CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1Caroline Verzat : comment l’histoire de Matrice a-t-elle commencé ?

2Tiphaine Liu et François-Xavier Petit. Tout a commencé par une rencontre avec les enjeux de l’école 42. Nous nous sommes rapprochés de Kwane Yamgnane qui était alors le directeur général adjoint, devenu aujourd’hui directeur de l’école 42 à San Francisco. Il voulait amener les étudiants à autre chose qu’à bidouiller au fond d’un garage. Les étudiants de 42 ont aujourd’hui 100 % de taux de placement dans l’emploi, mais ils sont formés de manière tellement différente du système traditionnel que leur insertion n’est pas forcément facile ni durable dans les organisations classiques. Au bout de six mois à la direction des systèmes d’information de la Société Générale ou de Pôle Emploi, l’étudiant de 42 peut être tenté de quitter l’entreprise pour devenir travailleur indépendant, fuir la hiérarchie, les blocages, la complexité. À 22 ou 23 ans, comme ils n’ont fait que du code et sont pour beaucoup passés par une phase de décrochage scolaire, ils n’ont pas forcément des idées très originales. Ou alors, ils se limitent au petit monde des jeunes, par exemple en créant une appli pour commander sa bière à distance… Dans notre esprit, il fallait trouver les moyens de les amener à créer des start-up (ou autre) à horizon lointain, sur des projets vraiment innovants, vraiment différents.

3Quelle est l’idée de base qui a donné naissance au projet Matrice ?

4T. L. et F.-X. P. A la base, notre vision consistait à connecter le numérique et le sens, l’intérêt général et l’efficacité. L’intuition à la source du projet Matrice, c’est que la transformation numérique aujourd’hui est assez mal pensée et mal gérée dans les organisations. Trop souvent, le digital est un nouvel outil imposé d’en haut sans aucune prise en compte des acteurs concernés et des implications multiples sur leur travail. Ou alors un objet de pure communication. L’enjeu de Matrice est d’impliquer l’ensemble des personnes concernées dans la conception et la transformation des pratiques, au point qu’elles deviennent auteurs de nouveaux processus utilisant le numérique au plus près de leurs enjeux. L’espoir est autant de générer des conditions de travail complètement renouvelées qu’une amélioration de la qualité des produits ou services rendus. Pour qu’une telle transformation puisse se faire, il faut l’accompagner par un processus de formation sur la durée qui passe par l’expérimentation pratique et par la réflexion sur le sens de l’action outillée par les cadres d’analyse des sciences humaines. C’est précisément ce que propose le programme Matrice.

5La plus-value du projet Matrice, c’est donc de porter la force du numérique sur des enjeux qui ont du sens – ce dont le numérique était assez loin – et en même temps d’ouvrir ces mondes compliqués au numérique en s’appuyant sur la qualité de leurs professionnels. Car il n’est pas question de jeter aux orties le vieux monde. Au contraire, il faut réinvestir ses formes, ses expériences et ses savoirs dans des formats différents.

Tiphaine Liu, directrice pédagogique de Matrice

« J’ai fait toute ma scolarité dans une école nouvelle avec une pédagogie type Freinet… Ce système éducatif alternatif m’a entraîné à prendre des initiatives, à questionner. Je m’en suis rendu compte à la fac. Dès qu’il y avait un problème, j’avais tendance à dire ‘ on n’a qu’à essayer de le résoudre, aller voir les profs, le Conseil d’administration…’ Cela surprenait les autres étudiants. Ensuite, j’ai été enseignante dans le secondaire et j’y ai vécu beaucoup de frustration à cause du cadre très contraignant qui n’incitait pas à des relations moins codifiées entre enseignants et élèves. Puis j’ai fait une thèse en sciences de l’éducation sur les formations à l’innovation. Cela m’a conduit à m’immerger pendant un an et demi à l’École 42, qui s’est construite en rupture avec l’enseignement traditionnel, sans cours et sans professeurs. Je me suis alors demandé si le système 42 [1], qui fonctionne pour apprendre le codage informatique, pourrait fonctionner avec des enseignements autres, plus humains. À ce moment-là, j’ai étudié le Bachelor Jeune Entrepreneur à l’Ecole de Management de Strasbourg, qui avait aussi une pédagogie par l’action sans profs et sans cours [2], dans le domaine de l’entrepreneuriat. Il y a seulement un temps d’échanges hebdomadaire de quatre heures, où les étudiants se retrouvent et utilisent l’intelligence collective pour parler de leurs projets, sous le regard d’un coach. Je me suis beaucoup inspirée de cet exemple qui a fait ses preuves depuis 2011 en France et 1993 en Finlande, pour concevoir et développer le projet Matrice avec François-Xavier. »

