CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1Le développement considérable des usages économiques des hydrocarbures depuis la fin du XIXème siècle a entraîné une croissance très forte du commerce maritime de ces produits, dans la mesure où leurs lieux de production, de transformation et de consommation sont distincts et même souvent séparés par des océans. Cette évolution, indispensable à la fourniture d’énergie bon marché, s’est cependant accompagnée d’une multiplication des marées noires, c’est-à-dire déversements accidentels d’une quantité importante d’hydrocarbures dans l’océan et éventuellement sur les côtes.

2De par l’émoi qu’il a provoqué, le naufrage de l’Amoco Cadiz en 1978 en Bretagne a entraîné certains progrès réglementaires, comme par exemple l’obligation de réservoirs à ballasts séparés, afin de réduire le volume d’hydrocarbures déversés en cas d’accident. Toutefois, ces améliorations ont rapidement montré leurs limites, comme l’atteste la survenance des marées noires de l’Exxon Valdez en 1989 puis de l’Erika en 1999. À la suite de ces catastrophes, les États-Unis et l’Union européenne ont décider d’imposer le retrait progressif des pétroliers simple coque et leur substitution par des double coque, réputés plus sûrs.

3Confrontée à la nouvelle marée noire du Prestige en novembre 2002, l’Europe a adopté un nouveau règlement (1726/2003) qui durcit encore les conditions de transport d’hydrocarbures. Il prévoit notamment l’interdiction immédiate, dans les ports européens, du transport d’hydrocarbures lourds par des pétroliers simple coque, ainsi que l’accélération du retrait de ces pétroliers du pavillon européen comme de tout port communautaire.

4L’objectif de cette étude est d’évaluer l’impact socioéconomique de ce règlement en mettant en perspective les gains que l’on peut en attendre (diminution du nombre de marées noires du fait de l’augmentation précoce de la part de double coque et du rajeunissement de la flotte) et les surcoûts économiques (constructions supplémentaires et surcoûts d’exploitation) induits pour le transport maritime et in fine les consommateurs.

5Le calcul du coût de renouvellement de la flotte de pétroliers de plus de 10 000 tpl (tonnes de port en lourd) est effectué sur la période 2003-2020 dans trois scénarios – à savoir le statu quo réglementaire, la mise en œuvre unilatérale par l’Europe de son nouveau règlement et l’application mondiale de ce règlement –, en partant des prévisions d’évolution de trafic par destination géographique et segments de marché (brut, produits, hydrocarbures lourds). Pour chacun d’entre eux, est simulé un profil optimisé de construction et de démolition de la flotte intégrant les limites de capacité des chantiers navals. L’analyse est effectuée à la fois au niveau mondial et aux échelons régionaux pertinents en matière de réglementation maritime, à savoir l’Europe, les États-Unis et le reste du monde.

6Le coût socioéconomique d’une marée noire comporte différentes composantes (remise en état du milieu, pertes des secteurs halieutique et touristique, pertes d’aménités découlant de la pollution du littoral, etc.) dont certaines, en particulier les pertes non marchandes liées à la dégradation des écosystèmes, restent particulièrement difficiles à évaluer. Par ailleurs, à quantité d’hydrocarbures déversée égale, le coût socioéconomique d’une marée noire peut varier considérablement en fonction de paramètres tels que le type de produit transporté, la météo, la distance à la côte, ou encore l’importance des activités économiques et touristiques situées à proximité du lieu du naufrage.

7Malgré ces limites, l’analyse du coût estimé des différentes marées noires qui se sont produites en Europe et aux États-Unis a conduit à supposer que le coût moyen d’une marée noire en Europe pouvait être évalué à environ à 700 millions d’euros ou 1500 millions d’euros selon les variantes considérées. S’agissant des autres régions du globe, deux hypothèses ont été examinées : un coût des marées noires identique à celui de l’Europe, en considérant implicitement que les milieux naturels dégradés ont un caractère de bien public mondial ayant une valeur commune, ou un coût variable au prorata du PIB en parité de pouvoir d’achat de la zone concernée, en supposant que seules les pertes marchandes sont constantes.

8Le manque de recul historique ne permet pas d’évaluer aujourd’hui le gain de sécurité inhérent aux double coque. Cependant, les recherches et simulations effectuées aux États-Unis suite à l’Exxon Valdez nous ont amené à considérer qu’à âge égal, un pétrolier double coque a près de deux fois moins de risque qu’un pétrolier simple coque de provoquer une marée noire. Par ailleurs, l’examen des taux de perte des navires en fonction de leur âge au cours de la décennie 1990 nous a permis de paramétrer la fonction affine reliant l’âge d’un pétrolier simple coque et la probabilité de survenance d’une marée noire.

