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1La fourniture de services techniques essentiels (d’approvisionnement en eau potable, d’accès à l’énergie, de gestion des déchets solides et liquides, de drainage des eaux pluviales, de télécommunication...) se heurte, dans les villes africaines, aux difficultés de l’universalisation du réseau. Les données disponibles l’attestent : au rythme actuel de la croissance démographique et des investissements, l’Afrique subsaharienne atteindra les objectifs du millénaire pour le développement dans le secteur de l’eau potable seulement en 2040 et, dans le domaine de l’assainissement, en 2076, tandis que dans certains pays les taux de couverture de ces services déclinent (Watkins, 2006). La qualité d’autres services, notamment ceux d’électricité, se dégrade comme en atteste un peu partout la généralisation des délestages.

2Pour l’essentiel, les solutions proposées ont été formulées dans le cadre d’une reproduction des systèmes de fourniture qui assurent la desserte des villes dans les pays industrialisés. Ces systèmes reposent sur le modèle du réseau conventionnel, ensemble d’équipements interconnectés, planifiés et gérés de manière centralisée par un opérateur unique offrant un service homogène sur un territoire donné qu’il contribue ainsi à solidariser (Maria, 2007 ; Coutard, 2010). Transféré en Afrique subsaharienne dans un cadre colonial, ce modèle est exposé depuis aux grandes évolutions doctrinales en provenance du Nord, les formes dominantes de la gestion publique centralisée ayant été progressivement remises en cause, à partir des années 1990, par des réformes néolibérales appliquées partout avec plus ou moins de cohérence (corporatisation des organismes publics, privatisation de la gestion des réseaux, nouvelles législations et marchandisation des services). En termes d’universalisation des services en réseaux, ces réformes sont un échec. Toutefois, en transformant le cadre d’action et en facilitant la reconnaissance d’offres alternatives, elles ont diversifié, pour de nombreux citadins pauvres notamment, les conditions d’accès aux services essentiels (Jaglin, 2005). Il est ainsi frappant de constater, dans toutes les villes africaines, petites et grandes, la diversification des systèmes socio-techniques de desserte, des acteurs impliqués, des structures institutionnelles avec, à la clef, une différenciation des offres de services. Parmi celles-ci, beaucoup relèvent de filières informelles.

3Jusque récemment, la réflexion et l’action se sont concentrées sur l’extension du service conventionnel et la réduction des offres alternatives, mais le réseau a-t-il partout vocation à l’universalité ? Les villes africaines ne sont-elles pas l’expression d’un autre modèle, composite, dans lequel le réseau cohabite, durablement et depuis longtemps, avec des extensions non conventionnelles de son propre système socio-technique et des fonctionnalités de service hors réseaux (Jaglin, 2010) ? Dans cet article, il s’agit d’expliquer pourquoi les dynamiques de l’urbanisation et celles des services en réseaux, loin de résorber les dispositifs décentralisés alternatifs, ont produit des systèmes de fourniture structurellement différenciés. En revenant sur les conditions de l’urbanisation en Afrique et sur celles du déploiement des services essentiels au travers de « configurations de fourniture » (Olivier de Sardan et al., 2010) constituées de sous-systèmes socio-techniques hétérogènes, nous tentons de proposer un cadre analytique général à cette déconnexion.

4Cette réflexion reprend un constat déjà formulé sur la capacité limitée des facteurs endogènes à expliquer seuls les évolutions et transformations des réseaux dans la longue durée, et donc la nécessité de les articuler à leur « englobant » dans une analyse centrée sur les « interdépendances entre un réseau et son environnement, en particulier le système territorial qu’il dessert » (Offner, 1993). Ce faisant, elle discute également l’hypothèse d’une convergence technico-institutionnelle au profit du système conventionnel, qui a jusqu’à présent dominé les politiques de fourniture dans les villes en développement (Maria, 2007).

Des configurations de fourniture multiples

5Pour fournir des services essentiels à l’ensemble de la population, les représentations, savoirs et techniques, forgés dans les villes industrialisées, restent dominés par la figure du réseau comme forme la plus performante de fourniture des services urbains à des ensembles agglomérés de populations et d’activités (Coutard, 2010). En dépit de la force de ce modèle, il convient d’en relativiser la portée pratique car il s’accompagne de nombreuses exceptions dans le monde urbain contemporain, notamment dans les pays en développement. On peut ainsi distinguer schématiquement quatre configurations ou états du modèle : consolidé, dégradé, inachevé, inadapté (fig. 1).

Fig. 1

Trajectoires différenciées du modèle de mise en réseau des services urbains

Fig. 1

Trajectoires différenciées du modèle de mise en réseau des services urbains

6On s’intéresse ici aux situations africaines, qui relèvent pour la plupart du quart sud-est du graphique : c’est là que la part du réseau est la plus faible et que les politiques d’équipement peinent le plus à suivre le rythme de l’urbanisation ; là aussi que l’amélioration des taux d’accès, à l’eau par exemple, dépend le plus de sources d’approvisionnement non résidentielles. Dans les situations du quart sud-ouest, bien plus enviables en termes de desserte par le réseau, des môles de résistance à l’universalisation subsistent dans les villes mais ces pays émergents à forte croissance économique sont, à la différence des pays les moins avancés, dotés d’États solides et de marges de manœuvre financières qui autorisent des politiques d’équipement et des politiques sociales ambitieuses [1].

7Dans les villes africaines, la desserte en services associe souvent une infrastructure en réseau lacunaire, à l’origine d’une offre rationnée, et des offres marchandes d’initiative privée, individuelles ou collectives, formelles ou informelles, le plus souvent illégales au regard des contrats d’exclusivité des opérateurs officiellement en charge du service. Ces offres pallient la déficience du service conventionnel et s’adressent, selon les types d’espaces urbains, à des clientèles aisées ou à des clientèles pauvres, exclues en raison de leur faible pouvoir d’achat, de leur éloignement géographique ou de l’illégalité de leur statut. En nous inspirant d’une définition de Jean-Pierre Olivier de Sardan et al., nous proposons de définir ces configurations de fourniture comme des « combinaisons d’acteurs, d’institutions et de moyens qui permettent à un bien d’être délivré […] quelles que soient les formes de cette codélivrance : collaboration (directe ou indirecte, ponctuelle ou permanente), substitution, concurrence, complémentarité, etc. » (Olivier de Sardan et al., 2010, p. 5-6). Quelques exemples permettent d’illustrer ces configurations de fourniture.

