CAIRN.INFO : Matières à réflexion
« [...] I maintain that trust is irrelevant to commercial exchange and that reference to trust in this connection promotes confusion. »
Oliver Williamson (1993 : 469)[1]
« Les acteurs de la relation de crédit [...] invoquent une relation de confiance qui laisse supposer une certaine forme d’altruisme dans leur relation d’échange. La déconstruction du discours des acteurs montre que la relation de confiance est en fait sous-tendue par la rationalité économique. »
Michel Ferrary (1999 : 560)

1La « confiance » et plusieurs idées connexes (dont le « capital social ») occupent une place de choix dans la recherche en histoire et en sciences sociales. Toute une littérature théorique cherche à définir ce que la confiance implique, et les études empiriques examinent des formes d’organisation sociale que seule la confiance semble expliquer. Récemment, deux types distincts de littératures ont examiné ce qu’on pourrait appeler les éléments empiriques de la confiance. La première approche utilise des expériences de laboratoire afin de comprendre quel type d’individus fait confiance à qui et à propos de quoi, alors que la seconde procède par questionnaire pour saisir les liens et la confiance entre individus. La plupart de ces travaux supposent implicitement que la notion de confiance est neuve et importante.

2Certains chercheurs se sont montrés plus critiques envers cette notion de confiance. Dans un article antérieur, « Trust : a Concept too many » (2005b), j’ai appuyé la position d’Oliver Williamson qui suggère que la « confiance » ne contribue en aucune façon à l’analyse de problèmes commerciaux ou économiques [2]. Selon Williamson, tous les éléments utiles liés à la notion de confiance sont déjà disponibles dans la théorie économique standard. Je soutiens l’idée qu’il est superflu de parler de confiance pour comprendre le crédit, alors que nous possédons déjà les outils pour appréhender concrètement le phénomène. Parfois, un vocabulaire inédit peut aider les chercheurs à relancer un débat sur un sujet éprouvé. Ceci n’a pas été le cas avec la littérature de la confiance, qui a plutôt brandi ce terme comme une formule magique qui pouvait résoudre des problèmes insolubles ou mal pris en compte. Mais, pour traiter ces questions, il convient en fait de travailler sur les particularités d’un contexte social ou institutionnel donné et d’en déduire les raisons pour lesquelles les acteurs concernés s’attendent à ce que chacun se comporte honorablement. Ériger la confiance en facilitation sociale aux vertus magiques détourne les chercheurs de ce genre de questionnement et d’analyse détaillés.

3Plus récemment, les économistes ont rejoint la bataille avec deux types de travaux qui tentent de comprendre empiriquement la confiance. Ils cherchent, fort à propos, à découvrir les attributs individuels qui rendent probable la confiance mutuelle. Le premier groupe de travaux s’appuie sur des expériences de laboratoire et sur des enquêtes par questionnaire, le second sur des cas historiques. Ces deux approches butent sur certains des problèmes mentionnés dans mon article « Trust : a Concept too many ».

4La littérature sur la confiance a traité d’une grande variété de situations. Mon article, tout comme le précédent texte mentionné, se focalisent sur la notion de confiance dans les marchés et les institutions de crédit. Les idées que j’avance sont pourtant générales, car la recherche empirique sur le crédit est trop réduite pour s’y limiter. En fait, le crédit est sans doute celle des activités économiques où les questions de confiance se posent le plus fréquemment. Comme la racine du mot le suggère, le crédit nécessite qu’une des parties croie que l’autre tiendra parole et remboursera le prêt octroyé [3]. Je suis au fond étonné que les économistes n’aient pas immédiatement repoussé le « paradigme de la confiance », pourtant si spongieux et si contraire à leur (c’est-à-dire, notre) mode de pensée. Les réactions à mon article (2005b) sont d’ailleurs instructives. L’article a été téléchargé plus de six cents fois du site web du Social Science Research Network (SSRN) [4], mais son argument n’est jamais repris par les quelques publications qui le citent. Le présent article reprend brièvement cet argument, sans revenir sur mes propres recherches relatives aux institutions de crédit. Je discute ensuite les études économiques empiriques sur la confiance, pour conclure par quelques observations concernant les recherches récemment menées en France sur ce thème.

La confiance, un concept en trop

5Russel Hardin (2001, 2002) remarque que les définitions de la confiance en « intérêt incorporé » (encapsulated interest), comme chez Williamson, ne s’appliquent évidemment pas à deux types de situation. Premier cas, la confiance n’est pas un concept très intéressant dans les situations où la personne en qui j’ai confiance considère mon bien-être aussi important que le sien. Son attention à mon égard n’est pas distincte de celle portée à son propre égard. Second cas, certains individus agissent convenablement pour ne pas subir la colère divine. Ici, un individu se comporte honorablement parce qu’il craint pour son avenir, soit dans ce monde, soit dans l’autre. Ces questions, sans doute importantes, sont en-dehors des limites de la présente discussion.

6Les situations de confiance qui nous intéressent postulent, elles, une relation tripartite impliquant deux acteurs autour d’une action. Tout énoncé sur la confiance devrait donc préciser qui sont les acteurs et quelle est l’action. Je fais confiance à des individus ou à des institutions précises pour accomplir des choses précises. « Précis » est un adjectif soigneusement choisi, central pour mon raisonnement. Or, la littérature de la confiance suppose souvent que chaque acteur fait confiance à n’importe qui au sujet de n’importe quoi. Cette approche me semble vaine. Je peux avoir assez confiance en un ami pour lui prêter 100 dollars, mais pas assez pour lui en prêter 1 000. Il y a des gens à qui je prêterais plus, et d’autres rien du tout. Affirmer que je ferais confiance à n’importe qui pour tout, ou à tout le monde pour n’importe quoi, est assez absurde. Pourtant, l’idée que la confiance est un attribut stable d’une personne (qui fait confiance à tout le monde ou à personne) ou d’un environnement (les États-Unis comme société à confiance élevée, la Russie en société à confiance faible) sous-tend nombre de travaux empiriques qui utilisent le genre de questions posées dans le US General Social Survey, l’Eurobaromètre de l’Union européenne ou l’Afrobaromètre. Ces questions varient quelque peu, mais on demande généralement au sondé s’il croit qu’il peut faire confiance « aux gens ». Par exemple, l’Eurobaromètre demande si les « gens » de telle ou telle nation sont dignes de confiance. Ces questions ne nous mènent pas loin. Supposons qu’on demande à un Français s’il fait confiance aux Allemands. Quels Allemands le Français doit-il imaginer ? Dans sa réponse, il peut utiliser une connaissance précise de vrais Allemands qui résulte d’une interaction commerciale, éducationnelle ou militaire… Ses propos nous renseignent sur le genre d’Allemands qu’il a rencontré, et finalement sur son propre milieu. Seulement certains Français auront eu des relations commerciales avec des Allemands, d’autres des relations d’éducation en tant qu’étudiants ou professeurs, et d’autres encore un contact avec les Allemands pendant la guerre. Et dans la plupart des cas, répondre à la question ne fait appel à rien de plus qu’à des préjugés. La diversité des réponses à ce genre de questions nous en dit autant sur les différences entre sondés que sur la perception qu’ils ont des Allemands. Et à quelle action l’enquête se réfère-t-elle ? Certains sondés peuvent s’imaginer qu’on leur demande s’ils croient que les Allemands tiennent leurs engagements commerciaux ou trichent aux examens, d’autres s’ils croient que les Allemands envahiront la France [5].

