Résumé
L’autorité fut longtemps l’attribut du chef. Il suscitait spontanément l’obéissance. Or notre société privilégie l’influence. Plus d’autorité, donc plus de chef ?
L’air du temps déplore le déclin de l’autorité (ou s’en félicite). Mais elle fait problème. Pendant des siècles, elle conféra l’aptitude à obtenir l’obéissance de ses subordonnés ou de ses dépendants. Elle apparaissait comme une faculté propre aux individus (ou aux institutions qu’ils représentaient) et se concrétisait sans sanction ni promesse, sans violence, mais aussi sans travail de persuasion (l’autorité ne se négocie pas puisque, par définition, elle se reconnaît). Bref, elle se définissait surtout négativement par ce dont elle faisait l’économie : moyens de contrainte, contreparties, négociations, rappels, surveillance, résistances, contestations... Pour agir, elle commençait par se faire oublier.
Or, en ces temps de démocratie participative, d’entreprise citoyenne, d’école ouverte sur le monde, les chefs ont mauvaise presse… Notre époque leur préfère leaders, coachs, managers, animateurs. Désormais, « chef » est devenu un concept gastronomique, et l’autorité n’est acceptable que s’il est précisé qu’elle est « morale ».
L’autorité rappelle un temps ancien (oui papa, oui patron, oui chéri…) dont nous nous sentons affranchis, nous autres redoutables rebelles postmodernes et critiques.
Certes, l’autorité revient dans le discours politique contemporain, précisément chez quelqu’un que l’on présente volontiers comme un « chef » : comme quelque chose de naturel mais d’oublié. De la même façon que le travail ou la récompense du mérite, la valeur autorité serait victime de l’égarement des utopistes…
L’autorité fut longtemps l’attribut du chef. Il suscitait spontanément l’obéissance. Or notre société privilégie l’influence. Plus d’autorité, donc plus de chef ?