CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1L’Afrique de l’Ouest (du Sénégal au Niger) a été longtemps perçue comme caractérisée par une abondance foncière et une régulation coutumière peu propices à la marchandisation de l’accès à la terre rurale. Les transactions foncières marchandes y ont pourtant pris une ampleur notable depuis le milieu du XXe siècle dans certaines régions [1].

2« Transaction marchande » désigne ici le transfert de droits d’appropriation ou d’usage contre une contrepartie exigible, établie sur la base d’un système d’équivalence [2]. « Droits » est entendu dans une acception de sciences sociales, au sens de règles qui légitiment et organisent l’usage d’un bien ou d’une ressource, le contrôle sur le produit de cet usage et le transfert de ce bien ou de cette ressource. Ces règles émanent d’institutions qui traduisent des normes sociales, des principes de justice et s’incarnent dans des autorités et dans des organisations (communauté, lignage, famille, etc.), au-delà du seul cadre juridique formel. Les droits transférés peuvent être reconnus ou non par le droit positif – dans ce dernier cas, ils pourront conduire à des pratiques illégales (prohibées par le droit positif) ou extra-légales (non considérées par le cadre légal, mais non prohibées) [3].

3L’acception proposée des transactions marchandes n’exclut pas leur possible enchâssement social. Le concept d’enchâssement social vise à rendre compte de l’insertion des actions économiques dans des réseaux sociaux [4], ou, plus largement, de l’imbrication de la production et de l’échange dans les sphères politiques, culturelles et sociales [5]. L’enchâssement renvoie alors, en particulier, à la construction cognitive, culturelle et sociale des échanges, à travers ce que Paul DiMaggio qualifie de scripts normatifs, qui fondent des significations partagées dans les échanges et définissent les pratiques jugées légitimes en un temps donné [6]. L’enchâssement social peut prendre une dimension sociopolitique dès lors que les droits et obligations à propos de la terre et de ses usages dépendent de la position de leurs détenteurs dans la structure sociale. Les transferts fonciers sont ainsi, de fait, les vecteurs d’une politisation de la question foncière lorsqu’ils interviennent entre des populations locales et des allogènes (au sens générique de non autochtones) [7].

4Traiter des conditions et des formes de la marchandisation de l’accès à la terre dans les contextes ouest-africains fait sens à deux titres au moins. C’est d’abord le cas au regard de l’importance grandissante des pratiques foncières marchandes et des conflits qu’elles engendrent. Cela fait aussi sens car cela offre l’opportunité de documenter le passage de régulations foncières non marchandes à des modes d’accès à la terre intégrant des rapports marchands. À cet égard, la conception élargie de l’enchâssement social des transactions qui vient d’être évoquée s’avère particulièrement utile pour analyser les transferts réalisés dans un cadre coutumier. Les transferts de droits fonciers qualifiés de ventes (par les observateurs ou par les acteurs eux-mêmes) posent la question de la légitimité du transfert du point de vue du groupe social d’appartenance du cédant. Ils posent surtout celle de l’interprétation, par les parties (et, ultérieurement, par leurs héritiers), de l’objet de la transaction – la terre ou le droit d’exploitation ? – et du caractère libératoire ou non de la transaction (le paiement libère-t-il l’acquéreur de toute obligation vis-à-vis du cédant ?). En d’autres termes, la vente est-elle « complète », transfère-t-elle définitivement l’ensemble du faisceau de droits à l’acquéreur ? Ce concept, lorsqu’il est appliqué au foncier, traduit le fait qu’il n’y a pas un droit sur la terre, mais différents droits élémentaires correspondant à différentes actions socialement autorisées, qui constituent les composantes du faisceau : droits de cultiver, de réaliser des investissements (comme des plantations pérennes), etc., et surtout, pour ce qui concerne la présente discussion, droit de vendre ou de céder en faire-valoir indirect [8].

5Le champ de cet essai, qui mobilise la littérature de sciences sociales, restera thématiquement et spatialement restreint. Il se focalisera sur les ventes (« complètes » ou non), sans traiter donc des pratiques de faire-valoir indirect. L’analyse privilégiera l’Afrique de l’Ouest francophone, afin de réduire la diversité qu’aurait impliquée l’intégration de situations ayant connu d’autres histoires coloniales, en particulier le Ghana. Le cas ivoirien sera souvent évoqué du fait d’un développement précoce des transactions foncières, de la documentation existante et de l’expérience de recherche de l’auteur [9].

6L’analyse doit composer avec les limites des sources disponibles : rares sont les études portant spécifiquement sur les transactions foncières dans les contextes ouest-africains. Par ailleurs, les transferts, qui restent dans leur très grande majorité informels (au sens de non enregistrés par les services de l’État ou par des corps de métier homologués par l’État, comme les notaires), ne sont pas saisis par les statistiques et renseignés dans les archives (hors ceux concernant des conflits portés devant l’administration ou la justice, de fait peu ou non accessibles). Les éléments manquent donc pour proposer des analyses quantitatives et diachroniques des prix, des superficies concernées par les transactions ou de leur incidence sur la distribution foncière. Cet essai abordera la question de la marchandisation des terres rurales en mettant plutôt l’accent sur les conditions d’émergence des transactions foncières, le sens que leur donnent les acteurs, les logiques d’acteurs qui y président et les conflits induits.

Les facteurs de la marchandisation de l’accès à la terre rurale

7Dans un contexte marqué par une faible densité démographique, l’abondance de terre et le caractère largement autocentré et pas (ou peu) monétarisé de la production agricole, un caractère général des systèmes fonciers coutumiers ouest-africains jusque dans le courant du XXe siècle était que tout individu membre de la collectivité villageoise avait accès à la terre, afin de pouvoir assurer sa subsistance et celle de sa famille [10]. L’allocation de la terre, de nature non marchande, était du ressort des autorités coutumières, puis de dispositifs de délégation de droits d’usage au sein de chaque lignage. Dans un tel contexte, les ventes de terres rurales n’ont pas émergé de façon endogène au sein des sociétés locales, mais ont été historiquement et sont jusqu’à ce jour structurées par le rapport entre autochtones et allogènes. Ce constat infirme l’idée, parfois présentée comme une évidence empirique, que la monétarisation du rapport à la terre (tout particulièrement à travers les ventes) interviendrait initialement au sein des communautés villageoises locales, avant de s’ouvrir progressivement aux étrangers à ces communautés [11].

8La marchandisation de l’accès à la terre est à mettre en rapport avec différents facteurs qui, le plus souvent, se combinent et renvoient, directement ou indirectement, à l’accroissement de la pression foncière et de la valeur économique de la terre : passage d’une agriculture de subsistance à une agriculture commerciale et monétarisation de l’économie des sociétés rurales, pression démographique et demande de terre induites par l’arrivée de migrants, avec les cas emblématiques de la zone forestière de Côte d’Ivoire depuis le début du XXe siècle et du sud-ouest de la Haute-Volta (devenue en 1984 le Burkina Faso) depuis les années 1960 [12], périurbanisation [13]. L’introduction de cultures pérennes comme le caféier ou le cacaoyer, avec le développement des agricultures de plantation villageoise depuis le début du XXe siècle le long du golfe de Guinée, a contribué à la marchandisation de l’accès à la terre du fait de l’aliénabilité reconnue comme légitime de la plantation (car créée par le travail du planteur) et du caractère lié de l’arbre et de son support foncier. La dimension foncière de la transaction passe ainsi de sous-produit de l’acquisition d’un capital végétal en production à l’acquisition de la terre portant la plantation.

