CAIRN.INFO : Matières à réflexion

Selon le philosophe Wilhelm Dilthey, la vie humaine est fondée sur la temporalité dont chacun recherche, au cœur de la plénitude du présent, l’expression des possibles en s’appuyant sur le socle du passé (Dilthey, 1910/1970). L’inscription temporelle du sujet ne garantit cependant en rien une cohérence du flux d’expérience, et aucun ordre ne saurait surgir par lui-même de la projection dans l’avenir. C’est par le processus de signification que les fins trouvent un début d’harmonie. Ce rapport au passé et aux fins s’avère aujourd’hui en profonde mutation. Le terme de « régime d’historicité » désigne les modalités temporelles de conscience de soi des communautés humaines. Aux temps modernes s’est élaborée une autorité du futur se substituant à l’autorité de la tradition. Ce régime d’historicité a laissé ensuite la place à une autorité du présent caractérisée par « l’expérience contemporaine d’un présent perpétuel, insaisissable et quasiment immobile, cherchant malgré tout à produire pour lui-même son propre temps historique » (Hartog, 2003, p. 40). Ce présentisme affecte les sociétés, mais impacte aussi la temporalité subjective.
La temporalité psychique se manifeste en un acte de temporalisation aux consonances multiples. La notion d’espérance rend alors compte d’un travail d’attente et de signification lié à la temporalisation des possibles. La temporalisation prend aujourd’hui un tour inédit, caractérisé par un travail particulier du temps et une pensée du futur devenue apophatique, c’est-à-dire décrivant, dans un contexte de catastrophisme, l’envers de son objet, et fonctionnant ainsi dans le registre de la négation…

Français

L’article analyse – dans le registre d’une anthropologie culturelle informée par la phénoménologie – la manière dont l’inscription du sujet dans la temporalité (la temporalisation) prend aujourd’hui un tour inédit, dans lequel le rapport à la décision et la pensée du futur sont en crise. Est alors mise en valeur la notion d’espérance en tant qu’elle peut faire l’objet d’un « travail » d’attente et de signification accompagnant la temporalisation. Le champ de la filiation constitue alors un domaine essentiel dans lequel s’exprime ce passage contemporain d’une pensée de l’originaire à un difficile exercice d’ouverture des possibles. Sont exposés enfin les enjeux théorico-cliniques d’une approche inventive de la temporalité en situation de cure, quand les problématiques de filiation et d’« usure » de la transmission affaiblissent la « fabrique » du temps.

  • chronos
  • filiation
  • kairos
  • krisis
  • temporalisation
  • travail d’espérance
Jacques Arènes
Psychologue clinicien, psychanalyste, docteur en psychopathologie fondamentale et psychanalyse. Habilité à diriger des recherches, directeur de l’École de Psychologues Praticiens. Équipe « Vulnérabilité, Capabilité, et Rétablissement », Unité de Recherche « Religion, Culture et Société », Institut Catholique de Paris.
10 rue Saint-Lazare, 75009 Paris
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Mis en ligne sur Cairn.info le 21/06/2022
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