7Les discussions sur la confiance tendent souvent à confondre ou à amalgamer faire confiance et être digne de confiance. Or il y a une différence analytique de taille entre les deux. Nous ne voulons pas vraiment savoir si un emprunteur est confiant, mais si on peut compter sur lui pour payer sa dette. Ce qu’on appelle un problème de confiance est en fait un problème lié à la fiabilité d’acteurs précis, ici l’emprunteur. Ne pas faire confiance à quelqu’un qui n’en est pas digne ne révèle rien de pathologique ; c’est tout simplement rationnel. Hardin (2001, 2002) donne l’excellent exemple de la profession médicale. Plusieurs discussions supposent que le déclin de la confiance envers les médecins découle d’un processus généralisé qui ronge la société. Peut-être bien. Mais peut-être que les médecins sont devenus moins dignes de confiance ou encore, plus vraisemblablement, qu’ils ne l’ont jamais été mais que nous le savons désormais. Il n’est pas nécessaire de revenir ici sur cette distinction.

La confiance entre information et contraintes

8Les approches de la confiance auxquelles je m’oppose en font toutes une question morale ou psychologique, et établissent implicitement la défiance comme défaut moral ou psychologique [6]. Dans cette perspective, la confiance est une qualité fixe, que possède ou pas un acteur ou un ensemble d’acteurs. Je soutiens plutôt que la confiance révèle ce que les acteurs savent des autres, et de ce qui arrive à ceux qui ne respectent pas leurs engagements. Comme Michel Ferrary (1999) le suggère, la confiance caractérise un environnement légal, institutionnel ou social plutôt qu’une personne. Selon moi, la popularité de la notion de confiance découle pour beaucoup d’une vision trop étroite de ce que les économistes veulent dire par « information and enforcement » (information et application des termes) [7]. Ou bien de l’idée, si tentante, que les économistes oublient toujours un élément extrêmement important. Or, la plupart d’entre eux acceptent désormais que les transactions impliquent des problèmes d’information. Il y a généralement deux façons de traiter ces problèmes. L’une consiste à structurer les relations commerciales de sorte que les parties soient incitées à dévoiler des informations importantes, l’autre consiste à chercher plus d’informations. Ceci peut prendre des formes bien différentes et nous emmène dans l’épaisseur de la vie des acteurs concrets, insérés dans des réseaux d’amis et de partenaires d’affaires, dans des familles, dans des quartiers. Certes, l’économie orthodoxe présente l’acteur central comme un agent isolé, mais elle considère de plus en plus cet agent au sein d’un contexte social qui joue sur les transactions qu’il entreprend.

9D’ailleurs, les modèles économiques stipulent le plus souvent une interaction précise et concrète entre deux acteurs ou plus. Les discussions sur l’économie de confiance devraient en faire autant. Considérons le cas de Dupont et de Durand, respectivement prêteur et emprunteur. Supposons que Dupont prête 1 000 dollars à Durand pour un an à un taux d’intérêt de 5 %. Les termes de l’entente stipulent que Durand remboursera 1 050 dollars à Dupont. Comment pouvons-nous inférer que Dupont « fait confiance » à Durand simplement parce qu’il lui a prêté de l’argent ? Supposons d’abord que tous deux vivent dans une société dotée d’un système judiciaire efficace et fonctionnant correctement, et que Durand possède assez de biens pour que Dupont soit assuré de rentrer dans ses fonds s’il doit le poursuivre en justice. Dupont n’a aucune vraie raison de craindre la perte de son investissement. Pour rendre l’exemple plus concret, supposons que Durand possède une terre valant 10 000 dollars et que Dupont pose comme garantie du prêt une hypothèque sur cette propriété. Nous considérons bien sûr que la société en question possède un système fiable d’enregistrement des hypothèques : Dupont est certain qu’il n’y a pas d’hypothèque antérieure, que Durand est bel et bien propriétaire, etc. C’est l’occasion d’établir une distinction délaissée par la littérature sur la confiance. Pouvons-nous dire que Dupont fasse confiance à Durand ? Nombre de chantres de la confiance répondraient par la négative : s’il lui faisait vraiment confiance, il aurait présumé que celui-ci respecterait ses engagements. L’hypothèque est alors une preuve de la défiance de Dupont, le recours à un système de sanctions légales qui se substituent au manque de confiance. Williamson, lui, dirait au contraire que cette situation révèle la présence de la confiance puisque Dupont accorde le prêt.

10Maintenant formulons la situation autrement : Dupont accorde le prêt à Durand, sans hypothèque, dans une société au système légal incertain. Ce prêt démontrerait-il alors la confiance de Dupont en Durand ? Les caractères que les enthousiastes de la confiance présentent comme différents de ceux du prêt « à l’hypothèque » ne sont en fait que d’autres moyens que Dupont a de réaliser les fonctionnalités de l’hypothèque. Dans ce cas, en effet, il a besoin d’informations sur son emprunteur et d’une capacité à faire appliquer les termes du prêt si Durand ne rembourse pas. Ces éléments se retrouvent dans tous les termes de prêt, et la littérature sur la confiance se trompe quand elle n’en voit pas la présence, aveuglée qu’elle est par l’existence ou l’absence du mécanisme légal de l’hypothèque.

11En effet, que veux-je dire par « informations » ? Dupont veut savoir si Durand voudra et pourra lui rendre l’argent avancé. Personne ne connaît vraiment la réponse à cette question, pas même Durand qui malgré toute sa bonne volonté ne sera pas en mesure de rembourser le prêt s’il est victime d’un revers de fortune inattendu. Dupont cherche donc dans deux directions. Premièrement, il veut connaître les affaires passées de Durand, sa réputation. Deuxièmement, il veut savoir quelle est la situation présente de ce dernier. Il est possible que Durand ait une excellente réputation, mais qu’il ait dernièrement connu quelques difficultés. Dans certains contextes, Dupont obtiendrait d’une agence de notation financière un rapport de crédit formel sur Durand. Il pourrait aussi lui demander de lui fournir des références, des noms d’autres personnes lui ayant prêté de l’argent, et ainsi vérifier sa conduite passée. D’ailleurs signalons que l’hypothèque elle-même transmet de l’information : Durand n’engagerait pas sa terre s’il n’avait l’intention de rembourser, et ainsi son consentement transmet de l’information à Dupont. La littérature sur la confiance confond parfois les mécanismes formels d’acquisition de l’information avec le besoin d’acquérir l’information. Mais revenons à nos contractants, et supposons qu’ils vivent dans un monde sans agence de notation financière. Dupont pourrait utiliser d’autres moyens pour évaluer Durand en tant que débiteur. Il pourrait obtenir des informations auprès de personnes ayant fait affaire avec celui-ci [8], ou se servir d’autres sources d’information. Les voisins de Durand, par exemple, peuvent savoir quelque chose d’utile sur sa santé et sur l’état de ses affaires.

