CAIRN.INFO : Matières à réflexion

Introduction

1 L’apparition et le développement d’un domaine de recherche appelé « neuroéconomie », qui trouve ses racines dans le dynamisme des neurosciences et leur mise en relation avec l’étude des comportements économiques et sociaux, a fait l’objet d’une intense couverture « médiatique » : articles et dossiers de revues grand public se sont récemment multipliés [1], laissant penser qu’un phénomène important se joue autour de ce nouveau domaine. Il n’existe pas de définition unifiée de la neuroéconomie, cette dernière étant un enjeu de luttes. On peut cependant la décrire comme une science qui étudie les prises de décisions et les actions économiques à l’aide de méthodes expérimentales permettant d’observer directement les activités cérébrales [2]. Elle dit permettre, selon ses promoteurs, de mieux comprendre la rationalité et les préférences qui guident les prises de décisions des acteurs économiques. Le principal résultat de la neuroéconomie à ce jour est la mise en évidence du rôle important de l’émotion dans la prise de décision économique.

2 Cet article vise à restituer plus précisément le périmètre de la « neuroéconomie » – d’un point de vue transnational et national [3] – avec l’exemple de la France, à la fois en matière de production de connaissances scientifiques, en s’appuyant sur des mesures établies à partir de la construction de deux corpus d’articles publiés dans des revues scientifiques (en et hors de la science économique) [4], et sur un plan institutionnel, à partir de l’analyse des espaces d’inscription de ce sous-champ disciplinaire.

3 L’enquête permet tout d’abord d’évaluer l’importance, somme toute encore très récente et modeste, même si elle s’accroît rapidement, de la production d’articles spécialisés dans ce domaine. Mais ce constat doit être quelque peu nuancé, tout d’abord du fait de la centralité des supports concernés, qui laisse entrevoir une dynamique située au cœur des enjeux, notamment épistémologiques, de la science économique voire de la science contemporaine, et d’autre part, du fait de la rapidité du processus de constitution d’une nouvelle sous-discipline, qui mobilise d’ores et déjà des ressources significatives en nombre et en qualité. L’enquête permet également de faire apparaître le caractère pluridisciplinaire de l’espace constitué par la neuroéconomie, doublement dominé, comme pouvait le laisser supposer son nom, par les neurosciences et la science économique. On peut dès lors raisonnablement penser que l’institutionnalisation de ce nouveau domaine devrait affecter de façon marquée la dynamique générale du champ scientifique, en science économique et au-delà. Plusieurs conséquences sont possibles, qui renvoient très directement au contenu des conclusions scientifiques émanant des développements de la neuroéconomie. Un premier ensemble d’effets concerne les implications d’une « naturalisation » des processus économiques et sociaux qui aurait pour cadre le développement de la neuroéconomie. On peut y voir le renouvellement d’un débat ancien qui reste central dans la science économique contemporaine. Un deuxième ensemble concerne plus spécifiquement la conception de la recherche empirique en économie, appelée à se rapprocher toujours plus de (voire se confondre avec) la démarche expérimentale des sciences de la vie, y compris dans ce qu’elle a de plus spécifique avec le recours à des technologies modernes (imagerie cérébrale). Un troisième ensemble concerne le cadre théorique de l’acteur rationnel maximisateur : selon les auteurs, la neuroéconomie peut conduire à lui donner un fondement biologique ou, à l’opposé, à en nuancer voire en contester (dans une perspective « hétérodoxe ») la pertinence. Un quatrième ensemble concerne les conséquences de l’émergence de la neuroéconomie sur le statut de différentes hypothèses, traditions et courants en science économique. Après avoir présenté le « périmètre » de la production de connaissances en neuroéconomie à partir de l’étude de corpus d’articles issus de deux bases de données de revues scientifiques, nous présenterons différents aspects de la rapide « institutionnalisation » de cette sous-discipline, qui permettent d’entrevoir un processus potentiellement lourd de conséquences pour le champ scientifique.

Quelques exemples d’expériences en neuroéconomie

Selon Kevin McCabe (McCabe, 2008), « les expériences en neuroéconomie utilisent une combinaison d’imagerie cérébrale, d’expériences de simulation développées en neurosciences cognitives et de systèmes micro-économiques, comme des expériences en théorie des jeux développées en sciences économiques » [5]. Les expériences neuroéconomiques sont assez différentes les unes des autres du fait des traditions et des intérêts disciplinaires propres à chaque communauté scientifique impliquée.
Les premières expériences reconnues par les neuroéconomistes sont issues de la neurobiologie, avec les travaux notamment de Peter Shizgal et Paul W. Glimcher [6] qui effectuent des expériences sur les animaux. Michael Platt et Paul Glimcher – en s’appuyant sur des expériences effectuées sur des singes dans une étude datant de 1999 – cherchent à montrer que le modèle issu de la théorie de la décision est une alternative puissante au paradigme du réflexe (stimulus-réponse).
Du côté des économistes, la tendance est à recourir à des jeux (avec des raisonnements issus de la théorie des jeux). Par exemple, Alan G. Sanfey, James K. Rilling, Jessica A. Aronson, Leigh E. Nystrom et Jonathan D. Cohen [7] appliquent la technique d’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf) afin d’étudier la contribution relative des processus cognitifs et émotionnels à la prise de décision dans le cadre d’un jeu dit de l’ultimatum [8] sur dix-neuf sujets. L’étude met en évidence un décalage entre l’observation expérimentale effectuée en laboratoire et la prédiction du modèle de calcul de maximisation rationnel. [9] Une des principales explications de ce décalage provient de la réaction de colère des individus devant une offre perçue comme injuste. Les émotions négatives peuvent amener les joueurs à sacrifier leur gain financier. Ceci induit, selon les auteurs, des conflits chez le joueur entre les motifs cognitifs (« accepter ») et les motifs émotionnels (« rejeter »). Ce sont ces derniers que les auteurs tentent de mettre en évidence [10]. Le principal résultat de cette étude est que l’expérience d’émotions négatives constitue la principale source du rejet de l’offre et donc du gain financier.
Une autre expérience a été initiée en France par le philosophe Sacha Bourgeois-Gironde en collaboration avec la neuroscientifique Catherine Tallon-Baudry, spécialiste d’imagerie cérébrale (plus spécifiquement de la MEG [11]) – à la Salpêtrière. Ces deux chercheurs ont proposé des « stimuli monétaires à des individus, des pièces en gros, sur un écran, des pièces qui avaient cours et des pièces qui n’avaient pas cours » [12]. Selon Sacha Bourgeois-Gironde, il ressort deux principaux résultats de cette expérimentation. « On avait vu que les activités dans le cerveau […] liées à la perception des pièces variaient selon que la pièce avait court indépendamment de la familiarité que le sujet avait avec ces pièces […]. C’est-à-dire que le paramètre de familiarité avec les pièces n’avait pas d’impact sur la catégorisation neuronale de ce stimuli, ça c’était le premier résultat. Le deuxième résultat c’est que le décodage de la valeur en court d’une pièce est extrêmement rapide, […] aussi vite que pour décoder un visage […] alors que l’on s’attendait que ce soit comme décoder un mot par exemple » [13] qui est beaucoup plus long (trois fois plus de temps). « Donc cela revenait à dire que le traitement de certaines propriétés très abstraites comme avoir cours, être une monnaie, des propriétés extrêmement conventionnelles, avaient une espèce d’ancrage automatique dans le cerveau. […] Quel sens peut-on donner au fait que le traitement de la valeur monétaire est aussi rapide et se passe dans des zones du cerveau qui sont liées par exemple au décodage du visage ? Qu’est-ce qu’on peut dire de ça ? Alors là par contre, ça va spéculer là. Ça, ça va nous amener à poser des questions de type Stanislas Dehaene sur la lecture et le nombre » [14]. Pour Christian Schmidt, cette expérience n’a guère d’intérêt dans la mesure où « un jour il n’y aura probablement plus aucune pièce de monnaie […]. En revanche, si on voulait faire une étude mentale intéressante, et là il y en a une, c’est de regarder au niveau des comptes. C’est-à-dire, est-ce que vraiment nous comptons tout à fait de la même manière dès lors que les cartes bleues fonctionnent comme elles fonctionnent, c’est-à-dire en argent virtuel permanent, ou quand on était obligé de signer un chèque, voir même de payer cash ? […] Alors là, ça serait assez intéressant de savoir si notre mécanisme mental et notre comptabilité est exactement le même selon la modalité de paiement, ça c’est intéressant ». L’interprétation des résultats des expériences est, on le voit avec cet exemple, un enjeu de controverses pluridisciplinaires entre spécialistes de la neuroéconomie.

Quelques caractéristiques du sous-champ disciplinaire de la neuroéconomie

4 Quelle est l’importance quantitative de la production de connaissances en neuroéconomie ? Quels en sont les principaux traits, du point de vue des espaces nationaux, des institutions impliquées, et en ce qui concerne le type de supports où ses résultats sont diffusés ? Pour répondre à ces questions, nous nous appuyons, pour commencer, sur l’étude des bases de données Econlit et Web of Science, ce qui nous permet de conjuguer un travail centré sur la science économique, dont les contours sont bien définis, et sur le champ scientifique dans son ensemble, où la neuroéconomie se développe par-delà les frontières disciplinaires.

La neuroéconomie, un secteur de petite taille centré sur quelques acteurs clés

5 La neuroéconomie est un domaine de recherche de petite taille : un nombre relativement faible d’articles lui est consacré dans les revues académiques, qui sont peu nombreuses à publier ce type de textes ; un nombre limité d’acteurs et d’institutions occupent cet espace. En considérant le champ de la science économique à travers l’étude des principales revues académiques de science économique, seuls 123 articles [15] traitant de neuroéconomie ont été référencés à partir de la base Econlit[16]. Ces articles sont le fait de 174 auteurs différents, dont 33 ont participé à l’écriture de plusieurs articles. Les spécialistes de neuroéconomie ainsi définis sont donc très peu nombreux à avoir publié en science économique. Le plus prolifique d’entre eux est Colin F. Camerer, avec 5 articles. Si l’on considère leurs institutions d’appartenance, on observe que la New York Université, le California Institute of Technology (CALTECH) et l’Erasmus Universiteit Rotterdam sont les trois plus présentes.

6 Les 123 articles référencés ne concernent qu’un petit nombre de revues : 42 d’entre elles ont publié au moins un article de neuroéconomie [17] et seules 15 en ont publié plus d’un. La revue la plus représentée est Economics and Philosophy, avec 17 articles publiés lors d’un numéro spécial de novembre 2008. Vient ensuite le Journal of Economic Methodology avec 13 articles, qui ont tous été publiés en 2010, et dont 11 sont également issus d’un numéro spécial. Ces deux revues sont des revues d’« excellence » [18] de la science économique, qui relèvent de l’épistémologie économique, l’histoire de la pensée économique et l’histoire économique [19]. Les revues suivantes sont quasiment toutes classées dans la catégorie des revues généralistes. Par ailleurs, les revues qui publient le plus de travaux de neuroéconomie sont celles qui ont consacré un numéro spécial à ce domaine, contribuant ainsi également à sa visibilité nouvelle. Cela peut laisser supposer que l’innovation en neuroéconomie ne provient pas majoritairement des revues d’économie. Ces dernières semblent en effet avoir davantage un rôle de diffusion d’articles de synthèse et une fonction programmatique, plutôt qu’un rôle de publications de résultats originaux. Cela peut s’expliquer par le manque de formation en neuroéconomie du fait même de la nouveauté de ce domaine de recherche mais également par une barrière technique à l’impression des images obtenues par la neuro-imagerie, que les revues académiques de sciences économiques ne sont pas habituées à publier [20]. L’innovation en matière de neuroéconomie semble donc en majorité publiée en dehors des revues d’économie, ce qui nécessite l’étude de l’ensemble du champ scientifique.

7 L’élargissement de l’analyse à l’ensemble du champ scientifique, en s’appuyant sur la construction d’un corpus d’articles traitant de neuroéconomie à partir de la base de données Web of science[21], révèle que le nombre d’articles ne s’étend guère qu’à 200, ce qui reste relativement peu élevé [22]. Ces articles n’ont été écrits que par 420 auteurs différents, dont 76 (soit 18 %) en ont écrit plus d’un. Le plus prolifique en la matière est Taiki Takahashi – biophysicien – avec 33 articles (soit 16 % des articles du corpus). Loin derrière, on retrouve Colin F. Camerer avec 9 articles. Du côté des institutions d’appartenance, ce sont deux universités japonaises qui concentrent le plus grand nombre de producteurs : l’université de Tokyo [23] et l’université d’Hokkaido [24]. On retrouve ensuite une institution déjà repérée dans l’analyse de la production dans les revues d’économie, le California Institute of Technology (CALTECH) [25]. Viennent ensuite deux universités américaines : la Duke University et la New York University [26].

8 À travers le filtre de Web of science, seules 89 revues différentes ont publié un article ou plus. Elles sont 31 à avoir publié plus d’un article et 10 seulement à avoir publié au moins cinq articles. Les deux revues les plus prolifiques sont Economics and Philosophy – une revue déjà identifiée précédemment – et une revue généraliste prestigieuse, Proceedings of the national academy of sciences of the United States of America[27]. Viennent ensuite deux revues s’inscrivant dans le domaine des neurosciences : Neuroendocrinology letters et Journal of neuroscience.