Casablanca : électrification des bidonvilles

8La Lydec est l’entreprise privée en charge des services d’eau, d’assainissement et d’électricité dans le Grand Casablanca depuis 1997. Sur les 4,5 millions d’habitants, environ 400000 vivent dans près de 400 bidonvilles. Pour électrifier ces bidonvilles, où le braconnage d’énergie était très élevé, Lydec a dû innover. Le principe retenu est celui d’une alimentation collective de sous-ensembles gérés par un représentant responsable d’un « réseau secondaire » qui alimente une vingtaine de foyers en aval d’un compteur dit « tête de rue » : il coordonne la réalisation des travaux et la maintenance des ouvrages ; il gère la répartition de la facture de consommation globale pour le sous-ensemble sur la base de compteurs individuels.

9Le choix des responsables de rue est laissé à la population et aux communes. Beaucoup de ces représentants sont en fait d’anciens braconniers de l’électricité, qui avaient acquis expérience et contrôle sur la population illégalement raccordée. Ils bénéficient d’une formation et leur rémunération est fixée en accord avec les habitants et en fonction de la quantité de travail dans une limite de 20 % de la facture payée à Lydec (Zaki, 2010).

Mini-réseaux d’eau et petits opérateurs privés

10À Maputo (Mozambique), le service d’eau conventionnel géré par l’opérateur privé AdeM exclut environ un quart de la population, qui recourt pour son approvisionnement à de petits opérateurs privés (PoPs). Exploitants propriétaires de dispositifs d’exhaure (forages équipés de pompes submersibles et de réservoirs de stockage), ceux-ci fournissent de l’eau au voisinage à partir de mini-réseaux qui alimentent des bornes-fontaines et des connexions domestiques dites « spaghetti », dotées de compteurs individuels et de tuyaux en polyéthylène posés à même le sol et reliés à un robinet. La politique sectorielle de l’eau à Maputo [2] a l’ambition de donner aux petits opérateurs privés les moyens de jouer un rôle accru dans le service d’eau urbain en partenariat avec la société publique de patrimoine de l’eau (Fipag). Elle envisage notamment la formalisation de licences, le montage juridique de partenariats financiers, des actions de formation et de professionnalisation, une organisation du marché de l’eau par concentration et intégration de la filière (Blanc et al., 2009).

Accès à l’énergie hors réseau en Tanzanie

11L’accès à l’énergie dans les bourgs de l’arrière-pays de Dar es Salaam passe par Egg-Energy [3], une entreprise privée proposant trois services : la vente d’abonnements pour une location de batteries rechargeables ; la vente d’équipements agréés (ampoules basse consommation, chargeurs de téléphones mobiles, adaptateurs pour radio, etc.) ; l’installation et la maintenance du système électrique dans les logements.

12Les centres de recharge et d’échange des batteries (Change & Swap stations) permettent en 2010 à 300 abonnés, non connectés au réseau national (comme 90 % de la population), de profiter de l’énergie électrique produite par la Tanzania Electric Supply Company Limited (Tanesco) [4]. Les demandes sont nombreuses : toujours plus de clients s’abonnent, certains réclament un service de batteries plus puissantes pour la télévision et, pour les plus éloignés des magasins Egg, un système de « coursiers » est à l’essai [5].

13Ces configurations de fourniture ont un point commun : le réseau conventionnel ne parvient pas partout jusqu’à l’usager final. Il a besoin de médiations socio-techniques prenant la forme d’un prolongement adapté du réseau ou d’un dispositif hors réseau pour étendre certaines fonctionnalités du service. Pour l’énergie, par exemple, la configuration de fourniture peut combiner, comme indiqué par la figure 2, un réseau avec des branchements individuels et compteurs, des piquages en aval des compteurs (système informel d’abonné semi-grossiste), des piquages sur le réseau (braconnage d’électricité), des systèmes off-grid (mini-réseau alimenté par panneaux solaires ou éoliennes ; installations individuelles de solaire thermique et photovoltaïque) et des fonctionnalités accessibles aux ménages non-raccordés : services de location de batterie, de recharge des téléphones mobiles, de séances collectives de TV…

14Pour les communications, un peu partout en Afrique, l’usage de la téléphonie mobile s’est démocratisé dans toutes les catégories de population et concerne aujourd’hui une majorité d’usagers à très faibles revenus, pour lesquels une économie du détail et de l’occasion se développe, souvent sous la forme de services collectifs (Chéneau-Loquay, 2010 et son article dans ce numéro de l’Espace géographique).

15Ces systèmes ne sont pas infinis en nombre et en variété ; tous n’existent pas partout ni avec la même intensité, mais dans toutes les villes, une combinaison de plusieurs de ces dispositifs contribue à la fourniture de services, en fonction de l’état du réseau et de son fonctionnement, de la nature de l’urbanisation, du pouvoir d’achat des ménages, du dynamisme et de la capacité d’invention de l’opérateur dominant. Enchâssées dans des configurations urbaines spécifiques, ces médiations socio-techniques permettent, sous certaines conditions, d’étendre des services au-delà du club des abonnés au réseau conventionnel. En tant que mode d’organisation industrielle des services urbains, celui-ci existe donc dans toutes ces villes et les techniques en sont connues, mais il ne constitue pas une modalité universelle de la généralisation des services. Sa part dans l’offre totale de services est au contraire un puissant critère de différenciation entre les villes, comme l’illustre la figure 1.

