CAIRN.INFO : Matières à réflexion

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« Voilà de l’humanitaire et du social avant que la mode n’en vienne. [...] Identifiant les victimes et désignant avec sagacité leurs bourreaux, Ramazzini était largement en avance sur son temps. [...] On peut sans guère se tromper le tenir comme un précurseur sinon le père de la médecine du travail moderne »
(Kouchner 1990).

2Dans sa préface à la dernière édition en date de la traduction française du De morbis artificum diatriba [traité des maladies des artisans] (Ramazzini 1700), avec pour titre Des maladies du travail, Bernard Kouchner (1990) fait d’un médecin italien du xviie siècle le « précurseur sinon le père » d’une spécialité médicale établie (en France) en 1946. Bernardino Ramazzini, né à Carpi en 1633 et mort à Padoue en 1714, est souvent décrit en ces termes [1]. Au cours du xxe siècle le Traité des maladies des artisans a fait l’objet de nombreuses éditions commémoratives, notamment en allemand (1977, 1998), anglais (1933, 1940, 1964, 1993), espagnol (1949, 1987, 1999, 2000), grec (2001), italien (1933, 1982, 1995, 2000, 2007, 2009), français (1928, 1933, 1990), japonais (1979), portugais (1971, 1985, 1988, 1992, 1999), russe (1961) et suédois (1991) [2]. Depuis 1982, le Collegium Ramazzini s’est ajouté à la Commission internationale de la santé au travail, fondée en 1906 pour mieux faire avancer la cause de la médecine du travail [3]. Le culte du précurseur a récemment atteint des proportions inédites lorsque des recherches archéologiques ont été engagées pour identifier ses dépouilles (Marin et al. 2003). Il est vrai que son traité, publié d’abord en 1700, puis dans une deuxième édition en 1713, se distinguait à la fois par sa qualité littéraire et par son souci de l’observation de terrain, issu de la science expérimentale du xviie siècle. Surtout, il semblait fonder un nouvel objet d’étude en identifiant deux causes principales des maladies qui figurent l’étiologie moderne : la mauvaise qualité de l’eau, de l’air et des substances utilisées, et les mouvements violents ou situations gênantes induites par le travail lui-même (Ramazzini 1777 : 1-2).

3La figure du précurseur ou du père fondateur pose néanmoins problème si on l’évalue à la lumière des travaux historiques récents [4]. Ceux-ci ont montré que la médecine du travail n’était pas un système cohérent d’énoncés scientifiques dont on pourrait aisément rechercher l’origine. Située à la rencontre de différents savoirs comme la toxicologie, l’ergonomie, l’épidémiologie, la médecine légale, la statistique, la psychologie, ou encore l’étude de l’organisation du travail, elle est le résultat d’un compromis entre le corps médical, l’État social, le mouvement ouvrier et les entreprises. En outre, il apparaît plus clairement aujourd’hui qu’une pluralité de modèles pour penser le lien entre maladie et profession se sont succédé au cours de la période contemporaine. Avant la médecine professionnelle, l’hygiène industrielle, la medicina sociale, la industrial medicine et la Gewerbehygiene s’imposèrent, qui comportaient elles-mêmes plusieurs modèles hygiénistes en concurrence. Or ces différents savoirs, acteurs et dispositifs ont chacun des histoires singulières, qui offrent autant de points de vue différents sur l’histoire de la médecine et sur la place qu’y occupe le traité de Ramazzini. À mesure que ces travaux avancent, il paraît de plus en plus difficile d’assigner une origine unique à ce domaine médicolégal aux ramifications multiples. Pourtant, il paraît difficile d’ignorer purement et simplement la référence à Ramazzini, tant elle semble incontournable chez les acteurs de la santé au travail.

4Le décrire comme un « précurseur », en abordant sa pensée du seul point de vue d’une modernité qu’on suppose récente a priori, reviendrait à renoncer à toute explication historique. Une approche qui consisterait, par contraste, à souligner l’ancienneté de la médecine du travail (Cipolla 1992a ; 1992b : 6), ne trouverait pas plus de secours dans la notion de « père fondateur ». Car pourquoi faudrait-il alors privilégier un fondateur plutôt qu’un autre ? Comme le notait déjà en 1822 Philibert Patissier, auteur d’une influente réédition du Traité des maladies des artisans, le travail de Ramazzini était un « assemblage des observations faites avant lui », tâche pour laquelle il consulta des ouvrages divers (médicaux mais aussi historiques et techniques), et entretint une correspondance avec les médecins de différentes villes (Patissier 1822 : xix-xx) [5]. Pour se prémunir contre « l’idole des origines » (Bloch 1993 : 85-89), qui tend à privilégier la filiation sur l’explication, il faudrait pouvoir situer Ramazzini dans son contexte propre, plutôt que dans celui de la période récente, mais également saisir la manière dont son traité a été lu et compris avant la période récente. Or il existe peu de travaux sur les approches de la santé au travail à l’époque moderne, la grande majorité des recherches ayant privilégié l’Occident industriel depuis la fin du xixe siècle [6].

5Cet article propose d’étudier la réception et les usages du De morbis artificum diatriba, non pas pour rechercher les « origines » de la médecine du travail moderne, mais afin d’éclairer l’histoire longue des différents régimes de savoirs qui se sont succédé dans le temps et dans l’espace pour penser et réguler les liens entre santé et profession (Pestre 2006 : 94-107). Pour cela, il cherche à restituer l’épaisseur historique de la notion de « maladie des artisans » en montrant que Ramazzini fut compris jusqu’au début du xixe siècle d’une manière fort différente de celle qui prévalut par la suite. Quel était le projet médical et scientifique de Ramazzini ? Quelles furent les grandes étapes de la circulation de son traité, et quels en étaient les différents usages ? Dans quelle géographie savante s’inscrivait-il ? Pour répondre à ces questions, la première partie tente de dessiner les contours d’un « premier moment » ramazzinien correspondant à l’époque antérieure à l’hygiénisme (Jorland 2010). Puis, la seconde partie en précise le contenu intellectuel et politique afin de montrer ce qui la sépare du xxe siècle. La thèse qui y est défendue est que le succès du De morbis artificum diatriba dès le xviiie siècle s’explique non pas par son caractère spécialisé, mais par son insertion dans un projet de « médecine politique » dans laquelle les artisans n’étaient pas considérés comme un groupe social distinct, et où il n’existait pas de séparation entre la société et son environnement [7]. Il ne s’agit donc pas de faire la « préhistoire » de la médecine du travail moderne, mais au contraire de montrer que le traité de Ramazzini en était l’antithèse.

L’invention du précurseur

6L’apparition de la référence au précurseur est antérieure à l’institutionnalisation de la médecine du travail en 1946. Dès 1936, Henri La Mesta le qualifiait de « précurseur de la médecine du travail ». Vers la même époque, marquée par la célébration du tricentenaire de sa naissance en Italie, Ramazzini était décrit, d’Angleterre à la Roumanie, comme father of industrial medicine ou comme intemeietorul igienii muncii (fondateur de l’hygiène du travail) (La Mesta 1936 ; White 1934 ; Popa 1939). Plusieurs années auparavant, en 1907 en Italie, les fondateurs de la « médecine sociale » avaient fondé la revue Il Ramazzini. Giornale italiano di medicina sociale, organe italien d’une « Commission internationale permanente pour l’étude des maladies professionnelles » [8]. À la fin du xixe siècle, Ramazzini était également décrit comme un précurseur par différentes personnalités de l’hygiène publique, parmi lesquelles Franz Koelsch en Allemagne ou John Simon en Angleterre (Simon 1897 : 126 ; Pagel 1891 ; Koelsch 1912). Dès 1861, la Gazette médicale de Lyon parlait de Ramazzini comme « l’un des pères de l’hygiène industrielle » (1861 : 196).

