Résumé
Toute puissance politique a besoin de stratégies d’influence. Quand l’État américain se dote de moyens de séduction, médias et réseaux, il s’expose parfois à des surprises.
Les mots soft power apparaissent en 1990. Le doyen Joseph Nye lance le terme dans Bound to Lead (« contraints de diriger »), un livre sur la nature « changeante » du pouvoir d’une Amérique, seule hyperpuissance. Ou plutôt sur la synergie de ses trois pouvoirs : prédominance dans le domaine politico-militaire et économico-technologique plus prééminence idéologico-culturelle. Une stratégie efficace doit exploiter les symboles auxquels sont associés les États-Unis (de l’entertainment aux valeurs morales) et multiplier ses soutiens. Le pouvoir « doux » repose sur la séduction des produits culturels, sur l’attraction de l’american way of life – prospérité et liberté –, sur l’exemplarité d’un projet éthique, mais aussi sur des réseaux proaméricains. Il s’agit de favoriser tout ce qui renforce l’aura des États-Unis et de multiplier les alliés et les soutiens.
Ni bâton ni carotte. Ni contrainte ni contrat. Le soft power se manifeste quand l’autre veut spontanément ce que nous souhaitions qu’il désire. Il suffisait d’y penser.
Le propos de Nye ressemble à un discours gramsciste sur l’hégémonie culturelle ou à un texte de l’école de Francfort sur l’idéologie invisible des mass media, mais affectés d’un signe positif. Nye reconnaît que l’idée n’est pas nouvelle et qu’il n’a fait qu’inventer un mot pour rappeler une pratique ancienne. Alexandre divinisé dans le panthéon des peuples vaincus. Versailles inspirant le style architectural et artistique imité par l’Europe entière. La II…
Toute puissance politique a besoin de stratégies d’influence. Quand l’État américain se dote de moyens de séduction, médias et réseaux, il s’expose parfois à des surprises.