François-Xavier Petit, directeur du projet Matrice

« Je suis historien et anthropologue, j’ai enseigné l’histoire moderne à la Sorbonne et travaillé à l’EHESS, après être passé par la prépa, la fac, et une première année d’enseignement au collège. Le fil rouge de mon questionnement était : comment se génère le changement social à travers l’histoire ? En anthropologie, j’ai travaillé sur le Parlement européen et sur la construction de dynamiques politiques à l’échelon supranational. En parallèle de mon activité d’enseignant, j’ai travaillé pendant trois ans avec Arnaud Montebourg. Puis je suis entré en Cabinet ministériel, en 2012, au ministère du Travail. Je me demandais : « Que se passe-t-il dans le monde du travail, pourquoi et comment la société a-t-elle évolué ? Qu’est-ce qui fait que les systèmes centraux organisés et pensés dans la société industrielle sont si peu efficaces dans le monde d’après ? ». À partir de là, je me suis saisi de la question des innovations, de l’innovation sociale et du numérique. J’ai mobilisé à la fois les outils de l’historien pour comprendre d’où vient l’internet, quel est son cheminement, son histoire, mais aussi les outils de l’anthropologue afin de regarder en vrai comment ça marche. Pour cela, je me suis rapproché de l’École 42.

6Il s’agit donc organiser une vraie rencontre. Ce n’est pas une rencontre fonctionnelle au sens où l’on mettrait des compétences bout à bout pour que ça marche par miracle. Sur le papier, c’est attrayant, mais en vrai, c’est un petit peu plus compliqué… En fait, le constat partagé à 42, même si tout le système est fait pour inciter à travailler ensemble, c’est que le travail de groupe ne fonctionne pas si bien… Il ne suffit pas juste de mettre des gens dans une pièce et de leur dire « travaillez ensemble » pour que ça marche !

7L’ambition de Matrice est donc de former un creuset culturel qui fait que ça prend, ça fonctionne. Il y a un double enjeu : socialiser les jeunes à monter des projets, à innover, en milieu complexe en prenant en compte le sens, l’histoire, l’intérêt, la mémoire, la valeur des milieux dans lequel ils s’insèrent, et en même temps socialiser aussi les institutions et les mondes complexes au potentiel de l’innovation numérique, en en prenant la démarche, la façon de penser, l’intérêt et la puissance. D’où l’idée de connecter le numérique et le sens, le service public et l’efficacité. Et donc c’est pour ça qu’on a plutôt aussi une orientation publique à la base.

8Comment avez-vous réussi à monter ce projet ? Par quoi avez-vous commencé ?

9T. L. et F.-X. P. Il y a eu un premier test avec des équipes d’étudiants de l’école 42 et la préfecture de police autour d’une question sur l’urgence. Comment est-ce qu’on conçoit le 112 par SMS avec une intelligence artificielle pour répondre ? Un développement a été livré à la Police et l’équipe étudiante forte de cette expérience a créé une start-up sur d’autres applications du code source dont ils avaient gardé la propriété.

10La structure institutionnelle Matrice a ensuite été enfantée dans la douleur… Il fallait que François-Xavier puisse quitter le ministère du Travail pour se consacrer à temps plein au projet. Ça n’a pas été simple, car les cultures d’origine et d’arrivée ne sont pas les mêmes, mais professer la pluridisciplinarité suppose d’abord de se l’appliquer à soi-même. Le programme a été porté dans un premier temps par l’incubateur Creative Valley et 42, avant de devenir une entité juridiquement autonome.

11La suite du financement a été obtenue dans le cadre du Programme d’Investissement d’Avenir (PIA) sur des parties de formation (PIA Partenariats pour la formation professionnelle et l’emploi). Et parallèlement, grâce aux contacts de François-Xavier dans le public, des premiers contrats ont été gagnés avec le ministère du Travail puis avec le Commissariat à l’Energie Atomique qui ont apporté l’autonomie financière permettant de créer une structure indépendante sous forme associative.

12De nouvelles « matrices » (chaque projet est appelé ainsi) ont pu ensuite voir le jour : l’une, conçue en partenariat avec le ministère de la culture (DGCA) s’intitule Arts et Numérique et vise à proposer de nouvelles pistes pour la médiation, la diffusion et la création culturelle ; une autre « matrice » a été montée avec la Marine nationale et Thales a pour thématique l’analyse des situations maritimes ; Les problématiques et partenaires sont très variés.