9La marchandisation de l’accès à la terre peut aussi être induite non pas directement par le jeu de la raréfaction foncière, mais par les politiques publiques. En Côte d’Ivoire, les pressions exercées par l’administration coloniale (au long du XXe siècle, jusqu’à l’indépendance en 1960), puis par le régime du président Houphouët-Boigny (dans les années 1960-1980), en faveur de l’installation en zone forestière de migrants originaires du centre et du nord du pays et de pays limitrophes, avec le slogan « la terre à celui qui la travaille », ont pu encourager les cessions, par les autochtones, de forêts encore inexploitées. Le risque de perte de tout contrôle autochtone sur les réserves foncières s’est ainsi traduit par une multiplication des cessions induites par cette logique dans le Centre-Ouest et le Sud-Ouest, entre les années 1950 et 1980 [14]. Ces dernières décennies, le risque d’expropriation pour lotissement en zones périurbaines a été également un stimulant de la marchandisation, dans une logique d’anticipation [15].

10Notons que la formalisation des droits sur la terre par le titre foncier, souvent présentée comme un facteur de dynamisation des marchés fonciers, n’intervient pas dans l’émergence et le développement des transactions portant sur les terres rurales d’Afrique de l’Ouest. Ce constat est à mettre en rapport avec l’ineffectivité, depuis l’époque coloniale jusqu’à présent, des politiques de formalisation (au sens d’intégration, dans le registre du droit écrit, des droits individuels ou collectifs qui ne l’étaient pas auparavant et relevaient de ce fait d’autres formes de régulation) [16]. Il n’exclut pas que de plus en plus d’acquéreurs de terres rurales, notamment les urbains – nous y reviendrons –, cherchent à sécuriser leur acquisition par l’obtention d’un titre foncier.

L’émergence des transactions marchandes

11L’accès des allogènes à la terre s’opérait traditionnellement dans le cadre d’une relation de patronage entre un autochtone (ou un groupe familial autochtone) et un migrant auquel des droits sur la terre étaient délégués au nom du principe d’économie morale [17], selon lequel « il faut assurer à tout individu l’accès aux ressources nécessaires à sa subsistance », sans terme défini mais avec l’idée qu’au décès ou au départ du bénéficiaire, le cédant récupérerait la terre [18]. L’accès à la terre donnait lieu à un don symbolique et « l’étranger » avait dès lors un devoir de reconnaissance vis-à-vis de son « tuteur » (autochtone l’ayant accueilli, lui ayant assuré un accès à la terre et avec qui s’établit un rapport de patronage), qui s’exprimait à travers les civilités de la vie quotidienne, par la remise de cadeaux après la récolte et, tout particulièrement, lors de temps forts de la vie sociale, comme les funérailles. Dans de tels contextes, la référence aux ventes traduit en fait un alourdissement et la monétarisation du don initial marquant l’accès à la terre, le transfert foncier conservant, du moins dans l’esprit des cédants, une dimension relationnelle forte. Lors des cessions foncières intervenant dans le cadre de ce néo-tutorat, le paiement ne clôt pas alors la relation, il l’instaure ou la perpétue – il s’agit là de la dimension majeure de l’enchâssement social des transactions dans les contextes évoqués ici [19]. Cette conception du transfert foncier n’est pas sans rappeler « l’emphytéose », si on définit cette dernière, de façon générique, par une durée indéfinie ou à très long terme et par le partage des droits sur la terre entre domaine éminent et domaine utile [20]. Andreas Köbben, dans les années 1950, favorisait déjà cette interprétation, en privilégiant l’expression « emphytéose sans canon fixe » plutôt que le terme de vente [21]. Dans une lecture plus anthropologique, on pourra dire que cette dimension relationnelle renvoie à une conception « inclusive » de la propriété, selon laquelle le transfert d’un bien maintient certains droits pour le cédant, alors qu’une conception « exclusive » considérera le bien comme passant sous le seul contrôle de la personne qui le détient [22] – avec le droit de propriété privée comme archétype, et une conceptualisation de la transaction comme vente « complète ».

12En d’autres termes, l’existence d’un flux financier ne permet pas toujours de conclure à une vente ferme, définitive, incontestable. Les achats-ventes peuvent rester entourés d’un certain flou relativement à la légitimité du vendeur, à l’interprétation de la nature de la transaction par les différents acteurs (achat de la terre ou du droit de planter, avec une échéance déterminée implicitement par la durée de vie de la culture mise en place ?), et donc au contenu des droits transférés et aux obligations de l’acheteur vis-à-vis du cédant [23]. D’autant que, dans les contextes ruraux ouest-africains auxquels nous nous intéressons ici, la marchandisation de l’accès à la terre intervient le plus souvent en déconnexion du cadre légal. Dans de nombreuses législations, les terres ne disposant pas d’un titre de propriété – l’immense majorité des terres rurales – relèvent légalement du Domaine privé de l’État (ou du Domaine national au Sénégal) et les législations prohibent alors (ou ne reconnaissent pas) les transactions portant sur des terres de statut coutumier [24]. Le déphasage, voire le divorce, entre pratiques foncières et cadre légal, parfois également entre pratiques et normes locales lorsque la coutume reste vivace, ont pour conséquence un développement de ventes informelles illégales ou extra-légales, mais souvent aussi incomplètes, ambiguës, susceptibles de se prêter à des interprétations divergentes [25].

13La marchandisation de l’accès à la terre suppose un changement dans les systèmes de valeur des acteurs, favorisé par les renouvellements générationnels et le « retour au village » de natifs ayant séjourné en milieu urbain ou dans des contextes où l’accès à la terre est d’ores et déjà largement « marchandisé » – comme dans le cas de Burkinabè de retour de Côte d’Ivoire forestière lors de la crise polico-militaire qui a secoué ce pays à partir de 2002 [26]. La diffusion de l’islam ou des cultes évangélistes intervient également, en fragilisant les normes coutumières et en légitimant le principe de la marchandisation de l’accès à la terre.

14Les ventes intervenant dans le cadre d’une relation de néo-tutorat expriment le contrôle social exercé par les aînés autochtones sur la terre non défrichée – avec la situation type des agricultures de plantation du golfe de Guinée –, ces aînés cédant la terre à des migrants. Un autre grand type de transactions correspond à des ventes de plantations (par des allogènes sur le départ à des allogènes) ou de friches (par des allogènes ou des autochtones à des allogènes). Les exploitants allogènes apparaissent en effet non seulement comme acquéreurs de terre, mais parfois également comme vendeurs, à l’occasion du retour dans leur village d’origine. Dans ce cas de figure, le droit exercé par le cédant vient non seulement du transfert foncier qui lui a assuré un accès initial à la terre, mais aussi de son investissement en travail. On retrouve ici la question de l’objet de la transaction – la terre, les arbres, le droit d’exploiter ? –, mais se posent aussi celle de la légitimité de la cession – un allogène sur le départ peut-il légitimement céder sa terre ou sa plantation ? – et celle du transfert d’obligations que pouvait avoir le cédant vis-à-vis de son « tuteur » autochtone. La norme sur ces points reconnaît la cessibilité de la plantation mais non de la terre en tant que telle, et requiert la reconnaissance, par l’acheteur, du transfert des obligations vis-à-vis de l’autochtone ayant concédé initialement l’accès à la terre au cédant [27] – avec ici une source de tension ou de conflit, en cas de non-respect de cette norme (voir infra).

15La conceptualisation de la vente, comme « complète » ou non, reste une question empirique à apprécier en un lieu et un temps donnés. Le principe d’une vente complète semble de plus en plus reconnu, du moins dans certaines régions du Burkina Faso, du Mali, de Côte d’Ivoire ou du Bénin, que ce soit de façon générale en zones périurbaines, avec le changement d’usage du sol par le lotissement, mais aussi relativement à des terres rurales [28]. Au Bénin, Ogounbyi Thomas Houédété rappelle ainsi que dans certains villages du plateau Adja, l’usage du qualificatif de hogbogbé désigne un achat « avec coupure du cordon ombilical [29] ».

