Résumé
Dans l’affrontement entre le politique et le technologique, l’État n’a pas dit son dernier mot. Les opérateurs non plus : ils peuvent jouer dans l’un ou l’autre camp.
Pendant des décennies, nous avons pensé le rapport entre médias et mouvements sociaux sur le modèle du filtre et de la perte. Les médias éliminent un grand nombre de faits et d’opinions qu’ils ne portent pas à notre connaissance. Soit en raison de contraintes techniques propres à chaque média et qui obligent à résumer, simplifier ou formater. Soit en raison de pressions politiques (dans tout système il y a des informations qu’il est interdit de diffuser et des opinions qui sont des délits). Soit parce que les acteurs économiques qui possèdent les médias ne désirent pas propager des informations qui ne rapportent pas, ou qui ne sont pas conformes à leur vision idéologique, ou qu’ils pensent sans intérêt pour le public. Si bien que, des milliards d’événements qui se produisent quotidiennement, seuls certains, accompagnés de certains commentaires, nous sont rapportés selon une certaine hiérarchie approximative (il suffit de comparer le contenu de deux journaux télévisés censés être concurrents pour s’en convaincre). Or voici que la conjonction du numérique et des réseaux changent la donne : tout le monde peut tout dire ou tout montrer, au moins en théorie. Pour le triomphe de la démocratie ?
Nous passons du stade de la déploration – « Ah, si le peuple savait... » – à celui du triomphal – « Nous sommes le média. » La tendance à identifier la révolte à son vecteur ainsi glorifié devient presque une idéologie en soi. Partisans de la transparence absolue dénonçant le « complot » des puissants (WikiLeak…
Dans l’affrontement entre le politique et le technologique, l’État n’a pas dit son dernier mot. Les opérateurs non plus : ils peuvent jouer dans l’un ou l’autre camp.