CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1Partant du constat que la prise de risques collectifs (industriels et naturels) est, contrairement à la prise de risque individuel qui permet parfois de s’imposer en collectivité, largement redoutée par nos sociétés alors que ces risques sont particulièrement difficiles à évaluer et à normaliser, il convient, dans le cadre d’un objectif de développement durable, de poser certaines questions nées de la complexité du risque, caractéristique de notre époque.

21) Comment définir les notions de risque et complexité dans leur diversité ?

32) De quels outils disposons-nous pour une approche rationnelle et globale ?

43) Comment faire face aux différences culturelles dans la perception et à la dimension humaine dans la gestion du risque ?

54) Quelle expérience tirée de la comparaison de situations de risques de différentes natures pour établir les contours d’une gestion mondialisée de certains risques ?

6En mettant ainsi l’accent sur la pluralité des approches disciplinaires (scientifique, juridique, sociologique, philosophique, anthropologique), géographiques et culturelles (principalement en comparant Asie-Europe-Amérique du Nord) et les types de risques (techniques et naturelles, imprévisibles et prévisibles, industriels et environnementaux, biologiques et nucléaires), nous fixons les axes d’une politique du risque qui peut se décliner ainsi :

  • La nécessité de se doter d’outils d’évaluation aptes à définir une méthodologie adaptée aux différentes natures de risques et à leur dimension tout à la fois complexe et globale, notamment en ce que « sciences dures » et sciences sociales ne doivent plus s’ignorer dans une analyse de ce type ;
  • L’intérêt à percevoir la double dimension de chaque risque : une dimension inscrite dans des territoires, dans lesquels le risque se produit, mais aussi une dimension plus large en raison de la perméabilité « physique » et des retombées sociales et humaines de chaque risque ;
  • La prise de conscience du rôle du droit. En effet, tant la prévention que la gestion des risques supposent de nouveaux moyens pour faire face à la dimension planétaire des risques de sorte que l’émergence d’un droit international est un élément contributeur important. Il nécessite cependant d’être conforté par des institutions en charge de mener des politiques déléguées, voire de sanctionner leur violation (idée d’un tribunal pénal international en matière d’environnement).

7Il sera ainsi permis de trouver des synergies d’intérêts et de coopération entre chercheurs et acteurs des politiques.

8Si les explications de survenance des risques ont évolué historiquement, d’abord de nature religieuse, puis philosophique, elles soulignent désormais la complexité du risque moderne, logiquement lié à l’incertitude techno-scientifique. En effet, il n’y a jamais un seul élément, ou erreur, à l’origine d’une catastrophe. Le risque moderne est excessivement difficile à prévoir car il dépend de nombreux facteurs d’où sa complexité à plusieurs niveaux.

9Or, recherchant un « bien-être » permanent, nos sociétés post-modernes considèrent le risque comme une anomalie, qu’il convient d’éliminer. Cependant, on peut aussi penser que son occurrence permet d’avancer dans l’ordre du développement des connaissances et des expériences.

10Alors faut-il considérer le risque dans sa complexité comme une anomalie à combattre ou un facteur du développement qu’il convient de comprendre et de « maîtriser » au mieux ?

11A défaut, doit-on se résigner à minimiser les risques et à « gérer » les conséquences de leur survenance ?

12Là encore, on peut se demander si les systèmes de prévention des risques, notamment celui reposant sur le principe de précaution, comme les systèmes visant à compenser les atteintes aux biens, aux personnes et à l’environnement, représentent une bonne réponse face au risque dès lors que nos sociétés ne réaliseraient pas que le risque zéro n’existe pas et qu’au contraire, c’est d’une certaine manière avec le risque que nos sociétés « progressent ».

Christian Byk
Magistrat, Secrétaire général
Association internationale droit, éthique et science
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Mis en ligne sur Cairn.info le 20/10/2017
https://doi.org/10.3917/jib.282.0011
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