Fig. 2

Accès des ménages à l’énergie : exemple d’une configuration de fourniture

Fig. 2

Accès des ménages à l’énergie : exemple d’une configuration de fourniture

Services urbains en réseaux : constat d’un désenchantement

16Depuis trente ans, les résistances à la généralisation des réseaux ont été principalement analysées sous l’angle de la défaillance institutionnelle des services conventionnels et les politiques mises en œuvre ont privilégié deux voies principales : la réforme des institutions (privatisation, libéralisation, décentralisation) et le traitement de la pauvreté pour solvabiliser les usagers. L’idée dominante est, en effet, que ces échecs sont principalement le résultat du sous-investissement et de la mauvaise gestion des services publics. Le modèle de l’entreprise publique nationale ou locale a dominé jusqu’aux années 1980, avec des succès divers. Par la suite, inefficacités gestionnaires et médiocrité des taux de couverture ont conduit à une remise en cause de la légitimité des monopoles publics. Les propositions de changement, inspirés par la supériorité présumée des modèles d’organisation et de management de l’entreprise privée, ont conduit à un « consensus » international incarné dans la notion de « partenariat public-privé » (PPP) et dans divers types de contrats de gestion déléguée (Kerf, Smith, 1996 ; Kessides, 2005 ; Foster, Briceño-Garmendia, 2010).

17Toutefois, aucune analyse empirique, principalement dans les secteurs de l’eau et de l’électricité, n’a démontré sans ambiguïté la capacité du secteur privé à améliorer la gestion des services tout en remplissant un mandat d’universalisation du service, en particulier dans la desserte en eau des bidonvilles urbains (Trémolet, 2006 ; Kirkpatrick et al., 2006 ; Prasad, 2006 ; Banerjee et al., 2008). Comme le montre une récente synthèse, nulle part les partenariats publics-privés n’ont rempli toutes leurs promesses : l’évaluation de la performance de plus de 65 grands contrats dans le monde en développement sur la base de quatre indicateurs (extension de la couverture, qualité de service, efficacité opérationnelle, modifications tarifaires) a conclu que peu de contrats sont efficaces au regard de plus d’un ou deux de ces critères (Marin, 2009).

18Les raisons des succès ou des échecs de ces réformes en Afrique, comme ailleurs dans le monde en développement (Prasad, 2006 ; Gómez-Ibáñez, 2008 ; Gassner et al., 2009 ; Marin, 2009 ; Mugabi, Castro, 2009 ; Jaglin, Zérah, 2010), ont été interprétées en termes de gouvernance et de régulation. Premièrement, les faiblesses du système de délégation, bien analysées au Nord, sont souvent amplifiées au Sud : les contrats incomplets se sont avérés insuffisants pour assurer une allocation efficace des risques [6], garantir un investissement sécurisé dans le temps et apporter des réponses adéquates à des risques macro-économiques. En outre, la régulation de ces contrats, le plus souvent mise en œuvre par des commissions spécialisées et centralisées, s’est avérée difficile en raison de problèmes d’asymétrie d’information, de capture du régulateur et de manque de compétences. Deuxièmement, l’équilibre économique des contrats a été difficile à réaliser. Les politiques de prix ont suscité des protestations sociales et politiques, tandis que les programmes d’investissement et d’expansion ont trébuché sur la difficulté de mobiliser des capitaux en quantités suffisantes. Troisièmement, contrairement à l’argument selon lequel les opérateurs privés ont une plus grande capacité d’innovation dans la desserte des quartiers pauvres, la généralisation d’une desserte abordable pour tous est globalement un échec (Hall, Lobina, 2006 et 2007).

19Parallèlement, les politiques sociales (qui permettent de subventionner les coûts initiaux de connexion et les consommations) ont échoué à solvabiliser de nombreux utilisateurs très pauvres (Boccanfuso et al., 2005 ; Dagdeviren, 2008 ; Kayaga, Franceys, 2007), y compris dans un pays émergent comme l’Afrique du Sud, où les marges de manœuvre financières existent et où une politique redistributive est mise en œuvre depuis plus de quinze ans (Jaglin, 2008) [7].

20Dans ces approches, le réseau conventionnel n’est pas remis en cause et, pour beaucoup des chercheurs et praticiens, le modèle de développement reste celui de la « courbe en S », modélisant la tendance séculaire des espaces à la desserte universelle par des réseaux (Dupuy, 2011). Dans ce modèle, le défaut d’équipement ou d’accès est considéré comme un retard, rattrapable au fil du temps, tandis que les dispositifs alternatifs sont transitoires et destinés à être résorbés dans le système conventionnel. La théorie économique a souligné le rôle essentiel des effets de club et des économies d’échelle dans la phase d’expansion des réseaux et celui des effets de résistance (contrainte du revenu, connexions plus coûteuses et techniquement plus difficiles) dans la croissance ensuite plus modérée du réseau (Dupuy, 2011). Des approches historiques soulignent pour leur part le rôle moteur de l’action publique dans leur déploiement et leur universalisation, notamment pour dépasser cette résistance du milieu (Coutard, Pflieger, 2002 ; Scherrer, 2006). C’est par rapport à ces modèles et à leurs théorisations que la littérature dominante a pensé l’action publique dans les réseaux en Afrique, marginalisant, ce faisant, d’autres travaux critiques sur la vision moderniste du transfert des modèles, ceux des réseaux conventionnels et de leur réforme (Darbon, 2008). Ceux-ci insistent sur les leurres des stratégies de généralisation des services en l’absence des institutions et principes organisationnels des grandes bureaucraties modernes qui en ont permis le développement dans les pays industrialisés. Pour Augustin Maria, les « contestations » scientifiques, techniques et pratiques du système conventionnel, qui s’expriment à travers les dispositifs socio-techniques alternatifs, sont des « germes potentiels d’une modification profonde du système [conventionnel] » (Maria, 2007, p. 251). Dans ces approches, la prolifération des services alternatifs n’est pas une « résistance » mais une adaptation aux conditions spécifiques de l’urbanisation dominée du Sud : elle est l’expression structurelle d’un enrayement du modèle du réseau conventionnel.

Les « résistances » africaines au déploiement du réseau : retard ou inadaptation structurelle ?

21C’est donc le modèle même du service en réseau qui doit être interrogé, comme le suggère Jean-Marc Offner (1993), non pas du seul point de vue de sa logique interne ni même des politiques qui en accompagnent le développement, mais au regard des conditions historiques, politico-institutionnelles, socio-techniques et urbaines de son déploiement.