7L’invention de l’hygiène industrielle après 1860 constitue un tournant important par rapport à la première moitié du xixe siècle [9]. Dans les années 1830 et 1840, en effet, les fondateurs de l’hygiénisme, à l’image de Louis-René Villermé et Alexandre Parent-Duchâtelet en France ou Edwin Chadwick en Angleterre, avaient mené une campagne systématique pour occulter Ramazzini des institutions officielles de santé (La Berge 1992 : 149-159 ; Vincent 2011a). Dans une série d’articles et de rapports, ils s’étaient efforcés de montrer que le médecin italien avait exagéré le lien entre maladie et profession, en minorant l’importance de l’hygiène publique. Soucieux de contrer toute tentative pour contrecarrer les mesures libérales destinées à encourager l’essor industriel, ils avaient dévalorisé la réputation du De morbis artificum diatriba. En 1845, le médecin François Mêlier, connu pour avoir croisé le fer avec Parent-Duchâtelet sur la question des maladies des ouvriers du tabac, louait encore le Traité des maladies des artisans de Ramazzini (Mêlier 1845 : 7). Même dans le troisième quart du xixe siècle, le Traité sur les maladies des artisans gardait une actualité dans la pratique ordinaire de nombreux médecins (Vincent 2009 : 34-35). Mais les hygiénistes libéraux avaient réussi à atténuer le prestige du médecin italien, créant de nouvelles conditions pour sa redécouverte à la fin du xixe siècle.

8En 1875, le médecin Alexandre Layet expliquait que l’hygiène des professions héritait à la fois du traité de Ramazzini, « premier ouvrage qui ait paru sur la matière », mais également de ceux-là mêmes qui avaient contribué à le discréditer quelques décennies plus tôt. Ramazzini avait péché par « pessimisme » : il avait attribué trop de maladies aux professions, en intégrant à ces dernières « les influences extrinsèques du climat et de l’habitation », et en échouant à les distinguer clairement des « influences absolument professionnelles ». Les médecins du deuxième quart du xixe siècle, au contraire, avaient su donner toute leur place aux « influences du milieu, des habitudes et des mœurs ». Mais on était allé trop loin dans cette direction. Le temps était venu, selon Layet, d’opérer un retour critique vers Ramazzini afin d’entrer dans une nouvelle phase de « l’hygiène sociale », désormais soucieuse de « pénétrer dans l’hygiène privée » de chaque profession (1875 : viii, 1-4). En ramenant le traité de Ramazzini au seul projet d’identifier les « influences absolument professionnelles » des maladies, Layet en proposait une lecture singulièrement réductrice, qui ne permettait plus de comprendre son succès au xviiie siècle. Car bien avant l’hygiénisme, le De morbis artificum diatriba avait été imprimé partout en Europe et traduit dans plusieurs langues. Or les conceptions et les pratiques qui sous-tendaient cette première carrière du traité de Ramazzini n’avaient qu’une parenté lointaine avec la figure du « précurseur » érigée à la fin du xixe siècle.

« Ramazzini est un des médecins italiens qui ont obtenu le plus de célébrité »

9Lorsque paraît son traité sur les maladies des artisans en 1700 (année où il est aussi nommé à la prestigieuse chaire de médecine pratique de Padoue), Ramazzini fait déjà partie des grands noms de la médecine italienne. Né dans le duché de Modène en 1633, il est devenu docteur en médecine de l’université de Parme en 1659 avant de revenir exercer dans sa région natale (Rosen 1964). En 1682, il est nommé professeur de « médecine théorique » au sein de la nouvelle université que vient de fonder à Modène le duc François II. Il s’attache dès lors à étudier non plus les maladies individuelles, mais celles qui touchent la population du duché dans son ensemble. Il construit sa réputation en publiant d’abord une histoire des épidémies de rouille et de malaria qui s’abattent au printemps 1690 sur les campagnes de Modène (Constitutio epidemica ruralis), puis, l’année suivante, de l’épidémie de fièvre qui touche la population urbaine (Constitutio epidemica urbana). Au début du xixe siècle, on pouvait encore le décrire comme « [l’]un des médecins italiens qui ont obtenu le plus de célébrité » (Boisseau 1824). Dresser la carte des éditions du traité entre 1700 et 1850 offre quelques éléments pour mieux comprendre ce phénomène.

Les éditions du traité de Ramazzini sur les maladies des artisans en Europe, 1700-1860

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Les éditions du traité de Ramazzini sur les maladies des artisans en Europe, 1700-1860

© D.R.

10Si la célébrité de Ramazzini ne se limitait pas au De morbis artificum diatriba, cet ouvrage se distingue par le nombre de ses rééditions, de ses mises à jour qui suscitaient divers comptes rendus et commentaires dans les revues, et de ses traductions en langue vernaculaire qui en élargissaient le public au-delà du cercle des médecins [10]. La carte (ci-contre) représente trois types d’éditions du De morbis artificum diatriba : les œuvres complètes latines contenant le traité ; les éditions séparées du texte latin (qui proviennent surtout des éditeurs italiens) ; enfin les traductions en langue vernaculaire (anglais, allemand, italien, français et polonais) qui sont les plus nombreuses. La carte fait ressortir trois principaux pôles éditoriaux, Venise, Paris et Londres. Ce sont trois métropoles industrielles où la question des maladies des artisans revêtait une acuité particulière. Dans une lettre à Antonio Magliabechi écrite en 1692, alors qu’il commençait son travail sur les maladies des artisans, Ramazzini évoque le besoin dans lequel il se trouve, pour réaliser toutes ses observations, de résider « dans une grande ville comme Venise, Paris ou Londres » (Di Pietro 1964 : 134). Mais ces villes (tout comme Leipzig et Naples) étaient aussi trois centres importants pour la médecine comme pour l’imprimerie, qui rayonnaient bien au-delà de leur région. Plus qu’elles ne reflétaient mécaniquement des forces économiques uniformes, chaque publication répondait à des motivations et des contextes différents.

11En Angleterre, le cas du médecin Robert James (1703-1776), à l’origine des deuxième et troisième éditions en traduction anglaise en 1746 puis 1750, montre l’inscription des savoirs ramazziniens dans l’expansion d’un marché des soins et des remèdes, sur lequel médecins, chirurgiens et pharmaciens diplômés n’exerçaient qu’un contrôle limité (Calinon 1994 ; Burr 1929 ; Cook 1986). L’exercice de la médecine en hôpital, qui participait d’une économie de la charité, mais aussi les cours de médecine qui répondaient à une demande croissante, étaient autant d’espaces qui échappaient aux corporations médicales [11]. Les médecins devaient donc adapter leur offre de savoirs médicaux à un marché commercial et concurrentiel. Membre du Royal College of Physicians de Londres, Robert James avait étudié à Oxford et pratiqué la médecine au cours des années 1730 dans les petits centres industriels de Sheffield et Birmingham, avant de s’installer à Londres en 1740. Véritable entrepreneur médical, il avait inventé des remèdes qui avaient fait sa célébrité. Son Medical Dictionary, qui parut entre 1743 et 1745, était également une aventure commerciale, tout comme la traduction du traité de Ramazzini. Comme il l’expliquait dans sa préface de 1746, cette dernière aurait dû être intégrée au dictionnaire, mais en avait été finalement retirée par l’éditeur qui ne voulait pas en retarder la publication et perdre des acheteurs potentiels.

