CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1 INTRODUCTION

1L’évolution de la réglementation des industries de réseaux (électricité, télécommunications, chemins de fer…) constitue un terrain d’investigation privilégié pour apprécier la nature et les ressorts de la dynamique de transformation de l’intervention de l’État en matière économique. Les mutations en cours posent la question de la place de l’action publique en matière économique et quant aux missions de service public. Nous n’ambitionnerons pas ici de nous attacher aux implications de la libéralisation sur l’intervention économique de l’État. Notre souci sera d’examiner la dynamique de changement institutionnel elle-même. Il s’agit de mettre en évidence quels sont les dispositifs et les institutions qui sous-tendent l’évolution du cadre législatif et réglementaire. Nous examinerons donc moins l’activité législative elle-même, que l’application des textes, leur utilisation et leur transformation au travers de la jurisprudence. Notre démarche prend appui sur l’économie institutionnaliste du droit [1]. Pour cette dernière, la jurisprudence permet de saisir les modes d’activation des règles de droit, que cela soit dans le cadre de la résolution des conflits d’intérêts ou de construction de la réglementation économique. Les règles ouvrent des registres d’action stratégique aux acteurs économiques. Comme le notent Thierry Kirat et Évelyne Serverin, « le droit en tant que tel peut faire l’objet d’actions visant à l’interpréter, le modifier ou à le préserver, à l’initiative d’acteurs individuels ou collectifs qui ont un intérêt à la règle. La règle juridique est alors endogénéisée dans un champ stratégique ou calculatoire (…) l’action visant la règle ne se résume pas à un jeu de lobbying exercé par des groupes d’intérêts sur le décideur public, mais s’exerce chaque fois qu’un sujet (individuel ou collectif) est intéressé par le sens donné à la règle, et agit en conséquence. Ces actions sont observables à la fois devant les tribunaux (par la demande de jurisprudences), dans la sphère privée (interprétation de la règle dans un but utilitaire) et dans l’espace administratif (circulaires et instructions destinées à guider l’action des agents dans l’application des dispositions juridiques) ».

2Notre propos sera de mettre en exergue l’utilisation d’un tel registre d’action dans le cadre du changement de réglementation que connaissent actuellement les industries de réseaux. À cette fin, nous nous proposons d’analyser la production juridique du Conseil de la Concurrence français (ci-dessous : Conseil). En effet, le Conseil nous apparaît tout d’abord comme un lieu pertinent d’observation du changement réglementaire dans la mesure où il intervient dans différentes étapes de la libéralisation des réseaux. Ensuite, sa jurisprudence revêt une importance particulière en matière de précision et de mise en œuvre de la réglementation. Elle nous permet de saisir ses inflexions et de mettre en évidence l’influence des décisions de justice dans sa construction. Nous comparerons donc les différentes industries de réseaux afin de vérifier s’il est possible d’identifier une même dynamique dans leurs processus respectifs de libéralisation. À cette fin, nous nous attacherons particulièrement au cas du secteur électrique. L’intuition, que nous proposons de confronter à la jurisprudence, est qu’il existe trois phases successives d’activation du Conseil, lesquelles correspondent à trois grandes étapes de l’évolution législative et réglementaire. Différents acteurs institutionnels et économiques vont successivement saisir le Conseil pour solliciter des avis relatifs à la réglementation générale du secteur, à la mise en place du nouveau cadre réglementaire et pour enfin trancher d’éventuels litiges les opposant à l’opérateur historique.

Figure 1

Étapes de l’intervention du Conseil

Figure 1
Étapes de l’intervention du Conseil dans la réglementation des services publics en réseaux Avis sur la Avis sur la Activation de la réglementation mise en application réglementation « optimale » de la réglementation par les firmes Pouvoirs publics Autorités Firmes ou Groupes d’intérêts de régulation du secteur Acteurs à l’origine des saisines Industries de réseaux non encore « libéralisés » [Chemins de fer, Poste…] Industries de réseaux en cours de libéralisation [Électricité] Industries de réseaux libéralisés [T élécommunications] Situation des différents services publics de réseaux dans le processus de libéralisation Figure 1 : Étapes de l’intervention du Conseil dans la réglementation des industries de réseaux

Étapes de l’intervention du Conseil

3L’intérêt du corpus d’actes du Conseil vient de la succession dans le temps et de la pluralité de ses interventions dans la conception de la réglementation et dans son application / construction par le jeu de la jurisprudence. Il est donc possible de dégager une logique des interventions dans le processus conduisant à la construction de la nouvelle réglementation. L’activité du Conseil permet de mettre en évidence ces passages de relais successifs. Nous viserons à le montrer au moyen d’une analyse statistique de l’ensemble des avis, décisions et mesures conservatoires du Conseil relatifs à l’ensemble des services publics, publiés entre 1987 et 2002, soit 94 actes [2]. Nous montrerons qu’il ressort de cette analyse une dynamique qui peut prendre la forme suivante.

Figure 2

Présentation de la dynamique réglementaire

Figure 2
Dommages à l’économie Saisines ministérielles sur l’économie générale du secteur et la transposition de directives européennes Saisines des autorités de régulation sur le contrôle de l’opérateur dominant art. L420-2 C. Com. art. L420-1 C. Com. Saisines des associations professionnelles à l’encontre de l’opérateur dominant Saisines des nouveaux entrants sur le thème des distorsions de concurrence Dommages à des tiers Figure 2 : Présentation de la dynamique réglementaire au travers des actes du Conseil

Présentation de la dynamique réglementaire

4Nous nous proposons de mettre en évidence un phénomène de passage de relais dans le processus de changement de la réglementation applicable aux industries de réseaux. Le processus de mise en place du nouveau cadre réglementaire mobilise successivement des acteurs bien distincts. Dans une phase préparatoire au basculement réglementaire, marquée par la nécessité de transposer une directive européenne, le gouvernement saisit le Conseil de façon consultative. Dans une première phase, la nouvelle législation votée par le Parlement occupe une place centrale. Dans la phase suivante, consacrée à la définition des modalités pratiques de la loi, le Conseil et l’autorité de réglementation se partagent la production du droit. La phase initiale de mise en œuvre de la nouvelle réglementation sera assurée par les saisines de l’autorité de réglementation et des syndicats professionnels. L’intérêt général n’est plus invoqué pour motiver le changement réglementaire. Il s’agit de l’intérêt de la branche. Celui-ci est, de plus, souvent confondu avec celui des entreprises concurrentes de l’opérateur historique. Dans la dernière phase du changement réglementaire, l’application de la réglementation est assurée par le jeu de la jurisprudence du Conseil. Celle-ci est le fruit des saisines contentieuses des entreprises, ambitionnant de faire valoir leurs intérêts, en arguant de dommages liés aux pratiques de l’opérateur historique.

5Notre propos résidera donc en la mise en évidence du rôle de la jurisprudence concurrentielle dans la construction d’un nouveau cadre réglementaire applicable aux industries de réseaux. Dans une première partie (2), nous justifierons notre choix d’analyser la dynamique d’évolution de la réglementation au travers de la jurisprudence du Conseil et nous présenterons les modalités de construction de notre base de données. Dans le cadre de notre seconde partie (3), nous montrerons de quelle façon l’exploitation statistique de cette dernière permet de caractériser l’activité du Conseil en matière de réglementation et de saisir, au travers d’une analyse en composantes principales du corpus, la distribution des actes dans le cadre de la dynamique de changement réglementaire dont nous venons succinctement de présenter les principales caractéristiques.