Genèse des réseaux et dépendance socio-technique

22La gestion et la réforme des systèmes en réseaux demeurent très dépendantes des choix et des fonctionnements de leurs origines [8]. Les réseaux conventionnels sont en effet des systèmes socio-techniques enchâssés dans leur environnement spatio-temporel et leur première phase d’expansion est indissociable de l’État providence et de la modernité des sociétés industrielles du xxe siècle, dans lesquelles leur diffusion et leur démocratisation ont été fondamentales dans l’émergence d’un sentiment national de cohésion (Graham, Marvin, 2001, p. 74) et, comme ce fut le cas en France, dans la réalisation du principe d’égalité républicaine (Coutard, Pflieger, 2002). Ce modèle européen du xxe siècle fut bien importé dans les anciennes colonies africaines, avec les outils de la planification spatiale moderne et une certaine conception des logements publics subventionnés. La littérature souligne néanmoins les lacunes de la planification urbaine coloniale, son incapacité à adapter les valeurs et les représentations qu’elle défend, l’inadéquation entre les ressources nécessaires à sa mise en œuvre, d’une part, et celles dont disposent les autorités locales, d’autre part (Massiah, Tribillon, 1988 ; Devas, Rakodi, 1993). Les réseaux de services publics ne font pas exception à ce schéma : à l’origine conçus et construits par des ingénieurs envoyés par les pays européens, ils incorporent des normes techniques et des dispositions juridiques et socio-économiques mimétiques de celles qui encadrent les infrastructures métropolitaines. Pour autant, ils ne constituent pas des répliques des « services publics » européens mais des formes dégradées dont le développement est d’emblée biaisé par les conditions locales de leur appropriation.

23Ainsi, comme le soulignent de nombreuses études de cas historiques, le développement urbain a d’abord été limité par un « malthusianisme économique » combiné, dans les colonies françaises, avec la lourdeur des procédures et des conflits bureaucratiques qui, dès l’origine, se sont traduits par d’importants retards de l’infrastructure physique sur l’extension urbaine. À l’exception d’une légère amélioration dans les années 1950, ces conditions de pénurie financière, qui ont duré pendant toute la période coloniale et caractérisent également les décennies post-indépendances, ont non seulement freiné l’aménagement formel des villes mais aussi bloqué l’émergence de la notion d’utilité publique et plus encore sa matérialisation (Chanson-Jabeur et al., 2004).

24Cependant, les contraintes budgétaires et la réticence des concessionnaires privés à investir n’expliquent pas tout. Les disparités d’équipement sont également un héritage de la politique coloniale de ségrégation : les réseaux ont été conçus et construits pour satisfaire la demande des élites métropolitaines et locales et leur inachèvement participait aussi du projet politique d’affirmation de la « supériorité morale » des colonisateurs. Ainsi, « the Western ideal of a unitary, orderly city, laced by networked infrastructure[9] » (Graham, Marvin, 2001, p. 82) a été remodelé dès le départ pour céder la place à un projet d’infrastructure discriminatoire, comme le montrent, dans des contextes politiques et urbains différents, les taux de connexion de l’Eeao (Compagnie des eaux et électricité de l’Ouest africain) puis la Safelec en Afrique de l’Ouest (Hibou, Vallée, 2007, p. 7-8), l’histoire de la domestication de l’eau dans les villes zambiennes de la Copperbelt (Kazimbaya-Senkwe, Guy, 2007), les origines de l’approvisionnement en eau courante à Kampala (Nilsson, 2006) ou à Tamatave (Madagascar)(Rajaonah, 2004).

25Si, à l’origine, la qualité différenciée des infrastructures physiques est issue des pratiques discriminatoires des administrations coloniales, elle est ensuite amplifiée par des retards chroniques dans la réalisation des ouvrages alors que la croissance urbaine s’accélère (Chanson-Jabeur et al., 2004). En effet, après 1950, les autorités publiques perdent le contrôle des mécanismes d’expansion de vastes espaces urbains non planifiés et pauvres, tandis que les logiques de planification et de réalisation des infrastructures conventionnelles engendrent une demande insatisfaite de services toujours croissante. Il devient vite évident que les réseaux, adaptés à la desserte des quartiers urbains formels, ne peuvent pas faire face à une expansion urbaine rapide. Comme le résume David Nilsson (2006) à propos de l’eau à Kampala : bien que le système ait été à la fois financièrement et socialement « soutenable » dans son environnement colonial, les services offerts n’étaient pas adaptés à la population africaine et les étendre, par la suite, aux citadins les plus pauvres selon le principe « water for all » aurait nécessité des mécanismes de subvention inaccessibles alors même que le maintien en l’état du réseau pour les couches moyennes et supérieures se révélait progressivement problématique.

Les déterminants politico-institutionnels de la « performance » des entreprises de services

26La performance réelle des services en réseau ne peut pas être évaluée en dehors de leur environnement macro-économique et politique. Ainsi, en Afrique comme ailleurs, les caractéristiques spécifiques des réseaux (monopole naturel, externalités [10]) ont justifié des formes d’intervention de l’État en réponse aux défaillances du marché, mais la prolifération post-coloniale des entreprises publiques et semi-publiques fut également, dans les situations africaines d’extrême dépendance économique, une réponse aux préoccupations économiques et sociales d’États considérés comme des agents de développement (Sandbrook, 1988). Une évaluation catastrophique de cette gestion publique fut ensuite produite dans les années 1980. Les causes de cet échec peuvent, au moins en partie, être attribuées au contexte : difficultés économiques consécutives aux chocs pétroliers, détérioration de la position de l’Afrique dans le commerce international, resserrement des ressources fiscales nationales. D’autres causes sont à trouver dans la situation monopolistique de ces compagnies et dans les problèmes récurrents de la gestion publique (défaillance de l’État). Aucune de ces raisons n’est spécifique à l’Afrique, mais leurs manifestations ont été exacerbées par la nature de l’État post-colonial africain. L’ingérence politique y a été renforcée par les logiques d’un État néo-patrimonial et rhizomatique (Bayart, 1989), lié à une structure de pouvoir construite sur la loyauté personnelle et des relations de clientélisme, en contradiction avec les requis de l’efficacité bureaucratique et de la rationalité juridique (Sandbrook, 1988). La notion d’État néo-patrimonial cherche ainsi à rendre compte de deux caractéristiques convergentes : l’échec de l’institutionnalisation du pouvoir d’État et un « modèle » de gouvernance néo-patrimoniale basée sur le chevauchement de fonctions génératrices de ressources et l’exploitation de relations avec l’appareil d’État pour extraire et redistribuer ces ressources (Médard, 1991).