9Avec ces hypothèses, l’analyse coûts-bénéfices suggère que le bilan du règlement communautaire est positif d’au moins 100 millions d’euros pour les Européens : il n’entraîne pas de surcoûts économiques mais permet de diminuer la fréquence des marées noires dans les eaux européennes. Toutefois, le règlement relève d’une logique non-coopérative : il ne réduit pas le risque de marée noire au niveau mondial et entraîne simplement un déplacement des pétroliers les moins sûrs vers les eaux extra-européennes.

10La généralisation au niveau mondial des dispositions du règlement a été demandée par l’Europe afin de protéger son pavillon et de réduire encore le risque de marée noire, dans la mesure où les pétroliers qui passent au large des côtes européennes sans s’y arrêter ne sont pas concernés par une mise en œuvre unilatérale du règlement par l’Europe. Il ressort des simulations effectuées que cette extension du champ d’application du règlement permettrait de réduire significativement (de l’ordre de 15%) l’espérance du nombre de marées noires dans le monde d’ici 2015. Toutefois, avec les coûts d’une marée noire que l’on peut aujourd’hui retenir, son bilan socioéconomique serait défavorable, tant du point de vue de l’Europe (solde d’environ-800 millions d’euros sur la période 2003-2020) que du monde entier (solde négatif de plus de 4 milliards d’euros).

11Une réévaluation à la hausse du surcroît de sécurité apporté par les double coque, tout comme une valorisation collective plus importante du coût des marées noires, ne modifieraient pas les conclusions de l’étude. En effet, même en supposant que les double coque permettent d’éviter à coup sûr les marées noires, il faudrait un coût de la marée noire supérieur à 8 milliards d’euros pour que ce bilan devienne positif.

12Au total, il apparaît que l’élimination précoce des double coque pour réduire le nombre de marées noires a un coût élevé. Aussi, d’autres pistes de réformes, comme par exemple une meilleure responsabilisation des armateurs et une indemnisation plus large des dommages environnementaux par les agents à l’origine du sinistre, devraient être envisagées, en s’appuyant sur l’expérience américaine en la matière.

13L’objet de cette recherche est de procéder à une analyse coûts-bénéfices sur la période 2003-2020 du règlement communautaire 1726/2003 qui durcit les conditions de transport maritime d’hydrocarbures, demanière à mieux prévenir la survenance demarées noires. Deux cas sont considérés, selon que l’Europe applique seule ce règlement ou que d’autres pays décident de l’imiter :

  • le scénario 1 correspond à la mise en œuvre unilatérale des dispositions du règlement en Europe dès 2003;
  • le scénario 2 (officiellement demandé par les pays européens dans le cadre de l’Organisation maritime internationale – OMI – [1] ) correspond à l’extension au niveau mondial des dispositions qui sont entrées en vigueur au niveau communautaire en 2005 [2].

14L’étude met en perspective, d’une part, l’impact économique sur le secteur des transports maritimes et, d’autre part, les gains inhérents à la nouvelle réglementation, du fait d’une moindre fréquence des marées noires. Elle se limite à l’analyse des pétroliers de plus de 10 000 tpl (tonnes de port en lourd), alors que le projet de règlement concerne également, selon des modalités spécifiques, certains navires de taille inférieure. L’analyse coûts-bénéfices est effectuée à la fois à l’échelle du monde et à celle des trois zones géographiques qui sont ici considérées (Europe, États-Unis, reste du monde).

Le contexte

Flux de transport maritime d’hydrocarbures

15Depuis ses débuts en 1860, le transport maritime d’hydrocarbures s’est développé rapidement et représente aujourd’hui de très loin la forme de commerce internationalla plusimportante, avecplus de deux milliards de tonnes transportées par an. Ce transport concerne aux trois quarts du pétrole brut et pour le reste les produits pétroliers, parmi lesquels il est d’usage de distinguer les produits lourds (dits « noirs »), tels que le fioul n°2 ou le goudron, des produits plus légers (dits « blancs »), comme l’essence, le gazole ou le kérosène : les premiers, visqueux, sont très polluants, alors que les seconds, volatiles, le sont moins.

16Lorsque les hydrocarbures ne sont pas transportés par pipeline, l’acheminement par voie maritime des hydrocarbures s’effectue lors de deux étapes distinctes : entre le lieu de production et le lieu de transformation (raffinage), mais également entre le lieu de transformation et le lieu de vente. Par exemple, l’Europe, qui dispose d’une capacité excédentaire deraffinage par rapport à ses besoins de consommation, exporte des quantités relativement importantes de produits en direction de l’Afrique ou des États-Unis.