12Ramazzini était aussi une référence majeure pour les médecins de l’Empire germanique, mais pour des raisons différentes. Sous l’influence des écrits de Wilhelm Rau puis de Johann Peter Frank, une police médicale s’y était établie, qui ambitionnait de couvrir l’ensemble des aspects de l’hygiène et de la population. Dans la plupart des États de l’Empire, les facultés de médecine entretenaient des liens étroits avec les collegia medica chargés de nommer un physicus dans chaque communauté urbaine (Geyer-Kordesch 1985 ; Lindemann 1996 ; Bueltzingsloewen 1997). Johann Christian Gottlieb Ackermann, traducteur de Ramazzini au début des années 1780, était ainsi physicus dans sa ville natale de Zeulenrode, dans le Vogtland, où il avait été nommé après ses études à Iéna puis à Göttingen. De même Julius Heinrich Gottlieb Schlegel, qui traduit l’édition de Philibert Patissier en 1823, était directeur de la police médicale du grand-duché de Saxe-Meiningen.

13En France, enfin, la réception éditoriale du De morbis artificum diatriba reflète plutôt le contexte mouvant des institutions scientifiques suite à la fondation en 1778 de la Société royale de médecine dirigée par Félix Vicq d’Azir. Comme l’écrit en 1788 Claude-Denis Balme, médecin au Puy-en-Velay, « la Société royale de médecine a regardé comme un des points essentiels de ses travaux les maladies des artisans » [12]. Le choix de faire traduire Ramazzini par Antoine François Fourcroy, protégé de Vicq d’Azir, a été mûrement pensé [13]. Il est conforme au règlement de la Société qui prévoit de « faire un Extrait raisonné de ce que les meilleurs auteurs ont écrit sur la médecine pratique » en divisant ces écrits en deux classes : « la première s’étendant depuis Hippocrate jusqu’à Sydenham ; et la seconde, depuis Sydenham jusqu’à nos jours » (Vicq d’Azyr 1776 : 53). Ramazzini appartient au jeune panthéon de la médecine moderne : dans son texte directeur, Vicq d’Azyr le cite aux côtés de Sydenham comme l’un des fondateurs de la science épidémiologique (ibid. : 4). Investir la santé des artisans permet en outre d’enrichir la nation tout en mettant en œuvre une nouvelle organisation de la recherche : il s’agit d’organiser les connaissances médicales en centralisant et en mettant en relation les observations de médecins provinciaux, mais aussi celles de non-médecins (ibid. : 1-2). Enfin, l’intérêt que la Société royale porte à Ramazzini reflète la volonté du pouvoir de contourner la Faculté de médecine [14]. En captant l’héritage d’une grande autorité médicale, la Société suggère que la Faculté est impuissante face à ce vaste problème de santé publique ; en publiant le traité en français elle l’offre à un public plus large que celui des médecins universitaires, notamment les industriels et les inspecteurs des manufactures. En 1822, la nouvelle édition mise à jour et considérablement enrichie que publie Philibert Patissier s’inscrit dans la même logique. Né en 1792, docteur en médecine en 1805, Patissier cherche à attirer l’attention de la jeune Académie royale de médecine, fondée en décembre 1820, qui reprend une partie de l’héritage de la Société de 1776 en se donnant pour mission de renseigner le gouvernement sur les questions de santé publique. Il est dûment élu membre de l’Académie en 1823.

14Si la carte des éditions du De morbis artificum diatriba (voir p. 92) ne témoigne pas de l’émergence d’un courant médical cohérent qui serait consacré aux maladies professionnelles, inversement l’intérêt pour le sujet traité par Ramazzini se diffusait bien au-delà des seules rééditions de son traité. La date tardive de la première édition française du traité, par rapport aux éditions allemandes, anglaises ou italiennes, n’est ainsi pas le signe d’un désintérêt ou d’une ignorance de la part des médecins français. Fourcroy, dans sa préface à l’édition de 1777, rendait hommage à plusieurs travaux suédois, anglais, allemands ou français, parmi lesquels l’ouvrage de 1740 de Philippe Hecquet, La médecine, la chirurgie et la pharmacie des pauvres où une large section était consacrée à discuter Ramazzini, et l’article sur les « maladies des artisans » du Dictionnaire de Santé de 1760 (Hecquet 1742, 2 : 6-148) [15].

15De la même manière, l’absence de nouvelle édition du traité en Angleterre après 1750 ne témoigne pas d’un prestige déclinant de l’auteur ni d’un affaiblissement de l’intérêt pour son sujet d’étude. La révolution industrielle, loin de le rendre obsolète, renforça au contraire l’intérêt pour le De morbis artificum diatriba. Rappelant en 1807 que le traité de Ramazzini avait été traduit en anglais un siècle plus tôt, le statisticien et politicien écossais sir John Sinclair s’indignait du paradoxe : « alors que nous sommes devenus la plus grande nation industrielle qui ait jamais existé, aucun travail n’a été écrit sur ce même sujet intéressant depuis cette époque par un natif de notre pays » (1816 : 551) [16]. Mais il parlait le langage de Ramazzini lorsqu’il soulignait que l’essor de la civilisation crée des problèmes spécifiques de santé pour tous les groupes sociaux, riches et pauvres (ibid. : 3-4). Dans son Code of Health, il consacrait une section entière aux professions, qu’il divisait en huit classes : paysans, ouvriers, mineurs, militaires, gens de mer, commerçants, oisifs en ville ou à la campagne, classe sédentaires des hommes de lettres et des hommes politiques (ibid. : 549-556). En 1820, un praticien du Birmingham Dispensary, John Darwall, intitulait sa thèse en vue du doctorat de médecine à l’université d’Édimbourg en référence transparente à Ramazzini, De morbis artificum praecipue eorum qui Birminghamiae habitant (Meiklejohn 1956). Plus tard Charles Turner Thackrah, chirurgien dans le comté textile de Leeds, plaçait explicitement son traité The Effects of the Principal Arts, Trades, and Professions (1831) dans la continuité du médecin italien. Dans son ouvrage sur la préservation de la santé de 1836, Joseph Barnard Davis, de la Royal Society of Surgeons, consacrait un chapitre entier de son ouvrage aux professions, en distinguant quatre groupes en fonction de la pureté de l’air et de l’exposition à des substances dangereuses (1836 : 11, 66).

16La géographie du premier moment ramazzinien, pour finir, n’est pas exclusivement européenne. Dans la préface du De morbis artificum diatriba les arts mécaniques, nécessaires à la civilisation occidentale, étaient présentés comme un critère permettant de différencier les peuples civilisés d’Europe et les peuples barbares d’Amérique. Mais le lettré Ramazzini, qui ne mentionnait pas l’Asie, ne pouvait ignorer que les arts mécaniques avaient atteint, en Chine et en Inde, un niveau de développement technique et commercial comparable à celui de l’Europe [17]. Au cours du siècle suivant, il devint l’une des autorités incontournables des médecins qui trouvaient dans les colonies extraeuropéennes des conditions sanitaires assez comparables à celles de l’Europe du xviie siècle (Cipolla 1981 : 158) [18]. Même si la médecine coloniale tendait à s’organiser, surtout dans la deuxième moitié du xixe siècle, autour de débats sur la santé des soldats et des prisonniers plutôt que des artisans, l’attention aux métiers n’était pas négligée dans les topographies médicales qui continuèrent de dominer la production scientifique jusqu’à la fin du xixe siècle (Arnold 1993).