13Concrètement, comment travaillent les étudiants ?

14T. L. et F.-X. P. Les projets sont développés par les étudiants en équipes interdisciplinaires et inter-écoles et ils appartiennent aux étudiants. Le but est qu’au bout du processus de travail collaboratif sur huit à dix mois, cela évolue vers un projet intra ou entrepreneurial, mais les étudiants restent libres de leur décision. Certains étudiants donnent le produit créé au partenaire mais gardent le code source et créent une startup sur d’autres applications. Certains négocient un contrat de maintenance associé, certains le vendent, certains embarquent en équipe dans une business unit interne à l’institution partenaire. Toutes les issues sont envisageables. La propriété du projet est la clé de l’engagement des étudiants. On ne peut pas leur demander de se comporter en futurs entrepreneurs si le partenaire est en réalité un commanditaire qui a droit de vie ou de mort sur la suite du projet in fine.

15Comment les partenaires y trouvent-ils leur compte ?

16T. L. et F.-X. P. Du point de vue des partenaires institutionnels, on vend un processus ouvert. On leur dit : « On entre dans le sujet, avec vos problématiques, vos enjeux, vos besoins, mais pas vos cahiers des charges précis ; prenez le risque d’être surpris par ce qui va se passer, car à la fin, on sait qu’il en sortira plein de choses mais il est impossible de dire quoi à l’avance ». Il y a un côté mystère, mais c’est précisément cette liberté qui autorise qu’il se passe quelque chose. Par exemple, avec le CEA, nous avons fait une matrice avec des étudiants de 42 et des étudiants de Strate College sur la transformation de leurs recherches sur les systèmes intelligents, les réseaux de neurones et les logiciels de reconnaissance d’image en démonstrateurs permettant de faire émerger des applications économiques. Ils nous ont avoué : « On ne comprend pas comment il est possible qu’en un mois, des étudiants qui étaient si loin du sujet aient réussi à comprendre nos enjeux mieux que beaucoup de nos clients qui sont pourtant assez experts ».

17À votre avis, quelle est la valeur ajoutée de Matrice ?

18T. L. et F.-X. P. Une chose frappante, c’est que dans les organisations, tout est souvent pensé sous l’angle du problème. Dans le processus Matrice, il y a évidemment plein de problèmes, mais la réflexion est orientée du côté des solutions via l’expérimentation et le dialogue avec les acteurs du terrain. Des solutions et des bonnes idées, il y en a partout, tout le monde a plein de bonnes idées. Mais l’important, c’est leur mise en œuvre, l’application concrète, ce qui suppose leur co-construction.

19Dans les mondes compliqués des ministères, si la « solution » arrive de l’extérieur, d’un cabinet de conseil par exemple, c’est comme si le ciel tombait sur la tête des acteurs en place. C’est comme la foudre, rien à faire : même si la solution est bonne, elle ne marchera pas. L’intérêt du programme Matrice, c’est de co-construire sur la durée avec les professionnels et d’être d’emblée interdisciplinaire. Donc d’accepter les avis opposés des autres étudiants, des autres cultures professionnelles, des vocabulaires etc. Il y a beaucoup plus de chances que les solutions soient expérimentées, réutilisées, réappropriées, transformées, car le dialogue continue. Le programme pousse d’abord à apprendre à s’écouter, à dialoguer entre étudiants d’origines différentes et à discuter et tester avec les partenaires.

20Il y a aussi une forme de naïveté et de gentillesse de l’étudiant qui rend les choses possibles… Par exemple, sur le sujet de l’autisme, quand on a mis ensemble des étudiants de 42, donc des codeurs, des designers, des cognitivistes, des psychologues professionnels, des pédopsychiatres de l’hôpital Robert-Debré, des généticiens de Pasteur, et des familles d’enfants autistes, dans cet attelage un peu bizarre, les problématiques étaient posées différemment. Là où il y avait des chapelles, des guerres de tranchées constituées depuis des années entre les comportementalistes et les psychanalystes, les choses ont été posées différemment, parce que ce n’étaient pas les mêmes acteurs, et puis parce que les étudiants osaient questionner « mais enfin, on pourrait faire comme ça ? »… Alors, parfois, ça effrayait les professeurs « mais vous ne vous rendez pas compte à quel point vous avez mis le doigt dans un engrenage ! ». Mais cette fraîcheur, cette ouverture finalement, permettait de se dire « oui, en fait, peut-être qu’on peut le contourner ce champ de mines, et ça va bien se passer quand même ». En même temps, la présence des professionnels permettait de ramener les étudiants sur des choses faisables, réalistes et pertinentes au regard de l’état de l’art, si bien qu’ils ne sauteraient pas sur la mine…

21Au-delà de la « fraîcheur », qu’est ce que le fait de recourir à des étudiants comporte comme avantages ?