27Dans ce contexte, il n’est guère étonnant que les services publics aient été intensément sollicités comme instruments de redistribution des ressources (emplois et services) et, s’ils ont participé à des stratégies de légitimation des gouvernants africains, ce ne fut pas sur la base d’objectifs d’équité sociale et spatiale. Dans un cadre néo-patrimonial, le contrôle des biens publics a été une source de favoritisme politique et a été utilisé pour cimenter la loyauté des classes moyennes urbaines, selon une logique tout à fait distincte de l’idéal occidental d’égalité intégrative. Ainsi, seules des dimensions superficielles du modèle européen de services publics en réseau ont été transférées et reproduites en Afrique : l’instrument technique (infrastructure physique) n’a pas été accompagné, dans ces pays, de l’adoption du modèle politico-économique de régulation sous-jacent (Darbon, 2008). Les principes institutionnels et de gouvernance de la gestion du service conventionnel ne sont donc pas intégrés dans les processus socio-politiques locaux et ne sont pas incorporés en tant que règles communes dans le contrat social. Par conséquent, à côté du modèle officiel du service conventionnel, de nombreux autres systèmes d’approvisionnement continuent à exister, sur la base de normes et règles mais aussi de valeurs que les pratiques citadines endossent comme références « légitimes » de la vie quotidienne.

Des contextes urbains déterminants

28Les réseaux et leur réforme dans les villes africaines sont aussi tributaires de l’ensemble des circonstances entourant la définition d’une norme sociale de service « public » essentiel. Ainsi, l’omniprésence de la pauvreté, le chômage, un marché de l’emploi largement informel (souvent proche de 60 % de la population active), le rôle marginal des dispositifs de sécurité sociale et les pratiques socio-démographiques de solidarité influencent fortement les pratiques de consommation des services. La vulnérabilité chronique entraîne une demande instable et variable, combinant des accès payants et gratuits (pour l’eau, l’énergie ou encore l’évacuation des déchets). L’hétérogénéité des conditions urbaines, en termes de revenu monétaire mais aussi de cultures et de perceptions, façonne également la demande urbaine de services : alors que les élites urbaines africaines embrassent avec enthousiasme un consumérisme cosmopolite, les citadins pauvres vivent dans des conditions de fortune et avec peu de moyens d’expression politique, sinon dans la rue comme le montrent les « émeutes de l’électricité » [11].

29Les configurations de desserte sont enfin forgées par les modèles dominants de l’urbanisation : rapide croissance démographique accompagnée de populations « flottantes » ; planification spatiale inexistante ou très inefficace et régimes fonciers concurrents avec pour conséquence un tissu urbain composé de vastes zones non formellement administrées ; faibles capacités institutionnelles et modalités de gouvernance des services conflictuelles dans des sociétés très hétérogènes. Comme le souligne AbdouMaliq Simone (2010, p. 2), la modernisation des infrastructures concerne des villes où « the increasing volatility of urban life, both productive and deleterious, itself generates wide-ranging political, social and cultural impacts which are difficult to predict and assess[12] ».

30Le modèle du réseau conventionnel n’a donc jamais pleinement fonctionné dans les villes africaines. Même si la fourniture par un réseau centralisé reste généralement le mode le plus économique de fourniture des services essentiels, mais aussi le type d’offre préféré des consommateurs (Kjellén, McGranahan, 2006), les politiques basées exclusivement sur les services conventionnels sont confrontées à une inadéquation entre attendus du modèle et réalités urbaines. Cette contradiction se traduit par un rationnement de l’approvisionnement, des tensions financières, des crises institutionnelles et l’exclusion d’une proportion « incompressible » de ménages pour lesquels les coûts d’entrée sont trop élevés.

31L’analyse d’un grand nombre de ces situations, dans des configurations urbaines différentes et concernant plusieurs types de services, suggère deux réflexions. Les défaillances du réseau conventionnel relèvent certes de problèmes institutionnels et de gouvernance mais les blocages de l’universalisation sont plus fondamentalement le résultat d’une offre inadaptée à certaines des caractéristiques de l’urbanisation africaine. À l’inverse, les médiations socio-techniques et les innovations qui les accompagnent sont certes souvent des bricolages mais elles sont surtout une réponse pragmatique à cette désarticulation entre offre et demande. Loin d’être des héritages archaïques, elles répondent aussi à la diffusion récente de technologies à bas coût et à la démocratisation d’innovations techniques dont les coûts diminuent : téléphonie mobile, batteries légères et efficaces, compteurs intelligents… Si ces configurations de desserte ne sont pas simplement l’expression de la défaillance de la gestion publique ou de l’échec des réformes de privatisation, à quoi répondent-elles précisément ?

Un cadre interprétatif au désajustement entre réseaux et villes africaines

32« Même si le réseau est là, tous les éléments nécessaires pour qu’il joue son rôle ne se trouvent pas réunis » (Dupuy, 2011, p. 12) : c’est le cas dans les villes africaines mais nous suggérons que tous les éléments ne peuvent précisément pas y être réunis. Certes, là comme ailleurs, les sociétés urbaines ont à résoudre des problèmes d’approvisionnement en eau, de distribution d’énergie, d’assainissement, mais le réseau universel (ou quasi universel) est une solution contingente que les dynamiques africaines n’ont pas favorisée et ne favoriseront pas dans un avenir proche.

33Pour comprendre ce désajustement entre le réseau conventionnel et de nombreuses configurations urbaines africaines, nous proposons un cadre interprétatif des relations entre économie, urbanisation et réseaux inspiré des travaux de l’école française de la régulation (Boyer, Saillard, 1995 ; Aglietta, 1997) et de ceux de Dominique Lorrain (2002) sur les capitalismes urbains européens. Des premiers, nous retirons l’idée que les services en réseaux participent des compromis socio-économiques qui ont été au cœur des modes de régulation fordistes et qu’ils ont été un des moyens dans la poursuite du progrès économique et social. Des seconds, nous retenons que les modes de gestion des services urbains relèvent de différents modèles de capitalisme urbain qui ont été élaborés en Europe, au milieu du xixe siècle, « pour faire face au défi de l’industrialisation » (Lorrain, 2002, p. 203) puis qui, à partir de choix fondateurs et de quelques bifurcations, ont ensuite suivi « d’authentiques “sentiers de dépendance”» (idem, p. 234). En d’autres termes, les circonstances historiques d’émergence et de développement des services urbains en réseau dans les villes industrielles, européennes notamment, ont produit des modèles que nous proposons de qualifier de fordistes et qui présentent trois composantes communes.