2 L’APPORT DE L’ANALYSE DE LA JURISPRUDENCE DU CONSEIL À L’ANALYSE ÉCONOMIQUE DE LA RÉGLEMENTATION

6Après avoir présenté l’intérêt de s’attacher à la jurisprudence du Conseil pour analyser le processus de changement réglementaire, nous nous proposons de présenter succinctement le cadre juridique dans lequel se déploie l’action du Conseil.

2.1 Les apports de l’analyse économique d’un matériau jurisprudentiel en matière d’analyse de la dynamique réglementaire

7L’étude de la jurisprudence du Conseil répond à une double logique. D’une part, il nous apparaît que le processus de changement institutionnel passe de façon privilégiée par des canaux qui ne sont plus seulement ceux du droit étatique. La libéralisation du secteur est, en effet, impulsée par les directives communautaires. Au titre de sa saisine consultative, le Conseil émet des avis sur les transpositions des directives européennes. Il utilise fréquemment dans ses décisions la jurisprudence de la Cour de Justice des Communautés européennes. D’autre part, la réglementation est de plus en plus souvent élaborée par les autorités administratives indépendantes, au premier rang desquelles le Conseil.

8Par le jeu de sa jurisprudence issue des saisines contentieuses, il joue un rôle déterminant en matière de précision des modalités pratiques de la réglementation et de mise en œuvre de celle-ci. Qui plus est, son quasi-pouvoir réglementaire en fait un acteur central de la réglementation. La place prise par les autorités administratives indépendantes procède des délégations accordées par le législateur, mais aussi et surtout des processus juridiques automatiques de régulation résultant de la production juridique de ces entités. Cette production découle de leur activation par les acteurs économiques désireux de faire valoir leurs intérêts, voire de leur fonctionnement propre.

9Le jeu de la jurisprudence est l’un des principaux moteurs de la dynamique de construction d’un nouveau cadre réglementaire. La position de l’économiste Henri Lepage [3], au cours des débats relatifs à la transposition de la directive européenne tendant à libéraliser le secteur électrique, est tout à fait évocatrice de cette logique. En effet, selon cet auteur, « les nuances et les ambiguïtés présentes dans [la] rédaction [de la directive], la flexibilité de ses dispositions, sa complexité, sont souvent interprétées comme une faiblesse. Nous pensons que c’est au contraire ce qui fait sa force. Ce qui importe (…) [c’est] la dynamique subtile et presque subreptice d’évolution[4] qu’elle introduit dans tous les pays en raison précisément de toutes les imprécisions, de toutes les ambiguïtés, de toutes les nuances que le texte recèle et qui permettront peu à peu à certains acteurs de se créer – en particulier par le jeu de la jurisprudence – des espaces de plus en plus grands de choix, malgré et en dépit de la résistance de certains pouvoirs nationaux ».

10En d’autres termes, le caractère général et trop faiblement prescriptif de la directive (du fait du principe de subsidiarité) apparaît comme une opportunité d’accélération de la déréglementation grâce aux saisines contentieuses des juridictions concurrentielles nationales et de la CJCE au nom du droit européen de la concurrence. Le rôle des actions en justice dans l’évolution et l’approfondissement de la structuration du cadre réglementaire est considéré comme le meilleur point d’appui pour achever la libéralisation du secteur : « Il nous semble que, paradoxalement, le plus important n’est pas le nouvel “ordre” électrique que la directive va permettre d’organiser dans les différents pays membres mais plutôt le “désordre” que ses silences, ses blancs, ses ambiguïtés, ses nuances, ses bornages mal définis, risquent de semer en générant des revendications, des conflits, des rivalités, des jalousies porteuses d’une jurisprudence finalement favorable à l’affinement progressif des procédures de concurrence et à leur élargissement à de nouveaux espaces de décisions. » On ne saurait réaliser un aussi efficace plaidoyer en faveur de l’utilisation de données jurisprudentielles pour étudier les dynamiques de changement institutionnel.

11Le corpus constitué par l’ensemble des avis, décisions et mesures conservatoires du Conseil sur lequel est basée notre étude représente la pratique du Conseil plutôt qu’une jurisprudence au sens strict. En effet, nous avons sélectionné l’ensemble des actes relatifs aux services publics de réseaux. Cependant, du fait de la nature et du fonctionnement même du Conseil, nous pouvons considérer que les actes rassemblés assument cette fonction et peuvent nous apporter de précieux enseignements. Ce corpus permet aux acteurs économiques de s’appuyer, malgré la diversité des situations économiques et juridiques caractéristiques de chaque acte, sur des principes généraux, dégagés par le Conseil, et applicables à leur situation. De ce fait, les actes utilisés à titre de jurisprudence permettent à la fois de « capitaliser » des règles générales issues des précédents actes, tout en préservant l’irréductibilité des situations. La jurisprudence peut donc nous être utile pour « retracer les situations d’action dans lesquelles la loi est mobilisée » [5]. De façon plus générale, la jurisprudence, ou dans notre cas, l’ensemble des décisions, mesures conservatoires et avis, visent à éclairer un point non encore développé de la réglementation du secteur ou à dégager les règles applicables. La construction d’une jurisprudence relative à la réglementation sectorielle constitue donc un apprentissage juridique permettant de compléter le travail du législateur.

2.2 Les modalités de saisine du Conseil

12Le Conseil ne se substitue pas aux juridictions judiciaires. Il ne traite pas des pratiques commerciales déloyales ou des litiges contractuels. Il n’intervient que lorsque le fonctionnement concurrentiel des marchés est remis en cause. Il demeure un acteur crucial dans l’architecture réglementaire des industries de réseaux dans la mesure où son mandat le conduit à intervenir dès lors que le jeu de la concurrence est faussé dans toute activité et pour tout type d’acteur économique (de statut public ou privé). Le Conseil est en effet compétent sur l’ensemble des marchés [6]. « C’est la nature économique de l’activité et non la qualité de l’opérateur ou la forme sous laquelle il intervient qui détermine l’applicabilité des règles de concurrence. » Les saisines sont susceptibles de générer, par le jeu de la jurisprudence, une dynamique de régulation juridique autonome, telle qu’elle fut mise en évidence au niveau européen par Élie Cohen [7], via les voies contentieuses (notion de dommage à des tiers) ou consultatives (notion de dommage à l’économie).

13La fonction consultative du Conseil rend possible sa saisine pour toute question de concurrence [8], pour tout projet de loi, pour toute opération de concentration ou pour tout texte réglementant les prix ou restreignant la concurrence [9]. Notons que seuls les avis donnés au Gouvernement et aux commissions parlementaires peuvent ne pas être publiés. Ainsi, la base que nous avons constituée est susceptible de ne pas rassembler l’ensemble des avis sollicités par l’administration. Il est possible que des avis quant à des transpositions de directives de libéralisation ou relatifs à l’organisation des services publics après libéralisation soient restés confidentiels. De façon dérivée, nous devons n’en accorder que plus d’importance et de significativité aux avis publiés compris dans notre échantillon. Ils deviennent des signaux donnés aux acteurs économiques. Ils contribuent donc plus que d’autres au basculement réglementaire.