17Dans la méthode qu’il proposa à la fin des années 1820 pour écrire des topographies médicales, le chirurgien militaire John Hennen, en poste auprès de la Royal Navy en Méditerranée, recommandait, traité de Ramazzini en main, une analyse des maladies des artisans. Il fallait prêter une attention précise aux métiers des régions décrites, aux conditions de travail, « dans des appartements confinés, surpeuplés et humides, ou à l’air libre », et à la composition précise de l’air et des vapeurs. Son conseil ne resta pas lettre morte : dans leurs journaux de bord, les médecins de l’époque victorienne envoyés sous les tropiques continuèrent de décrire le climat, le sol, les zones marécageuses, et l’influence des activités et des métiers sur la salubrité générale du pays (Hennen 1830 : xxvii [pour la référence à Ramazzini) [19]. En 1859 encore, les cours d’hygiène promulgués aux élèves de l’Army Medical Service s’intéressaient à l’influence de l’âge, du sexe et du tempérament, mais aussi des métiers et professions [20].

18La carte des éditions du De morbis artificum diatriba témoigne ainsi de l’existence durable, entre la fin du xviie siècle et le milieu du xixe siècle, d’un faisceau de savoirs et de pratiques qui entretenaient l’actualité du traité de Ramazzini. Pour comprendre ce phénomène, il faut reconstituer le projet scientifique du médecin italien et les raisons de sa longue postérité.

Une médecine « politique »

19Le contexte intellectuel dans lequel s’inscrit la démarche ramazzinienne est à la fois une condition de sa réussite à si grande échelle, et la clé qui permet de comprendre l’insertion des « maladies des artisans » dans un projet plus large de société civile [21]. Sans jamais chercher à soigner les maux d’une société industrielle qu’il ne pouvait anticiper, Ramazzini tentait de fonder une médecine politique pour son époque, qui était profondément étrangère aux présupposés de l’hygiène industrielle, de la médecine du travail et de la médecine environnementale plus tardives. L’ordre social et politique que présupposaient ces dernières procédait d’une logique de spécialisation médicale et se fondait sur une distinction entre la sphère civile et la sphère du travail. Par contraste, la notion d’artifex utilisée par Ramazzini découlait d’un souci de soigner la cité dans son ensemble, sans distinguer les « artisans » des autres. De même, alors que l’hygiène industrielle et la médecine du travail opposaient la société à son environnement, ou encore l’hygiène privée à l’hygiène publique, les lecteurs de Ramazzini du xviiie siècle et du début du xixe siècle les intégraient pleinement, à travers la notion hippocratique de « lieu ».

L’artifex et la société civile

20L’artifex de Ramazzini n’est pas l’ouvrier des hygiénistes du xixe siècle, ni l’employé de la médecine du travail du xxe siècle. Les trois éditions anglaises traduisent le terme artifex alternativement par tradesman (en 1705 et 1746) et par artificer (en 1750). Cette incertitude n’a rien d’une coïncidence. Alors que le xixe siècle voit l’assignation de droits sanitaires distincts à différentes catégories de personnes (sur des critères d’âge, de sexe, de race ou de profession), la catégorie d’artifex ne renvoie à aucun statut ni à aucune compétence spécifiques. Comme le terme italien artefici, elle couvre l’ensemble des arts libéraux et des arts mécaniques [22]. Dans les grandes villes comme Venise, Londres et Paris, la frontière entre l’artisanat et le monde de l’art et de la littérature n’était pas nette. Les éditions allemandes mentionnent à la fois les Künstler (artistes) et les Handwerken (artisans). Johann Christian Gottlieb Ackerman, qui publie sa traduction allemande au début des années 1780, était d’ailleurs l’auteur, en 1777, d’un traité sur les maladies des savants (Gelehrten), qui est probablement à l’origine de son intérêt pour le livre. Dans le traité de Ramazzini, sont étudiés à la fois les artisans et les fabricants, les mineurs, mais aussi les soldats, les gens de mer et les hommes de lettres, les chanteurs, les écrivains, les athlètes, ceux qui montent à cheval, les chasseurs, voire les princes eux-mêmes (Ramazzini 1724). La notion d’artifex comprend également ceux-là mêmes qui sont les plus susceptibles de lire le livre, pharmaciens, chimistes et médecins. Elle inclut finalement tous ceux qui contribuent à la société civile. Les arts mécaniques, lit-on dans sa préface, sont ce qui sépare la société civilisée des barbares d’Amérique. C’est à ce titre qu’il convient de se soucier de la santé des artisans. Diamantios Coray devait utiliser le même argument un siècle plus tard : « dans l’état actuel de l’économie politique, que presque toutes les nations d’Europe ont adoptée », remarque-t-il, il est devenu impossible, « de diminuer le nombre des arts mécaniques les plus insalubres pour l’homme » (1800 : 1).

21C’est dire que la liste des arts à étudier est nécessairement instable et évolutive. Dès la première édition de son traité, Ramazzini, qui s’est appuyé sur ses propres observations à Modène mais aussi sur les informations obtenues de ses correspondants, explique que son projet ne pouvait que se concevoir comme une tâche collective et de longue haleine. Mais quelle direction doit-elle prendre ? La liste des arts, dit-il, varie avec le degré de civilisation, mais aussi d’une cité à l’autre. Faudra-t-il compléter, à chaque époque et pour chaque ville, la nomenclature professionnelle ? Faudra-t-il élargir l’étude à d’autres groupes, afin de finir par couvrir l’intégralité de la société civile ? On croit pouvoir reconnaître Venise, grand centre du textile, de l’imprimerie et de la vie artistique et littéraire, dans les chapitres du De morbis artificum diatriba qui portent sur les maladies des « juifs » (cardeurs de matelas et chiffonniers du ghetto), des imprimeurs, des rameurs, mais aussi des chanteurs, maîtres de musique et écrivains (Georgelin 1978). Mais Ramazzini a pris soin de généraliser ses observations afin de les rendre applicables à d’autres cités. C’est pourquoi il commence chaque chapitre par une discussion générale de l’utilité de la profession considérée, puis en décrit les pathologies, enfin les remèdes.

22Dès la deuxième édition du traité en 1713, Ramazzini enrichit sa première liste de quarante-deux professions de douze chapitres supplémentaires. Cet ajout illustre à la fois le caractère toujours provisoire de cette médecine empirique et cumulative, et l’ancrage du « lieu » dans une histoire et dans une société. Étudier les maladies des artisans n’est pas une fin en soi, ce n’est qu’un point d’entrée vers une médecine couvrant l’ensemble de la société. Il n’y avait aucune raison, au xviiie siècle, de chercher à résoudre l’incertitude sémantique de la notion d’artifex. Il suffisait de se placer dans la continuité du médecin italien. Un rapport sur le mémoire du docteur Jean-François Paris, de Berre, sur les maladies de ceux qui travaillent aux huiles d’olive, fait ainsi l’objet de ce commentaire :

23

« Quoique ce mémoire ne nous ait paru contenir que des faits en général connus et déjà annoncés par Ramazzini dans son traité sur les maladies des artisans […], nous pensons cependant que l’on doit faire mention de son travail dans l’histoire de la Société soit comme confirmant la doctrine de Ramazzini, soit parce qu’ils présentent quelques détails intéressants sur la cure des maladies de ces espèces d’artisans [23] ».