22T. L. et F.-X. P. Les étudiants sont au départ sans enjeu majeur par rapport à la thématique, ils ont juste envie de bien faire et d’apprendre. Ils sont volontaires sur un programme d’entrepreneuriat autour d’une thématique sociale suffisamment large qu’ils ont choisie, par exemple Matrice Autisme, Matrice Art et numérique, Matrice citoyenneté et numérique… Ce sont des thématiques qui leur parlent. Quand ils arrivent, ils ont cette posture humble à l’opposé de celle du consultant : « on ne connaît pas, on n’est pas des experts, donc on vient, et vous, vous êtes les experts ou les acteurs de terrain, vous connaissez »…

23Et puis ils ont du temps pour concevoir, coder, tester, refaire… Quand le consultant dispose de trois jours, les étudiants ont huit à dix mois à temps plein. C’est un des facteurs qui permet l’accélération : mixer le savoir de l’institution, du professionnel qui manque de temps mais qui saura donner les éléments de savoir et orienter sur les bonnes personnes au bon moment, avec le temps des étudiants, qui eux, sont en capacité de rencontrer les utilisateurs, de questionner, d’imaginer, de coder une application, de tester, de refaire… Et in fine, le produit testé et délivré avec le logo « fait avec l’institut Pasteur » donne une crédibilité fondamentale.

24La disponibilité des étudiants de 42 est entière parce que le curriculum leur donne beaucoup de temps libre. En revanche, elle doit être conquise pas à pas avec les autres institutions académiques. Pour ces autres étudiants, la participation à Matrice est gratuite. Mais il faut que leurs écoles et universités acceptent de les libérer de leurs obligations de cours. C’est facile quand ils ont une césure, un stage ou un projet prévu suffisamment long dans leur curriculum. Il faut aussi s’entendre sur l’octroi des crédits pour leur participation à ce programme. Jusqu’à maintenant, ça s’est arrangé. On fait des jurys communs. Nous sommes en train de construire un système complémentaire de validation des crédits à base d’auto-évaluation, et de co-évaluation par les pairs et par les coachs en cohérence avec les principes d’apprentissage par l’action.

25Quelle est la part des techniques et celle des soft skills dans votre pédagogie de l’entrepreneuriat ?

26T. L. et F.-X. P. Au démarrage du programme, on fait un temps d’immersion pour apprendre à se connaître les uns les autres. ça ne se décrète pas, quand on vient d’écoles différentes. Le but est aussi d’introduire les grandes problématiques de la thématique choisie.

27Ensuite le principe est que les étudiants sont en autonomie sur leurs projets. Mais ils ont une rencontre hebdomadaire obligatoire (training session inspirée du système finlandais Team Academy [3]) en groupe de 15 à 20 étudiants animée par un coach ou tisseur. Le rôle du tisseur est de leur permettre de développer, de poser toutes les questions et problématiques transversales aux équipes. Ce n’est pas un temps pour faire avancer le projet uniquement, mais aussi pour construire des savoirs en inter-équipes. En particulier, pour pouvoir apprendre à gérer les problèmes humains : Comment communiquer ? Qu’est-ce que c’est que le leadership ? Comment avoir confiance ? Comment aborder des personnes extérieures ? Quels sont les enjeux et valeurs qui poussent chacun à faire des choix ? Quelle posture adopter vis-à-vis des futurs partenaires, clients, parties prenantes ? C’est un temps pour développer une intelligence collective afin de s’entraider et d’apprendre à agir avec discernement. La mise à distance critique et bienveillante de l’action est la clé de ces apprentissages.