Acteurs et logiques d’acteurs

16Traiter des acteurs et de leurs logiques dans leurs rapports aux transactions foncières marchandes ouvre un champ d’analyse particulièrement vaste et le propos ne peut que se limiter à quelques éclairages circonscrits.

17Relativement à l’offre, on peut distinguer trois principaux profils d’acteurs : les aînés de lignages ou de segments de lignage autochtones, les exploitants allogènes sur le départ [30], et, de plus en plus, des cadets autochtones, du fait de la fragmentation des groupes familiaux et de leurs patrimoines fonciers [31]. Ramané Kaboré note ainsi, dans un contexte burkinabè :

18

L’émancipation relative des cadets par rapport aux aînés et l’éclatement des lignées ou des familles élargies qui s’en est suivi concourent à la segmentation des domaines fonciers lignagers et à la revendication par les groupes familiaux restreints des droits d’appropriation sur les terres qui sont passées sous leur contrôle. Ces transformations […] entraînent l’émergence des cadets sociaux comme acteurs fonciers [32].

19Les logiques des acteurs impliqués dans les cessions relèvent de registres variés, sans que les sources permettent d’en apprécier le poids respectif.

20La cession a pu venir d’une anticipation du risque d’être dépossédé de la terre lorsque des politiques publiques créent une incertitude sur les droits des autochtones sur leurs réserves foncières, comme on l’a vu dans le cas du développement de l’économie de plantation villageoise en Côte d’Ivoire, ou lorsque les acteurs perçoivent un risque d’expropriation, tout particulièrement en zone périurbaine. Dans les cas de conflits sociopolitiques opposant autochtones et allogènes, des ventes réalisées par des allogènes craignant une dépossession violente ont également été documentées [33]. Sur un tout autre registre, la « vente de forêts », dans le contexte du développement des plantations villageoises (de caféiers ou de cacaoyers principalement) en zone forestière, était parfois une réponse aux contraintes du travail familial ou de trésorerie, la cession d’une partie des disponibilités foncières permettant la mise en valeur d’une autre partie de ces disponibilités en finançant l’emploi de manœuvres [34]. Les ventes ont pu aussi intervenir dans une logique d’aubaine, lorsque s’exprimait une forte demande de terre par de nouveaux venus, et où les cédants autochtones contrôlant les réserves foncières (des forêts inexploitées) avaient la perception d’une abondance de la terre et n’anticipaient pas la fin de cette abondance. Ainsi, dans le Centre-Ouest et l’Ouest ivoiriens des années 1960-1970, les terres étaient d’autant plus facilement cédées qu’elles étaient perçues comme une ressource dont on n’avait pas l’utilité immédiate et dont on pouvait ainsi tirer un profit facile [35]. De nos jours, la tentation est grande également dans les situations de forte pression foncière avec explosion des prix, comme dans les contextes périurbains ou, en zone rurale, lorsque la demande d’acteurs urbains (voir infra) se traduit par des offres de sommes importantes aux yeux des cédants [36].

21La vente peut accompagner un retrait de l’activité agricole locale. Cette logique est mentionnée avant tout pour les économies de plantation villageoise ayant impliqué des allogènes, les cessions intervenant lors du retour dans le village d’origine, si les plantations ne sont pas reprises par un parent. Une analyse diachronique exhaustive des ventes réalisées entre les années 1950 et 1980 dans un village localisé dans une ancienne zone pionnière de Basse Côte d’Ivoire montre que les ventes ont été essentiellement impulsées par le départ de planteurs pionniers, rentrant dans leur village d’origine sur leurs vieux jours. Le marché foncier, largement ouvert à la fin de la phase pionnière – un tiers de la superficie totale du terroir ayant fait l’objet d’une transaction au moins –, se referme presque totalement une fois disparue la génération des pionniers [37]. La cession peut enfin venir financer des dépenses sociales importantes (mariage, habitat, scolarisation, etc.) [38]. Il s’agit parfois de l’unique moyen d’obtenir les liquidités nécessaires pour répondre à un choc (comme un problème de santé), dans des contextes marqués par la défaillance des dispositifs publics ou privés d’assurance, de sécurité sociale ou de crédit [39].

22Relativement à la demande de terres rurales, deux catégories d’acteurs méritent une mention particulière. Ce sont d’abord les allogènes de souche paysanne : le développement des transactions foncières rurales s’est historiquement produit, en particulier depuis les années 1950, entre autochtones et migrants, nationaux ou non [40]. Ce sont ensuite les acteurs urbains, particulièrement actifs depuis deux décennies dans les transactions foncières de terres rurales à des fins de production agricole, dans des régions facilement accessibles par la route : il s’agit de petits ou grands fonctionnaires, de membres des professions libérales, de cadres du secteur privé, d’hommes ou femmes d’affaires, de politiciens, de membres des forces armées, etc. Ces acquisitions, en particulier celles réalisées par des membres des élites urbaines, sont mentionnées dans tous les pays considérés ici [41]. On peut voir là une version régionale et à une échelle réduite (de quelques hectares à quelques centaines d’hectares) de la dynamique d’accaparement foncier via les transactions marchandes – l’essentiel des « grandes acquisitions » en Afrique de l’Ouest ne venant cependant pas du jeu du marché, mais de concessions publiques sur des terres relevant juridiquement du domaine de l’État [42]. Les achats de terres rurales par les acteurs urbains font fréquemment intervenir des courtiers : des autochtones, des agents de l’administration, techniciens agricoles, commerçants, transporteurs, etc., qui, du fait de leurs activités professionnelles, ont l’occasion de parcourir les régions concernées et ont noué des relations avec les populations locales, ou encore parfois des agents immobiliers [43]. Ainsi en est-il du Sud Bénin, où des sites internet sont dédiés au marché foncier et où les utilisateurs de certains réseaux de téléphonie mobile reçoivent des offres de parcelles urbaines ou rurales, en fin d’appel [44].

23Les achats de terre peuvent avoir pour objectif la constitution d’un capital foncier productif, mais aussi la constitution d’un patrimoine transmissible. Ce facteur joue en particulier lorsque les systèmes coutumiers d’héritage, qui continuent à prévaloir en milieu rural, excluent les enfants ou les épouses – comme dans les sociétés matrilinéaires dans lesquelles les enfants appartiennent au lignage de leur mère et n’héritent donc pas de leur père [45]. L’achat de terre peut également viser à sécuriser une acquisition passée réalisée dans un cadre coutumier non marchand (dans une relation de tutorat), dans les contextes où la pression de la marchandisation fait craindre sa remise en cause [46]. Souvent dénoncées dans la littérature sur la marchandisation de la terre en Afrique subsaharienne, les acquisitions réalisées à des fins spéculatives ou de prestige restent rarement documentées empiriquement en Afrique de l’Ouest francophone, hors situations périurbaines.

Tensions et conflits autour des transactions foncières

24La marchandisation de l’accès à la terre peut induire une fragilisation des droits fonciers des allogènes ayant bénéficié par le passé d’un accès à la terre dans un cadre coutumier, pour une durée indéterminée et avec un devoir de reconnaissance symbolique, lorsque les autochtones exercent des pressions pour redéfinir ces cessions en rapports marchands. S’ils n’y parviennent pas, ils cherchent à expulser ces bénéficiaires pour réallouer la terre dans un cadre marchand. De telles pratiques sont documentées aussi bien au Burkina Faso qu’en Côte d’Ivoire ou au Bénin [47].