24Le même médecin, dans un mémoire postérieur sur « les maladies de ceux qui travaillent aux Salines », précise d’emblée : « je ne connais aucun auteur qui ait parlé sur ce sujet [24] ». « Si je ne me suis pas borné aux maladies des artisans proprement dit, c’est que je n’aurais pu enchérir sur les travaux de Ramazzini, et des autres qui ont suivi les traces de cet illustre médecin », explique le docteur Balme du Puy-en-Velay en avril 1788 pour justifier le sujet de son mémoire sur les maladies de la jeunesse dans les séminaires, dans les pensionnats, et sur les maladies des ouvrières en dentelles [25]. À près de cinquante ans de distance, en 1843, George Calvert Holland utilise les mêmes arguments pour expliquer la publication de son étude sur les maladies respiratoires des ouvriers de la coutellerie de Sheffield : le travail de Ramazzini accompagné des ajouts de Patissier, quoique d’un mérite incontournable, est superficiel sur l’analyse des processus de travail des couteliers et des modalités fines de leur exposition aux poussières, et c’est pourquoi il a consacré plus de cinq années à étudier de près leur condition (Holland 1843 : 4). En concentrant son étude sur l’industrie de Sheffield, spécialisée dans la coutellerie, l’auteur s’inscrivait à la fois dans l’esprit des topographies médicales et dans celles de l’étude des spécificités du métier.

25Selon Vicq d’Azir, Ramazzini était avec Thomas Sydenham l’un des fondateurs de l’étude moderne des épidémies, qui en soulignait les origines endémiques et climatiques et non toujours contagieuses [26]. L’intérêt méthodologique de son travail était selon lui d’avoir souligné le caractère multifactoriel des épidémies en montrant que, dans certains cas, elles touchent en priorité certaines catégories sociales ou certaines professions [27]. L’atelier constitue un bon point de départ pour l’observation épidémiologique, car on ne peut « rien dire de positif sur les symptômes des épidémies en général ». Mais il ne saurait constituer une unité d’analyse unique ou permanente. Il faut sortir de l’atelier, élargir le regard, multiplier tous les cadres d’analyse, afin d’étudier « [les symptômes] de toutes les maladies, avec lesquelles [les épidémies] participent » [28].

26Si la question de la santé des artisans était clairement désignée en tant que telle au cours du long xviiie siècle et du premier xixe, elle ne fut jamais constituée en un domaine séparé de la science et de la pratique médicale. Médecine politique offerte à l’ensemble de la société, elle mettait au cœur de son objet d’étude l’analyse des rapports entre l’homme et son environnement.

Lieux et constitutions

27L’hygiène industrielle et la notion de maladie professionnelle nées à la fin du xixe siècle et au début du xxe, puis celle de médecine environnementale apparue vers le milieu du xxe siècle, se sont toutes réclamées de Ramazzini. Mais ce dernier présupposait une notion de l’environnement fort différente de celle qui s’affirme à partir de la deuxième moitié du xixe siècle.

28Dès 1690, les écrits de Ramazzini sont perçus comme représentatifs d’un courant médical qui, se réclamant d’Hippocrate, renouvelle l’analyse des trois variables principales de la maladie, les airs, les eaux, les lieux. Dans ses différents travaux, notamment dans son histoire de l’épidémie de typhus survenue à Modène, Ramazzini se réfère fréquemment aux progrès récents de la chimie pneumatique. Il connaît la pompe à air de Robert Boyle, mais aussi les nombreuses autres machines inventées autour d’elle, thermomètre, baromètre, hygromètre ou anomètre [29]. Ramazzini est également très attentif aux progrès des connaissances sur l’eau, auxquelles il s’efforce de contribuer : en 1691, il publie une étude des sources souterraines de Modène où il s’affirme partisan de la physique newtonienne (Saint Clair 1697). Il n’existe pas de frontière, dans l’esprit du médecin italien comme dans celui de ses lecteurs et continuateurs, entre le De morbis artificum diatriba et ses autres travaux concernant l’influence sur la santé, de l’eau, de l’air et de la géographie. Médecin des artisans, Ramazzini était aussi célèbre pour ses travaux sur les épidémies et les épizooties, comme la peste animale de Venise de 1710 [30]. Dans le Dictionnaire des sciences médicales de 1824, l’auteur de la notice sur Ramazzini, François-Gabriel Boisseau, fait bien du Traité des maladies des artisans l’une de ses œuvres importantes, mais pas davantage que le De constitutione anni 1690, présenté comme un « ouvrage majeur, qui fait époque dans l’histoire des épidémies, et dans lequel Ramazzini s’est montré médecin du premier ordre », le Ephemerides barometricae, qui prouve que « le mercure descend dans les temps pluvieux et monte dans le beau temps », ou encore le De abusu chinae de 1713 sur l’action irritante de la quinine, « sans contredit la plus importante de toutes [ses productions] sous le rapport de la médecine pratique » (Boisseau 1824 : 534). Avant et après avoir écrit le De morbis artificum diatriba, Ramazzini avait publié plusieurs études influentes sur les épidémies et les épizooties survenues dans les nord-est de l’Italie qui restent très couramment citées au cours du xixe siècle.

29En publiant le De morbis artificum diatriba en 1700, ou en consacrant ses premiers enseignements sur le même sujet à partir de 1690, Ramazzini ne cherchait aucunement à fonder une nouvelle branche de la médecine, mais plutôt à prolonger le travail commencé au début des années 1680 [31]. Jusque vers le milieu du xixe siècle, il n’y a pas de rupture dans l’esprit des lecteurs de Ramazzini entre des travaux à dominante « épidémiologique » des années 1690 et le traité plus « sociologique » de 1700. Ainsi Robert James fait précéder la traduction anglaise de 1746 du De morbis artificum diatriba par un texte de Friedrich Hoffmann portant sur les « maladies endémiques » (endemial distempers), c’est-à-dire les maladies provenant de « climats, de situations, et de modes de vie particuliers » : l’étude des maladies des artisans représente un volet de cette étude plus large (James 1750). En 1820 Michele Araldi, professeur de médecine à l’université de Modène, publie un éloge de Ramazzini où la question des maladies des artisans en représente qu’un aspect mineur (Araldi 1820, 2 : 1-28).