14La fonction contentieuse place le Conseil dans un rôle de contrôle de l’ordre public économique [10]. Il a le pouvoir de contraindre les acteurs économiques et de réprimer leurs pratiques délictueuses. Le Conseil n’est pas tenu par le contenu et le périmètre de la saisine déposée par les dénonciateurs. Il examine la situation de concurrence dans le secteur concerné et définit lui-même les griefs qu’il y a lieu de notifier. Le Conseil peut ordonner aux parties de mettre fin à leurs pratiques si celles-ci sont jugées anticoncurrentielles. Les sanctions pécuniaires peuvent être immédiates ou liées à la non-exécution des injonctions. Les sanctions sont proportionnées à la gravité des faits reprochés, à l’importance du dommage causé à l’économie et à la situation de l’entreprise ou de l’organisme concerné [11].

15Le Conseil peut s’appuyer sur trois ensembles de griefs. Le premier porte sur les ententes anticoncurrentielles. Celles-ci sont prohibées par l’article L 420-1 du Code de Commerce [12]. Celui-ci rassemble sous ce chef les pratiques d’entraves concertées à l’accès au marché, de répartition de ceux-ci, d’échanges d’informations sur les prix et les marges, ainsi que les soumissions coordonnées dans les appels d’offres [13]. Les abus de position dominante et les abus de position de dépendance économique constituent un deuxième moyen. L’article L 420-2 du Code de Commerce [14] condamne les abus commis par une firme dont le pouvoir de marché lui permet de s’abstraire du contexte d’interdépendance stratégique. Enfin, les prix abusivement bas et les stratégies de prédation, visés à l’article L 420-5, sont le troisième moyen d’action du Conseil. Les dispositions relatives aux prix abusivement bas ont été introduites dans la législation le 1er juillet 1996. Il s’agit d’une notion liée à la catégorie économique de la prédation [15].

16Le cadre d’action du Conseil évoqué, nous nous proposons maintenant de présenter les résultats de l’analyse statistique de la base de données construite à partir de l’ensemble des actes du Conseil relatifs aux industries de réseaux, publiés entre 1996 et 2002. Nous nous attacherons tout d’abord à une analyse descriptive, visant à mettre en évidence les principales caractéristiques de l’activité du Conseil et à comparer les différents services publics entre eux. Dans un second temps, nous présenterons les principaux résultats d’une analyse en composantes principales réalisée sur la base de données, permettant d’illustrer le processus de changement réglementaire dont nous avons donné les principales caractéristiques en introduction.

3 ÉTUDE DU CORPUS D’ACTES DU CONSEIL

17Nous présenterons, dans cette partie, les principaux résultats de l’analyse statistique de la base de données constituée à partir de notre corpus, en nous attachant successivement à une analyse descriptive dans laquelle nous présenterons notamment des distributions par type d’actes, de formation du Conseil ou de griefs à l’origine des saisines, avant de réaliser une analyse en composantes principales nous permettant d’illustrer notre hypothèse d’un « passage de relais » en matière de dynamique de changement réglementaire.

3.1 Analyse descriptive du corpus

3.1.1 La distribution par type d’actes

18 Il est possible d’examiner l’activité du Conseil en fonction des différentes industries de réseaux en observant la distribution des types d’actes juridiques en fonction du secteur d’activité. Nous obtenons, en croisant ces deux dimensions, le tableau suivant.

Tableau 1

Distribution des types d’actes juridiques en fonction du secteur d’activité

Tableau 1
Domaine industriel/Activité juridique Chemins de fer (CF)Construction électrique (CrELEC)Distribution d’eau potable (Eau)Électricité (ELEC)Ensemble des secteurs (Gal)Gaz (Gaz)Gestion déléguée d’infrastructures publiques (GestInfrapub)Poste (Post)Télécommunications (Telecom)Audiovisuel (TV)TotalAvis(A)43911111535Décisions(D)1238151241Mesures conserva-toires (MC) 159318Total 4 12 7 22 1 2 6 1 36 3 94 Tableau 1 : Distribution des types d’actes juridiques en fonction du secteur d’activité

Distribution des types d’actes juridiques en fonction du secteur d’activité

19En ventilant ces résultats en fonction de notre opposition entre secteur concurrentiel (représenté dans notre échantillon par le secteur de la construction électrique) et secteur non concurrentiel (recouvrant les domaines de production, transport et distribution d’électricité, ainsi que les autres industries de réseaux), nous obtenons le tableau suivant.

Tableau 2

Distribution des types d’actes juridiques en fonction

Tableau 2
Nature secteur/ Activité juridique Secteur concurrentielSecteur non concurrentielTotalAvis3535Décisions122941Mesures conservatoires 1818Total 12 82 94 Tableau 2 : Distribution des types d’actes juridiques en fonction de la nature du secteur

Distribution des types d’actes juridiques en fonction

20Nous observons que nul avis ou demande de mesures conservatoires n’a été exprimé dans le secteur de la construction électrique. L’activité du Conseil se limite donc pour la question à la condamnation des pratiques anticoncurrentielles constatées ex post. Nulle trace de réflexions suscitées par des demandes d’avis quant au régime de concurrence ou aux pratiques d’une firme. À l’inverse, dans le secteur non différencié, avis et décisions sont comparables en nombre.

3.1.2 L’importance juridique de la décision

Tableau 3

Distribution des types de formation du Conseil

Tableau 3
Formation du Conseil DomaineindustrielCFCrELECEauELECGalGazGestInfrapubPostTelecomTVTotalNon déterminée122412618Permanente2461215333Plénière1 17111719Section2 851824Total 12 7 22 1 2 6 1 36 3 94 Tableau 3 : Distribution des types de formation du Conseil en fonction du secteur d’activité

Distribution des types de formation du Conseil

21 Selon l’importance de l’acte juridique et de sa nouveauté, le Conseil peut siéger en section, ce qui est la situation habituelle, ou en commission permanente, ce qui correspond à la procédure simplifiée, ou enfin en séance plénière. Cette dernière formation est celle qui est utilisée pour les actes appelés à faire jurisprudence. Nous pouvons formuler l’hypothèse que les actes juridiques les plus importants et les plus fondateurs en termes réglementaires se feront en formation plénière. Les actes conduisant à la nouvelle réglementation seront ceux-ci. À l’inverse, les actes plus routiniers n’impliquant pas d’innovation juridique ou n’appelant aucun élément nouveau, se feront en commission permanente. Les actes « normaux » se feront, eux, en section. L’exemple de la construction électrique pour laquelle la législation est bien assise et ne nécessite pas d’éclairage jurisprudentiel est ici significatif. Aucun acte juridique de ce secteur n’a nécessité la réunion du Conseil en session plénière. Dans le domaine des télécommunications, avancé dans le processus de libéralisation, les actes émanent de moins en moins souvent d’une session plénière.