12Le deuxième type de questionnement que mon exemple soulève se rapporte à la capacité de Dupont à faire appliquer les termes du contrat. Par « l’application des termes », nous entendons de façon générale ce que Dupont peut faire à Durand si celui-ci ne rembourse pas. L’application des termes s’exerce à deux niveaux. Le premier correspond à une menace voilée : que Dupont peut-il faire qui incite Durand à rembourser plutôt qu’à garder l’argent ? Le deuxième consiste à s’assurer que Dupont recouvrera son argent même si Durand essaye de renoncer à ses engagements. Dans le cas de l’hypothèque, Durand risquerait de voir sa terre saisie s’il ne rendait pas les sommes avancées : l’hypothèque fonctionne comme une garantie pour Dupont.

13On trouve dans la littérature sur la confiance une tendance à séparer d’un côté des garanties formelles comme l’hypothèque et, de l’autre, des moyens de contrainte plus informels, mais remplissant la même fonction. Supposons que Durand affirme qu’il ne remboursera pas le prêt. Dans certains contextes, Dupont pourrait menacer la réputation de son débiteur, juste en proclamant que ce dernier refuse d’honorer sa dette. Pour Durand, cette menace est aussi redoutable que celle de la saisie de la terre hypothéquée, puisqu’une réputation de probité est un bien qui permet d’emprunter et de faire des affaires dans de meilleures conditions [9]. Mais Dupont a bien d’autres alternatives qui dépendent, encore une fois, d’un contexte social précis. Il se peut que Dupont et Durand aient des partenaires en commun, ou que Dupont fasse des affaires avec des membres de la famille de Durand. Il se pourrait aussi que l’octroi du prêt à Durand par Dupont se base en partie sur le fait que la famille de Durand perdrait sa réputation si ce dernier faisait défaut [10].

14Tout cela est implicite et parfois explicite dans les approches de théories des jeux et d’économie de l’information, qui dominent les débats sur ces questions en économie. Il est surprenant que certaines des incarnations les plus célèbres de ces théories soient reprises par la littérature de la confiance, alors qu’elles n’ont souvent rien à voir avec elle. C’est le cas notamment avec l’analyse que fait Avner Greif de la « coalition » formée par les marchands maghrébins dans la Méditerranée des xe-xiie siècle (1989). Selon Greif, leur but était d’encourager les comportements honnêtes en rendant l’information plus disponible et les sanctions plus efficaces. Et Greif refuse explicitement une interprétation basée sur les qualités morales des participants (ibid. : 862-863).

15Ce débat met en relief les ambiguïtés inhérentes à la littérature basée sur les enquêtes par sondage. Beaucoup d’études utilisant le US General Social Survey concluent que les femmes et les membres des groupes minoritaires accordent moins leur confiance. Que cela veut-il vraiment dire ? Deux choses au moins. Soit que, sur son expérience d’une société raciste, un homme africain-américain ferait moins confiance que son homologue blanc à quelqu’un de précis dans un contexte précis. Soit, que l’Africain-Américain moyen n’est pas confronté au même type de décisions de confiance en raison de sa situation. La première conclusion suggère qu’un Dupont noir ne ferait pas confiance à Durand parce qu’il s’est fait posséder dans le passé, alors que la seconde suggère qu’un Dupont noir ne rencontre pas les mêmes Durand qu’un Dupont blanc. La première lecture laisse entendre que la confiance n’est ici qu’un re-étiquetage de l’inégalité raciale, un phénomène banal. La seconde suggère un programme de recherche intéressant, mais qui ne peut être mené à bien en utilisant les enquêtes par sondage qu’utilisent les études sur la confiance [11].

Que pouvons-nous apprendre de la littérature empirique sur la confiance ?

16Le contenu empirique des premières recherches sur la confiance était assez modeste, se limitant souvent à révéler l’absence de confiance ou son caractère indispensable pour la réalisation des échanges. Deux nouveaux axes de recherche sont apparus au cours des dernières années, qui dépassent ces approches antérieures. Leurs principes sous-jacents n’éludent pas les difficultés que j’ai pointées, mais ils sont intéressants car ils commencent à différencier les types de liens habituellement agrégés sous le terme « confiance ». Aucune étude récente ne traite directement des marchés de crédit mais leurs implications sont bonnes à penser pour nous. Voyons ce qu’il en est des apports et limites de deux de ces recherches.

Les laboratoires et les enquêtes

17La première recherche révèle la popularité croissante des expériences de laboratoire en sciences sociales. Une étude menée à l’Université de Harvard a permis de confronter les résultats d’une enquête en laboratoire aux réponses à des questions proches de celles posées dans le US General Social Survey (Glaeser et al. 2000). Ces approches expérimentales permettent aux chercheurs d’élaborer un protocole précis pour détecter la présence ou l’absence de confiance. Les étudiants recrutés pour l’enquête ont d’abord répondu à un questionnaire sur la confiance. Le formulaire comportait des questions plus détaillées que celles du US General Social Survey et des enquêtes semblables. Puis ils se sont livrés à deux jeux en laboratoire. Le premier est un « jeu de confiance ». Pour cette expérience, les étudiants sont répartis par paires, au hasard, et se rencontrent avant le début du jeu. Puis ils sont séparés et ne communiquent plus qu’indirectement. Un étudiant (l’expéditeur) reçoit un montant d’argent des enquêteurs et l’autre étudiant (le récipiendaire) envoie alors à l’expéditeur un message du type : « Si tu me donnes x dollars, je te redonnerai y dollars ». L’expéditeur décide alors quel montant il donne au récipiendaire. Puis les enquêteurs doublent la somme envoyée et le récipiendaire renvoie tout ou partie du montant qu’il a reçu, voire rien du tout. Ici la situation de confiance se rapproche un peu de celle d’un prêt. À partir de cette expérience, les chercheurs tirent des conclusions sur les inclinations de l’expéditeur à croire à la parole du récipiendaire et sur celles du récipiendaire à la tenir.

18Le second jeu est celui du « jeu des enveloppes ». Les enquêteurs disent aux étudiants qu’ils ont placé 10 dollars dans des enveloppes libellées à leur adresse et abandonnées au hasard sur le campus. L’enveloppe ne rejoindra son destinataire que si quelqu’un la ramasse et décide de la placer dans une boîte aux lettres au lieu de l’ouvrir et de garder l’argent. Les enquêteurs racontent différentes histoires sur les enveloppes ; l’une est dépourvue de timbre, l’autre n’est pas cachetée, etc. Les étudiants proposent ensuite une estimation de l’enveloppe : si un étudiant annonce qu’il paiera 6 dollars pour l’enveloppe, ceci indique qu’il croit qu’il y a 60 % de probabilité que l’enveloppe arrivera. Les enquêteurs utilisent ces estimations comme une mesure de la confiance accordée par les étudiants à de parfaits inconnus fréquentant les endroits où les enveloppes ont été laissées.