Colin Farrell Camerer (1959-)

Colin Farrell Camerer [28] est un économiste américain de renom : cité dans le Who’s who in Economics ?, il a été Président de l’Economics Science Association (2001 à 2003), il est membre élu de l’American Academy of Arts and Sciences (depuis 2003) et Elected Fellow de l’Econometric Society (depuis 1999). Il a été formé à l’Université Johns Hopkins (BA d’étude quantitative en 1977) et surtout à l’Université de Chicago (MBA de finance en 1979 et PhD de théorie comportementale de la décision en 1981). Il fut professeur de Stratégie et de science comportementale de 1991 à 1994 [29]. Chicago fut aussi pour lui le lieu d’expérimentation pratique de l’économie lorsqu’il devint président (1983-1995) d’une maison de disque, Fever Records, qui produisait des artistes de la scène punk de cette ville. Enfin, il est, depuis 1994, professeur de gestion et d’économie à CALTECH (California Institute of Technology) au département des Sciences humaines et sociales [30].
Colin F. Camerer est l’un des leaders de l’économie comportementale et de la neuroéconomie. Il est coéditeur (avec Ernst Fehr) de la série Behavioral Economics de la Russell Sage Foundation et de Princeton University Press. À travers l’économie comportementale – synthèse tentant d’unifier la psychologie et l’économie des décisions et s’inscrivant dans une longue tradition qui cherche à donner une assise empirique aux théories économiques – Colin F. Camerer cherche à améliorer les modèles économiques dominants en les rendant plus réalistes. Dans cette optique, la neuroéconomie est l’étape suivante du même développement dans la mesure où elle vise à substituer aux modèles mathématiques simplificateurs des données neuronales. La pratique de la recherche s’effectue alors (aussi bien pour l’économie comportementale que pour la neuroéconomie) dans des environnements de laboratoire artificiels étudiant expérimentalement l’économie. Les travaux de Colin F. Camerer sont notamment spécialisés dans la théorie des jeux comportementale et la neuroéconomie. Dans une tradition beckerienne, il a également étudié des objets de recherche non spécifiquement économiques (les paris dans la NBA par exemple). Il a par ailleurs effectué des travaux sur l’addiction aux jeux.

De l’émergence à la stabilisation d’un secteur en forte expansion

9 Les premiers articles publiés relevant de la neuroéconomie (selon les critères que nous avons retenus) se repèrent grâce à la base de données Web of science. En 1991, un article est publié par Warren D. Tenhouten [31] – sociologue, professeur au département de sociologie de l’université de Californie à Los Angeles – dans une revue de sciences sociales, le Journal of social and biological structures. Warren D. Tenhouten y met en évidence le développement remarquable des neurosciences, qui malgré leurs limitations en ce début des années 1990, devaient selon lui inéluctablement permettre d’approfondir nos connaissances de l’esprit, du cerveau et de la société. Il cherche à élaborer une classification des neurosciences, et en met en évidence trois types : les « neurosciences classiques » fondées sur les sciences traditionnelles ayant pour objet le système nerveux central (sciences de la vie et sciences médicales) ; l’« ethnoneurologie » qui correspond aux neurosciences dans les sciences sociales et la philosophie [32] ; enfin, les neurosciences fondées sur les sciences comportementales. Pour Warren D. Tenhouten, « comprendre les interdépendances du corps, du langage, de la pensée et de l’esprit est essentiel pour une profonde compréhension de la culture. La pensée humaine, comme un processus continu qui permet la vie sociale, doit être étudiée objectivement, avec une attention directe portée au cerveau. Quand ce sera le cas, toutes les sciences sociales, chacune de celles qui contiennent aujourd’hui en leur sein une sous-discipline neurocognitive, trouveront une référence commune et objective pour comprendre le fonctionnement cérébral et cognitif du cerveau, l’« organe » virtuel de la culture et de la société. » [33] On va ainsi selon lui vers un dépassement des frontières entre le social et le biologique : « le cerveau humain ne peut être compris qu’avec une recherche neuroscientifique interdisciplinaire qui implique de se concentrer sur les relations entre le neurone, le mental et le social » [34]. C’est dans le cadre de l’« ethnoneurologie » fondée sur les sciences sociales qu’intervient la neuroéconomie [35]. Il la définit comme l’étude des couches neuronales et des phénomènes mentaux associés, et parallèlement des comportements économiques et socio-économiques de production et de consommation. Il fait remonter les premiers travaux de neuroéconomie au début des années 1970 [36].

10 Le second article est publié en 2002, soit plus d’une décennie plus tard, par Kip Smith (gestionnaire proche de la psychologie), John Dickhaut (économiste spécialisé en neuroéconomie), Kevin A. McCabe (économiste) et José V. Pardo (psychiatre) dans une revue de sciences de gestion, Management science[37]. Ces auteurs cherchent à y établir l’existence d’une relation entre la mesure de l’activité du cerveau et l’observation des choix économiques. Mené à l’aide d’une expérience de tomographie par émission de positons (TEP), ce travail illustrerait la faisabilité d’une science de la décision neuroéconomique [38].

11 Le troisième article [39] paraît en 2003 sous les plumes d’Alan G. Sanfey (psychologue cognitiviste), James K. Rilling (professeur assistant en anthropologie, en science comportementale et en psychiatrie), Jessica A. Aronson (psychologue), Leigh E. Nystrom (économiste et sociologue), Jonathan D. Cohen (psychologue cognitiviste) dans une des plus grandes revues de diffusion scientifique, Science. Selon ces auteurs, le champ naissant de la neuroéconomie cherche à asseoir l’étude des prises de décision économique sur le substrat biologique du cerveau [40]. Pour ce faire, les auteurs utilisent l’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf), dans le cadre de l’étude d’un jeu sous ultimatum. À l’aide de ces outils, ils essaient de faire apparaître le rôle important des émotions dans la prise de décision, se différenciant ainsi des modèles économiques standards.

12 Si l’on se réfère au premier manuel de neuroéconomie [41], on note qu’aucun de ces trois articles n’est mentionné comme fondateur. Le manuel fait référence dans un premier temps aux travaux des neurobiologistes, il évoque alors deux articles : celui de Peter Shizgal et Kent Conover [42] paru en 1996 dans Current Directions in Psychological Science et celui de Michael L. Platt et Paul W. Glimcher [43] paru en 1999 dans Nature.

13 Du côté des économistes, ce même manuel mentionne un manuscrit – Grey Questions – écrit par Colin F. Camerer, George Lowenstein, et Drazen Prelec qui aurait commencé à circuler dès la fin des années 1990. Les deux premiers travaux publiés considérés comme relevant plus explicitement de la neuroéconomie l’auraient été en 2001. Il s’agit de celui de Hans Breiter, Peter Shizgal (pionniers de l’Imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf)) et Daniel Kahneman [44] publié dans Neuron ainsi que celui de Kevin McCabe, Daniel Houser, Lee Ryan, Vernon Smith et Theodore Trouard, publié dans le Proceedings of the National Academy of Sciences of the United States of America[45].

14 Selon nos observations, la neuroéconomie se cristallise en domaine de recherche à partir de 2004, aussi bien dans le champ de la science économique (avec 4 articles référencés dans Econlit) que dans celui de la science en général pour cette seule année (9 articles référencés dans Web of science). C’est en 2007 que la production d’articles de neuroéconomie s’accroît fortement (avec 15 articles référencés dans la base Econlit et 31 dans Web of science), ce fort accroissement se poursuivant en 2008 [46] (avec 30 articles référencés dans Econlit et 46 dans Web of science). 2009 et 2010 sont deux années de stabilisation, avec environ 30 articles publiés dans le champ de la science économique et aux alentours de 40 articles pour l’ensemble du champ scientifique.

Graphique

Nombre d’articles neuroéconomiques par année

Graphique

Nombre d’articles neuroéconomiques par année

Répartition géographique

15 À la sortie de la Seconde Guerre mondiale dans un contexte d’internationalisation des sciences sociales « les États-Unis occupent de fait une position dominante qui assure l’hégémonie de leurs modèles organisationnels et méthodologiques » [47]. De fait, leur capacité à internationaliser leur vision des sciences sociales s’accroît fortement. Celle-ci appelle notamment à la pleine intégration de la méthode expérimentale dans les sciences sociales dont la neuroéconomie est une manifestation récente. Par conséquent, l’hégémonie américaine – que l’on observe en considérant le pays d’affiliation [48] des auteurs d’articles – sur ce domaine n’est pas surprenante. Cette domination est davantage marquée du côté des revues de science économique (Econlit), puisque 52 % des producteurs d’articles de neuroéconomie qui y sont référencés sont rattachés institutionnellement aux États-Unis contre 42 % pour les articles publiés dans l’ensemble des sciences (Web of science) [49]. Viennent ensuite, loin derrière les États-Unis, les Pays-Bas, la France, l’Allemagne et l’Italie. Pour ce qui concerne l’ensemble du champ scientifique, une seconde nation se détache nettement des autres : le Japon (avec 17 % des producteurs) [50]. Loin derrière, on trouve la Grande-Bretagne, l’Italie, la France et l’Allemagne. L’Europe occupe donc, derrière les États-Unis, une place non négligeable (environ 30 % dans le champ scientifique en général – Web of science – et 40 % en science économique – Econlit). L’Asie est quant à elle quasiment absente des articles traitant de neuroéconomie publiés en science économique (Econlit), alors qu’elle occupe 20 % des articles traitant de neuroéconomie publiés dans le champ scientifique en général (Web of science) (Voir Tableau A) [51].

Tableau A

Affiliation des auteurs à partir des corpus construits

Tableau A
Econlit Web of science Affiliation de l’auteur Nombre d’auteurs % Affiliation de l’auteur Nombre d’auteurs % Etat-Unis 117 52% Etats-Unis 253 42% Europe 90 40% Europe 173 29% Reste du monde 18 8% Asie 123 20% Reste du monde 52 9% Ensemble 225 100% Ensemble 601 100%

Affiliation des auteurs à partir des corpus construits

Un domaine de recherche multidisciplinaire dominé par les neurosciences et l’économie

16 La science économique n’est pas la seule source de production d’articles traitant de neuroéconomie. Afin de mieux se rendre compte de cette non exclusivité, l’étude des institutions de rattachement des auteurs d’articles du corpus construit à partir de la base Web of science permet d’effectuer une première analyse des appartenances disciplinaires des auteurs. Il en ressort que les institutions et les établissements d’économie ne sont pas ceux qui dominent et que de nombreuses disciplines sont concernées. Ce sont les institutions et les établissements classés en « médecine, pharmacie, psychiatrie et santé » qui sont les plus représentés, suivies des institutions et établissements de « sciences cognitives, de sciences du comportement, sur le cerveau et de sciences expérimentales », puis de celles de « neurosciences ». Les institutions et établissements d’« économie, de gestion et de finance » arrivent seulement en quatrième position.

17 La répartition par domaine (« Subject area »), catégorie attribuée par Web of science aux articles du corpus, permet de compléter l’analyse. Dans ce cadre, les articles neuroéconomiques sont d’abord publiés dans le domaine des neurosciences, avec plus d’un tiers des articles du corpus. Viennent ensuite le domaine de l’économie et gestion (avec presque 30 % des articles du corpus), le domaine de la médecine, psychiatrie et pharmacie (environ 20 %) et le domaine de la psychologie (environ 14 %).

La neuroéconomie : un domaine au centre des recherches économiques

18 Il faut relativiser la faible importance de ce domaine, telle qu’elle peut être mesurée à l’aune de la quantité d’articles. Tout d’abord, la production, même faible, peut être fortement citée dans des secteurs centraux de la discipline [52]. Plus important, près de la moitié de la production d’articles traitant explicitement de neuroéconomie dans l’espace des revues académiques d’économie (Econlit) est publié dans des revues dites d’« excellence » [53] (voir Tableau B). Par ailleurs, environ un tiers des articles est publié dans une revue généraliste [54]. Un peu plus d’un quart des articles est issu de revues classées dans la catégorie « Epistémologie – Histoire de la pensée – Histoire économique ». Viennent ensuite les revues classées en « Méthodes quantitatives, mathématiques, jeux et décision », puis les revues classées en « Marketing » (voir Tableau C). La neuroéconomie semble donc concerner des enjeux centraux de la théorie économique, comme le montre la publication des articles qui en traitent principalement dans des revues généralistes [55] et dans des revues de méthodes quantitatives et mathématiques ainsi que de théorie des jeux. Ce qui renforce l’idée de la centralité de ce domaine pour la science économique, engendrant ainsi des débats épistémologiques et méthodologiques comme l’atteste le nombre également important de publications dans ce type de revues.