30Comme Ramazzini, ni Robert James ni Antoine François Fourcroy, ni aucun de leurs contemporains, ne se sont « spécialisés » dans la médecine professionnelle qui n’était qu’un aspect de la médecine politique. Robert James était surtout connu pour avoir inventé une poudre contre la fièvre qui connut un grand succès au milieu du xviiie siècle. Fourcroy devint dans les années 1780 un des principaux disciples d’Antoine de Lavoisier, dont il présenta les conceptions dans la Philosophie chimique (1792) avant de réformer l’enseignement médical deux ans plus tard. Philibert Patissier, auteur en 1818 d’un Manuel sur les eaux minérales de la France et d’une réédition refondue du traité de Ramazzini en 1822, ne se spécialisa pas dans cette voie mais devient ensuite membre de la Commission des eaux minérales de l’Académie chargée d’analyser les eaux et d’examiner les conditions de la thérapeutique thermale. De même Charles T. Thackrah (1831) n’était en rien « spécialisé » dans la médecine professionnelle. S’il s’intéressait aux maladies développées au sein de différents types de profession, cela n’était qu’une branche d’un intérêt plus général pour la morbidité sociale dans son ensemble. En 1819 il avait publié un traité sur les propriétés du sang écrit du point de vue de la théorie des humeurs (Thackrah 1819). Son cas est donc semblable à ceux de Fourcroy et Patissier, dont l’intérêt pour les maladies des artisans s’insérait dans un ensemble beaucoup plus vaste. Lorsque le nom de Ramazzini apparaît dans les manuels de médecine et autres écrits médicaux anglais avant 1830, y compris dans une littérature à vocation généraliste et non prioritairement destinée aux médecins, c’est souvent en référence à ses travaux d’épidémiologie, à ses observations météorologiques, ou encore à sa célébrité en Italie [32]. Ainsi, à l’époque où la médecine coloniale se constitua autour d’un paradigme « tropicaliste », Ramazzini faisait partie du bagage intellectuel des médecins qui étudiaient les causes climatiques des maladies dans les colonies, en Algérie comme au Bengale (Balfour 1815 : 367-377 ; Perier 1847, 2 : 138). Les médecins européens qui étudiaient les épidémies et les épizooties tropicales y faisaient des liens avec les maladies étudiées par Ramazzini, par exemple dans le cas des pestes animales constatées en Inde [33].

31La notion hippocratique de « lieu » résume le caractère politique de la médecine ramazzinienne. Comme le résume l’auteur de l’article « Topographie » du Dictionnaire des sciences médicales, « La pratique de la médecine n’est point générale ; elle est essentiellement locale, chaque théâtre nouveau sur lequel un médecin se trouve placé doit être pour lui le sujet d’une nouvelle étude » (Reydellet 1821, 55 : 299). Inversement, la description complète d’une maladie supposait l’identification du périmètre adéquat à l’intérieur duquel elle pouvait être observée (Foucault 1963). Or ce lieu n’était pas uniquement ni même principalement le corps individuel du malade. Alors que l’anatomie pathologique, au tournant du xixe siècle, identifiait de plus en plus la maladie aux lésions visibles du corps humain et l’assignait à l’espace de la clinique, la médecine néohippocratique du xviiie siècle prolongeait la possibilité d’une « spatialisation libre, sans région privilégiée [34] » dans laquelle la définition des lieux de la maladie était la plus ouverte possible. Dans son étude des puits de Modène, en 1691, Ramazzini déclare ainsi vouloir faire l’anatomie du duché lui-même. Pour cela, dit-il, il faut en étudier les entrailles, les veines et les artères, comme on étudie la circulation du sang et des autres fluides du corps humain, sans se limiter à considérer les rivières et les fontaines en surface (Saint Clair 1697 : 56-49). Les puits et les mines sont ce qui relie l’histoire naturelle de la terre à l’histoire humaine des endémies. En ouvrant quelques années plus tard son traité sur les maladies des artisans par un chapitre sur les mineurs, Ramazzini l’ancrait clairement dans la continuité de ses travaux antérieurs.

32La fortune de Ramazzini auprès des médecins du xviiie siècle tient beaucoup à l’importance qu’il accordait à la météorologie médicale [35]. Les épidémies et les endémies s’inscrivent dans la périodicité des symptômes d’une fièvre, mais aussi dans l’évolution de la température, que le mouvement du mercure permet de mesurer, ou dans la succession des pluies, qui affectent l’humidité de l’air et dont on peut étudier la composition. Pour le médecin italien, les épidémies et les endémies se mesuraient dans la périodicité des symptômes d’une fièvre, mais aussi dans la force des vents, dans l’évolution de la température, que le baromètre permettait de mesurer, ou dans la succession des pluies, qui affectaient l’humidité de l’air et dont on pouvait étudier la composition. C’est avec le même outillage que Ramazzini abordait l’atelier en 1700. Quelques années plus tard, dans les écrits de l’abbé Du Bos, puis de Montesquieu ou de Ferguson, les savoirs sur les airs et les eaux produits par les nouveaux instruments de mesures atmosphériques, tels le baromètre et le thermomètre, furent regroupés sous la catégorie de « climat » [36]. Ce courant devait affecter en retour la médecine et contribuer à l’essor du courant néohippocratique (Jordanova 1997 ; Riley 1987 : 31-53). Avant qu’Alexandre Layet ne reproche à Ramazzini de donner trop d’importance aux « influences climatiques », on voit se multiplier, à partir de la fin du xviiie siècle, les descriptions qui font du lieu de travail un « climat » à part entière (Fressoz 2008 ; Fressoz et Locher 2010). « On peut dire que chaque atelier devient pour l’artisan qui y travaille, une atmosphère particulière, un nouveau climat », écrit Coray en 1800 (1800 : xix). Pour Benedict-Auguste Morel, écrivant au milieu du xixe siècle, si l’homme peut modifier la nature, « l’exercice de professions dangereuses ou insalubres, l’habitation dans des centres trop populeux ou malsains », constituent une « nature factice » qui le modifie en retour (1857, 1 : 50). Selon François Mêlier, le métier crée pour l’individu qui l’exerce « des conditions spéciales, des rapports nouveaux et, comme on l’a dit, une sorte de climat particulier au milieu du climat général, et ce climat factice diffère souvent beaucoup plus du climat proprement dit que ne diffèrent entre eux les pays situés sous les latitudes les plus opposées » (1845 : 5) [37]. Ainsi les professions sont-elles autant de « micro-climats » dont le médecin doit comprendre la spécificité, qu’elle découle des matières métalliques, végétales ou animales utilisées, ou encore des postures de travail.

33En Angleterre, la météorologie médicale demeure un savoir majeur pour aborder les maux et les épidémies issues de la révolution industrielle. Dans le Lancashire en 1795, Thomas Percival et John Ferriar, persuadés de l’importance de l’atmosphère pour la santé humaine, entreprennent de combattre les épidémies de « fièvre » qui touchent les ouvriers des usines en utilisant un procédé généralement réservé aux classes aisées, le changement de climat, rendu possible par la Manchester House of Recovery (Pickstone 1984, 1985 : 26). Un peu plus tôt, dans son traité sur l’influence des climats sur les sociétés humaines, le médecin écossais William Falconer (1744-1824) avait mentionné le De morbis artificum diatriba pour comparer ceux qui travaillent au contact de la chaleur aux habitants des climats chauds qui sont excessivement maigres et vieillissent prématurément (1781 : 12-13). Le parallèle entre le climat de l’usine et celui des tropiques est l’un des fils directeurs de l’enquête classique du chirurgien Peter Gaskell en 1836, qui voit dans les districts industriels des poches de dégénérescence physique et morale au cœur d’une nation pourtant en progrès. S’appuyant sur l’édition de Patissier et sur l’ouvrage de Thackrah, il insiste sur l’atmosphère délétère des grandes manufactures et des villes manufacturières, dans lesquelles la santé et le taux de mortalité sont comparables à la situation des pays les moins civilisés. Il compare ainsi les grandes manufactures anglaises au célèbre « Trou Noir » de Calcutta dans lequel un groupe de soldats britanniques qui s’y étaient réfugiés en 1758 avaient rencontré la mort (Gaskell 1836 : 201-206, 220). Comme Engels (1973 : 176) à la même époque, et comme les diverses commissions royales sur les factories des années 1830 et 1840, il décrit l’usine comme un environnement tropical produit artificiellement.