Quelle fréquence des marées noires en Europe et dans le monde ?

17Une marée noire est habituellement définie comme le déversement accidentel d’une quantité importante d’hydrocarbures dans l’océan et éventuellement sur des côtes. Plusieurs types d’accidents, propres au pétrolier et/ou extérieurs à lui, comme par exemple lesconditions météorologiques ou unecollisionavec un autre navire, peuvent en être à l’origine.

Tableau 1

causes des marées noires pour les pétroliers de plus de 700 tonnes

Tableau 1
Tableau 1 : causes des marées noires pour les pétroliers de plus de 700 tonnes Cause ITOPF*(depuis 1974) SCOR(période 1991-1999) Échouage 34% 21% Collision 28% 10% Incendie, explosion 6% 36% Autre 19% 20% Non spécifiée 12% 13% * International Tanker Owners Pollution Federation Limited. Les disparités entre les deux sources de données indiquées ci-dessus reflètent le fait que la cause d’une marée noire n’est pas toujours spécifiée (catégorie « non spécifiée » dans le tableau), que l’on ne dispose que d’un nombre relativement faible de sinistres et que les causes d’accident ont peut-être évolué depuis 30 ans.

causes des marées noires pour les pétroliers de plus de 700 tonnes

18Contrairement à l’impression la plus courante, le nombre moyen de marées noires dans le mondeesten forte réduction depuis la fin des années soixante-dix – époque à laquelle le risque de marée noire était historiquement le plus élevé– alors que le commerce maritime d’hydrocarbures a continué à progresser depuis.

19Comme souligné dans le tableau ci-dessous, l’Europe et en son sein la France ont cependant continué à connaître des marées noires relativement fréquentes, sans qu’une tendance baissière nette ne puisse être véritablement décelée.

Graphique 1

déversements annuels supérieurs à 7 tonnes d’hydrocarbures dus aux marées noires entre 1970 et 2001 (en milliers de tonnes)

Graphique 1
Graphique 1 : déversements annuels supérieurs à 7 tonnes d’hydrocarbures dus aux marées noires entre 1970 et 2001 (en milliers de tonnes) 700 600 Atlantic Express (Venezula) 500 Amoco Cadiz (France) Castillo de Bellves Haven Urquiloa (Afrique du sud) (Italie) 400 (Espagne) Khark 300 (Venezuela) ABT Summer Exxon Valdez (Mozambique) (États-Unis) 200 Sea Empress (Royaume-Uni) 100 Erika (France) 0 1970 1980 1990 2000 Source : ITOPF

déversements annuels supérieurs à 7 tonnes d’hydrocarbures dus aux marées noires entre 1970 et 2001 (en milliers de tonnes)

ITOPF
Tableau 2

marées noires d’importance ayant touché la France

Tableau 2
Tableau 2 : marées noires d’importance ayant touché la France Nom du pétrolier Année Lieu du naufrage Hydrocarbure Milliers de t déversées* Torrey Canyon 1967 Cornouaille, RU brut 117 000 (Bretagne) Amoco Cadiz 1978 Portsall, Bretagne brut 223 000 Tonia 1980 Ile de Batz, Bretagne fioul lourd 18 000 Amazzone 1988 Penmarch, Bretagne fioul lourd 18 300 Haven 1991 Golfe de Gènes brut 144 000 Erika 1999 Penmarch, Bretagne fioul lourd 20 000 Prestige 2002 Galice, Espagne fioul lourd > 37 500 (côte landaise surtout) * dans le cas de sinistres qui se sont produits à l’étranger, seule une partie des hydrocarbures déversés a effectivement pollué les eaux et côtes françaises.

marées noires d’importance ayant touché la France

Contexte réglementaire

20Suite à la marée noire de l’Erika (simple coque de 24 ans) en décembre 1999, l’Europe a acté leprincipede nombreuses mesures (paquets dits Erika 1 et Erika 2), comme par exemple la création d’une agence européenne de sécurité maritime, le renforcement du contrôle de la qualité des inspections des pétroliers effectuées par lessociétés de classification ou encore l’accélération du retrait des pétroliers à simple coque. Au terme d’âpres négociations, ce calendrier de remplacement accéléré des simple coque a été étendu au niveau international en 2002.