Tableau B

Nombre d’articles selon le rang des revues à partir d’Econlit

Tableau B
Rang des revues selon l’AERES en 2009 Nombre d’articles % du nombre d’articles sur le nombre d’articles total A+ 40 33% A 19 15% B 33 27% non noté 31 25% Ensemble 123 100%

Nombre d’articles selon le rang des revues à partir d’Econlit

Tableau C

Nombre d’articles selon la catégorie des revues à partir d’Econlit

Tableau C
Catégories des revues selon la section 37 du CNRS en 2004 Nombre d’articles % du nombre d’articles sur le nombre d’articles total % du nombre d’articles sur le nombre d’articles total issu de revues classées Généraliste 37 30% 41% non noté 33 27% Episténiologie – Histoire de la pensée -1 Iistoire économique 34 28% 38% Méthodes quantitatives, mathématiques, jeux et décision 11 9% 12% Marketing 6 5% 7% Economie publique et choix collectifs 1 1% 1% Finance et assurance 1 1% 1% Ensemble 123 100%

Nombre d’articles selon la catégorie des revues à partir d’Econlit

Le cas français

19 Le fait que parmi les revues de science économique les plus prolifiques en neuroéconomie, deux soient françaises, laisse supposer que ce nouveau domaine suscite un intérêt relativement important en France. La production d’articles de neuroéconomie issues de revues académiques françaises d’économie (Econlit) est de l’ordre de 12 % (15 articles) de la production totale, alors qu’au niveau de la science en général (Web of science), elle est de l’ordre de 5 % (9 articles). Quatre revues françaises d’économie ont publié au moins un article : Revue d’Économie Politique (7 articles) [56], Revue Française d’Économie (6 articles), Revue de Philosophie Économique (1 article) et La Revue des Sciences de Gestion (1 article). Ces 15 articles ont été produits par 28 auteurs différents parmi lesquels 10 seulement sont institutionnellement rattachés à la France (ces 10 auteurs [57] ont écrits 9 articles). Les institutions les plus représentées sont l’université d’Aix-Marseille, l’université de Lyon avec notamment le Groupe d’Analyse et de Théorie Économique (GATE, UMR 5824). L’auteur le plus présent est Olivier Oullier, auquel il convient d’ajouter Georgio Coricelli lorsque l’on prend en compte les articles publiés par des auteurs institutionnellement rattachés à la France et ayant publié dans des revues académiques d’économie non françaises [58]. En ajoutant ces publications, le nombre d’articles total de neuroéconomie produit par le champ de la science économique française est de 17 articles [59].

20 Du côté de l’ensemble des disciplines (Web of science), le nombre de revues concernées est également très faible puisque seulement trois revues académiques françaises répertoriées par cette base ont publié au moins un article traitant de neuroéconomie : Revue d’Économie Politique (7 articles), PSN-Psychiatrie Sciences Humaines Neurosciences (1 article) et Encephale-Revue de psychiatrie clinique biologique et thérapeutique (1 article). C’est donc une revue généraliste de science économique, la Revue d’Économie Politique, qui est le moteur de la publication de ce domaine de recherche dans les revues scientifiques françaises du fait de la publication d’un numéro spécial en 2008. À ces 9 articles publiés par des revues académiques françaises, il convient d’ajouter 10 articles produits par des auteurs institutionnellement rattachés à la France mais publiés dans des revues non françaises. Ces 19 articles ont été écrits par 26 auteurs différents. Seuls trois auteurs ont publié plus d’un article : il s’agit des deux auteurs identifiés précédemment – Olivier Oullier (qui est le plus prolifique avec 3 articles) et Giorgio Coricelli (2 articles) – auxquels il faut rajouter Gérard Reach (Professeur des universités et praticien hospitalier). Ici, les institutions les plus représentées sont également l’Université de Lyon, plus précisément son Institut des Sciences Cognitives [60], et l’Université d’Aix-Marseille. L’étude des « domaines » (« Subject area ») attribués par Web of science montre que ce sont les neurosciences qui est le sujet le plus associé aux articles répertoriés puisque 12 articles sur 19 se sont vus attribuer le sujet « Neuroscience », 8 articles se sont vus attribuer le sujet « économie », 3 « Biologie » et 3 « Médecine et Psychiatrie ».

21 Le champ français n’a publié d’articles traitant de neuroéconomie qu’une fois le domaine de recherche en pleine croissance (la première publication date de 2007), ce qui permet de dire qu’en la matière le monde académique français fait parti des « suiveurs » [61] et non des « innovateurs », ce qui semble le cas en science économique plus généralement, en tout cas depuis que la science économique française s’est pleinement insérée dans le « mainstream » international.

22 Les constats sont sans ambiguïté : domaine récent et encore limité, la neuroéconomie repose sur la mobilisation de quelques acteurs et institutions qui y ont fortement investi. Situés de façon prédominante dans le monde nord-américain, ces acteurs et institutions proviennent en premier lieu de l’extérieur de la discipline économique, mais celle-ci est cependant rapidement très présente dans l’ensemble de la production scientifique, où elle partage avec les neurosciences une position dominante. Surtout, les revues concernées occupent des positions centrales et prestigieuses en science économique, ce qui permet de penser que le processus, quoique limité, est en voie de produire des effets notables sur l’ensemble du champ de la science économique et peut-être plus largement sur le champ scientifique, dont il remet en question certains des « découpages » institués.

23 Pour déterminer un peu plus précisément ce que recouvre aujourd’hui le développement de la neuroéconomie, nous nous intéresserons maintenant à son institutionnalisation, processus en cours mais de forte intensité, qui nous permettra de préciser quels sont les vecteurs concrets de l’émergence de la sous-discipline.

L’institutionnalisation de la neuroéconomie, un processus en cours

24 Selon Johan Heilbron, la science moderne se caractérise par sa structuration en disciplines, que l’on peut définir « comme des unités d’enseignement, de recherche et de formation professionnelle » [62]. Yves Gingras [63] propose quant à lui de distinguer la discipline de la profession et met en avant « trois aspects du processus de formation des disciplines (ou « disciplinarisation ») que la notion de « professionnalisation » amalgame : 1) l’émergence d’une pratique nouvelle ; 2) l’institutionnalisation de cette pratique, qui permet sa reproduction et sa diffusion systématique et enfin ; 3) la formation d’une identité sociale, qui peut prendre plusieurs formes, dont celle de profession (comme la médecine ou le génie) ou de discipline (comme l’histoire, la physique ou la sociologie). Bien que ces processus se déroulent dans le temps, ils constituent moins les « étapes » d’une « évolution » que trois invariants du processus de formation des disciplines » [64].

25 En ce qui concerne la neuroéconomie, la première phase – qui voit émerger de nouvelles pratiques de recherche fondées sur une nouvelle idée ou une nouvelle technique – s’appuie sur l’apparition de nouvelles techniques reposant sur l’imagerie cérébrale à la fin des années 1990 et au début des années 2000, l’essor des neurosciences ainsi que de l’économie expérimentale et comportementale. La neuroéconomie est depuis lors entrée dans une deuxième phase de disciplinarisation, se caractérisant par la tentative de faire perdurer ce domaine de recherche et de favoriser sa reproduction, à travers la mise en place de lieux de discussion et de publication ainsi que de programmes de formation.

Des lieux de discussion à l’origine de la mise en place progressive d’une communauté de neuroéconomistes

26 L’institutionnalisation de la neuroéconomie a commencé par l’organisation de conférences et séminaires interdisciplinaires qui ont permis aux « neuroéconomistes » de se constituer progressivement en communauté. Cependant, l’économie expérimentale, l’économie comportementale [65] et la finance comportementale [66] – qui précèdent chronologiquement la neuroéconomie – déjà institutionnalisées et disciplinarisées, ont favorisé l»intégration des sciences cognitives en économie et en finance. De plus, les lieux de publication de ces domaines sont parmi les diffuseurs des travaux de neuroéconomie. Enfin, la trajectoire de certains des principaux acteurs de la neuroéconomie parmi les économistes montre que l’économie comportementale constitue souvent un point de départ. Par ailleurs, l’émergence et l’institutionnalisation de domaines de recherches reposant pour partie sur l’économie et pour partie sur des disciplines de sciences dites « dures » comme l’« éconophysique » et la « bioéconomie » ont sans doute aussi constitué un terreau favorable à la diffusion de la neuroéconomie. Enfin, on trouve également du côté des sciences cognitives – terme apparu en 1975 [67] – et des neurosciences [68] des ingrédients qui ont favorisé l’émergence de la neuroéconomie, notamment à travers l’existence de revues – comme Cognition, Cognitive Science ou Behavioral and Brain Sciences – et d’institutions centrales des sciences cognitives que l’on retrouve dans l’étude de la neuroéconomie.

27 Selon Paul W. Glimcher, Colin F. Camerer, Ernst Fehr et Russell A. Poldrack [69], la première conférence interdisciplinaire de neuroéconomie se serait tenue en 1997 à Carnegie-Mellon (Pittsburgh), sous la direction de Colin F. Camerer et George Loewenstein, avec un financement de la Russell Sage Foundation [70]. D’autres rencontres s’ensuivirent, parmi lesquelles la conférence qui s’est tenue à l’université de Princeton en 2000 [71]. Paul W. Glimcher, Colin F. Camerer, Ernst Fehr et Russell A. Poldrack [72] mentionnent deux autres conférences importantes en 2001 : un atelier portant sur l’intersection entre neurosciences et économie lors de la conférence annuelle – « Evolutionary Biology, Economics, and Law » – de la Fondation Gruter, qui s’est tenu à Squaw Valley, ainsi qu’une conférence qui s’est déroulée à Princeton et fut organisée par le neuroscientifique Jonathan D. Cohen et l’économiste Christina Paxson. Cette conférence semble très importante dans la mesure où elle provoqua un élan formidable et aurait servi de base pour la future création de la Société de neuroéconomie. Viennent ensuite l’Institut d’été Russel Sage en économie comportementale organisé par Matthew Rabin, George Loewenstein et David Laibson sur le campus de l’Université de Berkeley durant deux semaines en 2002 et la conférence organisée par Berns Greg d’Emory University en 2003 à Martha’s Vineyard (Massachusetts) [73].

28 L’ensemble de ces rencontres a abouti à la création de la Société de neuroéconomie (Society for Neuroeconomics) [74] en 2004 sur l’île de Kiawah, station balnéaire de Caroline du Sud, où se réunirent 83 participants, dont Vernon Smith, fraîchement « nobélisé » (2002), qui apporta un surcroît de légitimité [75] à cette nouvelle société. [76] Celle-ci s’est fixée pour mission de « favoriser la recherche sur les fondements du comportement économique en stimulant la collaboration et la discussion entre spécialistes des sciences psychologiques, économiques, et de neurones » [77] ainsi que de « veiller à la poursuite du développement du champ de la neuroéconomie en soutenant les jeunes chercheurs » [78]. Chaque année, cette société délivre un prix annuel des jeunes chercheurs (dont le bénéficiaire se voit accorder une bourse de 1 000 dollars). En plus de la Society for Neuroeconomics, deux autres associations sont centrées sur la neuroéconomie : l’Association for NeuroPsychoEconomics [79] fondée en 2005 et l’Association of Applied Neuroeconomics and Neuromarketing [80] fondée en 2009.

La publication d’articles de synthèse et d’un manuel

29 En parallèle, ce domaine de recherche s’est diffusé à travers des articles programmatiques et des dossiers de synthèse [81] auxquels sont venus s’ajouter quelques ouvrages de référence [82], et surtout la parution d’un manuel de référence (Handbook), celui de Glimcher, Camerer, Fehr et Poldrack [83].

30 Le premier numéro spécial a été publié en 2002 dans la revue Neuron par Jonathan D. Cohen et Kenneth Blum et s’intitule « Reward and Decision » et s’adressait davantage aux neuroscientifiques. Du côté des économistes, c’est en 2005 que semble être paru le premier numéro spécial, dirigé par Aldo Rustichini et publié dans Games and Economic Behavior. Deux textes font figure de manifeste : un pour les neurosciences – l’ouvrage de Paul W. Glimcher paru en 2003 [84] – et l’autre pour l’économie – l’article publié par Colin F. Camerer, George Loewenstein et Drazen Prelec dans le Journal of Economic Litterature en 2005 [85].

31 Comme nous l’avons vu plus haut, la neuroéconomie est au centre des préoccupations de la science économique et bénéficie à ce titre d’un espace de publication dans les meilleures revues généralistes de sciences économiques ainsi que de nombreux numéros spéciaux à partir de 2004. Un pas supplémentaire dans l’institutionnalisation est franchi lorsqu’un code dédié à ce domaine est créé en 2006, le D87, dans la codification du Journal of Economic Literature (JEL) [86]. La création de ce code, qui intervient très rapidement au moment où la neuroéconomie est en train d’émerger au sein de la science économique, est très importante dans le processus d’institutionnalisation, dans la mesure où cette codification fonctionne comme une norme universelle pour la publication d’articles : tout auteur doit attribuer des codes à son article afin de rendre compte des thématiques qu’il se propose d’aborder.

La création de centres de recherche

32 Plusieurs centres de recherche sont dédiés à la neuroéconomie : le Center for Neuroeconomics Studies (CNS) [87] de la Claremont Graduate University fondé par Paul J. Zak, le Center for Neuroeconomic Studies (CNS) du Duke Institute for Brain Sciences (DIBS) qui a été fondé en 2005 et dirigé par Scott Huettel, le Center for the Study of Neuroeconomics de la George Mason University dirigé par Kevin MacKabe. On peut également citer le Center for Neuroeconomics (CNE) de la New York University que dirige Paul W. Glimcher, le Center for Economics and Neuroscience fondée en 2009 par Christian Elger, Armin Falk, Martin Reuter et Bernd Weber de l’Université de Bonn (en Allemagne), le Center for Neuroeconomic Research à l’University of South Carolina et dirigé depuis sa création en 2006 par Stacy Wood, le RANGEL Neuroeconomics Lab au California Institute of Technology qui, comme son nom l’indique, est dirigé par Antonio Rangel et enfin l’Erasmus Centre for Neuroeconomics dirigé par Smidts Ale.

33 Ce domaine de recherche demande des moyens financiers, matériels et humains importants. Aux États-Unis, les agences de l’État (les National Institutes of Health) participent volontiers au financement, tout comme de nombreuses fondations : la Foundation for Research in Experimental Economics (Ifree), MacArthur, Templeton, Mercatus, Gruter Institute et Russell Sage Foundation.