34Mais la constitutio d’une épidémie n’est pas seulement physique et météorologique : les facteurs politiques, sociaux et moraux doivent également être pris en compte dans la définition d’un lieu propre à une maladie. Aux facteurs naturels, remarque Ramazzini dans sa Constitutio epidemica urbana de 1691, s’ajoutent les guerres, les famines, et les habitudes des populations (Ramazzini dénonce par exemple le trop grand recours à la quinine pour combattre les fièvres). C’est pourquoi, pour ausculter un artisan, le médecin ne doit pas « lui tâter le pouls aussitôt qu’il est entré, comme on a coutume de le faire ». Il convient plutôt « de s’asseoir quelque temps sur un simple banc, comme sur un fauteuil doré, et là, d’un air affable, d’interroger le malade sur tout ce qu’exigent et les préceptes de son art et les devoirs de son cœur » (Patissier 1822 : ix-xv). En étudiant les maladies des artisans, le médecin se fait sociologue des métiers, et au-delà, de la société toute entière. Ce constat allait être réinterprété par l’orientalisme du xixe siècle. S’il y a des différences sanitaires entre l’Orient et l’Occident, allait-on dire alors, celles-ci sont en partie le produit de la civilisation qui, en Occident, a permis un assainissement de l’environnement. Plusieurs observateurs du xixe siècle voient des similitudes entre les épidémies ou épizooties décrites par Ramazzini, désormais disparues d’Europe, et celles des colonies tropicales (Murchison 1866 : 32). Mettre en parallèle la constitution médicale de l’Italie du xviie siècle, encore dominée par la malaria, avec celle des tropiques, pouvait être utile, même lorsqu’il était question de minimiser le rôle de facteurs environnementaux comme la présence de marais. C’est le cas du médecin vétérinaire belge, Séraphin Verheyen, cherchant à montrer en 1855 que les maladies charbonneuses sont d’origine contagieuse. La malaria que décrit Ramazzini, explique-t-il, est « plus intense encore sous les tropiques » où l’on voit se renouveler « les phénomènes des premiers âges de la fondation de Rome […] qui, du reste, doivent être communs à tout peuple agricole et pasteur ». Si un médecin de « la sagacité de Ramazzini » n’a pas vu de lien entre malaria et maladies charbonneuses, il est vain de le rechercher sous les climats chauds (Académie royale de médecine de Belgique 1855, 15 :155).

35Souligner l’actualité de Ramazzini hors d’Europe permettait d’en montrer l’obsolescence dans les pays industriels modernes. Nassau Senior, professeur d’économie politique à Oxford, notait dans les années 1830 que l’atmosphère enfumée de la société industrielle, au lieu de décimer la population, s’était accompagnée d’une augmentation de l’espérance de vie générale (1830 : 17). Pourtant le risque de revenir en arrière était constant. Les « grandes villes manufacturières », précisait-il, seraient dans la même situation sanitaire que sous des climats moins favorables « si beaucoup de soin et de qualifications n’étaient pas consacrés à assurer leur propreté et leur ventilation » (1836 : 142). C’était l’hygiène moderne qui avait permis cette amélioration, forçant du même coup à repenser le lien entre maladies et activités industrielles. La voie était ouverte pour une nouvelle lecture de Ramazzini, non plus en contemporain mais en précurseur.

36Ramazzini n’est pas le précurseur de la médecine du travail car sa conception de la médecine est précisément celle avec laquelle les hygiénistes voulurent rompre au xixe siècle. Après que ces derniers se furent attaqués à la réputation scientifique du médecin italien, les hommages au grand précurseur à la fin du xixe siècle et au xxe achevèrent de gommer les traits essentiels de la médecine politique dans laquelle elle s’inscrivait, et contre laquelle la santé publique moderne s’est construite (Hamlin 1998 ; Vincent 2011a).

37« Je ne puis m’empêcher de reconnaître […] les extrêmes obligations que j’ai à [Padoue] nation aussi savante, que généreuse ; qui a non seulement fait un si favorable accueil à tous mes ouvrages, mais après les avoir honorés de ses applaudissements, les a presque tous réimprimés » (Ramazzini 1724, préface, non paginée). Si le médecin italien fait de la cité (Modène ou Padoue) le premier juge de la science, elle en est également pour lui l’objet unique. La carte des éditions du De morbis artificum diatriba jusqu’au milieu du xixe siècle permet de dessiner les pulsations du premier moment ramazzinien et d’en saisir les traits principaux. Il s’agissait d’abord, pour le médecin de Modène et ses continuateurs, de soigner non pas une catégorie sociale en particulier, mais l’ensemble de la communauté urbaine et son territoire. S’il était nécessaire, pour espérer accomplir ce programme, de mieux comprendre ce que les maladies des artisans avaient de spécifique, cela ne prenait sens que dans un projet scientifique où la « profession » n’était qu’un facteur parmi d’autres de la morbidité, et où la médecine du travail ne pouvait aucunement être vue comme un domaine distinct. En second lieu, cette médecine intégrait à la fois les sciences de la nature et la science des mœurs : refusant de restreindre son étude à la seule qualité de l’air et de l’eau, Ramazzini avait introduit dans son champ l’étude des environnements de travail et de vie.

38L’histoire du premier moment ramazzinien invite à mettre en perspective certains présupposés de l’histoire de la santé au travail. Elle permet d’abord de questionner l’espace géographique de référence au sein duquel elle est écrite. L’étude interne des systèmes nationaux de la santé et du travail a laissé place à une approche comparée et transnationale qui permet de mieux comprendre le contexte international de la naissance d’un domaine séparé de la protection sociale (Rosental 2006, 2008). Mais elle s’écarte rarement du monde industrialisé occidental (McCulloch 2003 ; Jobin 2006 ; Thomann 2009). Prendre au sérieux l’outillage intellectuel du premier moment ramazzinien, qui ne sépare pas la question des maladies des artisans de celle plus générale des épidémies, incite à en considérer davantage la dimension extra-européenne [38]. Suivre le fil du De morbis artificum diatriba permet ensuite de situer l’histoire de la santé au travail dans une chronologie plus longue, mais aussi de mieux comprendre la rupture que représenta l’hygiénisme du xixe siècle dans la délimitation du rôle politique de la médecine. Avant de devenir le précurseur d’une spécialité médicale, Ramazzini avait été l’un des grands noms d’une médecine aux ambitions beaucoup plus vastes.