19Le « jeu de confiance » s’approche de l’exigence de précision évoquée au début : deux acteurs définis et une action bien délimitée. Les variations sur ce type de jeu sont courantes dans les recherches expérimentales sur la confiance. L’expérience est bien maîtrisable puisque les sujets prennent des engagements précis, et les enquêteurs peuvent voir s’ils les tiennent ou non. Il est plus difficile de saisir le but du « jeu des enveloppes ». Selon les auteurs, cette expérience mesurerait jusqu’à quel point un sujet croit qu’un inconnu déposera à la poste une enveloppe contenant de l’argent, mais elle se rapproche dangereusement de l’imprécision des questions sur les Allemands posées à des Français. Certains étudiants attribuent une modeste valeur à l’enveloppe parce qu’ils estiment qu’un inconnu la gardera pour lui, d’autres lui attribuent une faible valeur parce qu’ils croient que l’enveloppe deviendra vite illisible, ou qu’ils ont une piètre opinion de la poste [12].

20Les auteurs de cette étude se penchent ensuite sur la corrélation existant entre les résultats expérimentaux et les réponses au questionnaire. Ils supposent implicitement que leur expérience offre une mesure fiable de la confiance et ils l’utilisent pour valider les résultats du questionnaire. Ils identifient alors de faibles niveaux de corrélation entre les deux séries, et en concluent que les enquêtes par questionnaires sont de mauvais instruments pour mesurer la confiance. Leurs résultats indiquent plutôt si la personne sondée est digne de confiance ou non. Bien qu’ils ne fassent pas l’unanimité, ces résultats ont joué un rôle très important dans la littérature sur la confiance [13].

L’Afrique, l’esclavage et la confiance

21Une autre recherche examine les conséquences de long terme de la traite des Noirs pour expliquer les déterminants de la confiance. L’Afrique contemporaine demeure désespérément pauvre et ses institutions gouvernementales chroniquement faibles. Le legs de l’esclavage est souvent désigné comme une cause directe ou indirecte du problème. Selon Nathan Nunn (2008) et d’autres, l’expérience de l’esclavage et la perte de confiance qu’elle aurait induite aiderait à comprendre les modèles de développement de l’Afrique contemporaine.

22Nathan Nunn et Leonard Wantchekon (2009) se servent des questions de l’Afrobaromètre pour étudier les comportements de confiance. Selon eux, la traite a directement engendré la défiance. De nombreuses personnes capturées et réduites en esclavage l’ont été à la suite de la trahison d’un ami ou d’un proche. Cette expérience pousserait les habitants des régions concernées à craindre que d’autres ne veuillent les vendre comme esclaves. Bien sûr, la traite des Noirs s’est terminée à la fin du xixe siècle, mais Nunn et Wantchekon affirment que la méfiance est demeurée la norme à travers le temps. Selon eux, les membres d’un groupe particulièrement victime de la traite seraient moins portés à la confiance envers autrui.

23La stratégie économétrique utilisée pour identifier cet effet est très méticuleuse. Nunn et Wantchekon se demandent (je simplifie quelque peu) si l’appartenance à un groupe dominant dans une région durement frappée par la traite du xixe siècle rend un individu plus méfiant aujourd’hui. Comme groupe de contrôle, ils incluent dans l’étude des membres du groupe qui ont quitté cette région. Ils peuvent ainsi déterminer si les effets qu’ils identifient découlent du milieu de vie ou de l’appartenance au groupe. Nous pourrions certes nous attendre à ce que les normes circulent à double sens : si je suis Egba, mais que j’habite Lagos, mes normes sociales dépendraient des autres Egba mais également d’autres groupes avec lesquels j’interagis à Lagos. Les auteurs affrontent en fait la question de l’endogénéité des effets de la traite en jouant assez classiquement des variables instrumentales. Dans la mesure où cette approche fonctionne, nous n’aurions pas à nous soucier de savoir si le rapport à la traite d’autres groupes fausserait les résultats.

24Ces travaux de recherche soulèvent trois problèmes conceptuels. D’abord, le propos des auteurs est affaibli puisqu’il est fondé sur des exemples dans lesquels le comportement confiant d’un individu est précisément ce qui a occasionné sa capture. Les auteurs disent qu’une grande partie des personnes vendues comme esclaves l’ont été par des amis ou des membres de leur famille, ou encore qu’elles ont été capturées dans un endroit qu’elles avaient rejoint de leur plein gré, en faisant confiance à leurs hôtes. Par exemple, les auteurs racontent l’histoire de tambourineurs qui avaient consenti à jouer à bord d’un bateau négrier, avant d’y être faits prisonniers et vendus comme esclaves (Nunn et Wantchekon 2009 : 7). Les Africains provenant de régions affligées par l’esclavage auraient donc appris qu’il est dangereux de faire confiance aux autres. Vraiment ? L’exemple des tambourineurs nous laisse plutôt penser que malgré le danger d’être capturé et vendu comme esclave, les Africains ont continué à se faire confiance. Le problème soulevé par cette proposition est assez typique. Si la traite avait bel et bien engendré de faibles niveaux de confiance, les prisonniers de guerre auraient été les seules personnes vendues en esclavage car les Africains se seraient tellement défiés les uns des autres qu’ils auraient tout fait pour éviter une vie de servitude. Autrement dit, l’argument avancé par les auteurs suppose que de faibles niveaux de confiance sont le produit de comportements basés sur un haut niveau de confiance.

25Ensuite, deuxième problème, la traite des Noirs s’est terminée à la fin du xixe siècle, alors que les données de sondage datent de 2005. Seuls des présupposés implicites permettent de tracer un lien entre ces récentes données comportementales et l’histoire de la traite. Le plus important concerne l’histoire de l’Afrique après la colonisation. Admettons que le legs de l’esclavage explique la faiblesse des institutions et rende la méfiance rationnelle. Rien n’empêche de se demander pourquoi les auteurs privilégient l’histoire de l’esclavage et non celle de la faiblesse des régimes post-coloniaux. Il se peut que l’histoire post-coloniale des sociétés africaines n’ait pas grand-chose à voir avec l’esclavage lui-même : la corrélation entre faible confiance aujourd’hui et esclavage hier ne serait qu’un chevauchement géographique de phénomènes indépendants. Les auteurs présument implicitement que la période située entre la fin de la traite et la date de l’enquête Afrobaromètre forme une séquence ininterrompue.

26Enfin, le recours aux questions de l’Afrobaromètre constitue le dernier problème. Des questions telles que « Quel est votre niveau de confiance dans les personnes suivantes : membres de votre famille, amis, élus locaux, membres de votre groupe ethnique ou votre tribu, membres d’autres groupes ethniques ? » sont à la base de l’analyse statistique de Nunn et Wantchekon. Souvenons-nous que toute action sociale doit rassembler deux acteurs et une action. Celui qui répond à une telle question se voit comme l’un des deux acteurs. Mais quels membres des divers groupes concernés a-t-il à l’esprit ? Et quelles actions envisage-t-il ? On pourrait aisément penser que le sondé imagine le type d’interactions qu’il est le plus susceptible d’avoir avec les tiers en question. Par exemple, « Est-ce que je fais confiance aux membres de ma famille pour me venir en aide ? », ou encore « Est-ce que je crois que mes élus locaux utiliseront l’argent de mes impôts à des fins illicites ? ».