22À titre d’exemple, dans le domaine électrique, le rapport entre les actes passant devant le Conseil en formation plénière et les actes gérés en commission permanente semble plus équilibré. Sept affaires ont été traitées en formation plénière, contre six en commission permanente. Les affaires traitées en formation plénière correspondent à quatre demandes de mesures conservatoires et à deux décisions relatives à des litiges dans le domaine de l’obligation d’achat. Il s’agit de contentieux pour lesquels la jurisprudence est déjà fondée et que le Conseil est habitué à traiter. Les sept affaires présentées devant le Conseil en session plénière correspondent à deux décisions et à cinq avis.

23Les actes concernés sont les suivants :

  • l’avis 94-A-15 [16], concernant les problèmes soulevés par la diversification des activités d’EDF et de GDF au regard de la concurrence,
  • la décision 96-D-80 [17], relative aux saisines présentées par la CGC et d’autres entreprises à l’encontre d’Électricité de France,
  • l’avis 98-A-05 [18], sur les principes à respecter ou les dispositions à prévoir pour assurer le fonctionnement concurrentiel du marché électrique dans le cadre tracé par la directive européenne 96/92/CE,
  • l’avis 98-A-22 [19], sur les principes devant guider et encadrer la politique tarifaire d’EDF,
  • l’avis 2000-A-03 [20], concernant l’acquisition de la société Clemessy par les groupes EDF, Cogema et Siemens,
  • la décision 2000-D-47 [21], relative à des pratiques mises en œuvre par EDF et sa filiale Citélum sur le marché de l’éclairage public,
  • l’avis 2000-A-29 [22], relatif à la séparation comptable entre les activités de production, transport et distribution d’électricité.

24Ces actes correspondent aux étapes les plus déterminantes du basculement réglementaire du secteur électrique. Deux de ces derniers sont relatifs à l’obligation d’achat. Le premier n’est pas surprenant, il s’agit de l’avis 98-A-22 sur la politique tarifaire d’EDF. Le SNPIET demandait alors si EDF, en modifiant (au détriment des producteurs autonomes) sa structure et ses niveaux tarifaires, n’avait pas contrevenu aux principes marginalistes qui devaient être les siens. Au-delà de ce point, la saisine portait sur le devenir du secteur électrique français dans la perspective de la transposition de la directive européenne de 1996. Le second acte relatif aux contentieux liés à l’obligation d’achat a été traité en séance plénière et non en commission permanente dans la mesure où il est appelé à faire jurisprudence. La décision 96-D-80 fait suite à une saisine déposée en octobre 1994, c’est-à-dire après le retournement de la stratégie d’EDF vis-à-vis des producteurs autonomes. Après les demandes de mesures conservatoires (94-MC-14 [23], 95-MC-06 [24] et 95-MC-15 [25]), le Conseil se prononce pour la première fois sur le fond de l’attitude d’EDF. La décision est alors destinée à faire jurisprudence comme l’indique la formation du Conseil et les 4 573 471 € de sanctions pécuniaires infligées à EDF.

25De la même façon, pas moins de trois avis et décisions traitent de la diversification d’EDF sous les angles du respect du principe de spécialité et de la coexistence d’offres destinées à des segments concurrentiels et captifs au sein d’une même entreprise. L’avis 94-A-15 est un avis clé tant pour EDF que pour l’ensemble des firmes publiques pour définir leur degré de liberté vis-à-vis des contraintes posées par le principe de spécialité. Il ne faut d’ailleurs pas oublier que cet avis arrive dans une période confuse quant à la politique gouvernementale sur l’évaluation de sa diversification. La décision 2000-D-47 traite de la mise en œuvre de subventions croisées et d’entraves à la disputabilité du marché qui peuvent advenir quand EDF s’engage dans des marchés connexes, dans des services en aval du compteur. Les notions d’édification de barrières à l’entrée, de stratégie de prédation furent mises en avant dans cette affaire qui se solda pour EDF par une condamnation de 152 500 €. Les conséquences possibles de la coexistence d’activités concurrentielles et d’activités sous monopole dans une même structure est aussi centrale dans l’avis 2000-A-03, relatif au rachat de Clemessy par EDF. Cet avis, le seul relatif à une fusion / acquisition, était crucial pour l’entreprise nationale dans la mesure où il déterminait si EDF pouvait s’engager, à l’instar de ses concurrents, dans le domaine des services associés à la fourniture électrique.

26Les deux autres avis ne sont ni plus ni moins que les préalables aux deux étapes les plus importantes de la mise en œuvre de la nouvelle réglementation. Le premier (98-A-05) se rapporte à la transposition en droit français de la directive de libéralisation du secteur électrique. Le second, le 2000-A-29, traite des règles à mettre en œuvre pour s’assurer de la séparation des diverses activités d’EDF (production, transport et distribution). Cet avis, relatif à l’unbundling (démantèlement vertical de l’opérateur historique), constitue la base même des prescriptions de la nouvelle économie des réseaux. Il implique aussi le basculement de l’électricité dans une logique de réglementation qui est celle des télécommunications. Mais il convient d’insister sur le parti pris pour la séparation juridique des différents pôles de l’entreprise (déjà défendu dans l’avis 98-A-05).

3.1.3 Les articles servant de base à la notification des griefs par le Conseil

Tableau 5

Distribution des types de griefs en fonction de la nature du défendeur

Tableau 5
Article correspondant aux griefs Type défendeurEntreprise du secteur concurrentielMonopole privéMonopole publicTotalL 420-612425L 464-2 L 420-11 12161 19L 420-2377080Total 16 9 100 125 Tableau 5 : Distribution des types de griefs en fonction de la nature du défendeur

Distribution des types de griefs en fonction de la nature du défendeur

27L’examen des articles à la base de la notification des griefs permet de mettre en évidence la nette prédominance des dénonciations pour abus de position dominante (l’article est invoqué 80 fois sur 125). Les principes cibles sont les opérateurs historiques devant ouvrir leur réseau aux tiers comme EDF (23 notifications) et France Télécom (35 notifications). Nous pouvons noter que l’article L420-1 est majoritairement employé dans le secteur de la construction électrique, marqué par de nombreuses ententes anticoncurrentielles autour des marchés publics. Les dénonciations au titre des prix abusivement bas sont significatives dans le secteur de l’électricité (8 fois) et des télécommunications (11 fois). Dans le domaine électrique, ce grief se retrouve dans les affaires traitant des diversifications (2000-D-57 [26], 99-D-51 [27] et 2000-D-47) et de la coexistence d’activités concurrentielles et monopolistiques au sein d’une même firme (2000-A-29 et 98-A-05).

Tableau 4

Distribution des types de griefs en fonction du secteur d’activité

Tableau 4
Article correspondant aux griefs Domaine industrielCF (chemins de fer)CrELEC (construction électrique)EauELEC (électricité)Gal (général)GazGestInfrapub (gestion d’infrastructures publiques)Post (poste)Telecom (télécommunications)TV (audiovisuel)TotalL 420-6(prédation)2118111125L 464-2 L 420-1(application (entente)d’unedécision)11221 131 19L 420-2 Total (abus de position dominante) 4 6 12 6 9 23 33 1 2 2 3 5 7 1 1 35 49 3 3 80 125 Tableau 4 : Distribution des types de griefs en fonction du secteur d’activité

Distribution des types de griefs en fonction du secteur d’activité

28Nous notons que les dénonciations pour prédation sont l’apanage des entreprises publiques. Dans les cas où les monopoles publics font l’objet d’un tiers des dénonciations au titre de l’article L 420-1, il s’agit, dans l’immense majorité, de situations dans lesquelles l’entente anticoncurrentielle mise en œuvre par le groupe public se double d’un abus de position dominante (dans la mesure où l’objet est d’exclure un nouvel entrant du marché). Nous pouvons citer les cas de la décision 99-D-51 (entente d’EDF et de GDF pour s’implanter dans des marchés en aval du compteur et pour réduire la disputabilité de leur marché) et de la décision 98-D-34 [28], relative à une manœuvre concertée d’Aéroports de Paris et d’Air France au détriment de TAT.