34 Du côté des formations, il ne semble pas cependant que la disciplinarisation soit aussi avancée que pour la recherche. Des cours de neuroéconomie sont certes dispensés à travers le monde, mais il n’existe pas de diplômes qui lui soient entièrement consacrés, hormis à Zurich – où a été fondée en 2008 la Chaire de Neurosciences sociales et de Neuroéconomie [88] – et à la Claremont Graduate University [89] où un programme doctoral en neuroéconomie a été créé.

Le cas français : Une institutionnalisation beaucoup moins avancée qu’aux États-Unis

35Tout comme pour les États-Unis, le processus a commencé en France par la mise en place de conférences et de séminaires interdisciplinaires, mais ceux-ci n’ont pas encore permis aux neuroéconomistes de se constituer en communauté dans l’espace scientifique national. Le champ scientifique « est un champ de forces doté d’une structure, et aussi un champ de luttes pour conserver ou transformer ce champ de forces » [90]. Le nouveau domaine de recherche qu’est la neuroéconomie n’échappe pas à cette logique. Pour le cas de la France, il apparaît que trois chercheurs, Sacha Bourgeois-Gironde, Olivier Oullier et Christian Schmidt, rivalisent pour devenir le principal représentant de ce domaine. Chacun est inséré dans un champ disciplinaire différent : Sacha Bourgeois-Girond est un philosophe qui pratique des expériences neuroéconomiques en collaboration avec des acteurs du champ médical. Olivier Ouiller est un neuroscientifique qui pratique également des expériences neuroéconomiques et possède l’avantage d’avoir investi le monde médiatique (il est l’auteur d’articles dans la presse écrite et tient un blog sur la neuroéconomie) et l’univers politico-bureaucratique (à travers notamment sa présence au sein du Conseil d’Analyse Stratégique). Enfin, Christian Schmidt est un économiste qui tente notamment de regrouper les initiatives de neuroéconomie au sein d’une association professionnelle [91]. Ces trois chercheurs ont pour point commun de tenter d’inscrire la neuroéconomie du côté de l’hétérodoxie économique (ou si l’on préfère de l’économie critique). C’est particulièrement le cas pour Sacha Bourgeois-Gironde [92] et Christian Schmidt. [93] Ce dernier, du fait de sa trajectoire et son capital scientifique, semble être le mieux à même d’effectuer cette passerelle entre la neuroéconomie et l’économie critique. Quant à Olivier Ouiller, il collabore avec Alan Kirman, économiste dont la pensée à évolué du cœur de la théorie économique « mainstream » pour se tourner progressivement vers une position plus critique en pointant les limites de l’analyse économique au profit d’une approche par les systèmes complexes [94].

36 La première rencontre où le domaine de la neuroéconomie émerge en France s’est déroulée à l’Institut d’économie industrielle (IDEI) de Toulouse lors de l’Institut d’Eté de Toulouse « Économie et Psychologie » en juin 2005. Celui-ci a laissé une large place à la neuroéconomie et a vu la participation des principaux acteurs [95] de ce domaine de recherche émergent. En 2005-2006, un séminaire a été organisé au Collège de France par Christian Schmidt et Jean-Pierre Changeux [96]. C’est également au Collège de France qu’un symposium international s’est tenu en mai 2009, organisé sous l’impulsion conjointe de la chaire de psychologie cognitive expérimentale et de celle de Théorie économique et organisation sociale [97].

37 Une conférence internationale jointe de l’International Association for Research in Economic Psychology (IAREP) et de la Society for the Advancement of Behavioral Economics (SABE), organisé par Louis Lévy-Garboua [98], s’est tenue à Paris en juillet 2006. L’Institut d’Histoire de Philosophie des Sciences et des Techniques (IHPST) a organisé le colloque « Théorie de la décision et neuro-économie » en février 2009. On retrouve également la neuroéconomie pour la première fois lors du congrès annuel de l’Association française de sciences économiques (AFSE) en septembre 2007. [99] On note que la neuroéconomie est surtout présente dans les plus hauts lieux de l’enseignement supérieur français, ce qui illustre, à nouveau, sa « centralité » alors qu’elle est encore émergente.

Christian Schmidt (1938-) [100]

Christian Schmidt est un acteur central du développement de la neuroéconomie en France, auteur de surveys et de réflexions sur ce domaine de recherche, bien qu’il n’ait pas encore effectué d’expériences neuroéconomiques. De formation pluridisciplinaire (Sciences Politiques, philosophie, sociologie et sciences économiques), il s’est d’abord intéressé à l’épistémologie économique, dans une perspective de philosophie analytique, débouchant sur une thèse et un doctorat d’État [101]. Il a été ensuite, très brièvement, l’assistant de Raymond Aron à Paris V où il a enseigné la sociologie économique et l’économie pour sociologues, avant d’être recruté à Paris-Dauphine où il a effectué toute sa carrière. De manière générale, Christian Schmidt est intéressé par les problèmes sociaux généraux et le comportement de l’homme dans ses différentes facettes mais il a opté pour une spécialisation en science économique dans la mesure où cette discipline lui permettait de garder un « il d’épistémologue » [102] et d’être dans la discipline des sciences humaines et sociales « dont l’ancrage formel est le plus rigoureux », au contraire de la sociologie ou de la psychologie. Il préférait en effet « partir d’une science dure, ou quasi-dure, ou en tout cas rigidifiée, parce que là on s’accrochait à des concepts, on pouvait les remettre en cause, etc. C’est essentiellement ce choix intellectuel qui m’a orienté vers l’économie ».

38 Après ses premiers travaux épistémologiques sur la science économique, Christian Schmidt s’est ensuite intéressé aux relations entre l’économie et la guerre [103], ce qui l’a amené à travailler sur la théorie des jeux. Le « décalage entre les principes strictement logiques de la théorie des jeux et la réalité stratégique dans laquelle il faut imaginer ce que l’autre imagine sur vous » l’a conduit à travailler sur le cerveau pour mieux comprendre et expliquer les prises de décision des agents [104]. De plus, de la même manière que son choix s’est fait en faveur de la science économique vis-à-vis des autres sciences sociales, son attrait pour la neuroéconomie s’explique par le projet de constituer la science économique sur des bases plus scientifiques.

39 Christian Schmidt est au centre d’un réseau de promoteurs de la neuroéconomie en France. Son principal collaborateur est Jean-Pierre Changeux, dont la rencontre en 2003-2004 a été déterminante [105] et l’a conduit à investir ce nouveau domaine de recherche débouchant notamment sur la publication d’un ouvrage [106], la direction d’un numéro spécial de la Revue d’Économie Politique en 2008 et la création de l’European Neuroeconomics Association en 2010. L’un des réseaux majeur de l’entreprise académique [107] en neuroéconomie de Christian Schmidt repose sur le monde médical. En effet, il peut compter sur le soutien de Bruno Dubois – professeur de neurologie, spécialiste d’Alzheimer et de la mémoire – principal contact à l’Hôpital de la Pitié Salpêtrière. Christian Schmidt fait, par ailleurs, partie du comité de l’Autorité de Régulation des Jeux En Ligne (ARJEL) en tant que spécialiste des problèmes d’addiction aux jeux où il y côtoie des médecins. [108] Il a également siégé pendant deux ans dans une commission spéciale de l’ANR consacrée aux crédits accordés aux sciences neuronales et cognitives, présidée par Alain Berthoz, où il a appuyé le premier projet ANR déposé et accordé en neuroéconomie. Il est aussi en contact avec Christian de Boissieu – Président du Conseil d’Analyse Économique – à qui il a demandé de faire « quelque chose » sur la neuroéconomie dans le cadre de cette institution.

40 Les premiers articles de neuroéconomie produits dans le champ français l’ont été, nous l’avons vu, en 2008. Cette même année voit la parution du premier ouvrage sur le sujet : il s’agit de celui de Sacha Bourgeois-Gironde, intitulé La neuroéconomie – Comment le cerveau gère mes intérêts[109]. Un second ouvrage, celui de Christian Schmidt, paraît en 2010 sous le titre Neuroéconomie – Comment les neurosciences transforment l’analyse économique[110]. Cette même année 2010 [111], Christian Schmidt crée la première association de neuroéconomie en France : l’European Neuroeconomics Association en vue de constituer une communauté de neuroéconomistes dans l’espace européen ou tout du moins français. Cette association a pour objectif de mettre en contact les équipes de recherche et de les aider à trouver un financement à partir des programmes scientifiques qu’elle élabore, ainsi que de diffuser et de faire connaître les différentes manifestations ainsi que les travaux de neuroéconomie. Pour cela, le projet d’une revue – des contacts sont pris avec De Boeck qui est une maison d’édition scientifique mi-francophone, miinternational, et très intéressée par la psychologie – et d’une sous-collection chez Odile Jacob, qui relèvera de la vulgarisation scientifique haut de gamme, sont en cours [112]. De plus, dans la mesure où il n’y a pas en France, aujourd’hui, d’économiste en activité indiscuté qui soit aussi reconnu en neuroéconomie, l’association a pour but d’inciter et de former quelques jeunes économistes ayant une formation expérimentale et intéressés par le domaine [113]. Un des enjeux pour l’association, selon Christian Schmidt, concerne également l’interface à construire avec le secteur médical. Ce secteur est central en neuroéconomie tant sur le plan théorique, avec notamment les travaux sur les déformations comportementales en cas de lésions, que sur le plan matériel, dans la mesure où les appareils nécessaires aux expériences en neuroéconomie appartiennent aux institutions médicales. Enfin, l’association devra permettre une indépendance vis-à-vis des États-Unis, dont l’influence est très forte en matière de neuroéconomie [114].

41 Il n’existe pas encore en France de centre entièrement consacré à la neuroéconomie, mais quelques institutions de recherche lui donnent une place non négligeable : en premier lieu, l’Institut Jean Nicod (IJN) [115], qui est l’une des neuf équipes du Département d’Etudes Cognitives (DEC) [116] de l’école Normale Supérieure, Unité Mixte de Recherche (UMR) [117] créée en 2002. Son thème unificateur est l’esprit humain et la nature des représentations. Parmi les trois thèmes de recherche de l’IJN figure « Culture cognition et société » lui-même subdivisé en trois sous-thèmes. C’est le sous-thème, « Cognition et comportements économiques » [118], dirigé par Sacha Bourgeois-Gironde, qui s’occupe de neuroéconomie.

42 Parmi les centres de recherche se préoccupant de celle-ci, on trouve également le Groupe d’Analyse et de Théorie Économique (UMR 5824) [119]. Elle se développe au sein de l’« Axe Micro-économie du travail et de l’emploi » et plus particulièrement au sein du « Sous-axe : Caractéristiques psychologiques individuelles et comportement économiques » à travers la thématique « Biais cognitifs, émotions et neuroéconomie ». Dans ce cadre, la neuroéconomie est envisagée comme une véritable rupture avec l’économie comportementale, ayant pour but d’« enquêter directement sur le cerveau et pas sur la personne ». Observer l’activité cérébrale serait donc plus pertinent pour comprendre le comportement que d’observer celui-ci directement. Pour mener à bien ses recherches en économie expérimentale et en neuroéconomie, l’unité possède une « plate-forme technologique » appelée « REGATE » [120]. Dans le projet pour le prochain contrat quadriennal (2011-2014), le GATE donne une place encore accrue à la neuroéconomie. En effet, sa présence dépasse le cadre d’un sous-axe puisqu’elle est présente dans trois thématiques [121] s’inscrivant dans deux sous-axes [122] différents au sein de l’« Axe : Économie du travail et des ressources humaines ». Cet élargissement s’accompagne de coopérations avec l’Institut des Sciences Cognitives de Lyon. Celui-ci est, comme nous l’avons vu plus haut, l’institution la plus productive en neuroéconomie dans l’ensemble des disciplines académiques en France.

43 L’université d’Aix-Marseille est un autre lieu où la neuroéconomie est en passe de se développer [123]. En effet, la présence de quelques acteurs du champ français de la neuroéconomie – Alan Kirman, Olivier Oullier et Pierre Livet – va dans ce sens. La nomination récente (à la rentrée 2010-2011) sur un poste de professeur de philosophie de Sacha Bourgeois-Gironde au sein du Centre d’EPistémologie et Ergologie Comparative (CEPERC) [124], auquel appartient également Pierre Livet, est un argument supplémentaire. De plus, le Groupement de Recherche en Économie Quantitative (GREQAM) et le CEPERC entretiennent des liens depuis plusieurs années sur les questions de philosophie économique se matérialisant par des séminaires conjoints et la publication d’une revue académique, la Revue de Philosophie économique. Recherches et débats en économie, philosophie et sciences sociales. Ces liens, ainsi que l’existence d’un réseau des sciences cognitives – COGNISUD [125] –, pourront être propices au développement de la neuroéconomie à Aix-Marseille.

44 Enfin, la toute nouvelle attribution des LABEX dans le cadre des « investissements d’avenir » laisse penser que la thématique de la neuroéconomie gagne du terrain dans la recherche française. En effet, parmi les projets retenus en SHS, trois LABEX font une place à la neuroéconomie : le LABEX de l’Ecole d’économie de Paris (PSE) [126], le LABEX de l’Université de Toulouse I [127] et le LABEX du Département d’études Cognitives de l’école Normale Supérieure [128].