21Devant le tollé suscité par la nouvelle marée noire du Prestige (simple coque âgé de 26 ans) au large des côtes galiciennes en novembre 2002, les différents pays de l’Union européenne, dont plus de 90% de l’approvisionnement en pétrole se fait par voie maritime, ont décidé d’améliorer encore leur législation sur la sécurité maritime et d’accélérer la mise en place de mesures déjà décidées de prévention de ces marées noires. C’est dans ce cadre que, parmi un éventail de mesures diverses (création de zones particulièrement vulnérables, renforcement du nombre d’inspecteurs…), l’Union européenne a décidé de durcir les caractéristiques techniques des pétroliers autorisés à transporter des hydrocarbures depuis ou vers des ports européens ou des terminaux offshore et/ou mouillant dans les eaux européennes.

22Le règlement européen prévoit notamment :

  • l’interdiction immédiate du transport des hydrocarbures lourds (brut et produits) dans des bateaux d’un port en lourd égal ou supérieur à 5000 tonnes munis d’une simple coque, qui sont généralement ceux qui causent le plus de dégâts en cas de marée noire, du fait de leur faible volatilité, et qui (dans le cas des produits) sont le plus souvent prioritairement transportés dans des navires plutôt âgés [3];
  • une accélération du calendrier de retrait des pétroliers simple coque, avec, comme dates limite de circulation, 2005 pour les pétroliers pré-MARPOL [4] et 2010 pour les autres, contre 2007 et 2015 avec les règles actuelles de l’OMI. Un calendrier spécifique est prévu pour les petits pétroliers compris entre 600 et 5000 tpl;
  • une application plus large du régime spécial d’inspection des pétroliers (Condition Assessment Scheme) pour évaluer le bon état structurel de l’ensemble des pétroliers à simple coque ayant plus de 15 ans.

23Il convient de noter que le champ d’application de ce projet de règlement varie selon ses dispositions : l’interdiction du transport d’un hydrocarbure lourd dans des simple coque ne concerne que les pétroliers qui entrent dans un port ou dans un terminal offshore relevant de la juridiction d’un État membre de l’Union européenne, alors que le calendrier de retrait accéléré des double coque est applicable en plus à l’ensemble des pétroliers battant pavillon d’un des pays de l’Union européenne, quelle que soit leur localisation.

24Deux calendriers distincts de retrait des double coque (cf. annexe 1) existent d’ores et déjà :

  • les États-Unis ont adopté en 1990, suite à la catastrophe de l’Exxon Valdez en Alaska en 1989, l’Oil Pollution Act (OPA) qui prévoit l’élimination de tous les pétroliers simple coque de plus de 30 000 tpl d’ici 2010 [5];
  • l’OMI interdit depuis 1993 la construction de simple coque de plus de 5 000 tpl (règle dite MARPOL [6] 13F) et a, suite notamment à la catastrophe de l’Erika, modifié en 2001 la convention MARPOL de 1973 (amendement à la règle dite MAR POL 13G ) en prévoyant l’élimination progressive des pétroliers simple coque au tonnage supérieur à 20 000 tpl (ou 30 000 selon les types de cargaison) d’ici 2015. Ces modifications sont entrées en vigueur depuis le 1er septembre 2002.

Modélisation du coût pour le transport maritime des différents scénarios

Hypothèses générales de l’étude

Période d’analyse

25L’analyse du coût et des bénéfices attendus pour chaque scénario de durcissement des conditions de transport maritime d’hydrocarbures a été conduite sur la période 2003-2020. En effet, dans tous les scénarios envisagés, le dernier « choc réglementaire » (c’est-à-dire l’élimination soudaine d’un nombre important de pétroliers simple coque) a lieu en 2015, si bien qu’après cette date les profils de construction et de démolition de navires redeviennent semblables dans tous les cas de figure. Par ailleurs (cf. partie II), les risques de marée noire après 2020 redeviennent sensiblement identiques selon les scénarios.

Actualisation

26A priori, il n’est pas évident de déterminer quel est le taux d’actualisation le plus adéquat pour une analyse au niveau mondial avec un horizon de vingt ans. Finalement, un tauxde 6% a été retenu, soitunniveau intermédiaire entre le rendement actuel de long terme d’actifs sans risque et le taux de 8% recommandéparle CommissariatGénéral auPlan.