Tableau 6

Distribution des types de secteurs en fonction de l’origine de la saisine

Tableau 6
Secteur Origine CF CrELEC Eau ELEC Gal Gaz GestInfrapub Post Telecom TV Total Demande d’avis d’une autorité de régulation 1 7 8 Demande d’avis de l’Assemblée ou du Sénat 1 1 2 Demande d’avis d’une association de consommateurs 1 1 Demande d’avis d’une collectivité territoriale 1 1 2 Demande d’avis du ministre 3 7 1 1 6 18 Demande d’avis d’une association professionnelle 1 1 1 3 Saisine d’une autorité de régulation 1 1 Saisine d’une association de consommateurs 1 1 Saisine d’une collectivité territoriale 1 1 Saisine d’une entreprise 1 11 3 16 2 33 Saisine d’une organisation patronale ou professionnelle 1 1 1 3 6 Saisine ministérielle 10 2 2 1 1 1 17 Saisine d’office 1 1 Total 4 12 7 22 1 2 6 1 36 3 94 Tableau 6 : Distribution des types de secteurs en fonction de l’origine de la saisine

Distribution des types de secteurs en fonction de l’origine de la saisine

29 Le croisement des secteurs d’activités avec l’origine de la saisine permet de dégager certains traits saillants de notre échantillon. Nous formulons ici l’hypothèse que les saisines consultatives se rattachent plus à des questions d’organisation générale du secteur ou à des notions de dommage à l’économie, alors que les saisines contentieuses se rattachent plus à la notion de dommage à un tiers. Ce faisant, les premières devraient être prédominantes dans le cadre de secteurs encore peu avancés dans le processus de libéralisation, alors que les secondes deviennent de plus en plus importantes au fil de ce basculement (i.e. quand la concurrence est effective).

30Tout d’abord nous pouvons mettre en relief la distribution des actes par secteur. L’électricité au sens large est représentée par 34 actes (12+22). Les télécommunications comptent 39 actes (36+3). Les autres services publics de réseau sont donc représentés par 21 actes. L’étude des ratios avis / décisions par secteurs permet de voir que le secteur des télécommunications présente 15 avis pour 24 décisions et mesures conservatoires. Pour l’électricité le rapport demandes d’avis /saisines contentieuses semble a priori déséquilibré. Nous avons 9 avis pour 25 décisions et mesures conservatoires. Or les 12 actes relatifs à la construction électrique sont issus de saisines contentieuses. Pour l’électricité stricto sensu, la proportion est donc pratiquement équilibrée avec 9 avis pour 13 saisines. Eu égard à la fréquence des décisions et mesures conservatoires liées aux contentieux entre EDF et les producteurs autonomes, il apparaît que le secteur électrique se trouve en fait dans une situation somme toute assez proche des autres services publics non encore avancés dans la voie de la libéralisation, tels les secteurs gaziers avec 1 avis et 2 décisions (en ajoutant la décision 99-D-51 qui concernait à la fois EDF et GDF), des chemins de fer (3 avis pour 1 décision) et de la poste (1 avis).

31La prédominance des avis dans les secteurs encore sous l’empire de la précédente logique de réglementation atteste de la primauté de la notion de dommage à l’économie. Cette primauté peut s’apprécier par la prédominance des demandes d’avis émanant principalement du ministre (18 sur 34), des assemblées (2 sur 34) et accessoirement des autorités de régulation (8 sur 34). Si l’on adjoint à ces trois origines, les demandes d’avis des associations de consommateurs et des collectivités territoriales (3), nous arrivons au total de 31 avis sur 34. Les avis visent donc bien à mettre en évidence l’existence d’un éventuel dommage à l’économie résultant de la situation de la concurrence dans un secteur donné.

32Nous pouvons formuler l’hypothèse d’une « course de relais » dans le processus du basculement réglementaire. Celle-ci se déroule de la manière suivante. Les premières étapes du changement de réglementation se font par des avis du Conseil faisant suite à des demandes du ministère en charge du secteur. Les premières questions portent sur la réglementation générale du secteur (en creux, nous retrouvons la notion de dommage à l’économie). Après les avis sur la transposition d’éventuelles directives européennes de libéralisation, le relais est pris par les autorités de régulation qui s’attachent à la mise en place du nouveau cadre réglementaire et au contrôle des pratiques de l’opérateur dominant. Le passage de la notion de dommage à l’économie à la notion de dommage à des tiers est consacré par la troisième phase du changement régulatoire qui est celle de l’application de la loi par les saisines contentieuses des entreprises concurrentes de l’opérateur historique. Cette succession d’étapes est visible quand on compare l’électricité aux télécoms, ces derniers étant avancés plus précocement dans le changement de réglementation. Les avis prononcés suite à une saisine ministérielle sont comparables dans les deux cas (7 et 6). L’antériorité des télécommunications est visible par la comparaison des avis pris suite aux autorités de régulation. Nous pouvons en compter 7 pour l’ART (auxquels nous pourrions adjoindre une saisine contentieuse) et 1 pour la CRE.

33Les saisines contentieuses émanent principalement d’entreprises (33 sur 60) et du ministre (17). Trois domaines concentrent la majeure partie de ces saisines : la construction électrique (12), l’électricité (13) et les télécommunications (21). Une différence existe néanmoins entre ces secteurs. Dans la construction électrique, les saisines émanent principalement du ministère (10). Il s’agit du maintien de l’ordre public économique, motivé par la lutte contre les cartels. Dans les télécommunications et l’électricité, les saisines (16 et 11) émanent surtout des entreprises (nouvelles entrantes ou producteurs autonomes). Nous sommes ici plus nettement dans le domaine des « dommages à l’économie », dans la mesure où il s’agit de griefs d’abus de position dominante. La victime de discrimination quant à l’accès à une infrastructure essentielle est alors à même de faire condamner les pratiques qu’elle juge anticoncurrentielles par le Conseil.

34Il convient de bien insister sur la relative nouveauté de la récente réglementation et donc de la faible présence à la date du 31 décembre 2001 de cette dernière étape du changement réglementaire. Les saisines contentieuses n’émanent qu’assez marginalement de nouveaux entrants ou de concurrents directs des anciens opérateurs monopolistiques. L’exemple de l’électricité est flagrant : les producteurs autonomes sont quasiment les seuls dénonciateurs d’EDF. Nous n’avons pas encore de saisines de Suez ou de concurrents étrangers opérant sur le territoire. Même dans le secteur des télécommunications, rares sont les saisines émanant de concurrents directs de France Télécom sur son marché principal. La libéralisation des services publics n’en est qu’à son début. Les nouveaux entrants n’ont pas encore eu le temps de faire valoir leurs droits devant le Conseil. La majeure partie des litiges porte sur les pratiques anticoncurrentielles de l’opérateur dominant pour consolider ses positions dans son marché d’origine et conquérir des parts dans des marchés connexes. Les litiges liés à l’accès des tiers au réseau sont encore marginaux en nombre.