Notes

  • [*]
    Je tiens à remercier Franco Carnevale, Paul-André Rosental, ainsi que deux membres anonymes du comité de rédaction de Genèses, dont les remarques ont été fort précieuses (même si nous n’avons pas toujours pu tomber d’accord). La carte a été réalisée par Fanny Madeline : merci !
  • [1]
    Les exemples sont innombrables, en particulier dans les publications médicales. Pour une étude de la réputation contemporaine de Ramazzini, voir Felton 1997.
  • [2]
    Selon Carnevale, Mendini et Moriani (2009 : 349-351).
  • [3]
    Voir http://www.collegiumramazzini.org/ (consulté le 25 mai 2011).
  • [4]
    Voir notamment : Buzzi, Devinck et Rosental 2006 ; Revue d’histoire moderne et contemporaine 2009 ; Bruno et al. 2011.
  • [5]
    Parmi les prédécesseurs de Ramazzini, on cite souvent Ulrich Ellenbog (1524) et Paracelse (1567).
  • [6]
    Au nombre des exceptions, mentionnons les travaux de Thomas Le Roux (2011a : 441-494 ; 2011b ; 2011c).
  • [7]
    Sur la notion de « médecine politique », voir Hamlin 2006.
  • [8]
    Concernant cette revue, voir Baldasseroni et Carnevale 1993.
  • [9]
    Sur la naissance de l’hygiène industrielle, voir Moriceau 2009.
  • [10]
    L’édition de Carnevale, Mendini et Moriani (2009) comporte une bibliographie détaillée des travaux sur le médecin italien et une liste des différentes éditions de son ouvrage. Pour une discussion méthodologique des apports de l’histoire du livre à l’histoire de la médecine voir Rabier 2002.
  • [11]
    Voir notamment Loudon 1986 ; Porter 1989 ; Bynum et Porter 1987 ; Lawrence 1996. Concernant le contexte de déclin des corporations en Angleterre, voir Daunton 1995 : 137-140.
  • [12]
    Archives de la Société de l’école de médecine (SEM), Balme, 1.
  • [13]
    Il n’existe pas de sources conservées parmi les archives de la Société royale de médecine (SRM) pour documenter les préparatifs à la traduction française de Ramazzini.
  • [14]
    Ce n’était pas le fait d’une quelconque incapacité des vieilles facultés médiévales de renouveler leur enseignements (Brockliss 1998). Dans le curriculum des facultés de médecine, l’étude des maladies des artisans prolongeait celle de la pathologie en général, voir Brockliss 1987 : 412-421.
  • [15]
    Fourcroy mentionne aussi Nicolas Skragge, médecin à Upsalla, et la Médecine domestique du docteur William Buchan (1775).
  • [16]
    Sinclair a une bonne connaissance des conséquences de l’activité professionnelle sur la santé des populations des différentes paroisses écossaises du fait de son travail à la tête du Statistical Account of Scotland de 1791 à 1799.
  • [17]
    Hippocrate avait par exemple consacré deux chapitres à comparer l’Asie et l’Europe (Coray 1800, 1 : chap. 5 et 6).
  • [18]
    Francis Balfour, médecin au Bengale pour le compte de l’East India Company, fait la même remarque (1815 : 370).
  • [19]
    Robert Hamilton Irvine (1841) offre un bon exemple de topographie médicale coloniale attentive aux professions. On trouve de nombreuses topographies médicales dans les archives de l’Admiralty conservées aux National Archives du Royaume-Uni qui mentionnent le rôle des métiers, mais n’ont pas fait l’objet d’étude sous cet angle.
  • [20]
    The National Archives, WO/33/8, Organization of the Practical Army Medical School, Londres, 1859, p. 13.
  • [21]
    Pour une discussion de cette notion, voir Vincent 2011b.
  • [22]
    Ramazzini prie les écrivains de l’excuser de les ranger parmi les artifices tout en rappelant qu’ils gagnent eux aussi leur vie, demande d’excuse qui disparaît dans l’édition de 1713.
  • [23]
    SRM, 178/15/7b ; ce rapport de 1781 est signé de Fourcroy, Jeanrois et Thameserie.
  • [24]
    SRM, 178/15/14.
  • [25]
    SEM, Balme, 1.
  • [26]
    « De ce qu’une maladie attaque un grand nombre de personnes à la fois, il n’en fait pas conclure qu’elle est contagieuse. Elle peut n’être que l’effet d’une cause générale et commune à la plus grande partie des habitants d’un canton » (Vicq d’Azyr 1776 : 4, 10). Sur l’anticontagionisme, voir notamment Ehrard 1957.
  • [27]
    « Ramazzini parle d’une épidémie qui, dans les environs de Modène, n’enlevait que les paysans, et quelquefois les ouvriers » (Vicq d’Azir 1776 : 11).
  • [28]
    Ibid. : 24.
  • [29]
    Pour une discussion en français de ces découvertes qui renouvelaient le concept hippocratique d’« air », voir Ramazzini 1724 : 29 et suiv.
  • [30]
    Les membres de la Société royale de médecine, qui mettent en valeur le traité de Ramazzini sur les artisans, s’intéressent aussi beaucoup aux autres écrits du médecin italien sur les épidémies et les épizooties ; ainsi Ramazzini est beaucoup cité par Jean-Jacob Paulet dans le premier volume de son histoire des épizooties (1775).
  • [31]
    C’est à tort qu’on a pu décrire que le De morbis artificum diatriba avait « distrait » Ramazzini de ses recherches antérieures sur les épidémies (Riley 1987 : 33). Voir Di Pietro 1964 : 134, « lettre à Antonio Magliabechi du 24 mai 1692 » ; 179, « lettre au même du 16 avril 1695 » ; 228, « lettre à Leibniz du 17 juin 1699 ».
  • [32]
    Voir Glasgow Mechanics’ Magazine and Annals of Philosophy 1826 : 217 ; Cabanis 1804 : 398. Sur les épidémies voir Cabanis 1823 : 463 et l’article « Ramazzini » du Penny Cyclopaedia of the Society for the Diffusion of Useful Knowledge 1841.
  • [33]
    Voir Report of Section of Provincial Medical and Surgical Association on Vaccination 1839, 7 : 18. Ce document est cité lorsque la question est à nouveau soulevée en 1866. Voir Charles Murchison (1866 : 32) qui résume un rapport rendu par le même auteur auprès de la Commission britannique sur la peste animale de 1865.
  • [34]
    La formule est de Michel Foucault (2007 : 17).
  • [35]
    Sur la météorologie médicale en Angleterre et en France au xviiie siècle, voir Rusnock 2002a : 109-136. On peut penser que l’édition publiée à Londres en 1717 du De morbis artificum diatriba était destinée à un milieu médical où, à l’image de Francis Clifton, Daniel Le Clerc ou John Friend, on s’attachait à développer une météorologie médicale proche de celle de Ramazzini (Rusnock 2002b).
  • [36]
    Ce n’est qu’à la fin du xviiie siècle que cet ancien terme aristotélicien fut mobilisé pour qualifier les nouveaux savoirs atmosphériques : voir Vladimir Jankovi? (2000).
  • [37]
    Dans cette citation Mêlier fait référence à Coray 1800 : 19.
  • [38]
    Pour un travail qui va dans cette direction, voir Carnevale, Rosental et Thomann (2012). Je remercie Paul-André Rosental de m’avoir communiqué ce texte avant sa publication.
Français

Les travaux historiques récents sur la « santé au travail » ont permis de mettre en valeur la diversité des savoirs et des traditions composant cet ensemble. Il est devenu difficile d’accepter l’idée commune selon laquelle le médecin italien Bernardino Ramazzini en aurait été le précurseur ou le père fondateur, dans son traité De morbis artificum diatriba publié en 1700. À partir d’une étude des diverses réceptions et usages de ce texte, cet article propose de voir le traité de Ramazzini, non comme un précurseur, mais comme un point d’entrée dans les régimes de savoir successifs sur les maladies professionnelles.

Ouvrages cités

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Julien Vincent
Julien G. R. Vincent, historien et enseignant à l’université de Paris 1 Panthéon-Sorbonne, il appartient au Centre d’histoire des sciences et d’histoire des techniques (CH2ST) et à l’Institut d›histoire moderne et contemporaine (UMR 8066).
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Mis en ligne sur Cairn.info le 16/04/2013
https://doi.org/10.3917/gen.089.0088
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