25Les conflits peuvent venir de la remise en cause de la transaction elle-même, du fait d’une contestation du droit ou de la légitimité du cédant à offrir la terre dans une transaction. Il peut s’agir d’un « tuteur » (ou ses héritiers) qui conteste une vente par un allogène qu’il avait « installé ». Il s’agit surtout de parents du cédant qui remettent en cause une cession portant sur des terres familiales héritées [48]. De façon très générale, les acteurs opèrent en effet une distinction entre les biens propres acquis par l’individu, qui peuvent faire librement l’objet de transactions, et les biens familiaux hérités dans le segment de lignage, pour lesquels les transactions peuvent être exclues ou pour le moins contraintes. Un autre champ de conflits conduisant à une contestation du principe même de la transaction, largement mentionné dans la littérature, trouve ses racines dans des pratiques ouvertement frauduleuses, avec des ventes réalisées par des cadets sociaux à l’insu de leur famille, ou avec la cession de parcelles sur lequel le cédant n’a aucun droit [49]. Ainsi, par exemple, la majorité des cas de dépossession foncière en situations dites de post-conflit documentés par Human Rights Watch [50] dans le Grand Ouest ivoirien venait de ventes de terres à des migrants burkinabè par des autochtones de villages voisins n’ayant aucun droit sur ces terres.

26Le facteur majeur de tensions et conflits dans les contextes ruraux ouest-africains vient d’une contestation non pas de la transaction en tant que telle, mais de son contenu. L’absence de spécification des droits transférés à travers une vente et le caractère informel du transfert ouvrent le champ à des interprétations divergentes de la transaction. Nombreux sont les autochtones de la zone forestière de Côte d’Ivoire qui réinterprètent aujourd’hui les transactions passées comme des cessions du droit d’exploitation, et non comme des ventes complètes. Cette question n’est en rien nouvelle, il suffit de mentionner, dans les années 1950, les études d’Andreas Köbben, Hubert Raulin ou Denise Paulme [51].

27Ces contestations, à mettre en rapport avec une perception plus aiguë de la raréfaction foncière, peuvent intervenir longtemps après la transaction initiale, en particulier avec l’arrivée de la génération des héritiers des cédants et le « retour au village » de jeunes en situation d’échec dans leurs projets urbains [52]. Les nouvelles générations remettent en cause les transferts passés en dénonçant le « bradage » des terres par les aînés et ne s’estiment pas liées par les arrangements conclus par la génération antérieure, avec l’argument du faible prix payé lors de l’acquisition et des gains perçus depuis lors par l’acquéreur grâce à l’exploitation de la terre. Dans cette dynamique, le contexte sociopolitique joue un rôle majeur, les élites autochtones (intellectuels, cadres, hommes politiques) étant actives dans la mobilisation d’un argumentaire autochtoniste s’opposant aux ventes à des allogènes et appelant à la récupération de la terre (moins dans une stratégie de mise en valeur directe, que de nouvelle cession marchande) ou à l’établissement d’une relation contractuelle : location à long terme, contrat de « planter-partager », maintenant plébiscité par les populations autochtones (sur lequel nous reviendrons) [53].

28Jean-Pierre Jacob propose une conception de la terre, dans les sociétés coutumières, à la fois comme bien privé et bien commun : la propriété individuelle est légitime mais les impératifs de la reproduction sociale – assurer l’accès à la terre des descendants, permettre à chacun de trouver une parcelle pour sa subsistance – imposent des restrictions au plein exercice de cette propriété – en particulier quant à la possibilité de l’aliéner définitivement par la vente [54]. La contestation des ventes par les autochtones peut être interprétée dans cette perspective. On peut aussi la voir comme l’expression d’intérêts individuels visant, fondamentalement, la pérennisation du versement d’une rente foncière, sous une forme ou sous une autre [55].

29La marchandisation de l’accès à la terre dans les contextes ouest-africains illustre la rencontre de différents registres de droit, de revendications contradictoires laissant une marge d’interprétation quant à la norme qui doit s’appliquer dans la circonstance – en d’autres termes, d’un pluralisme normatif [56], entre cadre légal et droits fonciers locaux. « La pluralité de normes peut alors favoriser les conflits portant non pas sur la façon d’arbitrer entre intérêts divergents en référence à une norme partagée, mais sur les normes à mobiliser [57]. »

Les stratégies de sécurisation des transactions

30Face aux risques de litiges auxquels ils sont confrontés, les acteurs impliqués dans les transactions foncières – les acquéreurs au premier titre – mettent en œuvre des stratégies de sécurisation visant à les prévenir [58].

31Une première stratégie est de « rendre visible » la possession par l’installation de panneaux indiquant le nom du propriétaire, de bornes, de clôtures, par l’emploi de gardiens, ou par la réalisation d’investissements sur la parcelle (plantation de cultures pérennes en particulier) (Fig. 1). La sécurisation des transactions passe aussi par les relations sociales : recours systématique à des témoins et sélection du partenaire (personnes jugées de confiance, mobilisation des réseaux pour s’informer de la fiabilité d’un partenaire potentiel). Sur un autre registre, pour un acquéreur allogène, la sécurisation de l’accès à la terre demande de se comporter « en bon étranger » à travers les civilités de la vie quotidienne, mais aussi en contribuant aux charges villageoises communes (construction d’une école, etc.) et en répondant aux sollicitations de la famille de son « tuteur ». Ce type de stratégie est documenté pour les acquéreurs de souche paysanne, mais aussi dans le cas de certaines acquisitions par les élites nationales [59]. Dans l’ouest du Burkina Faso toutefois, « être un bon étranger » n’est plus une garantie, le développement important des ventes accentuant les incitations à la renégociation d’accords fonciers passés. Les auteurs du GRAF (Groupe de recherche et d’action sur le foncier) soulignent que cette stratégie tend à être abandonnée par les « agrobusinessmen » dès lors qu’ils peuvent sécuriser leur accès à la terre avec des documents administratifs [60].

Figure 1

Panneau visant à sécuriser une propriété, département de l’Ouémé, Bénin

Figure 1

Panneau visant à sécuriser une propriété, département de l’Ouémé, Bénin

Source : Photographie Philippe Lavigne Delville (1er octobre 2016).

32Les transactions portent, dans leur grande majorité, sur des droits de propriété non reconnus légalement et ne peuvent donc pas être légalement enregistrées. Pour autant, nombreuses sont celles qui font l’objet d’une « formalisation locale », avec la production de documents écrits sans valeur légale, depuis la simple feuille volante manuscrite signée par les parties et des témoins, jusqu’à des formes plus élaborées [61]. Les autorités villageoises ou communales peuvent être impliquées dans la formalisation locale, pour « viser » le document (une pratique courante), voire dans le cadre d’une procédure édictée par les autorités locales, même sans valeur légale [62]. Ainsi par exemple à Guépahouo (Ouest ivoirien), le chef de village, devant la recrudescence des litiges induits par les ventes illicites de terre par des jeunes du village, demande que toute transaction foncière lui soit présentée, afin qu’il s’assure de l’accord de tous les membres de la famille du vendeur. Un acquéreur qui ne le solliciterait pas ne se verrait pas défendu, en cas de contestation ultérieure de la transaction [63]. Les administrations sont également fréquemment – quasi systématiquement, dans le cas des acquéreurs urbains – impliquées dans les procédures de sécurisation locale. On entre là dans le champ de ce qu’Albert Ley [64] qualifie de pratiques administratives coutumières, au sens de jeu informel des agences et des représentants locaux de l’État. Mairies ou sous-préfectures interviennent souvent en premier lieu par la légalisation des signatures portées sur le document. Même sans valeur légale quant au contenu de la transaction, ce visa donne du poids à l’acte. L’implication de ces administrations va parfois plus loin, avec la proposition de modèles d’« attestations de vente », de « contrats de cession de jachère », comme dans certaines sous-préfectures en Côte d’Ivoire, ici encore sans valeur juridique mais qui sont proposés à des fins de paix sociale, de façon contradictoire avec les directives ministérielles [65]. Les acquéreurs ont par ailleurs parfois recours à des attestations produites par l’administration de l’agriculture, détournées alors de leur usage, comme des attestations de délimitation de parcelle ou de plantation.