3.2 Analyse en composantes principales de l’ensemble du corpus

35Pour tester cette hypothèse et apprécier une éventuelle spécificité de l’électricité vis-à-vis du cas général des services publics, nous nous proposons de réaliser une analyse en composantes principales (ACP) sur la base de données constituée par l’ensemble des actes juridiques du Conseil dans le domaine des industries de réseaux [29].

3.2.1 Présentation des classes

36 L’analyse en composantes principales, pratiquée sur nos 94 actes, permet de définir un dendrogramme donnant la proximité des individus en fonction des cinq axes explicatifs retenus. La définition des proximités des actes juridiques permet de les classer dans des ensembles homogènes. Il nous est alors possible de chercher des traits communs permettant de définir ce qui lie les actes appartenant à un même ensemble et ce qui sépare les divers groupes.

37Il convient de noter que plus deux actes sont proches dans le dendrogramme, plus leurs caractéristiques sont comparables. En d’autres termes, lorsqu’un ensemble d’actes juridiques se constitue avant de confluer vers le tronc commun, cela signifie qu’ils forment un groupe logiquement homogène. Plus vite deux ensembles convergent, plus leur proximité logique est forte. Autrement dit, les actes juridiques sont classés par proximité décroissante.

38Les classes déduites de l’ACP se distribuent comme suit.

figure im9
1. Pratiques anticoncurrentielles de l’opérateur dominant pour s’implanter dans des marchés aval ou pour restreindre la pression concurrentielle 2. Ententes dans la construction électrique Nouveauté de la réglementation 3. Abus de position dominante de l’opérateur envers les utilisateurs de son réseau 4. Avis sur la libéralisation des entreprises de réseaux 5. Mise en application de la réglementation assise sur la nouvelle économie de réseau

39Nous avons repris les principales classes déduites du dendrogramme. L’analyse en composantes principales nous permet donc de distinguer cinq grandes classes constitutives de notre corpus. La première classe est relative aux pratiques mises en œuvre par l’opérateur de l’infrastructure essentielle qui s’appuient sur les avantages que confère celle-ci pour s’implanter sur des marchés aval et entraver le développement de concurrents potentiels. La deuxième classe appartient à la sphère de la répression des ententes anticoncurrentielles, notamment dans le domaine des appels d’offres d’EDF et dans le cadre de l’électrification rurale. Il s’agit d’une classe atypique dans la mesure où c’est la seule qui n’appartient pas directement aux services publics de réseaux.

40Si l’on s’écarte de cette classe pour étudier plus précisément le secteur « non concurrentiel », la succession des classes peut s’expliquer par la prégnance de la dimension du changement réglementaire. La première classe se rattache notamment à la question du principe de spécialité et au risque de mise en œuvre de subventions croisées entre les segments monopolistiques et concurrentiels. Les litiges compris dans cette classe peuvent logiquement trouver place dans la réglementation initiale, voire dans la suivante. La troisième classe est axée sur les abus de position dominante de l’opérateur de réseau et du problème de l’accès des tiers au réseau. La réglementation est ici de logique « libérale ». Les deux dernières classes portent, elles, sur le changement de réglementation stricto sensu. La troisième classe regroupe les saisines contentieuses d’entreprises devant utiliser le réseau du monopole national. La classe 4 traite des divers avis successifs quant à la réglementation sectorielle et à l’encadrement des pratiques des firmes. Nous sommes dans la sphère des dommages à l’économie. Les pouvoirs publics sont, dans une première étape, l’élément moteur du basculement réglementaire. La question de base est alors celle de la réglementation optimale du secteur. L’avis du Conseil porte sur la structure du secteur et le dispositif institutionnel l’encadrant. Il s’agit de fixer les règles du jeu. Dans un second temps, les demandes d’avis émanent des autorités de régulation. Elles interrogent le Conseil quant à la conformité des règles qu’elles édictent avec le cadre institutionnel déterminé par les pouvoirs publics. Un second type de demande d’avis vient ensuite. Il porte sur l’appréciation des agissements de l’opérateur anciennement monopoliste. Ces avis ne traitent plus de la structure du marché, mais des stratégies des firmes.

41Au terme de cette phase de changement de réglementation appuyé sur les avis du Conseil, vient une phase de mise en application du nouveau cadre via les saisines directes des entreprises du secteur. Le changement est alors porté par la mise en œuvre des textes. Il s’agit de notre cinquième classe. La mise en œuvre de la nouvelle réglementation passe dans cette phase finale par des saisines contentieuses d’entreprises privées, nouvelles entrantes sur le marché, s’estimant injustement lésées par la stratégie de l’opérateur dominant. La dernière phase de construction de la réglementation passe par la notion de dommage à des tiers. Les acteurs économiques, en activant leurs droits, vont par le jeu de la jurisprudence achever de construire le cadre réglementaire.

3.2.2 Projection dans le plan défini par les vecteurs propres

42 Nous nous proposons d’identifier les axes explicatifs fournis par les vecteurs propres à partir de l’étude du positionnement des variables. Les variables représentées dans le plan sont celles qui ont été désignées par l’analyse statistique comme les plus significatives pour expliquer l’ensemble de l’information contenue dans la base de données. Nous avons ensuite sélectionné les deux vecteurs propres ayant la valeur explicative la plus élevée pour distribuer les actes et les variables dans le plan orthonormé défini par leur intersection.

43L’axe 1 est identifié comme opposant les deux principaux griefs notifiables par le Conseil, en l’occurrence les articles L 420-1, relatif aux cartels, et L 420-2, relatif aux abus de position dominante, du Code de Commerce (les anciens articles 7 et 8 de l’ordonnance de décembre 1986). L’axe 2 est constitué par l’opposition entre les dommages à une entreprise et les dommages à l’économie.

Figure 3

Projection des variables dans le plan défini par les vecteurs explicatifs

Figure 3
1,0000 Dommage à l’économie 2 AV DAV_5 ADM DAV/PR AAA APD CRELEC DA7 SP – 1,0000 1,0000 1 TELEC ELEC DA8 DCOND DECI Cartel PRODIN CONCD MC DMC Dommage à un tiers – 1,0000 Figure 3 : Projection des variables dans le plan défini par les vecteurs explicatifs de l’analyse en composantes principales

Projection des variables dans le plan défini par les vecteurs explicatifs

44Identification des variables :
CRELEC : secteur de la construction électrique
TELEC : secteur des télécommunications
ELEC : secteur de l’électricité
PRODIN : saisine émanant d’un producteur d’électricité non nationalisé
CONCD : saisine émanant d’un concurrent direct de l’opérateur historique
ADM : saisine émanant de l’administration
AAA : saisine émanant d’une autorité administrative indépendante
AV : avis du Conseil
DMC : demande de mesures conservatoires
DECI : décision du Conseil
SP : sanctions pécuniaires
DAV/ PR : demande d’avis sur les pratiques de l’opérateur historique
DAV_5 : demande d’avis sur la situation de la réglementation du secteur vis-à-vis des règles de concurrence
DA8 : demande d’avis au titre de l’article 8 de l’ordonnance du 1er décembre 1986 (abus de position dominante)
DA7 : demande d’avis au titre de l’article 7 de l’ordonnance (entente anticoncurrentielle)
MC : mesures conservatoires
DCOND : demande de condamnation des pratiques

45À partir de la position des variables et de la projection des actes dans le plan, il est possible d’identifier comme suit les quadrants définis par l’intersection des deux axes explicatifs.

