Depuis la chute du Mur, le Scheunenviertel, le « quartier des granges » situé au centre-est de Berlin, est devenu un haut lieu de loisirs et un véritable aimant touristique. Le nom, qui est assez peu justifié d’un point de vue historique, vient du souvenir de quelques rues plus au nord et en marge de l’actuel quartier où se trouvaient autrefois les cabanons de fortune que la municipalité a rasés au début du siècle dernier. Ce Scheunenviertel d’antan était en quelque sorte les bas-fonds de Berlin, un monde de malfrats et de prostituées. Au lendemain de la Première Guerre mondiale, le terme a été repris pour stigmatiser la partie la plus pauvre de la ville, où depuis la fin du xixe siècle des Juifs de l’Est avaient trouvé refuge, fuyant les pogroms en Russie et en Pologne. Tous les moyens étaient bons pour couvrir d’opprobre ces étrangers aux vêtements si bizarres, qui parlaient le yiddish, et non l’allemand, et vivaient dans des logements souvent insalubres en attente de pouvoir rejoindre le Nouveau Monde. En novembre 1923, quelques jours seulement avant le putsch tenté par Hitler et le jeune parti nazi à Munich, le quartier sera secoué par un violent pogrom, le premier à avoir lieu en Allemagne depuis le début du xxe siècle ; et il sera bientôt suivi, partout dans le pays, et avant même l’arrivée au pouvoir des nationaux-socialistes, de centaines d’attaques contre des synagogues, avec profanation de cimetières et autres violences contre des Juifs.
Aujourd’hui, près d’un siècle plus tard, l…