27Pour parer à ces carences, Nunn et Wantchekon ont ajouté d’autres questions. Comme les auteurs possèdent des données, ils peuvent poser des questions sur la confiance des gens en leur conseil local (un acteur plus précis) en fonction de la performance du conseil, le tout rapporté à une expérience historique précise de l’esclavage. L’importance de cette dernière en sort confirmée. Ces résultats confirment la validité de leur approche, et lèvent presque mes doutes quant au manque de précision de la question du sondage.

28Pourtant, cet article de Nathan Nunn et Leonard Wantchekon ne réussit pas à me convaincre de rejeter une explication à la Williamson : les Africains n’ont pas confiance en leurs gouvernements parce que les structures institutionnelles empêchent de voir ce que ces gouvernements font et les préservent de sanction s’ils trompent les citoyens. Ce que Nunn et Wantchekon appellent des niveaux de confiance faible pourrait n’être que le résultat d’une appréciation lucide des institutions politiques africaines. C’est ainsi que je lis leur conclusion que « […] plus haute la confiance d’un individu en son conseil local, plus forte sa tendance à assister aux assemblées locales » (2009 : 41). Cependant, leur article représente bien un certain progrès puisqu’il tente d’établir un lien entre des causes réelles de confiance ou de méfiance (la traite des Noirs) et des conséquences tout aussi réelles (les résultats des institutions politiques).

29Mais alors, quel est le genre de travail empirique que j’appelle de mes vœux ? Le prêt de Dupont à Durand est une bonne ébauche et le « jeu de confiance » un bon point de départ, mais on peut aller plus loin, et de deux façons. Premièrement, il faudrait analyser un vrai prêt avec des termes contractuels précis (des garanties). Ainsi les parties comprendraient toute la signification des termes de l’entente et de sa rupture. L’introduction de garanties donnerait aux chercheurs l’occasion de saisir la différence présente entre mettre en jeu un bien et mettre en jeu sa réputation. Les promesses du « jeu de confiance » sont trop peu réalistes par rapport à une situation de prêt. Tout ce que les sujets risquent est d’apparaître égoïstes et sournois aux yeux des autres, et tous savent qu’il ne s’agit que d’un jeu. La façon dont ces expériences se déroulent ne peut pas reproduire la situation de Dupont (qui risque de perdre une forte somme et voudrait sûrement punir Durand de sa malhonnêteté) et Durand (qui met en jeu sa réputation et ses relations avec d’autres partenaires). Deuxièmement, la bonne approche tenterait de simuler les aspects de contexte qui jouent un rôle substantiel dans les vraies discussions sur les marchés du crédit. Nous pourrions demander à Dupont d’accorder un prêt à Durand si tous deux ont un ami commun ou s’ils sont membres de la même organisation. Une telle approche exigerait un nombre considérable de sujets et soulèverait sans doute des problèmes de sélection et d’endogénéité, mais nous pourrions en retirer des enseignements inédits. Selon moi, il nous faut aborder de la même façon la recherche par questionnaires. Posons aux sondés une question précise et délimitée plutôt que de leur demander s’ils « font confiance » aux autres. Décrivons un prêt, et demandons au répondant s’il l’accorderait. Présentons une situation où la malhonnêteté commerciale est possible et demandons au sondé s’il croit qu’un genre précis de personne profiterait de l’occasion. Une telle démarche nécessiterait un protocole très élaboré, mais elle apporterait des réponses aux questions qui nous intéressent vraiment.

Ces Français qui semblent faire confiance à la confiance

30La littérature sur la confiance discutée dans notre article est d’origine anglo-saxonne. On pourrait donc attribuer son contenu à la place relativement moindre de la pensée historique dans le monde anglo-saxon des sciences sociales. De même, au niveau politique, les notions de confiance et de capital social ont joué un rôle commode dans les débats sur les politiques sociales aux États-Unis et en Angleterre au cours des années 1990. Elles ont été présentées comme des recettes miracles pour améliorer les écoles, réduire la criminalité et amoindrir les tensions raciales sans grever les dépenses publiques. Les deux termes ont été accueillis chaleureusement par la droite, et par la gauche. Mais les débats sur la « confiance » (Vertrauen) se sont propagés jusqu’en Allemagne où les sciences sociales participent de la démarche historique. Même quelques historiens allemands sérieux en font désormais usage [14] !

31La notion de confiance est-elle adoptée par des sociétés où la tradition académique des sciences sociales incorpore plus organiquement la pensée historique ? La France, où cette notion n’est apparue que tout récemment dans la littérature, offre à cet égard un exemple intéressant. Un ouvrage récent suggère même un intérêt croissant dans la confiance en tant que sujet et outil d’analyse (Bernoux et Servet 1997). Le livre est une introduction fort utile au concept en général, et la contribution de Laure Bazzoli et Véronique Dutraive y offre un panorama sur la notion de confiance en économie institutionnelle. Dans leur discussion de Williamson, elles font remarquer que celui-ci considère que le fondement de la transaction est le calcul rationnel fondé sur la compréhension du comportement des autres acteurs, une fois prises en compte les incitations fournies par l’environnement institutionnel. Elles concluent qu’« il y a une certaine équivalence fonctionnelle entre l’économie des coûts de transaction et la confiance pour justifier du statut théorique de la firme » (Bazzoli et Dutraive 1997 : 401). Je dirais même plus : les idées sont les mêmes mais la première est beaucoup plus précise et concrète que la deuxième.

32Dans son article oublié, Ferrary (1999) avait tenté de prévenir la stérilité de l’approche par la confiance qui apparaît maintenant dans la littérature scientifique française. La citation placée en épigraphe ici dans mon article insiste, avec justesse, sur le fait que la confiance elle-même fait partie d’un calcul rationnel visant à déterminer ce que nous pouvons attendre d’un autre acteur : elle ne s’oppose pas fondamentalement au calcul rationnel. Tout au long de son étude, Ferrary insiste sur ces aspects précis d’une relation commerciale qui fondent la confiance, faisant écho à certains éléments discutés plus haut. Par exemple, il suggère que la proximité géographique permet aux employés de banque d’acquérir des connaissances sur des clients potentiels. Il s’agit en fait d’une stratégie adoptée par les petites banques et institutions financières afin de contrer l’avantage de leurs gros compétiteurs, aux volumes plus élevés. Ferrary insiste aussi sur l’importance de la réitération des interactions. En structurant un contrat de manière à ce que les parties interagissent de façon répétée sur une longue durée, les acteurs s’assurent que davantage d’informations seront fournies, ce qui renforce la confiance mutuelle [15]. Mieux encore, Ferrary ajoute que joindre une relation « personnelle » à une relation professionnelle constitue un effort pour transformer la relation en une relation de confiance. Mais il évite soigneusement de faire de cette confiance ce genre d’émotion magique et douce qui surgit entre deux êtres lors du partage d’un repas. La confiance veut tout simplement dire que les parties en savent plus l’une sur l’autre, que cette relation a une plus grande valeur à leurs yeux et qu’elle offre une meilleure garantie d’exécution du contrat.