45 L’enseignement n’existe qu’à travers quelques cours disséminés dans diverses institutions. Dans le domaine « Économie – Gestion », il faut signaler deux formations de niveau Bac +5. En premier lieu, il existe un Master « Économie quantitative », spécialité « Analyse économique des comportements et de la décision » depuis 2005-2006 à l’Université Paris I. Ce master est devenu depuis la rentrée 2010/2011, le Master « Économie et psychologie » sous la responsabilité de Louis Levy-Garboua, professeur de micro-économie. Il s’articule autour d’un approfondissement de l’interface entre l’économie et la psychologie. On y trouve un cours d’« Introduction à la neuroéconomie » dispensé par Sacha Bourgeois-Gironde en Master 1 ainsi qu’un cours de « Neuroéconomie », dispensé par Giorgio Coricelli et Sacha Bourgeois-Gironde, en Master 2. En second lieu, il existe un Master 2 « Économie quantitative » – créé en 2007-2008 –, spécialité « Économie quantitative des comportements et des marchés » à l’Université Lyon II. En lien avec le GATE, l’économie expérimentale y est enseignée – incluant la neuroéconomie – à travers une UE « Behavioral Economics » comportant un enseignement s’intitulant « Cognitive Bias and Neuroeconomics » dispensé par Giorgio Coricelli. [129] Ce diplôme vient compléter l’arsenal de l’Université de Lyon, faisant de celle-ci un pôle central, voire le pôle dominant dans l’enseignement de la neuroéconomie en France. Par ailleurs, un Master recherche en sciences cognitives, le COGMASTER [130] a été créé en 2004, il a pris la suite du DEA de sciences cognitives créé en 1990. La neuroéconomie est présente au sein de ce COGMASTER dans les enseignements suivants : « Introduction aux sciences de la décision » (dispensé par Mikaël Cozic en Master 1), « Sciences de la décision » (dispensé par Philippe Mongin en Master 2) et « Comportements économiques et sociaux : des bases cognitives aux phénomènes collectifs » (dispensé par Jean-Pierre Nadal et Sacha Bourgeois-Gironde en Master 2).

46 Du côté des financements, la principale possibilité d’obtenir des fonds publics pour une recherche en neuroéconomie est d’afficher l’étiquette « santé », ce qui fut le cas pour la seule ANR obtenue pour un projet de neuroéconomie [131]. En revanche, en sciences économiques, il est aujourd’hui difficile d’obtenir des financements publics pour une recherche en neuroéconomie. Cependant, pour les économistes, il semble possible d’obtenir des financements privés de la part d’organismes financiers, d’assureurs ou d’organismes de gestion.

Un début d’institutionnalisation politico-bureaucratique

47 La neuroéconomie, et de façon plus large les neurosciences, est un domaine de plus en plus reconnu sur le plan institutionnel comme l’atteste l’évolution du Centre d’Analyse Stratégique (CAS). Le CAS donne une place aux neurosciences à travers le programme « Neurosciences et politiques publiques » [132] initié en 2009. Ce programme comporte trois thèmes principaux (déterminants de la crise financière, prévention en santé publique, justice et loi) faisant l’objet de publications et manifestations. On retrouve dans l’un des thèmes de ce programme – « Management du Risque et de l’Incertitude à Différentes Échelles » – les neurosciences et en particulier la neuroéconomie. Ce thème est explicitement importé des États-Unis et du Forum Économique mondial de Davos [133]. L’idée développée [134] est de faire appel à la neuroéconomie et à ses applications, ce qui pourrait « apporter un éclairage nouveau sur les causes des dysfonctionnements observés dans la gestion » des crises dans « un univers à haut risque » et ainsi servir d’aide à la décision. Comme à l’accoutumée, le « retard de la France » [135] est invoqué, ici en ce qui concerne l’enseignement et la recherche en neuroéconomie. La principale « Manifestation » organisée par le Centre d’Analyse Stratégique sur cette thématique fut le séminaire « Crise financière : les éclairages de la neuroéconomie et de la finance comportementale » organisé en avril 2009 [136] et la principale publication – « Nouvelles approches de la prévention en santé publique. L’apport des sciences comportementales, cognitives et des neurosciences » – a été publiée en 2010 [137].

48 En conclusion, il convient donc de souligner que, malgré son développement quantitatif encore limité, le sous-champ de la neuroéconomie est d’ores et déjà solidement établi dans le champ scientifique, tant par sa présence dans des revues centrales à forte visibilité que par sa rapide institutionnalisation. Le cas français illustre un processus, certes dominé par les États-Unis, mais déjà très avancé dans de nombreux contextes nationaux. Il illustre aussi l’importance des enjeux épistémologiques et méthodologiques suscités par la disciplinarisation d’un secteur intrinsèquement « pluridisciplinaire » pour la science économique. Celle-ci est en effet caractérisée par une très forte capacité à maintenir à distance d’autres disciplines ou diverses tentatives d’hybridations pluridisciplinaires, notamment lorsqu’elles viennent des sciences sociales (sociologie, histoire, etc.). Or, la neuroéconomie remet en cause les frontières de la science économique, de façons multiples, nouvelles et potentiellement importantes.

49 Elle constitue tout d’abord un domaine « nouveau » qui attire les chercheurs, l’argent et bientôt sans doute les honneurs scientifiques et devrait devenir rapidement incontournable dans la formation. Cette dynamique ne peut rester sans conséquence sur la production de contenus de connaissance, sur leur définition et leur statut [138]. Il faut insister ici sur le caractère innovant, ou en tout cas considéré comme tel, de la neuroéconomie, qui explique pour partie les investissements importants de certains acteurs du champ, véritables « entrepreneurs académiques » prompts à parier sur les potentialités de ce secteur. Cela d’autant plus que les « découvertes » en science économique sont rares, comme l’observait naguère Edmond Malinvaud [139]. Ce potentiel (résultats espérés ou attendus, financements, avancées de la connaissance, reconnaissances scientifiques) expliquerait pour partie la rapidité que nous avons observée dans l’institutionnalisation et la croissance de ce domaine.

50 En second lieu, la neuroéconomie implique pour la science économique un changement plus ou moins fondamental dans la conception même de la démarche scientifique, qui peut la rapprocher un peu plus des sciences de la nature [140]. Elle légitime une approche plus expérimentale, lourde en termes de matériel et de conditions pratiques mais aussi de budget de recherche, et elle modifie le lien entre théorie et données empiriques tel qu’il existait jusque-là. C’est ainsi que l’on peut comprendre l’effervescence épistémologique qui l’accompagne, puisqu’elle implique à terme la reformulation de la frontière entre « sciences dures » et « sciences molles », « sciences humaines » et « sciences de la nature », etc. La montée en puissance de la démarche expérimentale ne commence certes pas avec la neuroéconomie, mais elle pourrait avec elle devenir une nouvelle norme, au minimum concurrente de la conception habituelle, qui combine modèles et « tests » économétriques. Cependant, cette hypothèse nécessiterait pour être étayée d’étudier plus systématiquement les autres sous-champs des sciences humaines et sociales mobilisant les sciences expérimentales et les neurosciences : économie expérimentale, économie comportementale, psychologie expérimentale, neurosociologie, « neurosciences sociales »… Cela permettrait de saisir l’émergence de ce type d’approche en science sociale dans un contexte plus large. Pour beaucoup d’auteurs, ce processus ne remet nullement en cause le primat de la modélisation en économie : de manière générale, les acteurs de la neuroéconomie défendent l’idée d’une science économique comme science modélisatrice. Selon Colin F. Camerer, la neuroéconomie peut être utile à la modélisation économique de trois manières, dans la mesure où elle renforce de manière empirique la modélisation mathématique des comportements. Il s’agit de rendre opérationnelles les théories du choix rationnel, indiquer quelles théories comportementales (et leurs modèles mathématiques) sont plus adaptées que d’autres, ou permettre d’inclure des variables pour le moment ignorées ou dépréciées dans leur importance [141]. Selon Andrew Caplin et Mark Dean [142], la science économique et les neurosciences sont des sciences modélisatrices, mais elles diffèrent par l’utilisation de l’axiomatisation des modèles que les économistes utilisent pleinement, contrairement aux neuroscientifiques. Axiomatisation que la neuroéconomie doit utiliser afin qu’elle se développe pleinement. Cette axiomatisation repose sur un tâtonnement entre approche théorique et approche empirique. L’approche empirique repose sur l’expérimentation en vue de se rapprocher de la réalité, que l’approche théorique n’arrive pas complètement à cerner, permettant ainsi de tester empiriquement la validité des modèles. De plus, l’axiomatisation nécessite d’importer des données non standard à l’économie, y compris des données neuroscientifiques. C’est donc bien un nouvel espace de controverses qui s’ouvre avec la neuroéconomie.

51 Troisième élément, la neuroéconomie peut impliquer une contestation des fondements de la théorie de l’action rationnelle et de l’homo œconomicus, par l’intégration d’éléments sur les processus cognitifs réels qui caractérisent les agents économiques, comme les facteurs émotifs ou corporels, partiellement « automatiques » et « inconscients », de l’action. Ce point est cependant un objet central de la controverse en cours, qui met en jeu le caractère plus ou moins « orthodoxe » ou « hétérodoxe », « conformiste » ou « subversif » des conclusions empiriques, voire théoriques, issues des expérimentations neuroscientifiques en économie. Les deux lauréats du prix de la Banque de Suède en sciences économiques en mémoire d’Alfred Nobel (communément appelé Prix Nobel d’économie) de 2002, Vernon Smith [143] et Daniel Kahneman [144], soutiennent que la neuroéconomie va changer fondamentalement notre manière de penser la prise de décision, les choix et comportements économiques. La neuroéconomie devrait ainsi permettre de complexifier les modèles économiques standard [145] ainsi que de proposer de nouveaux concepts et de nouvelles théories [146].

52 Quatrièmement, on peut s’interroger sur ce que signifie la « naturalisation de l’économie » et des sciences sociales impliquée par ce type de nouveauté intellectuelle qu’est la neuroéconomie. La « naturalisation » des sciences sociales n’est certes pas nouvelle, mais elle connaît sans doute une amplification avec la neuroéconomie et les neurosciences sociales en général : l’une des questions posées étant relative à ce qu’il faut entendre ici par « nature » [147], et dans quelle mesure « naturalisation » implique ou n’implique pas « réductionnisme », en particulier génétique. Ce retour à la naturalisation en économie peut aussi être interprété comme une manifestation de la difficulté à innover en science économique. Selon certains, l’économie, tout comme les neurosciences et la psychologie, est une science naturelle, similaire conceptuellement à la physique ou la biologie, descriptive et positive. Le modèle est celui de la physique quantique que l’économie pourra sans doute atteindre un jour grâce à la neuroéconomie [148].

53 Enfin, on peut se poser la question du devenir de la neuroéconomie, qui risque d’être dépendant du caractère subversif de ses « découvertes ». Si elles sont trop subversives, ne risquent-elles pas de ne pas pouvoir se développer au sein de la science économique dans la mesure où l’organisation de la discipline (avec un « paradigme » dominant) ne permet pas à des sous-champs contestant ce paradigme d’émerger en son sein, comme le montre l’exemple de l’éconophysique [149] ? Si ces découvertes, tout en étant subversives, ne remettent pas en cause fondamentalement le paradigme dominant, elle pourrait aussi se développer pleinement au sein de la science économique mais en étant réinterprétée dans le cadre des hypothèses du modèle théorique qui prévaut actuellement.

Méthodologie

54 Afin de rendre compte de la place de la neuroéconomie dans le champ scientifique, nous avons choisi de travailler principalement sur et à partir des revues académiques. Ce travail sur les revues a été complété par des entretiens avec des acteurs de la neuroéconomie du champ scientifique français.

55 De manière générale, prendre pour objet les revues vise à une meilleure compréhension des caractéristiques d’un champ scientifique disciplinaire. En effet, « les revues scientifiques qui, par la sélection qu’elles opèrent en fonction des critères dominants, consacrent les productions conformes aux principes de la science officielle, offrant ainsi continûment l’exemple de ce qui mérite le nom de science, et exercent une censure de fait sur les productions hérétiques soit en les rejetant expressément, soit en décourageant purement l’intention de publication par la définition du publiable qu’elles proposent ». [150] Comme le rappelle Robert Boure, l’étude des revues est « opératoire » pour comprendre le « fonctionnement » des disciplines dans leurs dimensions scientifiques, institutionnelles et humaines. Dans ce cadre, « notre unité d’observation de base est l’article. Dans la revue, les articles constituent la substance la plus importante, ce sont eux qui sont codifiés, cités, résumés. L’article possède deux caractéristiques : objet et sujet. L’article, en effet, a un objet, qui renvoie à un ou plusieurs thèmes ; quant au sujet de l’article, c’est l’auteur, à une ou plusieurs voix. Tous les articles sont signés ; […]. Doublement signés même, puisque le nom de l’auteur est complété, dans la plupart des cas, et de plus en plus fréquemment, par le nom d’une institution, tandis que la fonction de l’auteur dans l’institution est de moins en moins indiquée » [151].

56 Dans le champ de la science économique, lorsqu’il s’agit de rendre compte des thèmes traités dans une revue, les auteurs font appels à la codification du JEL[152]. Cette pratique permet une certaine homogénéité, facilitant ainsi les comparaisons entre revues, et permet également un gain de temps pour l’étude de certaines revues (plus de 800 références sont codifiées par le JEL[153], dont une vingtaine sont des revues académiques françaises et une trentaine sont francophones).

57 À partir de la base électronique bibliographique Econlit[154], un corpus de tous les articles traitant explicitement de neuroéconomie publiés jusqu’en décembre 2010 a été construit débouchant sur une base de 123 articles [155]. Ont été retenus comme article traitant explicitement de neuroéconomie ceux où figure ce terme (ou proche : neuroeconomic, neuroeconomy) dans l’un des trois éléments suivant : Titre, Résumé et Code du JEL.