[30]

figure im11
Demandes d’avis de Saisines émanant des pouvoirs Dommages l’administration ou d’une autorité publics suite aux dommages à l’économie de régulation sur la situation causés à l’économie par des générale de la concurrence dans un ententes de firmes de construction secteur ou sur les pratiques de mécanique l’opérateur Avis 2000-A-29, relatif à la séparation comptable des différentes activités d’EDF Avis 96-A-12 du 25 juin 1996, relatif à la concurrence sur le marché français du crédit (services financiers de La Poste) Demandes de mesures Saisines de firmes s’estimant conservatoires visant à faire cesser victimes d’une entente des abus de position dominante anticoncurrentielle commis par l’opérateur de réseau Décision 2001-D-47 relative à une Décision 98-D-34 concernant la Dommage saisine de la société Énergie de situation de la concurrence sur le à un tiers Bigorre concernant les pratiques marché des services d’assistance mises en œuvre sur le marché de en escale à l’aéroport d’Orly l’électricité par EDF Abus de position dominante Entente anticoncurrentielle

[30]

46Il serait donc possible de tracer une dynamique dans le plan défini par ces deux vecteurs propres, à même d’esquisser la trajectoire des différents services publics.

Figure 4

Interprétation de la dynamique réglementaire dans le plan défini par

Figure 4
Demandes d’avis sur les pratiques émanant d’une autorité de régulation Demandes d’avis sur la réglementation d’un secteur 1,0000 2 AV DAV_5 #04 DAV/PR AAA #05 – 1,0000 TELEC DA8 ELEC #03 PRODIN CONCD #01MC DMC APD – 1,0000 Dommages à l’économie ADM #02 CRELEC DA7 1,0000SP 1 DCOND DECI Cartel Dommages à des tiers Problématique de l’accès des tiers au réseau Litiges liés à l’obligation d’achat et à la précédente réglementation Ententes dans la construction électrique Figure 4 : Interprétation de la dynamique réglementaire dans le plan défini par l’analyse en composantes principales

Interprétation de la dynamique réglementaire dans le plan défini par

47 Classes dégagées de l’analyse en composantes principales :
# 01 : pratiques anticoncurrentielles de l’opérateur dominant pour s’implanter dans des marchés aval ou pour restreindre la pression concurrentielle
# 02 : ententes dans la construction électrique
# 03 : abus de position dominante de l’opérateur envers les utilisateurs de son réseau
# 04 : avis sur la libéralisation des entreprises de réseaux
# 05 : mise en application de la réglementation assise sur la nouvelle économie de réseau

48À l’heure actuelle, à l’exception des télécommunications et de l’électricité, les services publics sont concernés par des avis du Conseil sollicités par l’administration quant à la situation actuelle de leur réglementation. Un pas supplémentaire est franchi, par exemple pour le gaz, lorsque le Conseil est sollicité sur la transposition d’une directive européenne. Ces avis prennent place dans une logique de basculement de la conception que l’on se fait de l’action publique. Les pouvoirs publics demandent alors à la juridiction en charge des questions de concurrence son avis quant à la réglementation du secteur. Il s’agit donc de voir si les distorsions de concurrence liées à l’existence d’un monopole légal (abus de position dominante par excellence) ne causent pas un dommage à l’économie supérieur aux gains attendus de la nationalisation. Dans un second temps, le témoin passe aux autorités de régulation. Les demandes d’avis portent dans un premier temps sur les modalités d’application des textes. Il s’agit de voir si les dispositifs techniques de réglementation du secteur sont conformes à la logique de la nouvelle réglementation. Dans ce cadre, la portée de la notion de dommage à l’économie est réduite, on ne considère plus que l’ensemble des firmes d’un secteur donné. L’électricité est rentrée dans cette phase avec l’avis 2000-A-29. Dans un second temps, l’autorité de régulation s’attache au comportement de l’opérateur dominant, aux entraves qu’il fait peser pour l’accès à son réseau et aux avantages indus qu’il peut tirer de la maîtrise de l’infrastructure essentielle. Nous sommes ici très proches de la notion de régulation asymétrique. La réglementation est alors rabattue au contrôle de la stratégie de l’opérateur dominant. Nous sommes maintenant aux frontières du dommage à l’économie et du dommage à des tiers. L’autorité de régulation tend à défendre l’intérêt des concurrents de l’opérateur dominant. La réduction des rentes de ce dernier rapprochera le secteur de la situation de concurrence pure et parfaite, seule à même de permettre d’atteindre l’intérêt général. Pour l’instant, seul le secteur des télécommunications a franchi cette phase. Enfin, dans une dernière phase, la mise en œuvre du nouveau cadre réglementaire se fait par des saisines contentieuses directes émanant des nouveaux entrants dans le secteur. Il s’agit alors de dénonciations d’abus de position dominante appuyées sur la notion de dommage à des tiers. L’activation des droits par les intérêts économiques privés permet d’achever, notamment par le jeu de la jurisprudence, la construction du nouveau cadre réglementaire.

4 CONCLUSION

49La dynamique mise en évidence peut se rapprocher du phénomène de libéralisation « automatique » à l’œuvre à partir des législations et juridictions communautaires [31]. La Commission et la Cour de Justice délibèrent, à l’instar du Conseil de la Concurrence français, sur la seule dimension concurrentielle. Les approfondissements jurisprudentiels de la libéralisation du cadre réglementaire s’appuient sur la mobilisation de textes généraux régissant le droit européen de la concurrence. Le caractère général des textes favorise les saisines contentieuses. Celles-ci sont soumises à des juridictions jouissant de pouvoirs exorbitants du droit commun [32] et ne jugeant qu’en fonction du seul droit de la concurrence. Les saisines contentieuses sont donc à la source d’un « expansionnisme de la norme juridique » [33], reposant sur des articles généraux et flous du Traité de Rome. L’activité juridique constitue une source bien plus redoutable que l’activité législative elle-même en matière de libéralisation. Celle-ci est d’autant plus facilitée que les textes négociés par les représentants des États s’en tiennent à des considérations générales et ne posent aucun principe d’organisation explicite des services publics. Chaque imprécision, loin de laisser des degrés de liberté aux États, offre des marges de manœuvre aux actions en justice des divers intérêts constitués pour s’assurer, via la sédimentation jurisprudentielle, une libéralisation sans cesse plus complète des secteurs en question. Au final, le caractère trop général des textes crée des opportunités d’accélération de la libéralisation des services publics par le seul jeu des saisines des juridictions concurrentielles. Comme l’écrit É. Cohen, « ce mécanisme juridique est extraordinairement puissant car il se nourrit de sa logique interne, des principes de l’économie de marché, de l’initiative décentralisée des agents économiques, voire même de la politique masquée des gouvernements nationaux. Il constitue une fantastique excroissance à partir de quelques articles du traité de Rome qui étaient tombés en désuétude » [34].