33

« La relation professionnelle deviendra le prétexte à des relations informelles qui consistent en des échanges d’informations sans lien direct avec le projet et a priori extra-professionnels. Cette convivialité ne résulte pas uniquement de la sociabilité naturelle des individus mais relève de la stratégie d’acteurs rationnels. Le banquier a intérêt à mieux connaître ses débiteurs pour mieux appréhender leurs projets personnels qui peuvent interférer sur leur projet professionnel, pour découvrir leur personnalité et notamment pour évaluer leur style de management […] ».
(1999 : 574)

34Ce passage pourrait servir d’avertissement et d’enseignement à quiconque voudrait entreprendre des recherches empiriques sur la confiance. Dans certains cas, Dupont et Durand pourraient dresser un contrat écrit et s’attendre à ce que toute dispute soit réglée devant les tribunaux. Mais si le prêt est modeste et le système légal trop inefficace ou trop onéreux pour recouvrer une petite somme, on peut s’attendre à ce que Dupont utilise d’autres moyens pour savoir si Durand est un bon débiteur. Dupont pourrait n’accorder un prêt à Durand que s’ils étaient liés par d’autres relations, en partie professionnelles, en partie sociales, lui permettant d’en savoir plus sur Durand. D’ailleurs ces relations forceraient Durand à offrir une sorte de garantie sociale. Si ses relations professionnelles avec Dupont menaient à la rupture de leurs relations extraprofessionnelles, alors il perdrait quelque chose.

35L’analyse de Ferrary au sujet de la centralisation et de la décentralisation bancaire illustre comment une véritable analyse de la confiance peut offrir une explication et pas seulement une étiquette. Au cours des dernières décennies, beaucoup de banques ont grandi et ont adopté une structure en succursales. En conséquence, elles ont cherché à développer des grilles d’évaluation (credit scoring systems) pour uniformiser les techniques d’octroi de crédit. Deux raisons à ce développement. D’un côté, il s’agissait de « rationaliser » l’octroi de crédit en rendant la procédure moins onéreuse et, de l’autre, de reprendre le contrôle sur l’activité des succursales.

36Les anciennes méthodes d’octroi de crédit accordaient beaucoup d’importance à l’immersion des conseillers dans une communauté donnée, à l’entretien de liens commerciaux et sociaux avec les emprunteurs présents et à venir. Le conseiller savait à qui faire confiance. Évidemment, ce modèle dépendait des qualités de certains conseillers locaux et faisait obstacle à la centralisation du pouvoir décisionnel au siège. En résulte une contradiction classique de la culture bancaire : si le quartier général veut contrôler l’octroi de crédit, il doit s’en remettre à des mécanismes d’évaluations de crédit beaucoup moins précis, comme les grilles d’évaluation. Si, au contraire, la banque veut mettre à profit la qualité des informations et relations de ses conseillers locaux, elle s’interdit d’encadrer leurs décisions [16].

37Certains travaux récents offrent une définition un peu moins systématique de la confiance, mais inscrivent ses déterminants dans des situations concrètes et historiques. Anne Montenach, dans une étude des marchés lyonnais au xviie siècle, montre comment les particularités des acteurs et de leurs situations nous en apprennent plus que l’invocation de la confiance (2009). Elle insiste sur le rôle de l’information :

38

« C’est parce qu’un commerçant connaît, de près ou de loin, un acheteur qu’il accepte de lui faire crédit ».
(ibid. : 336)

39

« À l’inverse, un commerçant refusera de faire crédit à quelqu’un qu’il ne connaît pas suffisamment, qui ne lui inspire pas confiance ou qui s’est déjà révélé être un mauvais payeur ».
(ibid. : 344)

40Son argument se prolonge par une analyse de la sensibilité élevée des marchands aux ragots et aux insultes, surtout s’ils mettent en doute leur honnêteté. À raison, elle insiste sur les effets nuisibles de ces insultes quant à la réputation du marchand auprès de partenaires commerciaux présents et futurs.

41Anne Montenach (2009 : 344) soulève une autre question d’intérêt, non traitée par la littérature sur la confiance, du moins à ma connaissance. Beaucoup de travaux insistent sur le fait que les environnements larges et impersonnels, comme les villes, engendrent moins de confiance. Elle explique pourquoi : dans la mesure où Durand peut trouver d’autres créditeurs, payer son dû à Dupont est beaucoup moins urgent. Cette explication est analytiquement différente de celles qui mettent l’accent sur l’information ou les relations sociales. L’étude de Montenach rapporte, par exemple, la plainte d’une épouse de boucher au sujet d’un client auquel son mari avait fait crédit : le client ne l’avait pas remboursé et fréquentait désormais une autre boucherie. Il est probable qu’il aurait payé sa dette si aucun autre boucher n’avait été disponible. Le prêteur n’avait pas réalisé que la présence de compétiteurs diminuait sa capacité à vendre sa viande à crédit [17]. Simplement en créant plus de compétition, un marché de crédit plus grand peut diminuer les incitations au remboursement, et conséquemment, la confiance.

42Au contraire, il est fâcheux que certains travaux récents reprennent le pire de la littérature anglo-saxonne en invoquant la confiance sans la définir. L’étude de François Cusin (2002) sur les banquiers et leurs clients en est un bon exemple. Son article repose sur une série d’entretiens conduits auprès de clients bancaires, et les informations présentées ne sont pas dénuées d’intérêt. Cependant, bien que la « confiance » soit un thème important dans l’article, Cusin ne nous informe jamais de ce qu’il entend par ce mot ni de ce qu’il attend de la notion. L’idée apparaît presque comme une tautologie. Par exemple, il mentionne à un certain moment que :

43

« Le caractère hybride de la relation bancaire se renforce lorsque l’on considère la place de la dimension “personnelle” en jeu dans l’interaction entre le client et son banquier. Il en ressort, qu’à la confiance systémique et à celle liée à l’institution elle-même, s’ajoute l’ancrage de la confiance ».
(ibid. : 122)

44Et pourtant, cet article a été publié après celui de Ferrary…

Pourquoi les Français ne font-ils pas confiance de nos jours ?

45Un ouvrage paru récemment requiert une discussion plus longue parce qu’il reproduit fidèlement bien certains travers de la littérature anglo-saxonne classique. Dans La société de défiance, Yann Algan et Pierre Cahuc (2007) relient les problèmes sociaux, politiques et économiques de la France d’après-guerre au manque de confiance. Ils attribuent les origines de ce manque de confiance aux formes d’organisation économique « corporatiste » ou « étatique » ayant émergé après la Seconde Guerre mondiale. Selon eux, le manque de confiance de la France contemporaine s’oppose radicalement à la société française de la IIIe République, l’âge d’or de la confiance. Ce livre, délibérément polémique, a suscité beaucoup de commentaires en France, et ma brève discussion traite moins de son contenu que de ce qu’il illustre de mes doutes vis-à-vis de la notion de confiance [18].