34D’abord, un système de production des services visant la satisfaction d’une demande industrielle et domestique croissante par des prestations individuelles fournies au moyen d’une infrastructure de réseau centralisée. Ensuite, un dispositif institutionnel et technique – le réseau en monopole – qui assure, par la standardisation et l’interconnexion, des économies d’échelle permettant de généraliser une offre de services universels. Enfin, un « cercle vertueux » de développement du réseau dans un contexte où les gains de productivité et les hausses salariales favorisent une « convergence » des niveaux de vie et une consommation de masse de biens standardisés mais aussi dans lequel la croyance collective dans la capacité des nouvelles technologies à amener du changement social est favorable au déploiement universel des réseaux dans l’espace (pour des raisons d’équité sociale, de compétitivité économique et d’aménagement)(Scherrer, 2006). Les services conventionnels issus de ces modèles reposent sur un « compromis fordiste » ainsi étroitement articulé aux conditions de développement des villes industrielles.

35Différentes variantes de ces modèles du réseau ont bien été transplantées en Afrique mais, dans des contextes urbains où les compromis socio-économiques ne relèvent pas des modes de régulation fordistes, où le salariat joue un rôle marginal [13] et où les défis urbains sont très largement déconnectés de ceux de l’industrialisation, ils ont échoué à développer un service universel. Ajoutons que des ressorts de l’action publique, efficaces dans le passé, ont disparu. Ainsi, le choléra, qui fut un puissant moteur de l’assainissement collectif des villes au xixe siècle en Europe (Swaan, 1995), sévit régulièrement voire de manière endémique dans de nombreuses villes du golfe de Guinée et d’Afrique orientale, mais il a perdu de sa force mobilisatrice dans des contextes urbains où les couches moyennes peuvent se protéger individuellement et collectivement de la maladie sans partager le fardeau de l’équipement des quartiers pauvres (Chaplin, 2011). Par ailleurs, l’amélioration du service passe souvent par le marché et la capacité des citadins aisés à adopter des solutions individuelles [14] plus que par leur capacité à inciter les autorités urbaines à mutualiser les coûts et les externalités des services (Maria, 2006). Les réalités urbaines africaines se prêtent donc mal au déploiement universel du réseau : au prix d’une simplification réductrice, les principaux décalages sont synthétisés dans le tableau 1.

Tabl. 1

Modèle fordiste des services urbains en réseau (i.e. le réseau conventionnel) et configurations de fourniture des services dans les villes africaines

Tabl. 1
Modèle « fordiste » des services urbains en réseau Configurations de fourniture des services dans les villes en développement Environnement urbain • Planifié et contrôlé.• Équipement > peuplement. • Incontrôlé et informel. • Peuplement > équipement ? Situation économique des ménages • Taux d’emploi élevé, salariat dominant. • Pouvoir d’achat stable. • Auto-emploi dominant dans des activités informelles. • Grande vulnérabilité. • Pauvreté massive (60 à 80 % dans les villes d’ASS). Dispositif de fourniture • Un fournisseur (public ou privé) en monopole régulé. • Un monopole public non universel et des fournisseurs marchands en concurrence, mal ou non interconnectés. Offre • Fiable et continue. • Exclusive, uniforme et normée (économies d’échelle, standardisation, effets de club). • Tarifs fixes (subventions croisées, péréquations). • Un branchement, un abonnement, une facture régulière (mensuelle, bimensuelle). • Inconstante et discontinue. • Concurrentielle, hétérogène, à la carte. • Tarif au prix de revient. • Paiement au détail, crédit, abonnement à la demande, etc. Demandes • Convergentes. • Durablement hétérogènes. Capacité de payer • Stable voire croissante dans le temps long. • Régulière dans le temps court (salariat dominant). • Variable et réversible à toutes les échelles de temps (pauvreté, précarité, vulnérabilité). Consommation domestique • Constante et prévisible (conforme à un schéma d’évolution familiale et résidentielle « standardisé »). • Un fournisseur unique. • Pertes commerciales maîtrisées. • Variable (fonction du revenu, de configurations familiales et résidentielles labiles). • Fournisseurs multiples combinés entre eux en fonction de critères d’usage, de prix, d’accessibilité. • Pertes commerciales importantes (branchements illégaux). Consommation industrielle • Massive et croissante. • Très inégales voire inexistantes (poids important des petites et moyennes entreprises et micro-entreprises, connexions illégales).

Modèle fordiste des services urbains en réseau (i.e. le réseau conventionnel) et configurations de fourniture des services dans les villes africaines

36Pauvreté et informalité, grand nombre de petits consommateurs peu rentables, faible rôle d’entraînement de la demande industrielle et commerciale, production de l’espace urbanisé hors des cadres de l’urbanisme administré : les réalités urbaines des pays africains ne présentent pas, aujourd’hui, les conditions nécessaires au déploiement universel du réseau.

L’empreinte de l’informalité urbaine dans les configurations de fourniture

37C’est sur ce terreau que foisonne une économie de services alternatifs, individuels et collectifs, selon deux logiques combinées : l’adaptation de l’infrastructure terminale et de sa gestion pour démocratiser une offre accessible ; la création de fonctionnalités permettant d’étendre certains des bénéfices du service au-delà du périmètre de l’infrastructure. Chacune de ces offres repose sur un ensemble spécifique de ressources, un mode de gouvernance et est associée à une configuration territoriale ; aucune n’a les capacités de répondre à l’ensemble de la demande urbaine et de se déployer dans l’ensemble des espaces urbanisés. Tandis que les services conventionnels procèdent d’une logique d’offre calculée selon des normes et principes standardisés, les services alternatifs relèvent de logiques marchandes et d’une segmentation des clientèles (tabl. 2).

