abeba, en juillet 2015, ni le texte final de l’« Agenda 2030 », adopté en septembre 2015 lors de la Conférence de l’ONU sur le développement durable, n’ont beaucoup abordé cet aspect. Bien que mettant à juste titre en relief le rôle des États et de la puissance publique pour la définition des politiques publiques, les textes d’Addis Abeba et des ODD se limitent surtout à la question des ressources financières. La question financière est, certes, essentielle, et les financements publics sont à la fois indispensables et aujourd’hui trop faibles, mais elle ne peut répondre seule aux défis de l’agenda 2030. C’est l’ensemble des politiques des États, et notamment des pays développés, qui sont mises au défi de l’atteinte des ODD à l’échelle mondiale.

Annexe 1 : Classification indicative des financements du développement

Annexe 1 : Classification indicative des financements du développement

Source : Hubert de Milly.

Annexe 2 : Ordres de grandeurs de certains des financements relatifs aux PED (au sens de la « liste du CAD »), année 2014, en milliards US$

Annexe 2 : Ordres de grandeurs de certains des financements relatifs aux PED (au sens de la « liste du CAD »), année 2014, en milliards US$

Annexe 2 : Ordres de grandeurs de certains des financements relatifs aux PED (au sens de la « liste du CAD »), année 2014, en milliards US$

Source : compilations des données CAD/OCDE, CNUCED et Banque mondiale.

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Notes

  • [1]
    Un « billion » en anglais est un milliard. Un « trillion », c’est 1 000 milliards de dollars, c’est-à-dire 1012$, ou encore 1« Tera-dollar » ou « T$ ».
  • [2]
    Cet Accord constitue une réponse à la crise financière de 2008 ; il comprend un ensemble de mesures destinées à renforcer la résilience des grandes banques internationales ainsi que des mesures spécifiques sur le risque de liquidité.
  • [3]
    En prenant la même liste de « pays en développement » (PED) : celles des pays destinataires « éligibles » à l’aide publique au développement selon les règles du CAD de l’OCDE.
  • [4]
    Comme, en France, l’Agence française de développement (AFD).
  • [5]
    L’APD au sens strict ne comprend pas les « Autres apports du secteur public » (AASP), qui constitue une aide pas assez concessionnelle pour être classée dans l’APD : prêts de la Banque mondiale, de Proparco, une partie de l’activité AFD non concessionnelle, …
  • [6]
    Les fonds fiduciaires de l’UE sont les derniers nés des instruments financiers d’action extérieure de l’UE. Ils visent à mettre en commun des ressources provenant de différents bailleurs pour fournir un appui conjoint plus souple, plus intégré et plus efficace. Actuellement, l’UE compte trois FFUE2 : le Fonds fiduciaire de l’UE pour la République centrafricaine, dit « Fonds Bêkou », créé en juillet 2014, le Fonds fiduciaire régional de l’UE pour la Syrie, dit « Fonds Madad », créé en décembre 2014 et le Fonds fiduciaire d’urgence de l’UE pour l’Afrique, dit « Fonds fiduciaire pour l’Afrique », créé à rapidement et signé en novembre 2015.
Français

En 2014, le financement public international du développement a représenté 245 milliards de dollars, à peine plus d’1% de l’investissement mondial, qui se compte en trillions de dollars. Marginalisation inéluctable des acteurs publics ? Bien au contraire. Les chiffres globaux révèlent l’essentiel : le rôle irremplaçable des financeurs publics du développement dès lors que ceux-ci savent ajuster leurs politiques, leurs pratiques et leurs instruments.

Mots-clés

  • Financement des ODD
  • Aide publique au développement
  • instruments financiers
  • acteurs internationaux
Entretien avec
Hubert de Milly
Agence française de développement.
demillyh@afd.fr
Cette publication est la plus récente de l'auteur sur Cairn.info.
Mis en ligne sur Cairn.info le 27/06/2017
https://doi.org/10.3917/med.178.0093
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