33Toutes ces stratégies de sécurisation contribuent indéniablement à réduire les conflits dans les contextes où l’État n’offre pas de dispositif sécurisant les transactions marchandes sur des terres coutumières (voire les prohibe), mais sont d’une efficacité toute relative. Ainsi, lors du recours à l’écrit dans les transactions, les contrats rédigés sous seing privé restent généralement largement incomplets relativement à la caractérisation de la parcelle et des droits et obligations transférés, et la légalisation des signatures par une autorité ne règle pas la question de la légitimité du cédant ou de son droit de céder, lorsque la parcelle est l’objet de droits familiaux collectifs [66].

34La plupart des conflits induits par les achats-ventes viennent, en amont, d’incertitudes sur les droits du cédant sur la parcelle concernée. Une reconnaissance formelle légale du contenu et des détenteurs des droits avant leur transfert préviendrait une bonne partie de ces conflits. La mise en œuvre de politiques de formalisation des droits présente cependant des difficultés trop souvent ignorées par les tenants de telles politiques – en particulier quant à l’identification des droits et des détenteurs de droits [67]. Les tentatives coloniales ou postcoloniales sont restées marginales en milieu rural. De telles politiques plus volontaristes ont bien été engagées dans divers États d’Afrique de l’Ouest depuis les années 1990, mais sans s’être à ce jour véritablement traduites à grande échelle dans les pratiques. L’option de la formalisation légale des droits ou des transactions, lorsqu’elle existe, est documentée (relativement aux terres rurales), avant tout pour les transactions impliquant des acteurs urbains aisés, du fait de son coût et de la lourdeur des procédures administratives [68]. Par ailleurs, la formalisation est censée sécuriser les droits de propriété, mais elle offre aussi, lors de l’identification des parcelles et des titulaires de droits sur ces parcelles, l’opportunité de contester le contenu de transactions passées et donc d’insécuriser les acquéreurs ou leurs héritiers – le cas ivoirien actuel le montre bien, d’autant plus que la propriété foncière titrée est, depuis 1998, réservée aux seuls citoyens ivoiriens [69].

35Une option radicalement différente est de trouver une alternative aux achats-ventes. En zone forestière ivoirienne, où les conflits autour des ventes aux allogènes se sont exacerbés ces dernières décennies, une dynamique marquée du contrat de « planter-partager » a été notée [70]. À travers un tel contrat, un propriétaire (souvent autochtone) confie à un exploitant (généralement allogène) la réalisation d’une plantation pérenne (cacaoyer, hévéa ou palmier à huile) et son entretien jusqu’à l’entrée en production. Dans la configuration dominante de ce contrat, la plantation est alors partagée entre l’exploitant et le propriétaire foncier. Le cédant conserve son droit de propriété sur l’ensemble de la terre ; le preneur accède à la propriété de la partie de la plantation qui lui revient pour la durée de vie de cette dernière [71]. Ces contrats sont vus par les cédants comme par les preneurs comme susceptibles de contribuer à une réduction des conflits en milieu rural, en tant qu’alternative aux ventes. Alors que l’incomplétude des ventes porte sur l’enjeu central des droits sur la terre de l’acquéreur, dans le cas du « planter-partager », elle porte sur les questions nettement moins sensibles aux yeux des acteurs, comme les conditions d’établissement de la plantation. Cet arrangement foncier permet aux cédants de surmonter les contraintes d’accès au travail, au financement et à l’expertise technique pour mettre en valeur leurs disponibilités foncières (réserves forestières ou surtout, de nos jours, vieilles plantations à reconvertir) tout en évitant la vente, source de tensions intrafamiliales et pratique rejetée par la rhétorique de l’autochtonie. Du point de vue des preneurs, les droits d’exploitation obtenus à travers un tel contrat sont perçus comme moins fragiles que ceux qui sont obtenus à l’occasion d’un achat, en évitant l’amertume des autochtones face à ce qu’ils perçoivent comme une dépossession foncière à la suite des ventes aux migrants par leurs aînés.

36Lorsque les différentes stratégies de sécurisation évoquées ne permettent pas d’éviter les conflits, le principe du règlement à l’amiable est central dans les tentatives de résolution de ces derniers. Les autorités familiales interviennent non seulement en cas de litiges au sein de la famille, induits par la participation aux marchés fonciers, mais également parfois pour gérer des agissements opportunistes de membres de la famille vis-à-vis de tiers. En cas de conflit entre migrants et autochtones, la pratique usuelle de résolution des litiges en milieu villageois est, en mobilisant les témoins présents lors de la transaction, la sollicitation initiale des autorités coutumières, avant de se tourner vers d’autres instances, sous-préfecture en particulier. Les chefs de village comme les sous-préfets tendent à rechercher le compromis et jouent ainsi souvent en premier lieu un rôle de médiateur. Le recours au tribunal civil n’intervient que si un enjeu économique important se présente, du fait de la lourdeur des procédures et de l’incertitude quant au résultat.

37Les acteurs mobilisent l’autorité tout à la fois la plus accessible (physiquement et sociopolitiquement) et dont ils pensent qu’elle se positionnera dans le sens de leur intérêt lors de l’arbitrage. Ainsi, en cas de litige, les élites urbaines se réfèrent moins aux autorités coutumières qu’aux autorités de l’État : sous-préfecture, gendarmerie, ministère de la Justice. La marchandisation de l’accès à la terre dans les contextes ouest-africains illustre ainsi des situations marquées par un pluralisme non seulement normatif, comme on l’a vu, mais également institutionnel, au sens de pluralisme des instances d’autorité prétendant réguler l’exercice des droits fonciers [72]. Il arrive, tout particulièrement en milieu rural où la force de l’État est moins prégnante, que dans ces situations de pluralisme normatif et institutionnel, aucun registre de normes, aucune autorité, ne s’impose, ce qui compromet tout règlement durable des conflits [73]. En définitive, traiter de la marchandisation de la terre ne peut faire l’économie d’une économie politique du marché foncier.

38Cet essai a présenté quelques enseignements structurants relativement à l’émergence et à la dynamique des transactions foncières marchandes en Afrique de l’Ouest rurale. La marchandisation de l’accès à la terre y est de plus en plus évidente, avec l’accroissement de la pression foncière et de la valeur économique de la terre, du fait, en particulier, de la pression démographique, des flux migratoires, de la périurbanisation et de l’expression d’une demande de terres rurales émanant d’acteurs urbains. Elle se déroule le plus souvent en déconnexion du cadre légal ; les transactions restent informelles et peuvent demeurer socialement enchâssées. L’émergence des transactions (comme leur polymorphisme, sur lequel nous n’avons pas insisté dans ce texte) illustre la capacité d’innovation institutionnelle des sociétés rurales ouest-africaines. Parmi les acteurs des transactions, deux catégories de preneurs attirent tout particulièrement l’attention : de longue date, les producteurs familiaux allogènes (nationaux ou étrangers), et plus récemment, les acteurs urbains. Enfin, les transactions foncières marchandes sont susceptibles d’induire divers types de tensions et de conflits. Face à ces risques, les acteurs développent un ensemble de stratégies de sécurisation, d’une effectivité non assurée. L’enjeu actuel reste celui de la conception d’une régulation publique pragmatique et accessible.