58 Par ailleurs, pour caractériser les revues du corpus extrait d’Econlit ayant publié les articles relevés, ont été utilisés les classements des revues effectué par le CNRS et l’AERES [156].

59 Afin de rendre compte de l’espace occupé par la neuroéconomie dans l’ensemble du champ scientifique, nous avons choisi d’utiliser la base électronique bibliographique Web of Science qui fait partie d’un ensemble de bases de l’ISI (définition) appelé Web of Knowledge comprenant : le « Science Citation Index Expanded » qui référence plus de 6 000 périodiques en science, le « Social Sciences Citation Index » qui référence près de 2 000 périodiques en sciences sociales et l’« Arts & Humanities Citation Index » qui référence plus de 1 000 périodiques en art et en sciences humaines. À partir de cette base électronique bibliographique, un corpus de tous les articles traitant explicitement de neuroéconomie publiés jusqu’en décembre 2010 a été construit, débouchant sur une base de 200 articles (dont 43 sont référencés également dans Econlit). Ont été retenus comme articles traitant explicitement de neuroéconomie ceux où figurent les termes « neuroeconomics », « neuroeconomic » ou « neuroeconomy » dans l’un des trois éléments suivant : Titre, Résumé et Mots-clés.

60 Lorsque l’information était disponible, les institutions d’appartenance des producteurs d’articles traitant de neuroéconomie ont été relevées puis regroupées. Ce sont les noms indiqués des centres de recherche, départements, facultés, établissements, etc, qui ont été relevés. Ces noms sont les suivants : Institutions et établissements se rattachant à l’histoire, la sociologie, l’anthropologie, ethologie, philosophie, droit ; Institutions sur le cerveau et le comportement ; Instituons et établissements de médecine, de pharmacie et de santé ; Institutions et établissements d’économie, de gestion et de finance ; Institutions et établissements de neurosciences, de neuroimage, de neurobiologie ; Institutions et établissements de psychologie ; Institutions et établissements de sciences cognitives, de sciences du comportement et sciences expérimentales ; Institutions et établissements de psychiatrie ; Centres de recherche de neuroéconomie ; Institutions et établissements sur la technologie, les systèmes d’information et l’informatique ; Institutions de biologie, de biochimie, de mathématiques, statistiques, de chimie et de physique.