46Il y a des ressemblances notoires entre la littérature anglo-saxonne sur la confiance et le travail d’Algan et Cahuc. Pour eux, la confiance est à la fois une catégorie analytique et un outil qu’ils utilisent pour critiquer la société française actuelle. Entre leurs mains, la confiance a une teneur polémique, voire idéologique. À cet égard, leur travail se rapproche du Bowling Alone de Robert Putnam (2000). Algan et Cahuc décrivent une nouvelle « Chute de l’homme », lors du passage de la IIIe République à la Libération. Nombre d’auteurs américains, et notamment Putnam, traitent pareillement les années 1950 comme l’âge d’or américain et voient dans les troubles associés à la guerre du Vietnam et au scandale du Watergate la cause de la détérioration de la confiance [19]. Certes, beaucoup de chercheurs défendant cette position le font sans arrière-pensée. Mais, cette tactique rhétorique est bien utile à ceux qui découpent l’histoire en périodes distinctes pour critiquer certains développements sociaux : le mouvement afro-américain des droits civiques, le mouvement de libération des femmes aux États-Unis, ou un type d’économie politique en France.

47L’administration de la preuve chez Algan et Cahuc est parfois ingénieuse, mais elle conforte les inquiétudes que j’ai exprimées à propos de l’Eurobaromètre et autres enquêtes du genre. Ils décrivent la France comme une société où la confiance est faible. Comme plusieurs comptes rendus du livre l’ont déjà fait remarquer, tout est relatif au choix de la comparaison. Les Français font moins confiance que les Norvégiens, du moins si on prend les résultats de ces sondages au sérieux, mais ils font plus confiance que les Japonais. Encore une fois, demander à des Français choisis au hasard s’ils croient que la plupart des gens sont dignes de confiance est un exercice totalement vain, et les homologues américains ou russes de ces Français ne peuvent pas servir de points de comparaison utiles.

48Algan et Cahuc utilisent avec finesse les questions ayant trait au pays d’origine des sondés du US General Social Survey. Ils montrent d’abord que les réponses aux questions sur la « confiance » données aux États-Unis correspondent aux réponses à des questions semblables dans le pays d’origine du sondé. Les gens en Amérique latine ne font pas confiance, les immigrants d’Amérique latine vivant aux États-Unis non plus. Algan et Cahuc répartissent ensuite les immigrants en deux groupes, selon qu’ils aient immigré avant ou après la Seconde Guerre mondiale. En utilisant les Suédois comme groupe de référence, ils expliquent que les Français ayant immigré avant la guerre étaient plus confiants que les Suédois et que ceux d’après l’étaient moins. Ils en concluent que les immigrants d’avant-guerre ont quitté une France qui était plus confiante [20].

49Cette jonglerie statistique laisse perplexe. D’abord, les immigrants français ne forment qu’un groupe infime. Il n’y avait que cinq sondés nés en France dans l’échantillon du US General Social Survey de 2004 [21]. Algan et Cahuc sont avares de détails quant à leurs méthodes statistiques et ils ne présentent pas les erreurs-types. Il est ainsi impossible de savoir si les différences entre avant et après guerre sont statistiquement signifiantes. Je doute fort qu’en bonne méthode un si petit échantillon puisse soutenir leur conclusion. De surcroît, la prouesse statistique nous ramène aux préoccupations soulevées par la recherche sur l’esclavage en Afrique. Algan et Cahuc présupposent implicitement que les deux groupes d’immigrants proviennent des mêmes milieux de la société française et que leurs attitudes vis-à-vis de la confiance n’ont été influencées en aucune façon par leur vie aux États-Unis (ou alors de manière identique). Or ces deux propositions sont fausses. La première vague d’immigration contient sans doute une forte proportion de réfugiés et d’épouses de soldats américains alors que la deuxième est probablement dominée par des travailleurs qualifiés et des membres des professions libérales. Les réfugiés peuvent avoir exprimé plus de confiance par contraste entre la société américaine et celle qu’ils avaient quittée. Et la plupart des épouses françaises des soldats américains se sont établies dans des communautés peu enclines à avoir des doutes sur le comportement de leurs voisins ou sur la probité de leur gouvernement. Les immigrés français plus récents proviennent de milieux sociaux différents, et n’ont pas immigré aux États-Unis pour les mêmes raisons que leurs prédécesseurs. Même en admettant qu’il y ait une différence statistique solide entre ces deux groupes d’immigrants, on doit douter qu’elle puisse révéler des distinctions historiques entre la France d’avant et d’après guerre. Faire semblant de se pencher sur l’histoire sans se soucier du contexte historique ne fait pas avancer la recherche.

Obtenir de l’information, contrôler l’action

50Depuis une vingtaine d’années, les concepts de « confiance » et de « capital social » ont donc été discutés et utilisés par les chercheurs. Une grande partie de cette littérature est théorique et travaille sur les définitions de ces concepts et leur domaine d’application. Mais il y a tout une production empirique qui soutient qu’il est analytiquement utile d’étiqueter des sociétés ou des contextes « à confiance élevée » versus « à confiance faible », ou de déterminer si les sociétés ont beaucoup ou peu de capital social. Mon article de 2005 disait qu’il était vain d’utiliser le terme « confiance » comme un mot magique servant à classer des actions ou des contextes particuliers. Je défendais plutôt l’approche d’Oliver Williamson : considérer le comportement confiant comme une conséquence de l’évaluation par un agent des incitations qu’ont les autres agents à se comporter honorablement. La confiance n’est pas un attribut personnel et moral, mais bien celui d’un contexte social, légal et économique.

51La confiance entre en jeu dans mes propres travaux sur les intermédiaires financiers spécialisés dans le crédit aux personnes pauvres. Les incarnations historiques de ces institutions (les coopératives de crédit, les établissements de prêts sur gage, les associations de crédit informelles et autres) ont toutes adopté des conditions de prêt peu orthodoxes lorsqu’on les compare aux banques de leur temps. Certains ont suggéré que ces institutions avaient découvert une nouvelle façon « d’organiser la confiance ». Selon moi, ce genre d’interprétation relève de l’aveuglement volontaire. Mes recherches insistent au contraire sur les divers moyens utilisés par les coopératives de crédit pour déceler les emprunteurs à risque et offrir à leurs clients des incitations au remboursement. Une telle approche nécessite une compréhension détaillée des contextes sociaux et institutionnels ainsi qu’une bonne connaissance de la théorie économique orthodoxe doublée d’une connaissance de manuels bancaires assez ennuyeux. Mais elle nous en apprend davantage qu’un quelconque mot valise sur ce qui s’est réellement passé.

52Cet article a offert une revue critique de deux domaines de recherche empiriques qui se sont récemment développés autour de la confiance. Les économistes dominent le premier domaine empirique, qui conserve certaines des faiblesses de la littérature canonique de la confiance. On s’attarde encore trop peu sur ce que des acteurs précis feraient face à un acteur précis et pour une action précise. Néanmoins, cette littérature empirique a le mérite d’explorer les relations et pratiques de la confiance, ce qui est un progrès de taille par rapport à l’incantation à la confiance qui fait l’ordinaire du canon à la Putnam. Les travaux en langue française sur les marchés de crédit et les institutions bancaires constituent le second domaine. Cette littérature me rappelle la littérature anglo-saxonne antérieure dans la mesure où elle offre à la fois des discussions analytiques et empiriques précises et éclairées, et de malheureuses invocations de la confiance qui se substituent à l’analyse.