28Dans notre approche, les outils de l’entrepreneur que sont le business plan, le plan marketing ou le référencement sur internet… sont secondaires par rapport à la capacité d’être soi-même dans un projet, de construire une porosité entre le projet et soi, donc une maturité permettant de penser librement et de s’engager en connaissance de cause. C’est sur ça qu’on investit. C’est difficile à comprendre parfois du point de vue des clients ou des partenaires dans un environnement généralement saturé de cours, de workshops, où l’on apprend à faire du ‘dur ‘. Pour nous, la construction de cette maturité est essentielle, pour que les jeunes puissent tenir bon et que les équipes soient viables sur la durée, après l’arrêt du programme de formation. Il faut que ça tienne non parce que les étudiants sont dans un programme à valider à la fin, mais parce que le projet leur tient à cœur, qu’ils sont au clair sur leurs enjeux et ceux de l’environnement et qu’ils peuvent être eux-mêmes dans l’équipe. C’est ce changement de rapport à soi, au monde et aux autres qui est crucial pour nous. C’est la construction d’une identité socio-professionnelle fondée sur la confiance, l’engagement et le sens de nos actes.

29Quel premier bilan tirez-vous de l’expérience ?

30T. L. et F.-X. P Il est encore un peu tôt pour avoir des résultats significatifs : Matrice a vu officiellement le jour fin 2016 et le dispositif pédagogique complet n’a été mis en place que depuis janvier 2017. Mais les premiers retours qu’on a eu des équipes sont positifs : ils disent que les training session leur ont appris à se parler différemment, à gérer des choses qu’ils n’arrivaient pas à gérer avant et à croire en leur projet. Mettre à plat les vrais objectifs et dire « maintenant, on va aller jusqu’au bout, on verra bien ce que ça va donner, mais en tout cas on va faire ce processus tous ensemble » leur a donné confiance. Ils ont envie de continuer à s’investir dans leurs projets.

31Quels sont les enjeux et les défis de Matrice pour aujourd’hui et pour demain ?

32T. L. et F.-X. P. Aujourd’hui, notre défi, c’est de construire la croissance de Matrice. On a une forte demande de la part d’entreprises et d’institutions publiques mais aussi de la part d’étudiants dans toutes les institutions académiques avec lesquelles on a déjà opéré. C’est la preuve que le concept est validé.

33Maintenant notre enjeu, c’est de faire exploser le modèle, de lui donner une vraie ampleur, d’aller jusqu’au bout de ce que l’on veut faire. C’est-à-dire que des matrices en cours sortent de plus en plus de projets et d’équipes viables et qu’elles continuent à collaborer et à former un vrai écosystème porté par nos valeurs. On en voit les embryons, mais il faut aller jusqu’au bout. On a aussi besoin de connecter vraiment avec les mondes de la recherche pour continuer d’apprendre et d’innover. Il y a aussi une question d’échelle parce qu’il faut qu’on étoffe l’équipe, notamment qu’on ait des coachs qui soient dans notre état d’esprit. C’est un programme qui n’est pas forcément facile à expliquer parce qu’il a une vraie ambition sociale et des valeurs humanistes. Mais c’est aussi tout ce qui constitue sa différence dans les multiples incubateurs et formations à l’entrepreneuriat qui fleurissent partout aujourd’hui et dont l’environnement est plutôt branché profit et business. Nous voulons que ça reste un modèle ouvert, qui continue à évoluer, et d’abord centré sur l’humain.

Notes

Français

François-Xavier Petit et Tiphaine Liu ont conçu et créé ensemble en 2016 le projet Matrice, un incubateur étudiant original pédagogiquement inclus dans 42 mais structurellement indépendant et destiné à expérimenter l’entrepreneuriat avec des jeunes issus d’institutions d’enseignement supérieur hétérogènes (Ecole 42, Sciences po, Strate College, ENA, Condé, ENSAD, Icart, etc.), soutenu par des partenaires comme le ministère de la Culture, la Marine nationale, Thales, l’institut Pasteur, le CEA, etc. Une centaine d’étudiants y sont intégrés à ce jour et plusieurs projets entrepreneuriaux y sont nés. L’histoire personnelle et les valeurs de ces deux entrepreneurs humanistes, ainsi que leur rencontre avec un dirigeant de l’école 42, éclairent la vision de leur projet éducatif et livrent des réponses originales face aux enjeux de l’éducation par et pour l’entrepreneuriat.

Propos recueillis par
Caroline Verzat
Rencontre avec
François-Xavier Petit
Tiphaine Liu
Cofondateurs du programme Matrice
Cette publication est la plus récente de l'auteur sur Cairn.info.
Mis en ligne sur Cairn.info le 31/07/2017
https://doi.org/10.3917/entin.031.0036
Pour citer cet article
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