Notes

  • [1]
    Voir par exemple les articles de la revue Cerveau & Psycho de janvier-février 2010, ou encore le dossier du Monde Economie. Paru le mardi 15 janvier 2008 : « Neuroéconomie : les émotions dictent-elles nos décisions ? ».
  • [2]
    Voir « Quelques exemples d’expériences en neuroéconomie ».
  • [3]
    L’optique adoptée ici tente de concilier une approche transnationale avec une approche nationale d’un domaine de recherche particulier. Sur ces concepts voir Heilbron, 2008 et Heilbron, Guilhot et Jeanpierre, 2009.
  • [4]
    Voir « Méthodologie » en fin d’article.
  • [5]
    McCabe, 2008, 349. Article traduit dans McCabe, 2009.
  • [6]
    Ils eurent tous les deux pour directeur C. Randy Gallistel.
  • [7]
    Sanfey, Rilling, Aronson, Nystrom et Cohen, 2003.
  • [8]
    Selon Christian Schmidt, les règles du « jeu de l’ultimatum » sont simples. « Une somme d’un montant monétaire connu est mise à la disposition du jeu. Le premier joueur choisit une règle de partage de cette somme entre lui et l’autre joueur qu’il propose à ce dernier. Le deuxième joueur peut seulement l’accepter ou la refuser. Dans le premier cas, le partage sera effectué selon la règle proposée, dans le second, la transaction ne se fera pas et aucun des deux joueurs ne disposera de cette somme. » Schmidt, 2009, 59. L’utilisation courante du jeu de l’ultimatum chez les neuroéconomistes s’explique notamment par le décalage observé entre la prédiction du modèle de calcul de maximisation rationnel et les études expérimentales.
  • [9]
    En effet, selon l’approche théorique dominante, le premier joueur devrait « proposer un partage largement à son avantage, sachant que le second aura toujours intérêt à l’accepter […]. » Schmidt, 2010, 65. Or, « Les résultats obtenus sont très largement convergents, stables et statistiquement robustes. Plus des deux tiers des sujets jouant en premier font une proposition proche d’un partage à la moitié, et lorsque cette proposition s’éloigne trop de cette règle implicite de partage, celui qui joue en second la refuse dans une très large majorité des cas. » Schmidt, 2010, 65.
  • [10]
    Il faut noter qu’il persiste de nombreux problèmes sur l’interprétation des zones activées et repérées par l’appareillage technologique lors de l’expérience.
  • [11]
    Motionless Electromagnetic Generator.
  • [12]
    Entretien avec Sacha Bourgeois-Gironde du 12 janvier 2011.
  • [13]
    Ibid.
  • [14]
    Ibid.
  • [15]
    À titre de comparaison et en se référant au travail de Jean Mirucki, l’économie industrielle serait traitée dans 16155 articles de 1991-1998 dans les revues référencées dans la base Econlit (Mirucki, 2001, 458).
  • [16]
    Pour plus de détails chiffrés sur notre étude voir notre site : http://www.u-picardie.fr/labo/curapp/spip.php?rubrique61. Voir également « Méthodologie » en fin d’article.
  • [17]
    La base Econlit comporte plus de 800 revues académiques d’économie et de gestion. Seules 5% des revues académiques de science économique et de sciences de gestion référencées dans cette base ont donc publié au moins un article traitant de neuroéconomie, ce qui donne une idée du faible périmètre de la neuroéconomie.
  • [18]
    Les revues « d’excellence » sont celles qui sont classées en A+ ou A par l’AERES, Economics and Philosophy est classée « A+ » et Journal of Economic Methodology « A ».
  • [19]
    Selon le classement de la section 37 du CNRS en 2004, ces deux revues figurent dans la catégorie « Épistémologie – Histoire de la pensée – Histoire économique ».
  • [20]
    Cet argument a été développé par Christian Schmidt, lors d’un entretien (24 mars 2011).
  • [21]
    Voir « Méthodologie ».
  • [22]
    En effet, sur la période 2002-2010, près de 20000 articles traitant d’économie sont référencés dans la base Web of science. A titre d’exemple, l’économie internationale est un sujet présent dans 1296 articles de cette base de 2002 à 2010 et l’économie financière dans 1362 articles. Ce chiffre a été obtenu en cherchant les articles sur la période 2002-2011 ayant pour sujet (« topics ») l’économie.
  • [23]
    Notamment son Département de science cognitive et comportementale.
  • [24]
    Notamment son Département de Science comportementale, où travaille Taiki Takahashi.
  • [25]
    Notamment sa Faculté de sciences humaines et sociales, où travaille Colin F. Camerer.
  • [26]
    Université où travaille Paul Glimcher.
  • [27]
    Elle est la revue de la National Academy of Science (NAS) des états-Unis et possédait en 2009 un Impact factor qui s’élevait à 9,432.
  • [28]
    Colin F. Camerer possède une entrée dans le Who’s who in Economics ?, sur laquelle repose en partie cet encadré. Il s’appuie également sur les informations recueillies sur sa page personnelle (http://www.hss.caltech.edu/~camerer/camerer.html).
  • [29]
    Après son PhD et avant de devenir Professeur à Chicago, Colin F. Camerer est devenu Professeur Assistant de politique et environnement à l’Université de Nortwestern (1981 à 1983), puis Professeur associé à l’Université de Pennsylvanie (à la Wharton School) de 1983 à 1991 (en science de la décision ainsi qu’en management de 1989 à 1991)..
  • [30]
    On peut également noter qu’il a été Visiting Assistant Professor of Business à CALTECH (Hiver-Eté 1987), Visiting Scholar à la Russell Sage Foundation (1991-92) et Visiting Fellow du Center for Advanced Study in Behavioral Sciences de l’Université de Stanford (1997-98)..
  • [31]
    Tenhouten, 1991.
  • [32]
    Ethnoneurologie se définissant comme l’étude philosophique et scientifique des interrelations entre : a) le système nerveux central ; b) les niveaux mentaux de pensée, de perception, d’émotion… ; c) les fonctions, les structures, les arrangements et processus dans le monde social, politique, économique et culturel qui sont en lien avec les pratiques et les positions des gens.
  • [33]
    Tenhouten, 1991, 402.
  • [34]
    Tenhouten, 1991, 403.
  • [35]
    « Neuroeconomics » est le terme utilisé par Waren D. Tenhouten (Tenhouten, 1991, 391-392).
  • [36]
    Il cite comme étant des travaux de neuroéconomie les références suivantes : Tversky et Kahneman, 1983 ; Johnson-Laird, 1983 ; Galin et Omstein, 1972 ; Dumas et Morgan, 1975 ; Doktor et Bloom, 1977 ; Lewis, Rimland et Calloway, 1977.
  • [37]
    Smith, Dickhaut, McCabe et Pardo, 2002, 711-718.
  • [38]
    Ils citent comme texte important : Breiter, Aharon, Kahneman, Dale et Shizgal, 2001.
  • [39]
    Sanfey, Rilling, Aronson, Nystrom et Cohen, 2003, 1757-1758.
  • [40]
    Dans cette optique, ils identifient trois textes importants : Camerer et Loewenstein, 2002 ; Loewenstein et Lerner, 2003 ; McCabe, Houser, Ryan, Smith et Trouard, 2001.
  • [41]
    Glimcher, Camerer, Fehr et Poldrack, 2009, 8-10.
  • [42]
    Shizgal et Conover, 1996.
  • [43]
    Platt et Glimcher, 1999.
  • [44]
    Breiter, Aharon, Kahneman, Dale et Shizgal, 2001.
  • [45]
    McCabe, Houser, Ryan, Smith et Trouard, 2001. À noter que selon les auteurs du dossier « Neuroéconomie : les émotions dictent-elles nos décisions ? » publié dans Le Monde Economie le mardi 15 janvier 2008, le terme neuroéconomie se trouve aussi « sous la plume de Kevin McCabe, professeur à la GeorgeMason University. Celui-ci invente le mot neuroéconomie pour convaincre l’agence gouvernementale de la recherche, National Science Foundation, de lui accorder une subvention ». On trouve également dans ce dossier l’opinion de Paul Zak (directeur du Center for Neuroeconomics Studies à la Claremont Graduate University en Californie) pour qui le premier vrai article de neuroéconomie est celui de « Paul Glimcher et Michael Pratt publient dans la revue Nature (Platt et Glimcher, 1999) leur étude sur le comportement des singes lié aux récompenses espérées » en 1999. (On retrouve le même passage sur le blog consacré à la neuroéconomie que tient Olivier Oullier, voir http://neuro-economie.blogspot.com/2008_11_01_archive.html.)
  • [46]
    On remarque que cet accroissement se produit juste après la création du code D87 (neuroéconomie) par le JEL (voir http://www.aeaweb.org/jel/guide/jel_sub.php?class=D8).
  • [47]
    Heilbron, Guilhot et Jeanpierre, 2009, 136.
  • [48]
    Le pays d’affiliation est celui de l’institution d’appartenance de l’auteur. Cela peut donc être différent de la nationalité de celui-ci.
  • [49]
    À titre de point de repère, la production scientifique des Etats-Unis dans la production scientifique mondiale (hors SHS) était en 2008 de 24,4%, celle du Japon de 6,8%, de l’Allemagne 5,7%, de la Grande-Bretagne 5,7%, de la France 4,2%. Cf. OST, 2010, 403. On a donc bien un cas de domination américaine (étatsunienne) particulièrement prononcé. Il faudrait cependant comparer la domination américaine en neuroéconomie à celle que l’on observe dans l’ensemble du champ de la science économique mondiale. Voir par exemple pour les « Nobel » de science économique : Lebaron, 2006.
  • [50]
    En effet puisque cette nation n’a produit aucun article référencé de neuroéconomie dans les revues de science économique.
  • [51]
    Dans le domaine de la neuroéconomie, la science économique semble moins internationalisée pour ce qui concerne les producteurs d’articles. La diversité plus importante des nations productrices de neuroéconomie dans le champ scientifique en général s’accompagne toutefois d’une moins grande diversité des langues utilisées. En effet, la langue quasi exclusive est l’anglais avec 96% des articles du corpus (Web of science) et seules quatre autres langues sont utilisées. A contrario, la diversité des langues utilisées en science économique (Econlit) est plus importante : la langue principale de publication des articles est bien évidemment l’anglais (87% du corpus), mais 5 autres langues ont été utilisées, parmi lesquelles le français occupe une place non marginale avec pratiquement 10% du corpus. Il faudrait analyser plus systématiquement les sources de ces deux bases afin de mieux se rendre compte de la dépendance de nos résultats à ces sources et ainsi de mieux appréhender les spécificités de la neuroéconomie quant à ces caractéristiques. Pour des réflexions et données sur la répartition internationale de la production scientifique en SHS. Voir Unesco, 2010.
  • [52]
    Ce travail bibliométrique plus poussé sur l’impact des articles reste à faire.
  • [53]
    Si l’on se réfère à ce classement de l’AERES établit en 2009, un tiers de la production d’article a été publiée dans des revues de rang A+ et 15% dans des revues de rang A.
  • [54]
    Si l’on se réfère au classement de la section 37 du CNRS de 2004. Ces articles sont au nombre de 90 (soit 73% du total du corpus construit à partir de la base Econlit).
  • [55]
    La centralité de l’économie théorique à fort contenu mathématique est notamment discutée par Jean-Yves Caro (Caro, 1983).
  • [56]
    Cette revue a publié cinq articles en anglais, soit tous les articles en anglais publiés dans les revues académiques d’économie en France.
  • [57]
    Parmi ces 10 auteurs, on dénombre : 2 femmes, 3 doctorants (dont deux issus des neurosciences), 3 maîtres de conférences (dont un philosophe et un neuroscientifique), 1 maître de conférence habilité à diriger des recherches ainsi que 4 professeurs.
  • [58]
    Il y a seulement deux articles dans ce cas.
  • [59]
    15 articles ont été publiés par des revues académiques d’économie françaises et 2 articles ont été écrits par des auteurs rattachés institutionnellement à la France mais publiés dans des revues non françaises.
  • [60]
    En particulier son Centre de Neuroscience Cognitive (CNC) et le Laboratoire sur le Langage, le Cerveau et la Cognition (L2C2). Giorgio Coricelli, économiste, a été recruté au sein de l’Institut de sciences cognitives en 2004.
  • [61]
    « Basculant dans la modernité « mondiale » juste après les événements de 1968, les économistes français se rapprochent du modèle américain en moins d’une dizaine d’années. Ce rapprochement s’effectue de deux manières : inflexion du contenu des revues généralistes vers les débats de la science « normale » (celle ayant cours outre-Atlantique) et création de revues spécialisées plus formalisatrices surtout consacrées au paradigme néo-classique. » Marco, 1995, 83-85.
  • [62]
    Heilbron, 2006, 10.
  • [63]
    Gingras, 1991, 43-44 et Gingras et Schinckus, 2011.
  • [64]
    Gingras, 1991, 43-44.
  • [65]
    Tout un travail sur l’institutionnalisation de l’économie expérimentale et de l’économie comportementale reste à faire.
  • [66]
    Voir Schinckus, 2009.
  • [67]
    Andler, 2009.
  • [68]
    Une nouvelle approche, celle des neurosciences cognitives, a émergé vers la fin des années 1980. Voir Andler, 2009.
  • [69]
    Glimcher, Camerer, Fehr, Poldrack, 2009, 7.
  • [70]
    La Russell Sage Foundation est l’une des plus anciennes fondations américaine, elle a été créée en 1907 en vue de l’amélioration des conditions sociales et des conditions de vie aux États-Unis.
  • [71]
    Princeton workshop on Neural Economics (voir http://www.princeton.edu/chw/lectures-conferences/conferences/conf-12-2000/agenda/). À noter également que la session 2005-2006 « Psychology and Economics » de l’Institut for Advance Study de Princeton a accordé une place importante à la neuroéconomie.
  • [72]
    Glimcher, Camerer, Fehr et Poldrack, 2009, 7-8.
  • [73]
    « Ce congrès de trois jours a marqué un tournant clair où un groupe d’économistes, de psychologues, et de neurobiologistes ont commencé à s’identifier comme des neuroéconomistes et à dessiner explicitement la convergence entre les disciplines. Cette rencontre a conduit à un congrès d’inscription libre l’année suivante sur l’île de Kiawah, organisé par Read Montague de la Bayor College of Medicine. La décision a été prise à ce congrès, par presque toutes les figures centrales de cette discipline émergente, de former une société et de faire de cette rencontre récurrente un événement annuel qui servirait de point de convergence pour la neuroéconomie au niveau international. Durant cette rencontre, Paul Glimcher a été élu Président de la Société. La Société a ensuite tenu son premier congrès officiel en 2005 sur l’île de Kiawah. » Glimcher, Camerer, Fehr, Poldrack, 2009, 8.
  • [74]
  • [75]
    On remarque également que dans de nombreux articles les neuroéconomistes tentent de renforcer leur légitimité dans le champ de la science économique en citant des auteurs importants de la discipline (Hayek, Jevons, Veblen, Edgeworth).
  • [76]
    On retrouve les mêmes passages sur le blog consacré à la neuroéconomie que tient Olivier Oullier (http://neuro-economie.blogspot.com/2008_11_01_archive.html) et dans le « Dossier. Neuroéconomie : les émotions dictent-elles nos décisions ? » publié par Le Monde Economie le mardi 15 janvier 2008.
  • [77]
  • [78]
  • [79]
    Cette association a créé une revue académique publiant des recherches originales portant sur l’application des théories psychologiques ou des méthodes neuroscientifiques pour les entreprises et l’économie : le Journal of Neuroscience, Psychology, and Economics (JNPE), revue officielle de l’American Psychological Association (APA) et dont le premier numéro a été publié en 2008, à ce jour six numéros sont parus. Voir http://neuroeconomics-journal.com/front_content.php?idcat=4
  • [80]
    Cette association, basée à Baltimore, s’est donnée pour mission de favoriser la diffusion des connaissances scientifiques dans les domaines de la neuroscience appliquée, avec un accent particulier mis sur la neuroéconomie et le neuromarketing. Pour poursuivre cette mission, l’association met à jour un index des programmes en cours, des institutions et des personnes qui effectuent des recherches dans ces domaines. De plus, l’organisation est en voie de publier deux revues académiques bi-annuelles et distribuées par voie électronique, le Journal of Neuroeconomics et le Journal of Neuromarketing. Parmi les revues académiques de neuroéconomie, on peut également noter l’existence du Journal of Neuroscience and Neuroeconomics. Toutes ces nouvelles revues centrées sur la neuroéconomie ne figurent ni dans Econlit ni dans Web of science. Voir http://www.aanenm.org/
  • [81]
    Benjamin Pelloux, Jean-Louis Rullière et Frans Van Winden (Pelloux, Rullière et Van Winden, 2009) citent huit articles programmatiques et de synthèse : Zak, 2004 ; Camerer, Loewenstein et Prelec, 2005 ; Kenning et Plassmann, 2005 ; Rustichini, 2005 ; Montague, 2007 ; Camerer, 2008 ; Loewenstein, Rick et Cohen, 2008.
  • [82]
    Benjamin Pelloux, Jean-Louis rullière et Frans Van Winden (Pelloux, Rullière, Van Winden, 2009) citent trois ouvrages de référence : Glimcher, 2003 ; Caplin et Schotter, 2008 ; Politser, 2008.
  • [83]
    Glimcher, Camerer, Fehr et Poldrack, 2009.
  • [84]
    Glimecher, 2003.
  • [85]
    Camerer, Loewenstein, et Prelec, 2005.
  • [86]
  • [87]
    Le CNS emploie 14 chercheurs et affiche un budget de fonctionnement annuel de 800 000 dollars selon Le Monde Economie du 15 janvier 2008.
  • [88]
    Tania Singer en a été la première titulaire et ce jusqu’en 2010 pour la direction du Département de Neuroscience sociale du Max Planck Institute for Human Cognitive and Brain Sciences.
  • [89]
    C’est à cette université qu’aurait été créé le premier programme doctoral par Paul J. Zak (Voir http://www.universities.com/edu/Doctors_degrees_in_Economics_at_Claremont_Graduate_University.html).
  • [90]
    Bourdieu, 2001, 69.
  • [91]
    Voir encadré « Christian Schmidt (1938-) ».
  • [92]
    Selon Sacha Bourgeois-Gironde, « la neuroéconomie, pour être légitimité d’un point de vue épistémologique, suppose un véritable déplacement par rapport à la conception traditionnelle de ce qu’est l’économie […], finalement elle est assez proche de certaines positions hétérodoxes en économie. Finalement la neuroéconomie […] pourrait être intégrée par des courants hétérodoxes en fait, et donc voilà j’essaye depuis quelques temps de contacter quelqu’un comme André Orléan, par exemple, qui a pris un petit peu le devant de la scène en France sur les associations d’économistes hétérodoxes. […] Alors voilà, […], donc finalement il faut vraiment se déplacer du cœur orthodoxe classique, c’est une façon de faire disons, c’est une façon de poser son objet neuroéconomique dans le champ de la discipline économique de faire ça. » Entretien avec Sacha Bourgeois-Gironde du 12 janvier 2011.
  • [93]
    Tous deux ont pris contact avec André Orléan. André Orléan est économiste directeur de recherche au CNRS. De part ses travaux, ses prises de positions (il est notamment l’un des auteurs du Manifeste des économistes atterrés) et sa présidence de l’AFEP, André Orléan fait figure de chef de file de l’hétérodoxie économique en France. L’AFEP a notamment pour but de mettre au premier plan une conception pluraliste de l’économie ainsi qu’une ouverture intellectuelle, cherchant ainsi à contester l’hégémonie de l’économie néo-classique (voir http://www.assoeconomiepolitique.org).
  • [94]
    Voir Casella, Thoron et Trannoy, 2007, 269-270.
  • [95]
    Colin Camerer, Ernst Fehr, David Laibson, George Loewenstein, Drazen Prelec et Antonio Rangel ont fait partie des intervenants à cette manifestation. Et tout comme aux Etats-Unis cette rencontre a été financée par la Fondation Russel Sage.
  • [96]
    Il est neuroscientifique et Professeur honoraire du Collège de France et était titulaire de la Chaire de Communications cellulaires (1976-2006). Selon Christian Schmidt, « Jean-Pierre Changeux a été extraordinairement actif puisqu’il est arrivé à mettre un moment trois neuros : lui-même, Berthoz [Professeur honoraire du Collège de France qui occupait la Chaire de Physiologie de la perception et de l’action (1993-2010)] et Dehaene qui est très actif et qui est intéressé. »
  • [97]
    C’est la chaire de psychologie cognitive expérimentale – qu’occupe Stanislas Dehaene – qui fut le principal moteur de l’organisation de ce symposium international. En effet, Roger Guesnerie – titulaire de la Chaire de Théorie économique et organisation sociale – n’est pas intéressé par la neuroéconomie, il fait partie des sceptiques selon Christian Schmidt. Il a été un peu forcé à organiser ce symposium et selon Christian Schmidt, « Le Collège ne peut pas s’appuyer, tant qu’il est là, sur les économistes. » Entretien réalisé avec Christian Schmidt le 14 mars 2011.
  • [98]
    Louis Lévy-Garboua est également le créateur du Master Economie et psychologie (c.f. infra) et coorganisateur du séminaire Economie et Psychologie de Paris School of Economics (PSE) depuis 2005.
  • [99]
    On peut également mentionner le troisième congrès de la Société de philosophie des Sciences (SPS) « Sciences et décision », qui s’est tenue du 12 au 14 novembre 2009 à l’Ecole Normale Supérieure et à l’Université de Paris I, où la quatrième conférence plénière – dispensée par Bernard Walliser – a explicitement traité de la neuroéconomie. Ainsi que lors du « First Symposium «The Biology of Decision Making» » qui s’est tenu à Bordeaux en 2009, la neuroéconomie y fut abordée lors des présentations de Matthias Pessiglione, Giorgio Coricelli et Sacha Bourgeois-Gironde. Ou bien encore lors du Forum des Sciences Cognitives – qui « vise à encourager la coopération entre différents acteurs du domaine des science et des technologies de la cognition : étudiants, diplômés de grandes écoles ou d’universités, des jeunes chercheurs, des entreprises, des laboratoires de recherche et des formations » – de mars 2010 où une table ronde « Neuro-économie – Comportement consommateur » eu lieu avec la présence de Frédéric Basso, Olivier Oullier, Hilke Plasmann et Bernard Walliser.
  • [100]
    Ce travail a été effectué principalement sur la base de deux entretiens menés avec Christian Schmidt (14 et 24 mars 2011) dont sont issus les citations extraites ici, ainsi qu’à l’aide de recherches sur Internet et de quelques lectures.
  • [101]
    Les problèmes de l’interprétation en économie théorique – Essai d’épistémologie économique, sous la direction de Jean Stoetzel, 1978 (Thèse de lettre à Paris V et Doctorat d’Etat à Paris V de psychologie). Thèse dont est issue, en partie, un ouvrage, La sémantique économique en question (Schmidt, 1985).
  • [102]
    À noter qu’à la fin des années 1970 en France, les préoccupations épistémologiques en sciences économiques sont beaucoup plus présentes qu’au début du xxie siècle. Elles s’inscrivaient alors souvent dans une perspective critique à laquelle souscrit de manière modérée Christian Schmidt dans l’ensemble de ses travaux, y compris en neuroéconomie, comme peut l’attester sa signature au Manifeste des économistes atterrés.
  • [103]
    Ce travail a notamment débouché sur la publication d’un ouvrage, Penser la guerre, penser l’économie (Schmidt, 1991).
  • [104]
    Au sein des controverses théoriques de la science économique, Christian Schmidt a fait le choix de la neuroéconomie dans la mesure où selon lui, elle est la seule à pouvoir éclairer la micro-économie.
  • [105]
    Jean-Pierre Changeux lui a proposé de faire « quelque chose » sur la neuroéconomie, ce qui a abouti à l’organisation d’un séminaire de neuroéconomie au Collège de France (2005-2006).
  • [106]
    Schmidt, 2010.
  • [107]
    Le caractère nouveau et innovant de la neuroéconomie a également attiré Christian Schmidt : « Et en plus c’est stimulant pour un vieux comme moi parce que j’ai l’impression de redevenir étudiant, on est dans une discipline qui se contredit, avance, etc, donc je trouve ça extrêmement stimulant et je me suis lancé là-dedans ».
  • [108]
    En effet, Christian Schmidt effectue également des travaux sur l’addiction et collabore dans ce cadre avec le centre médical de Marmottan par l’intermédiaire du spécialiste de l’addictologie sans produits, Marc Valleur. Il a notamment publié un article dans la revue Psychotrope (Schmidt, 2007).
  • [109]
    Bourgeois-Gironde, 2008.
  • [110]
    Schmidt, 2010.
  • [111]
    Création au Journal officiel le 21 août 2010. La première rencontre organisée par cette association fut une journée d’étude qui a eu lieu le 15 juin 2011 à la Maison des Sciences Economiques (MSE) de Paris et qui fut organisée en collaboration avec l’Association de Neurologie Comportementale fondée et dirigée par Bruno Dubois où il y eut deux interventions centrées sur la neurologie comportementale et deux autres sur la neuroéconomie.
  • [112]
    Entretien avec Christian Schmidt du 24 mars 2011.
  • [113]
    Ibid.
  • [114]
    Ibid.
  • [115]
    Source : http://www.institutnicod.org/ (site consulté début 2011).
  • [116]
    Il y a également l’Institut d’Histoire de Philosophie des Sciences et des Techniques (IHPST) qui possède une équipe, créé en septembre 2007, « Décision, rationalité, Interaction » dont certains membres s’intéressent à la neuroéconomie comme l’atteste le colloque « Théorie de la décision et neuro-économie » organisé le 13 février 2009.
  • [117]
    Cette UMR possède deux tutelles universitaires en plus de celle du CNRS, l’Ecole Normale Supérieure (rattaché au département de philosophie et au département d’études cognitives) et l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales. Il s’agit d’un laboratoire de sciences cognitives, dirigé par François Récanati – dont la philosophie analytique est la discipline d’origine, mais qui a étendu ses recherches à la linguistique et aux sciences sociales – il est composé en 2010-2011 d’environ 80 membres.
  • [118]
    Ce sous-thème possède trois axes principaux, des collaborations et des financements spécifiques :
    • interprétation et modélisation des comportements présentant des déviations apparentes par rapport aux hypothèses classiques sur la rationalité économique ;
    • l’exploration de l’interface entre théorie des jeux expérimentale et questionnements cliniques et neurobiologiques dans le but d’éclairer les bases évolutionnaires de l’émergence des comportements et des environnements économiques modernes ;
    • l’évaluation de l’impact agrégé des biais cognitifs affectant les décisions économiques via la réalisation de questionnaires et la construction d’indicateurs éco-cognitifs.
  • [119]
    Cette UMR est une jeune unité issue de la fusion en 1996 de trois équipes de recherche du CNRS et/ ou de l’Université Lyon 2. Elle poursuit une vocation d’équipe généraliste en économie appliquée, couvrant des champs aussi variés que l’économie du travail, l’économie de la santé ou l’économie monétaire, tout en cherchant en permanence à faire fructifier ses points forts que sont l’économétrie appliquée et l’économie expérimentale.
  • [120]
    « La neuro-économie est un nouveau domaine de recherche qui combine l’économie expérimentale avec une analyse des processus cognitifs mis en œuvre par les sujets. Ces processus sont étudiés en particulier à partir de données physiologiques recueillies à l’aide d’électrodes durant les expériences (Skin Conductance Responses, ECG). Le GATE est le seul laboratoire au plan international à s’être doté d’un équipement permettant de prendre des mesures physiologiques sur 12 personnes simultanément. » Voir GROUPE D’ANALYSE ET DE THEORIE ECONOMIQUE – UMR 5824, 2009, 57.
  • [121]
    Comportement économique et obésité pédiatrique (B. Harbaugh, J.-L. Rullière), Action et Cognition : « l’objectivité » de la neuroéconomie (B. Pelloux, J.-L. Rullière, F. van Winden) et évaluation neurale des bonnes et mauvaises actions. (L. Butera, J.-C. Dreher, E. Métereau, M. C. Villeval).
  • [122]
    Le « Sous-axe : Immigration et ressources humaines » et le « Sous-axe : Ressources humaines, émotions, physioéconomie et neuroéconomie ».
  • [123]
    Deux financements ont déjà été obtenu au sein de cette université afin de mener des recherches en neuroéconomie : une ANR et un financement régional.
  • [124]
    Ce centre de recherche étudie « à la fois l’épistémologie des sciences mathématiques, physiques, biologiques et des sciences de l’homme et de la société ». Dans ce cadre, il pratique de manière privilégiée une analyse comparative « sur les rapports entre mathématiques et physique, mais également sur l’économie (nous sommes la seule équipe en philosophie qui ait développé la philosophie et l’épistémologie de l’économie), les sciences sociales et, tout dernièrement, la biologie ». (Voir http://sites.univ-provence.fr/ newceperc/spip.php?article595 ; consulté début 2011).
  • [125]
    COGNISUD est un réseau régional sud-est des sciences cognitives dont les activités sont coordonnées avec les autres réseaux régionaux. Il regroupe actuellement 22 laboratoires et équipes de recherche qui, pour nombre d’entre-eux, se situent à l’Université d’Aix-Marseille et qui sont des laboratoires de neuroscience. COGNISUD a pour vocation principale de favoriser le rapprochement entre des équipes issues de laboratoires et de disciplines différents sur des objectifs scientifiques communs. Cette collaboration se concrétise par l’organisation de tables rondes, de colloques et par le soutien apporté par le réseau à toute manifestation scientifique ou de formation susceptible de renforcer les liens entre les membres de la communauté scientifique régionale des sciences cognitives.
  • [126]
    Le projet de LABEX s’intitule « Ouvrir la science économique ».
  • [127]
    Le projet de LABEX s’intitule « Institut for Advanced Studies in Toulouse ».
  • [128]
    Le projet de LABEX s’intitule « Institut d’Etude de la Cognition de l’Ecole normale supérieure ».
  • [129]
    Ce diplôme est remplacé avec le nouveau contrat quadriennal (à la rentrée 2011/2012) par un Master 2 « économie quantitative » spécialité « Game theory, experiments and applied econometrics » (GAEXA), évalué A par l’AERES. Il comporte également un enseignement traitant de neuroéconomie en Master 2 (“Principles of Economic and Neuroeconomic Experiments” au sein du module “Experimental Economics and Applications Module”).
  • [130]
  • [131]
    Cette ANR a été accordée par une commission spéciale que présidait A. Berthoz et à laquelle participaient Christian Schmidt, Olivier Oullier et Alan Kirman.
  • [132]
    Ce programme « a pour but de déterminer comment les sciences du cerveau peuvent apporter un éclairage nouveau pour les politiques publiques, dont un enrichissement épistémologique et une démonstration expérimentale de leurs fondements empiriques ». « Ce programme vise également une meilleure prise en considération par les politiques publiques des enjeux liés à la subjectivité. Il s’inscrit par là dans un axe prioritaire du Centre d’analyse stratégique, tel que défini par la saisine « santé mentale et déterminants du bien-être » du secrétaire d’Etat chargée de la Prospective et du Développement de l’économie numérique, en date du 25/03/09. » (http://www.strategie.gouv.fr/content/programme-%C2%AB-neurosciences-etpolitiques-publiques-%C2%BB-du-centre-d%E2%80%99analyse-strategique).
  • [133]
    Le Forum Economique Mondial de Davos de janvier 2009 a organisé pour la première fois une session pour présenter l’apport de la neuroéconomie à la gestion de la crise financière. Voir http://www.strategie.gouv.fr/article.php3?id_article=1029
  • [134]
  • [135]
    Bouchard, 2008.
  • [136]
    Séminaire auquel ont participé Alain Berthoz, Christian Schmidt et Olivier Oullier. On note ici que l’« autorité scientifique est donc une espèce particulière de capital qui peut être accumulé, transmis et même reconverti en d’autres espèces sous certaines conditions ». Bourdieu, 1976, 93.
  • [137]
    Centre d’analyse stratégique, 2010.
  • [138]
    Comme le note Pierre Bourdieu, « Il n’est pas de «choix» scientifique – choix du domaine de recherche, choix des méthodes employées, choix du lieu de publication, choix, […], de la publication rapide de résultats partiellement vérifiés ou de la publication tardive de résultats pleinement contrôlés –, qui ne soit par un de ses aspects, le moins avoué et le moins avouable évidemment, une stratégie politique de placement au moins objectivement orientée vers la maximisation du profit proprement scientifique, c’est-à-dire de la reconnaissance susceptible d’être obtenue des pairs concurrents. » Bourdieu, 1976, 91.
  • [139]
    Malinvaud, 1996.
  • [140]
    « The rise of neuroeconomics is coming at a point in time when economic theory is not producing any exciting insights. The game-theoretical revolution in economics is complete – it has probably even gone too far by pushing aside other economic models. It is a time in which economists have already recognized the limits of rationality and are increasingly interested in models of Bounded Rationality. However, these models are due almost entirely to introspection and modelling convenience and as such are perceived as arbitrary. Neuroeconomics is offering us the illusion that results achieved through introspection can be supported with hard evidence. For many economists, who are obsessed with the desire to become scientists, this is an opportunity to become associated with real science. » (Rubinstein, 2008, 485).
  • [141]
    Camerer, 2008, 371.
  • [142]
    Caplin et Dean, 2009.
  • [143]
    Smith, 2009 et Smith, 2002.
  • [144]
    Kahneman, 2009.
  • [145]
    Smith, 2009.
  • [146]
    Kahneman, 2009.
  • [147]
    Lemerle, 2009.
  • [148]
    Padoa-Schioppa, 2008.
  • [149]
    Gingras et Schinckus, 2011.
  • [150]
    Bourdieu, 1976, 96.
  • [151]
    Jeannin, 1993, 122.
  • [152]
  • [153]
  • [154]
    L’utilisation de la base Econlit pour un tel travail n’est pas nouveau, voir par exemple Mirucki, 2001 et Mirucki, 2000.
  • [155]
    Pour plus de précisions voir notre site : http://www.u-picardie.fr/labo/curapp/spip.php?rubrique61.
  • [156]
    Pour plus d’information sur ces classements voir : Pontille et Torny, 2010.
Français