Tabl. 2

Typologie simplifiée des offres non conventionnelles

Tabl. 2
Citadins pauvres, quartiers informels Couches moyennes et entreprises, espaces urbanisés planifiés Formes économiques • Artisanat de service informel. • Unités de production informelles peu capitalistiques. • Offre calibrée (en quantité et en qualité) par la demande, forte réactivité aux variations de la demande comme à la conjoncture économique (turn-over rapide). • Régulé par la concurrence mais aussi par des formes de contrôle mafieux. • Entreprises de services, régulées par la concurrence et par des contrats. • Petites et moyennes entreprises locale ou consortiums avec filiales étrangères. • Modes de production « moderne » (matériel, compétences, management). • Capacités d’investissement, contrats de travail « légaux ». Relation aux clients • Transactions marchandes mais encadrées par les règles sociales dominantes. • Prestation peu standardisée, au détail, à la carte, adaptée au micro-paiement. • Prix = prix de revient. • Transactions marchandes. • Prestation standardisée fournie selon des normes et un cahier des charges connus à l’avance et souvent définis par un contrat commercial. • Prix = prix de revient. Techniques de production • Artisanales, utilisation-récupération de techniques existantes locales ou d’importation. • Pas ou peu d’innovations techniques. • Techniques industrielles, capacité d’innovation. Principes et missions de service public • Aucun. • Prix de revient élevés (pas d’économies d’échelle) sans subventions ni redistribution (pas d’équité sociale). • Répartition géographique guidée par la demande (pas d’équité spatiale). • Relation prédatrice à l’environnement (prélèvement gratuit des ressources, pollutions). • Pas de continuité assurée. • Aucun. • Prix de marché sans subventions ni redistribution (pas d’équité sociale). • Répartition géographique guidée par le marché (pas d’équité spatiale). • Relation à l’environnement variable (marché de la modernisation écologique). • Continuité assurée dans une certaine mesure.

Typologie simplifiée des offres non conventionnelles

38Ainsi, dans le domaine des services, les success stories africaines sont demand-driven. Certaines de ces demandes proviennent de clientèles aisées, domestiques ou d’entreprise, insatisfaites de la qualité médiocre du service public et qui ont à leur disposition, le plus souvent via les marchés locaux, des solutions techniques permettant de fiabiliser leur approvisionnement à un coût acceptable. Les autres proviennent des couches populaires urbaines (comprenant à la fois des populations citadines très pauvres et des ménages accédant à une « petite prospérité ») à l’habitat souvent illégal.

39La diffusion des offres alternatives à destination des clientèles pauvres relève, dans certains cas, d’innovations très encadrées à partir du réseau (c’est le cas de l’électrification des bidonvilles à Casablanca : figure 3) ; la plupart du temps, cependant, elle procède d’initiatives citadines, individuelles ou collectives. Ces dernières sont financièrement autonomes, ne bénéficient d’aucune subvention et présentent des caractéristiques typiques de l’économie informelle : non recensée, non fiscalisée, faiblement capitalistique, juridiquement vulnérable (Lautier, 2004). Flexibles et réactives, ces offres s’adaptent à la croissance urbaine, à la pauvreté, aux changements d’usage des sols comme au nomadisme géographique des petites activités économiques plus facilement que les grands réseaux, dépendants de trajectoires technologiques développées sur le temps long, de dispositifs institutionnels prégnants, de systèmes de planification rigides et lents. Peu capitalistiques, elles sont aisément « redéployables » dans l’espace. Si les barrières à l’entrée, financières et non financières, sont loin d’être négligeables (par exemple lorsque l’activité est contrôlée par des cartels mafieux [15]), elles n’empêchent pas de nouvelles offres de se développer lorsqu’existe une demande solvable. La faiblesse et la flexibilité des rémunérations, la force des liens personnels et sociaux dans les relations de travail expliquent aussi la capacité des services informels à résister aux conjonctures fluctuantes des marchés urbains et à la grande vulnérabilité des ménages, aux revenus irréguliers et incertains. La gouvernance de ces offres mêle des coordinations marchandes et communautaires, particulièrement adaptées aux règles de l’échange qui prévalent dans les quartiers populaires des villes africaines. Ainsi, informalité et illégalité n’excluent pas des formes d’intégration sociale par la production d’une norme d’accès compatible avec l’absence de réseau : les usagers sont intégrés dans des réseaux sociaux et marchands qui assurent une diversité de la qualité de service (à domicile par colportage, à un point public ou privé, avec ou sans une garantie de qualité et de régularité, avec ou sans abonnement, etc.).

Fig. 3

Principe du programme d’électrification des bidonvilles de Casablanca

Fig. 3

Principe du programme d’électrification des bidonvilles de Casablanca

40Cette économie de services informelle n’est donc pas un résidu archaïque. En contribuant à la reproduction d’une main-d’œuvre bon marché, elle est une des expressions de la flexibilisation à l’œuvre dans la production et une des modalités spécifiques de l’inscription des villes africaines dans la mondialisation. En satisfaisant les besoins basiques des citadins les plus pauvres et en redistribuant du revenu, certes faible, à des travailleurs non qualifiés elle rend la ville « habitable », tout en participant des mécanismes économiques dominants de production de la pauvreté urbaine.

Conclusion

41Le désajustement entre réseaux et villes africaines, historiquement construit, résulte d’une inadaptation de l’ensemble du système socio-technique nécessaire au service conventionnel : son infrastructure technique, son dispositif organisationnel, son mode de gestion et de financement, les acteurs et compétences qu’il mobilise, mais aussi les objectifs politiques qu’il porte ou dont il est l’instrument, les valeurs qu’il incarne. Le processus d’universalisation des services urbains essentiels passe donc aujourd’hui par des configurations de fourniture incluant aussi des services alternatifs, qui apparaissent comme des réponses pragmatiques aux besoins non satisfaits par le service conventionnel. Chacune des offres tire avantage de niches, dans le bas ou le haut du marché, et ensemble, dans le cadre de relations variables mais très souvent marquées par la rivalité (Katsongo, 2010), elles exploitent l’hétérogénéité des demandes et des capacités de payer comme celle des conditions citadines dans des sociétés très inégalitaires. Ce pluralisme technique et gestionnaire répond aux circonstances particulières de l’urbanisation en Afrique : croissance démographique et spatiale très rapide, grande pauvreté, fragilité des institutions, prégnance des héritages coloniaux et des processus de transferts institutionnels et cognitifs emblématiques des « sociétés projetées » (Darbon, 2008).

