CAIRN.INFO : Matières à réflexion

Deux soldats russes, accoudés à la fenêtre d’un train en marche, contemplent le fleuve qui sillonne la plaine allemande inondée de soleil. Le paysage défile et, avec lui, les souvenirs du temps passé au sein du « Groupement des forces occidentales » (GFO) russes, anciennement « Groupement soviétique des forces en Allemagne » (GSFA), stationné sur le territoire de l’ex-RDA. Ils viennent de jeter dans l’Oder une pièce de monnaie, comme le veut une vieille tradition russe lorsque l’on quitte un endroit agréable où l’on souhaite un jour pouvoir revenir. Le photographe allemand Christian Thiel a immortalisé les deux soldats sur ce cliché. Il les accompagne alors dans l’un des trains qui se dirige de Karlshorst vers Koursk avec, à son bord, les dernières troupes du GFO. En effet, les Russes quittent définitivement le territoire allemand en ce bel été 1994. Avec ce départ, c’est une page sombre de l’histoire européenne qui se tourne. La guerre froide, dont l’épicentre était une Allemagne jadis divisée, désormais réunifiée, semble finie…
Alors que le retrait soviétique d’Afghanistan fait l’objet d’une littérature fournie, celui des quelque 600 000 hommes stationnés dans la partie centrale et orientale du Vieux continent est moins exploré par la recherche historique. Pourtant, son étude s’avère précieuse pour alimenter une histoire de la sortie de guerre froide en friche et une histoire internationale de la Russie après 1991 qui reste à construire. La période de transition (1991-199…

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De 1991 à 1994, l’armée russe conduit ce qui est souvent décrit comme la plus grande opération logistique depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale : le retrait du groupement occidental de ses forces du territoire allemand. Pourtant, ces troupes n’ont pas été défaites au cours d’une bataille, leur départ ne suit aucun acte de capitulation, et sa gestion est très largement financée par la nouvelle Allemagne. Pour mieux saisir les raisons de ce retrait, de même que sa mise en œuvre marquée par la coopération, il convient de l’inscrire dans un processus plus large : celui d’une « sortie de guerre froide » concertée, témoignant d’un brouillage des catégories traditionnelles de vainqueur et vaincu, reflétant par là même toute la complexité du conflit qui vient d’être mené.

Sophie Momzikoff
Maître de conférences UMR SIRICE 8138 Sorbonne-Université
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Mis en ligne sur Cairn.info le 10/03/2021
https://doi.org/10.3917/gmcc.281.0111
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