1La proximité de la mise en œuvre du processus qui doit conduire à la révision de la loi de bioéthique justifierait déjà le rapprochement des termes de bioéthique et de politique.
2Sans être indifférent à cette opportunité, nous souhaitons donner un autre sens à la politisation de la bioéthique : le constat que le développement des sciences et des techniques, notamment dans le domaine biomédical et biotechnologique, contribue à la construction d’un nouveau modèle social.
3De même que le rationalisme a introduit une rupture entre la société du Moyen-âge et celle qui prit son essor avec la Renaissance puis le Siècle des Lumières, la techno science nous a fait entrer dans l’ère post-moderne, celle de l’effondrement des utopies, de l’individualisme et de la « compétition » internationale. La maîtrise des techniques, en flattant nos ambitions, nous donne l’assurance d’une « amélioration » de la vie humaine. Elle dessine aussi insidieusement les contours d’un monde où la symbiose entre l’homme et la technique rend l’humanité plus fragile parce qu’il lui appartient, dans ce formidable mouvement d’accélération de l’histoire au regard de la vitesse technologique, d’en assumer les conséquences économiques, socioculturelles et politiques.
4Autrement dit, il nous appartient de changer les structures mêmes de la société non parce que l’assistance médicale à la procréation bouleverse nos certitudes sur ce qui constitue la parenté ou que les neurosciences ouvrent la voie à de nouvelles interrogations sur la liberté individuelle mais parce que ces outils de notre intervention sur l’homme et son environnement exigent précisément que nous maintenions l’action humaine dans un vaste champ d’intervention nourri d’un savoir global susceptible de l’inscrire dans une histoire et de lui dessiner un avenir. La bioéthique, c’est l’idée que pour survivre en tant qu’humanité les hommes doivent exercer leur liberté pour fonder un projet commun.