Résumé

La neuroéconomie est un domaine de recherche récent, encore modeste mais en développement rapide. Il a émergé dans les années 1990, se cristallise en domaine de recherche à partir de 2004 pour se constituer progressivement en communauté en 2007-2008 aux États-Unis. La relative faiblesse de ce domaine dans l’espace de production scientifique doit être nuancée par la centralité des supports concernés. En effet, la neuroéconomie est située au cœur des enjeux, notamment épistémologique, de la science économique. Pluridisciplinaire, elle est toutefois doublement dominée par les neurosciences et la science économique.
Une enquête sur les revues académiques révèle que l’innovation scientifique s’effectue hors des revues d’économie, qui possèdent davantage un rôle programmatique et de diffusion du domaine au sein de la science économique. Ce sont les revues scientifiques généralistes et les revues de neurosciences qui jouent un rôle d’innovation scientifique. Dans un contexte de domination du champ scientifique mondial par les États-Unis, l’hégémonie américaine en ce domaine n’est pas surprenante, mais la neuroéconomie est déjà très internationalisée. Elle suscite un intérêt relativement important en France, en particulier au sein de la science économique. La France suit cependant le mouvement initié aux États-Unis et ne produit pas ou très peu d’innovation scientifique dans ce domaine. Un processus d’institutionnalisation de la neuroéconomie, moins avancé qu’aux États-Unis, est aussi en cours en France. Il mobilise quelques chercheurs qui s’appuient sur l’économie critique, en essayant de tirer partie des potentialités de la neuroéconomie.
La neuroéconomie est susceptible d’impliquer pour la science économique un changement plus ou moins fondamental dans la conception même de la démarche scientifique, pouvant la rapprocher un peu plus des sciences de la nature. Le caractère innovant de la neuroéconomie, dans un contexte où les découvertes en science économique sont rares, attire des entrepreneurs académiques enclins à investir dans ce domaine de recherche émergeant.

Mots-clés

  • Sociologie des disciplines académiques
  • institutionnalisation disciplinaire
  • Sociologie de la science économique
  • Champ scientifique
  • Neuroéconomie
English

The emergence of neuroeconomics : structure and dynamics of a scientific sub-field

The emergence of neuroeconomics : structure and dynamics of a scientific sub-field

Neuroeconomics is a recent research domain, which remains still modest in size. It has emerged in the 1990s, has become a research field after 2004 then has been structured as a scientific community in 2007-2008. The relative weakness in quantitative terms inside the space of scientific production has to be nuanced due to the centrality of the journals in which its results are published. Neuroeconomics is situated at the core of the scientific stakes of economics. As a plurdisciplinary field it is dominated by neurosciences and economics.
Our survey on neuroeconomics shows that scientific innovation in this field is not published in economic journals, which have more a function as regards research program and dissemination, but in general scientific or neuroscientific journals.
In a context of strong global domination of the scientific field by the United States, it is no surprise if neuroeconomics is also dominated by the United States. France can be described as a follower, without a strong impact on scientific innovation but a process of institutionalisation is also taking place in France, though delayed in comparison with the US. À few researchers play a leading role, in relation with heterodox (critical) economics.
Neuroeconomics may imply a rather fundamental change for economics, making it closer to the natural sciences. The innovative character of neuroeconomics may also attract scientific entrepreneurs investing in a emerging and probably rewarding field of research.

Keywords

  • Sociology of academic disciplines
  • Disciplinary institutionalisation
  • Sociology of economics
  • Sociology of scientific field
  • Neuroeconomics.
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Emmanuel Monneau
Université de Picardie Jules Verne CURAPP-ESS (UMR 6054 : CNRS/UPJV)
Frédéric Lebaron
Université de Picardie Jules Vernes CURAPP-ESS (UMR 6054 : CNRS/UPJV)
Mis en ligne sur Cairn.info le 07/05/2012
https://doi.org/10.3917/rhsh.025.0203
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