53Traduction de Jonathan Cayer

J’aimerais remercier, sans pour autant les associer à mes conclusions, Bruce Carruthers, Gilles Laferté, Sheilagh Ogilvie, Francesca Trivellato et Christopher Udry. Merci aussi à Florence Weber et deux lecteurs anonymes pour leurs commentaires, ainsi que Jonathan Cayer pour la traduction française du manuscrit.

Notes

  • [1]
    Oliver Williamson restreint sa discussion aux relations commerciales. J’adopte la même approche dans cet article, même si une bonne partie de l’argument pourrait être appliqué à d’autres domaines, comme la politique. Notons au passage que Williamson pense que nos efforts sont vains car la « confiance » et le « capital social » semblent être des notions réconfortantes dont il est impossible de se débarrasser, malgré leur inutilité. Le passage de Michel Ferrary se trouve dans son article de 1999 à la page 560.
  • [2]
    Sheilagh Ogilvie se montre elle aussi sceptique (2004, 2005). Ses recherchent insistent sur le fait que le capital social peut être utilisé pour nuire aux femmes et aux minorités. La plupart des auteurs, dont Robert Putnam (2000), supposent que la confiance et le capital social jouent toujours un rôle positif.
  • [3]
    Dans mes recherches sur les coopératives de crédit allemandes (Guinnane 1997, 2001, 2003, 2005 a), je cherche à savoir pourquoi des institutions si petites ont pu prospérer. En mettant à profit les liens sociaux, elles ont défini des pratiques d’octroi de crédit à faibles coûts avec des taux de remboursement élevés. Elles ont aussi élaboré des institutions régionales leur permettant de contrebalancer les limitations inhérentes à leur modèle local.
  • [4]
    Les articles les plus populaires du SSRN sont téléchargés à plusieurs milliers de reprises.
  • [5]
    Préciser à quel groupe nous faisons référence ne représente que la moitié du problème comme nous le verrons lorsque nous discuterons l’étude sur l’Afrique.
  • [6]
    S. Ogilvie (2005) propose le terme « la confiance comme sentiment », qui est peut-être meilleur que le nôtre.
  • [7]
    Note du traducteur : L’expression originale était information and enforcement. Le mot enforcement est difficilement traduisible, renvoyant à l’idée de contrainte, d’exécution ou d’application de cette contrainte, notamment par la loi mais pas exclusivement, pour obliger quelqu’un à respecter le cadre d’un contrat, d’un accord.
  • [8]
    Cet exemple souligne bien la difficulté d’établir une distinction entre les actions qui impliquent la confiance et leur contraire. Quelle est la différence entre l’action d’une grande banque qui demande à un emprunteur des lettres de référence de prêteurs antérieurs avant d’octroyer un prêt et la visite d’un petit prêteur à une connaissance faisant affaire avec son emprunteur afin de collecter des informations ?
  • [9]
    Cependant, porter atteinte à la réputation de Durand ne permet pas à Dupont de recouvrer son argent : le bien « réputation » n’est pas transférable.
  • [10]
    Yoram Ben-Porath (1980) avait, il y a déjà longtemps, insisté sur le rôle joué par la famille et les autres « relations ».
  • [11]
    Soulignons que nous n’avons jamais supposé que Dupont et Durand se soucient du contexte institutionnel dans lequel ils vivent. Ils peuvent n’être que des atomes, comme l’affirme la théorie économique standard, mais le contexte social demeure important. Et rien de ce que nous avons dit n’exige une situation d’information parfaite.
  • [12]
    Pour des raisons qu’ils n’expliquent pas, les auteurs ont mené le « jeu des enveloppes » en précisant les lieux d’abandon à Cambridge dans le Massachusetts. On peut imaginer que les différences dans l’estimation des enveloppes révèlent finalement une opinion sur les divers quartiers où les enveloppes ont été laissées.
  • [13]
    Ernst Fehr et al. (2003) ont conduit un exercice similaire et ont détecté plus de corrélations entre les résultats de l’expérience et ceux de l’enquête. Ils attribuent cette différence à l’échantillon de sujets plus restreint de l’étude d’Harvard (les étudiants de premier cycle d’Harvard). Voir aussi Fehr (2009).
  • [14]
    Ute Frevert (2003) sert d’introduction à une collection contenant plusieurs essais utiles, malgré l’accent mis sur la confiance.
  • [15]
    M. Ferrary pense à tort que ceci ne fait pas partie de la logique de l’analyse économique néo-classique.
  • [16]
    Laferté et al. (2010) discute un problème connexe en lien avec le croissante des relations bancaires et le déclin des interactions physiques dans le crédit aux consommateurs dans les années 1960 et 1970.
  • [17]
    Comme les tambourineurs africains, ce cas est un rare exemple d’une « erreur de confiance ».
  • [18]
    Voir, par exemple, Rodriguez et Wachsberger 2009 ; Delalande 2008.
  • [19]
    Précisons pour un public français que durant cet « âge d’or » les Noirs américains ne pouvaient souvent pas voter et étaient soumis à une terreur arbitraire, que les femmes étaient reléguées à un rôle domestique à la maison et secondaire dans la société, et que certains Juifs ayant fui le nazisme pouvaient être confrontés à l’antisémitisme.
  • [20]
    Par le même truchement, ils soulignent qu’à l’inverse des Français les immigrants tchèques sont devenus plus confiants au fil des ans. Yann Algan et Pierre Cahuc ne s’attardent pas là-dessus, mais si on suit leur argument, on conclut que le régime communiste d’après-guerre en Tchécoslovaquie a généré de la confiance.
  • [21]
    Le GSS est disponible gratuitement en ligne : http://www.norc.org/GSS+Website/Download/
Français

Résumé

La « confiance » est désormais une notion centrale en histoire et dans les sciences sociales, y compris en économie. L’auteur a défendu ailleurs l’idée que, pour les relations commerciales au moins, le terme « confiance » n’ajoutait rien d’utile aux concepts d’information et de sanction, pierre de touche des analyses économiques orthodoxes des marchés du crédit. Il semble plus utile de consacrer les efforts de recherche aux contextes sociaux et intellectuels particuliers qui amènent un acteur à faire confiance à un autre. Un certain nombre de travaux empiriques récents, en particulier en langue française, permettent de revenir sur cet argument.

Ouvrages cités

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Timothy W. Guinnane
Historien, enseigne l’histoire économique au Département d’économie (chaire Philip Golden Barlett) de Yale University. Titulaire d’un PHD de Stanford, il a été professeur assistant d’économie à Princeton University. À Yale depuis 1993, ses travaux portent sur l’histoire financière et démographique de l’Europe de l’Ouest et des États-Unis.
Cette publication est la plus récente de l'auteur sur Cairn.info.
Mis en ligne sur Cairn.info le 15/07/2010
https://doi.org/10.3917/gen.079.0006
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