Notes

  • [1]
    J.-P. Colin et P. Woodhouse (dir.), « Interpreting Land Markets in Africa », Africa, vol. 80, n° 1, 2010.
  • [2]
    J.-P. Colin et E. Bouquet, « Marchés fonciers : dynamiques, efficience, équité », in J.-P. Colin, P. Lavigne Delville et É. Léonard (dir.), Foncier rural et développement. Enjeux et clés d’analyse en sciences sociales, Versailles, Éditions Quae-IRD, à paraître.
  • [3]
    J.-P. Colin, P. Lavigne Delville et J.-P. Jacob, « Le foncier : accès, acteurs et institutions », in J.-P. Colin et al. (dir.), Foncier rural et développement…, op. cit.
  • [4]
    M. Granovetter, « Economic Action and Social Structure: The Problem of Embeddedness », American Journal of Sociology, vol. 91, n° 3, 1985, p. 481-510.
  • [5]
    K. Polanyi, « The Economy as Instituted Process », in K. Polanyi, C. Arensberg et H. Pearson (dir.), Trade and Market in the Early Empires, Glencoe, The Free Press, 1957, p. 243-270.
  • [6]
    P. DiMaggio, « Cultural Aspects of Economic Action and Organization », in R. Friedland et A. Robertson (dir.), Beyond the Marketplace. Rethinking Economy and Society, New York, Aldine de Gruyter, 1990, p. 113-136.
  • [7]
    J.-P. Chauveau et J.-P. Colin, « Customary Transfers and Land Sales in Côte d’Ivoire: Revisiting the Embeddedness Issue », Africa, vol. 80, n° 1, 2010, p. 81-103.
  • [8]
    J.-P. Colin, P. Lavigne Delville et J.-P. Jacob, « Le foncier : accès, acteurs et institutions », art. cité.
  • [9]
    Il est impossible de citer les nombreuses références ayant contribué à la réflexion proposée ici. Pour une revue récente de la littérature couvrant les différents points traités dans ce texte, voir J.-P. Colin, Émergence et dynamique des marchés fonciers ruraux en Afrique subsaharienne. Un état des lieux sélectif, Cahiers du Pôle foncier, n° 18, Montpellier, Pôle foncier, 2017. Voir également J.-P. Chauveau, J.-P. Colin, P. Lavigne Delville et P.-Y. Le Meur, Modes d’accès à la terre, marchés fonciers, gouvernance et politiques foncières en Afrique de l’Ouest, Londres, IIED, 2006 ; E. Sjaastad, « Trends in the Emergence of Agricultural Land Markets in Sub-Saharan Africa », Forum For Development Studies, vol. 30, n° 1, 2003, p. 5-28.
  • [10]
    G. A. Kouassigan, L’homme et la terre. Droits fonciers coutumiers et droit de propriété en Afrique occidentale, Paris, ORSTOM, 1966.
  • [11]
    Voir par exemple H. Binswanger, K. Deininger et G. Feder, « Power, Distorsions, Revolt, and Reform in Agricultural Land Relations », in J. Behrman et T. N. Srinivasan (dir.), Handbook of Development Economics, Amsterdam, Elsevier Science, 1995, p. 2659-2772.
  • [12]
    G. Feder et R. Noronha, « Land Rights Systems and Agricultural Development in Sub-Saharan Africa », Research Observer, vol. 2, n° 2, 1987, p. 143-169 ; D. Ault et G. Rutman, « The Development of Individual Rights to Property in Tribal Africa », Journal of Law and Economics, vol. 22, n° 1, 1979, p. 163-182.
  • [13]
    Voir par exemple P. Lavigne Delville, Les marchés fonciers ruraux au Bénin. Dynamiques, conflits, enjeux de régulation, Cahiers du Pôle foncier, n° 19, Montpellier, Pôle foncier, 2018.
  • [14]
    A. Schwartz, Sous-peuplement et développement dans le sud-ouest de la Côte d’Ivoire. Cinq siècles d’histoire économique et sociale, Paris, ORSTOM, 1993 ; É. Léonard et R. Ballac, « Colonisation agraire et construction de clientèles : la mise en place d’un nouvel ordre économique et social (1960-1990) », in É. Léonard et P. Vimard (dir.), Crises et recompositions d’une agriculture pionnière en Côte d’Ivoire. Dynamiques démographiques et changements économiques dans le Bas-Sassandra (Côte d’Ivoire), Paris, IRD-Karthala, 2005, p. 93-148.
  • [15]
    Voir par exemple T. Benjaminsen et E. Sjaastad, « Race for the Prize: Land Transactions and Rent Appropriation in the Malian Cotton Zone », in T. Benjaminsen et C. Lund (dir.), Securing Land Rights in Africa, Londres, Frank Cass, 2003, p. 129-152.
  • [16]
    P. Lavigne Delville, J.-P. Colin, É. Léonard et P.-Y. Le Meur, « Les politiques et opérations contemporaines de formalisation des droits sur la terre », in J.-P. Colin et al. (dir.), Foncier rural et développement…, op. cit.
  • [17]
    J. Scott, The Moral Economy of the Peasant. Rebellion and Subsistence in Southeast Asia, New Haven, Yale University Press, 1976.
  • [18]
    J.-P. Chauveau, « How Does an Institution Evolve? Land, Politics, Intergenerational Relations and the Institution of the Tutorat Amongst Autochtones and Immigrants (Gban Region, Côte d’Ivoire) », in R. Kuba et C. Lentz (dir.), Land and the Politics of Belonging in West Africa, Boston, Brill, 2006, p. 213-240.
  • [19]
    J.-P. Colin, « Le développement d’un marché foncier ? Une perspective ivoirienne », Afrique contemporaine, n° 213, 2005, p. 179-196.
  • [20]
    G. Béaur, R. Congost et P. F. Luna, « Emphyteusis: A Practical Question? », in R. Congost et P. F. Luna (dir.), Agrarian Change and Imperfect Property. Emphyteusis in Europe (16th to 19th centuries), Turnhout, Brepols, 2018, p. 11-38.
  • [21]
    A. Köbben, « Le planteur noir : essai d’une ethnographie d’aspect », Études éburnéennes, n° 5, 1956, p. 7-189.
  • [22]
    J. Carrier, « Property and Social Relations in Melanesian Anthropology », in C. Hann (dir.), Property Relations. Renewing the Anthopological Tradition, Cambridge, Cambridge University Press, 1998, p. 85-103.
  • [23]
    J.-P. Colin, « Le développement d’un marché foncier ?… », art. cité ; J.-P. Chauveau et J.-P. Colin, « Customary Transfers and Land Sales in Côte d’Ivoire… », art. cité.
  • [24]
    Pour un aperçu actualisé des législations foncières des pays d’Afrique de l’Ouest, voir P. Lavigne Delville, J.-P. Colin, I. Ka et M. Merlet, avec des contributions de G. Kouamé, S. Koudougou, M. B. F. Ouattara et S. El Ouaamari, Étude régionale sur les marchés fonciers ruraux en Afrique de l’Ouest et les outils de leur régulation. Rapport final, Dakar, UEMOA-IPAR, 2017.
  • [25]
    P. Mathieu, M. Zongo et L. Paré, « Monetary Land Transactions in Western Burkina Faso: Commoditisation, Papers and Ambiguities », in T. Benjaminsen et C. Lund (dir.), Securing Land Rights…, op. cit.
  • [26]
    L. Paré, Les délégations de droits de culture dans l’aire cotonnière du Burkina Faso. Modalités et dynamiques, Paris-Londres, GRET-IIED, 2003.
  • [27]
    J.-P. Colin, « Le développement d’un marché foncier ?… », art. cité.
  • [28]
    Id., « Émergence et dynamique des marchés fonciers ruraux… », art. cité.
  • [29]
    O. T. Houédété, « Régime foncier et développement agricole au sud du Bénin : de l’indépendance à nos jours (1960-2002) », thèse de doctorat en économie, Université Grenoble 2, 2004.
  • [30]
    P. Rey, « Droits fonciers, quelles perspectives pour la Guinée ? », Annales de géographie, n° 679, 2011, p. 5-26 ; P. Mathieu et al., « Monetary Land Transactions in Western Burkina Faso… », art. cité ; J.-P. Colin, « Le développement d’un marché foncier ?… », art. cité ; L. Adjahouéhoué, « Dynamiques sociales autour du foncier périurbain de Cotonou au Bénin : logique des acteurs et vulnérabilité sociale », thèse de doctorat, Université d’Abomey-Calavi, 2013.
  • [31]
    P. Mathieu, P. Lavigne Delville, H. Ouédraogo, L. Paré et M. Zongo, Sécuriser les transactions foncières au Burkina Faso. Étude sur l’évolution des transactions foncières au Burkina Faso. Rapport de synthèse, Paris, GRET, 2000 ; J.-P. Chauveau et al., Modes d’accès à la terre, marchés fonciers…, op. cit.
  • [32]
    R. Kaboré, « Agro-business, dynamiques socio-foncières et conflits fonciers dans le Ziro (centre-sud du Burkina Faso) », communication au Pôle foncier de Montpellier, 27 septembre 2012.
  • [33]
    F. Ruf, « Pareto en Côte d’Ivoire : cycle du caoutchouc et concentration foncière », in E. Jul-Larsen, P.-J. Laurent, P.-Y. Le Meur et É. Léonard (dir.), Une anthropologie entre pouvoirs et histoire. Conversations autour de l’œuvre de Jean-Pierre Chauveau, Paris, Karthala-IRD-APAD, 2011, p. 59-91.
  • [34]
    R. Hecht, « Immigration, Land Transfers and Tenure Change in Divo, Ivory Coast, 1940-80 », Africa, vol. 55, n° 3, 1985, p. 319-336.
  • [35]
    D. Paulme, Une société de Côte d’Ivoire hier et aujourd’hui. Les Bété, Paris, Mouton, 1962 ; P. Léna, « Quelques aspects du processus de différenciation économique en zone de colonisation récente (Région de Soubré, sud-ouest de la Côte d’Ivoire) », Cahiers du CIRES, n° 30, 1981, p. 65-95 ; M. Lesourd, « L’émigration baoulé vers le sud-ouest de la Côte d’Ivoire », thèse de 3e cycle en géographie, Université Paris 10, 1982 ; J.-P. Chauveau et J. Richard, Bodiba en Côte d’Ivoire. Du terroir à l’État : petite production paysanne et salariat agricole dans un village gban, Paris, Éditions de l’ORSTOM, 1983.
  • [36]
    Voir, par exemple, P. Lavigne Delville, « Les marchés fonciers ruraux au Bénin… », art. cité, sur le Sud Bénin, mais cette logique joue dans bien d’autres contextes.
  • [37]
    J.-P. Colin, « Le développement d’un marché foncier ?… », art. cité.
  • [38]