42Si elles sont une contribution majeure à l’accession des citadins à de nombreuses aménités urbaines, ces configurations de fourniture soulèvent aussi de nombreux problèmes : coûteuses pour les consommateurs, elles sont le plus souvent non régulées en termes de quantité et de qualité, et sont aussi très résistantes aux réformes [16]. Leur régulation est également difficile à concevoir car les questions soulevées sont aussi diverses que les dispositifs alternatifs sont variés (Jaglin, 2010) [17].

43Analyser l’échec du modèle fordiste de la fourniture de services dans des villes qui échappent très largement ou totalement au modèle de l’économie industrielle fordiste est une étape. Passer d’une description des configurations de fourniture à la formulation de politiques publiques d’accès n’a cependant rien d’aisé car la question centrale, comme le souligne Henri Coing (2010) à propos de l’eau, est celle de la construction sociale située des services et de leur prise en charge collective, de la définition et de la légitimité des règles qui encadrent leur fonctionnement. C’est donc, essentiellement, une question politique.

Notes

  • [1]
    Efficace au Chili et, plus récemment, en Chine, ce volontarisme public transforme aussi les villes en Tunisie, au Maroc, en Afrique du Sud ou encore au Brésil.
  • [2]
    Spécifiquement la composante 3 du Maputo Water Supply Project, financée par des fonds européens, français et hollandais.
  • [3]
    Egg-Energy est une start-up spécialisée dans l’accès à l’énergie et installée en Tanzanie depuis 2009. Fondée par un groupe d’ingénieurs de Harvard et du Massachusetts Institute of Technology, elle développe un modèle original d’accès à l’énergie pour des ménages pauvres et de petites entreprises.
  • [4]
    Tanesco est une entreprise para-publique nationale, dont le gouvernement tanzanien est le seul actionnaire. Elle est en charge de la production, la transmission, la distribution et la commercialisation de l’électricité dans l’ensemble du pays (à l’exclusion des îles).
  • [5]
  • [6]
    En particulier les risques commerciaux, compte tenu du fait que les fichiers clients sont rarement fiables, que les revenus de l’exploitation sont faibles, que les administrations publiques figurent parmi les plus mauvais payeurs et que, dans de nombreux pays africains, les autorités publiques ne respectent pas leurs engagements en termes de politiques tarifaires (Trémolet, 2006).
  • [7]
    Cette politique a d’abord consisté à garantir un service minimum gratuit à tous les abonnés-contribuables (« account holders » municipaux) comprenant notamment 6m3 d’eau et 50 kWh par mois ainsi que divers abattements fiscaux. Sous l’effet des contestations et de la jurisprudence, ces politiques municipales évoluent aujourd’hui vers un ciblage de l’aide (plutôt qu’une gratuité universelle) prenant mieux en compte les pauvres “invisibles” et vers une différenciation des prestations garanties (pour un exemple dans le domaine de l’eau à Johannesbourg, voir : Aubriot, 2012).
  • [8]
    L’expression « dépendance sociotechnique » renvoie à la notion de « path dependency » des auteurs anglophones : elle exprime l’idée que les choix effectués au temps t (par exemple l’adoption d’une norme technique) conditionnent les processus d’apprentissage et les routines organisationnelles dans une organisation, influençant largement sa stratégie et sa trajectoire ultérieures.
  • [9]
    L’idéal occidental d’une cité unitaire, ordonnée, sillonnée par une infrastructure en réseau.
  • [10]
    Pour une synthèse de la manière dont l’économie a théorisé ces notions (sur le modèle de la note 7), voir Lévêque, 2004.
  • [11]
    L’Afrique du Sud fait ici exception, avec le développement d’un usage militant du droit lié à l’inscription, dans la Constitution de 1996, de droits sociaux, dont le droit à l’eau (Aubriot, 2012).
  • [12]
    L’instabilité croissante de la vie urbaine, à la fois dans ses dimensions productives et délétères, génère en elle-même des effets politiques, sociaux et culturels d’envergure, qu’il est difficile de prévoir et d’évaluer.
  • [13]
    Alors qu’il a structuré la formation sociale en Europe (Castel, 1995).
  • [14]
    Forage et stockage individuels pour l’eau, solaire photovoltaïque et thermique pour l’énergie, fosse septique pour l’assainissement, collecte privée pour les déchets.
  • [15]
    C’est le cas de l’eau potable dans certains bidonvilles de Nairobi.
  • [16]
    La normalisation des offres informelles ayant tendance à recréer de l’informel.
  • [17]
    Dans les quartiers de couches moyennes, elles suscitent des craintes formulées en termes de fragmentation urbaine (Graham, Marvin, 2001), de désolidarisation technique et comptable, de surexploitation des ressources collectives au détriment des équilibres écologiques d’ensemble. Les offres visant le « bas de la pyramide » posent, quant à elles, des questions cruciales sur la solvabilité des ménages et leurs taux d’effort, sur les formes brutales d’exploitation socioéconomique dans les marchés de service informels, sur les priorités définies en termes d’accès au détriment des préoccupations environnementales et sanitaires.
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Résumé

La fourniture de services essentiels se heurte, dans les villes africaines, aux difficultés de l’universalisation du réseau centralisé et intégré et prend souvent la forme de dispositifs socio-techniques « alternatifs ». En revenant sur les conditions de l’urbanisation en Afrique, l’article propose un cadre analytique général pour comprendre le déploiement de configurations de fourniture constituées de sous-systèmes socio-techniques hétérogènes, et des pistes de réflexion pour une action publique renouvelée.

Mots-clés

  • modèle
  • réseau
  • service
  • ville africaine

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Sylvy Jaglin
Université Paris-Est
Umr 8134 –Latts
Équipe Réseaux, Institutions, territoires (Rit)
Enpc, 6-8 avenue Blaise Pascal – Cité Descartes
F-77455 Marne-la-Vallée Cedex 2
Mis en ligne sur Cairn.info le 07/06/2012
https://doi.org/10.3917/eg.411.0051
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