Notes

  • [*]
    Chargé de Recherche CNRS, CREDECO – GREDEG – Université de Nice Sophia-Antipolis. Revue Internationale de Droit Économique — 2004 — pp. 435-459
  • [1]
    Kirat T. et Serverin É., (2000), « Dialogue entre droit et économie à propos des relations entre les règles juridiques et l’action », in Kirat T. et Serverin É. (éds), Droit et action économique, Éditions du CNRS, Paris, 238 p., p. 9.
  • [2]
    Marty F., (2002), Pluralité et dynamique des conventions de réglementation : analyse économique de la jurisprudence du Conseil de la Concurrence relative au secteur électrique, Thèse de doctorat ès Sciences économiques, École normale supérieure de Cachan, décembre, p.433 et s.
  • [3]
    Lepage H., (1998), « Électricité et concurrence : les enjeux de la directive européenne », Document de travail, Institut Euro 92,mars, 35 p., p. 3 et s.
  • [4]
    Souligné par l’auteur.
  • [5]
    Didry C., (1998), « Les comités d’entreprise face aux licenciements collectifs : trois registres d’argumentation », Revue française de Sociologie, XXXIX-3, pp. 495-534.
  • [6]
    Code de Commerce, article L 410-1.
  • [7]
    Cohen É., (1995), « L’Europe entre marché et puissance. Le cas des politiques de l’industrie. Spécialisation, technologie, concurrence, commerce extérieur », in Mény Y., Muller P. et Quermonne J.-L., Politiques publiques en Europe, L’Harmattan, Paris, 352 p., pp.183-202.
  • [8]
    Code de Commerce, article L462-1.
  • [9]
    Code de Commerce, articles L 410-2 et L 462-2.
  • [10]
    Références sur l’ordre public économique : voir J. Savatier, L’ordre public économique, D. 1965, chr., p. 37 et s. et G. Farjat, L’ordre public économique, LGDJ, Paris, 1963.
  • [11]
    Code de Commerce, article L 464-2.
  • [12]
    Ancien article 7 de l’ordonnance du 1er décembre 1986.
  • [13]
    Il existe tant pour les ententes que pour les abus de position dominante des cas d’exemptions prévus à l’article 10. Il s’agit des pratiques qui résultent de l’application d’un texte législatif ou réglementaire et des pratiques favorables au progrès économique.
  • [14]
    Remplace l’article 8 de l’ordonnance de décembre 1986 depuis l’ordonnance n°2000-912 du 21 septembre 2000.
  • [15]
    Rey P. et Tirole J., (1997), « Analyse économique de la notion de prix de prédation », Revue française d’Économie, 1-vol. XII, hiver, pp. 3-32.
  • [16]
    Avis n°94-A-15 du 10 mai 1994, suite à une demande d’avis sur les problèmes soulevés par la diversification des activités d’EDF et de GDF au regard de la concurrence, Rapport d’activité 1994, p. 632.
  • [17]
    Décision n°96-D-80 du 10 décembre 1996, relative à une saisine présentée par la CGC à l’encontre d’Électricité de France, BOCCRF du 6 mars 1997.
  • [18]
    Avis n°98-A-05 du 28 avril 1998, relatif à une demande d’avis sur les principes à respecter ou les dispositions à prévoir pour assurer le fonctionnement concurrentiel du marché électrique dans le cadre tracé par la directive européenne 96/92/CE, Rapport annuel, 1998, p.115.
  • [19]
    Avis no 98-A-22 du 8 décembre 1998, relatif à deux demandes d’avis sur les principes devant guider et encadrer la politique tarifaire d’EDF, BOCCRF n°17 du 14 octobre 1988.
  • [20]
    Avis n° 2000-A-03 du 22 février 2000, relatif à l’acquisition de la société Clemessy par les groupes EDF, Cogema et Siemens, BOCCRF n°10 du 12 octobre 2000.
  • [21]
    Décision no 2000-D-47 du 22 novembre 2000, relative aux pratiques mises en œuvre par EDF et sa filiale Citélum sur le marché de l’éclairage public, BOCCRF n°14 du 30 décembre 2000.
  • [22]
    Avis no 2000-A-29 du 30 novembre 2000, relatif à la séparation comptable entre les activités de production, transport et distribution d’électricité, BOCCRF n°01 du 23 janvier 2001.
  • [23]
    Décision n°94-MC-14 du 30 novembre 1994, relative à une demande de mesures conservatoires, Rapport d’activité 1995.
  • [24]
    Décision n° 95-MC-06 faisant suite à une demande de mesures conservatoires présentée par MM. Bastide et Ségur, la société SA 2EM et le SNPIET, Index Lamy des Avis et Décisions du Conseil de la Concurrence, n°629, 21 mars 1995.
  • [25]
    Décision n° 95-MC-15 du 6 novembre 1995, suite à une demande de mesures conservatoires présentée par la CGC, la société Valenerg, la société UTEC SA…,Index Lamy des Avis et Décisions du Conseil de la Concurrence, n°615, 30 novembre 1995.
  • [26]
    Décision no 2000-D-57 du 6 décembre 2000, relative à des pratiques mises en œuvre par la SEM Gaz et Électricité de Grenoble et les sociétés GESTE et GEG Achats sur le marché des prestations de services dans le domaine de l’énergie et du bâtiment, BOCCRF n°2 du 23 février 2001.
  • [27]
    Décision no 99-D-51 du 20 juillet 1999, relative à des pratiques constatées dans le secteur des applications thermiques de l’énergie, BOCCRF n°20 du 11 décembre 1999.
  • [28]
    Décision no 98-D-34 du 2 juin 1998, relative à la situation de la concurrence sur le marché des services d’assistance en escale à l’aéroport d’Orly et sur le marché des locaux et espaces nécessaires aux activités des compagnies aériennes mis à leur disposition par Aéroports de Paris sur l’aéroport d’Orly, BOCCRF n°2 du 18 février 1999.
  • [29]
    Les principaux résultats ainsi que la méthode suivie sont présentés dans Marty F., (2002), op. cit.
  • [30]
    Avis n°96-A-12 du 25 juin 1996, relatif à une demande d’avis de l’Association française des banques concernant le fonctionnement des services financiers de La Poste au regard du droit de la concurrence, Rapport d’activité 1996, p. 901.
  • [31]
    Cohen É., (1995), op. cit.
  • [32]
    Par exemple, la Direction générale en charge de la concurrence peut s’auto-saisir de tout sujet et cumule les pouvoirs d’instruction et de sanction.
  • [33]
    Cohen É., (1995), op. cit.
  • [34]
    Cohen É., (1995), op. cit., p.189.
Français

Mots clés

  • concurrence
  • analyse économique du droit
  • libéralisation économique par la jurisprudence
Frédéric Marty [*]
  • [*]
    Chargé de Recherche CNRS, CREDECO – GREDEG – Université de Nice Sophia-Antipolis. Revue Internationale de Droit Économique — 2004 — pp. 435-459
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