    R. Hecht, « Immigration, Land Transfers… », art. cité ; A. Floquet et R. Mongbo, Des paysans en mal d’alternatives. Dégradation des terres, restructuration de l’espace agraire et urbanisation au Bas Bénin, Weikersheim, Margraf Verlag, 1998 ; J.-P. Dozon, La société bété. Histoires d’une ethnie de Côte d’Ivoire, Paris, Karthala-ORSTOM, 1985.
  • [39]
    M. Pescay, « Transformation des systèmes fonciers et “transition foncière” au Sud-Bénin », in P. Lavigne Delville (dir.), Quelles politiques foncières pour l’Afrique rurale ? Réconcilier pratiques, légitimité et légalité, Paris, Karthala, 1998, p. 131-156 ; A. Floquet et R. Mongbo, Des paysans en mal d’alternatives…, op. cit. ; M. Zongo, « Étude des groupements d’immigrés burkinabè dans la région d’Oumé (Côte d’Ivoire) : organisation en migration, rapports fonciers avec les groupes autochtones et les pouvoirs publics », document de travail de l’UR « Régulations foncières, politiques publiques et logiques d’acteurs », Montpellier, IRD, 2001.
  • [40]
    P. Mathieu et al., Sécuriser les transactions foncières au Burkina Faso…, op. cit. ; J.-P. Colin, « Étude sur la location et la vente des terres rurales en Côte d’Ivoire. Diagnostic des pratiques », Abidjan, République de Côte d’Ivoire-Ministère de l’Agriculture-Délégation de l’Union européenne, 2008.
  • [41]
    T. Benjaminsen et E. Sjaastad, « Race for the Prize… », art. cité ; S. Ouédraogo, Accès à la terre et sécurisation des nouveaux acteurs autour du lac Bazèga (Burkina Faso), Londres, IIED, 2006 ; Y. Magnon, « En attendant l’aéroport : pression marchande et vulnérabilités sociofoncières et agricoles à Glo-Djigbé (arrondissement rural du Sud-Bénin) », Autrepart, vol. 4, n° 4, p. 107-120 ; T. Hilhorst, J. Nelen et N. Traoré, Agrarian Change Below the Radar Screen. Rising Farmland Acquisitions by Domestic Investors in West Africa. Results from a Survey in Benin, Burkina Faso and Niger, Amsterdam, Royal Tropical Institute-SNV Netherlands Development Organisation, 2011 ; J.-P. Colin et G. Tarrouth, « Les élites urbaines comme nouveaux acteurs du marché foncier en Côte d’Ivoire », Géographie, économie, société, n° 19, 2017, p. 73-97.
  • [42]
    L. Cotula, « The International Political Economy of the Global Land Rush: A Critical Appraisal of Trends, Scale, Geography and Drivers », Journal of Peasant Studies, vol. 39, n° 3-4, 2012, p. 649-680.
  • [43]
    C. Goislard et M. Djiré, « Accès à l’information juridique, aux institutions et procédures légales. Quelle sécurisation foncière pour les ruraux pauvres au Mali ? Étude de cas dans le Sud malien », FAO, LSP Document de travail, n° 44, 2007 ; T. Benjaminsen et E. Sjaastad, « Race for the Prize… », art. cité ; GRAF, Agrobusiness au Burkina Faso. Quels effets sur le foncier et la modernisation agricole ?, Ouagadougou-Amsterdam, GRAF, 2011 ; T. Hilhorst et al., Agrarian Change Below the Radar Screen…, op. cit. ; J.-P. Colin et G. Tarrouth, « Les élites urbaines comme nouveaux acteurs… », art. cité.
  • [44]
    P. Lavigne Delville, « Les marchés fonciers ruraux au Bénin… », art. cité.
  • [45]
    J.-P. Colin et C. Rangé, « Les dimensions intrafamiliales de la question foncière », in J.-P. Colin et al. (dir.), Foncier rural et développement…, op. cit.
  • [46]
    J.-P. Chauveau et al., Modes d’accès à la terre, marchés fonciers…, op. cit.
  • [47]
    Voir des références in ibid. ; J.-P. Colin, « Émergence et dynamique des marchés fonciers ruraux… », art. cité ; M. Pescay, « Transformation des systèmes fonciers et “transition foncière” au Sud-Bénin », art. cité.
  • [48]
    A. Floquet et R. Mongbo, Des paysans en mal d’alternatives…, op. cit. ; H. Edja, Les délégations de droits de culture dans le sud du Bénin, modalités et dynamiques, Paris-Londres, GRET-IIED, 2003 ; J.-P. Colin, Étude sur la location et les ventes de terre rurales en Côte d’Ivoire…, op. cit.
  • [49]
    Voir par exemple P. Mathieu et al., Sécuriser les transactions foncières au Burkina Faso…, op. cit. ; J.-P. Colin, Étude sur la location et les ventes de terre rurales en Côte d’Ivoire…, op. cit.
  • [50]
    Human Rights Watch, « Cette terre est la richesse de ma famille ». Agir contre la dépossession de terres suite au conflit postélectoral en Côte d’Ivoire, Abidjan, 2013.
  • [51]
    A. Köbben, « Le planteur noir… », art. cité ; H. Raulin, Mission d’étude des groupements immigrés en Côte d’Ivoire. Problèmes fonciers dans les régions de Gagnoa et Daloa, Paris, ORSTOM, 1957 ; D. Paulme, Une société de Côte d’Ivoire hier et aujourd’hui…, op. cit.
  • [52]
    C. Beauchemin, « Le temps du retour ? L’émigration urbaine en Côte d’Ivoire, une étude géographique », thèse de doctorat en aménagement et urbanisme, Université Paris 8, 2000 ; J.-P. Colin, Étude sur la location et les ventes de terre rurales en Côte d’Ivoire…, op. cit. ; L. Montaz, Retour au village. Jeunesse et pouvoirs en Côte d’Ivoire, Paris, Karthala, 2020.
  • [53]
    S. Hagberg, « Money, Ritual and the Politics of Belonging in Land Transactions in Western Burkina Faso », in R. Kuba et C. Lentz (dir.), Land and the Politics of Belonging in West Africa, Boston, Brill, 2006, p. 99-118 ; J.-P. Chauveau et al., Modes d’accès à la terre, marchés fonciers…, op. cit. ; J.-P. Colin, Étude sur la location et les ventes de terre rurales en Côte d’Ivoire…, op. cit. ; L. Montaz, Retour au village…, op. cit.
  • [54]
    J.-P. Jacob, Terres privées, terres communes. Gouvernement de la nature et des hommes en pays winye, Paris, IRD Éditions, 2007.
  • [55]
    J.-P. Colin, Étude sur la location et les ventes de terre rurales en Côte d’Ivoire…, op. cit.
  • [56]
    J. Griffiths, « What Is Legal Pluralism? », The Journal of Legal Pluralism and Unofficial Law, vol. 18, n° 24, 1986, p. 1-55.
  • [57]
    J.-P. Colin et al., « Le foncier : accès, acteurs et institutions », art. cité.
  • [58]
    P. Mathieu et al., « Monetary Land Transactions in Western Burkina Faso… », art. cité ; J.-P. Colin, « Securing Rural Land Transactions in Africa. An Ivorian Perspective », Land Use Policy, vol. 31, 2013, p. 430-440. Voir davantage de références in J.-P. Colin, « Émergence et dynamique des marchés fonciers ruraux… », art. cité ; P. Lavigne Delville et al., Étude régionale sur les marchés fonciers ruraux en Afrique de l’Ouest…, op. cit.
  • [59]
    Voir par exemple T. Hilhorst et al., Agrarian Change Below the Radar Screen…, op. cit. ; J.-P. Colin et G. Tarrouth, « Les élites urbaines comme nouveaux acteurs… », art. cité.
  • [60]
    GRAF, Agrobusiness au Burkina Faso…, op. cit.
  • [61]
    P. Lavigne Delville, « When Farmers Use “Pieces of Paper” to Record their Land Transactions in Francophone Rural Africa: Insights Into the Dynamics of Institutional Innovation », in T. Benjaminsen et C. Lund (dir.), Securing Land Rights…, op. cit. ; P. Mathieu et al., « Monetary Land Transactions in Western Burkina Faso… », art. cité ; J.-P. Colin, Étude sur la location et les ventes de terre rurales en Côte d’Ivoire…, op. cit. ; T. Benjaminsen, S. Holden, C. Lund et E. Sjaastad, « Formalisation of Land Rights: Some Empirical Evidence from Mali, Niger and South Africa », Land Use Policy, vol. 26, 2008, p. 28-35 ; J.-P. Chauveau et al., Modes d’accès à la terre, marchés fonciers…, op. cit.
  • [62]
    H. Edja, « Colonisation agricole spontanée et milieux sociaux nouveaux : la migration rurale dans le Zou-Nord au Bénin », thèse de doctorat en sociologie du développement, Université de Hohenheim, Stuttgart, 1998.
  • [63]
    C. Beauchemin, « Le temps du retour ?… », op. cit.
  • [64]
    A. Ley, Le régime domanial et foncier et le développement économique de la Côte d’Ivoire, Paris, LGDJ, 1972.
  • [65]
    J.-P. Colin, Étude sur la location et les ventes de terre rurales en Côte d’Ivoire…, op. cit.
  • [66]
    P. Lavigne Delville et al., Étude régionale sur les marchés fonciers ruraux…, op. cit.
  • [67]
    Voir P. Lavigne Delville et al., « Les politiques et opérations contemporaines de formalisation des droits… », art. cité.
  • [68]
    P. Lavigne Delville et al., Étude régionale sur les marchés fonciers ruraux…, op. cit.
  • [69]
    J.-P. Chauveau et J.-P. Colin, « La question foncière à l’épreuve de la reconstruction en Côte d’Ivoire », in F. Viti (dir.), La Côte d’Ivoire, d’une crise à l’autre, Paris, L’Harmattan, 2014, p. 9-38.
  • [70]
    J.-P. Colin et F. Ruf, « Une économie de plantation en devenir. L’essor des contrats de planter-partager comme innovation institutionnelle dans les rapports entre autochtones et étrangers en Côte d’Ivoire », Revue Tiers Monde, n° 207, 2011, p. 169-187.
  • [71]
    Ce contrat n’est pas sans rappeler des formes d’emphytéose ou de baux à complants comme la rabassa morta en Catalogne. Voir G. Béaur, R. Congost et P. Luna, « Emphyteusis: A Practical Question? », art. cité.
  • [72]
    K. von Benda-Beckmann, « Forum Shopping and Shopping Forums: Dispute Processing in a Minangkabau Village in West Sumatra », The Journal of Legal Pluralism, vol. 13, n° 19, 1981, p. 117-159 ; C. Lund, « Negotiating Property Institutions: On the Symbiosis of Property and Authority in Africa », in K. Juul et C. Lund (dir.), Negotiating Property in Africa, Portsmouth, Heinemann, 2002, p. 11-43.
  • [73]
    J.-P. Colin et al., « Le foncier : accès, acteurs et institutions », art. cité.
Français

Cet essai propose une lecture de l’émergence et du développement des ventes de terres rurales en Afrique de l’Ouest francophone. Ces transactions n’émergent pas de façon endogène au sein des sociétés locales, mais sont structurées par le rapport entre cédants autochtones et preneurs allogènes. Elles restent souvent socialement enchâssées : le paiement ne clôt pas alors la relation, il l’instaure ou la perpétue. L’existence d’un flux financier ne permet pas dans ce cas de conclure à une vente ferme, définitive, incontestable, d’autant que, sauf exceptions, les transactions concernant les terres rurales se déroulent en déconnexion du cadre légal et restent informelles. Ces transferts fonciers posent la question de l’interprétation, par les parties, de l’objet de la transaction (la terre ou le droit d’exploitation ?) et de son caractère libératoire ou non – en d’autres termes, la vente est-elle « complète » ? La réponse est à apprécier empiriquement en un lieu et un temps donnés. La marchandisation de l’accès à la terre dans les contextes ouest-africains illustre des situations marquées par un pluralisme normatif et institutionnel.

Jean-Philippe Colin
SENS, CIRAD
(IRD, Université Paul-Valéry Montpellier 3)
Cette publication est la plus récente de l'auteur sur Cairn.info.
Mis en ligne sur Cairn.info le 23/02/2022
https://doi.org/10.3917/lms1.277.0117
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