Paramètres exogènes

27Pour la simplicité de l’étude, de nombreux paramètres qui déterminent le coût de transport des hydrocarbures (comme le prix d’achat des pétroliers) ont été considérés comme exogènes. Ainsi, les besoins de transport d’hydrocarbures entre zones géographiques ne dépendent pas du coût du transport et ne seront donc en conséquence pas modifiés par l’adoption du règlement communautaire. Cette hypothèse semble raisonnablepour laplupart destrafics (quidépendent des besoinsd’hydrocarbures deszonesimportatrices et sont donc difficilement modifiables). En revanche, il est possible que cette hypothèse soit forte pour certains trafics, notamment ceux d’hydrocarbures lourds (qui ne pourront être transportées que dans des doubles coques) et de produits d’hydrocarbures à destination de l’Europe. En effet, celle-ci a actuellement une capacité de raffinage excédentaire par rapport à ses besoins de consommation, si bien qu’un renchérissement du transport pourrait inciter certains opérateurs à raffiner le produit brut directement sur le lieu de consommation finale plutôt qu’en Europe.

Parc de pétroliers disponibles

28Le parc de pétroliers disponibles considéré dans cette étude (données Clarkson Research Studies, novembre 2002) comprend autour de 2450 navires pour un tonnage cumulé de près de 280 Mtpl, soit l’ensemble des pétroliers existants de plus de 10 000 tpl [7]. Dans la très grande majorité des cas, chacun des navires a une utilisation unique : le transport de brut ou de produits. Dans les quelques rares cas où les caractéristiques du bateau l’autorisent à transporter ces deux types de cargaisons, notre modèle considère arbitrairement pour des raisons de simplicité qu’il sera uniquement utilisé aux transports de produits. Par ailleurs, ce parc intègre quelques navires capables à la fois de transporter du vrac sec et des hydrocarbures : ils ont été comptabilisésàhauteurde 50% de leur tonnage.

29La base de données utilisée fournissait dans plus de 80% des cas la technologie du pétrolier : simple coque (cas de la quasi-totalité des bateaux jusque dans les années soixante-dix), double fond, doubles côtés ou double coque, qui constitue a priori la technologie la plus sûre et qui est quasi systématiquement utilisée depuis le début des années quatre-vint-dix. Dans les autres cas, la technologie des navires a été renseignée en tenant compte des données disponibles par ailleurs sur la technologie des pétroliers par année de construction. En revanche, il s’est avéré impossible de savoir si chacun des navires était ou non muni d’un serpentin de réchauffage (heating coil) nécessaire au transport de certains hydrocarbures lourds (qui peuvent être à la fois du brut et des produits). Sachant simplement qu’en moyenne 44% des simples coques et 53% des doubles coques étaient munis de serpentins, nous avons généré aléatoirement pour chacun des bateaux la présence ou non d’un serpentin selon ces lois de probabilité.

Flux de transport maritime d’hydrocarbures

Échanges maritimes en 2002

30L a compilation d’informations précises et exhaustives sur les volumes totaux d’hydrocarbures transportés par voie maritime n’est pas aisée. En particulier, il est extrêmement difficile de recueillir des données fiables sur les caractéristiques des cargaisons transportées (pétrole brut ou produit, densité de l’hydrocarbure… ) et les transports maritimes intra-zone, qui sont généralement absents des statistiques internationales [8]. Les données pour l’année 2002 présentées ci-dessous dans le tableau ont été déterminées à partir des données fournies par Total et BP dans sa publication statistical review of world energy 2002, des statistiques de l’OCDE, des rapports sur les transports maritimes de la Commission des Nations pour le Commerce et le Développement (CNUCED), ainsi que de données de trafic de la revue Oil and Tanker market publiée par Fearnley A/S. Les données sur les échanges intrazone pour les États-Unis et l’Europe, pour lesquelles la marge d’incertitude demeure plus importante, ont été estimées à partir d’informations publiées par l’administration américaine (Energy Information Administration), Eurostat et l’Institut supérieur d’économie maritime (Isemar), en excluant le cabotage réalisé par des navires de taille inférieure à 10 000 tpl.

Tableau 3

estimation des échanges maritimes d’hydrocarbures en 2002 (milliards de tonnes. milles nautiques transportées)

Tableau 3
Tableau 3 : estimation des échanges maritimes d’hydrocarbures en 2002 (milliards de tonnes. milles nautiques transportées) Type d’échange Brut Produits Europe – Europe 296,1 164,5 Europe – reste du monde hors États-Unis 2701,7 210 Europe – États-Unis 105 122,5 États Unis – États-Unis 60 80 États-Unis – reste du monde hors Europe 2260 227,5 Reste du monde hors Europe et États-Unis 4125 1155 Total 9547,8 1959,5

estimation des échanges maritimes d’hydrocarbures en 2002 (milliards de tonnes. milles nautiques transportées)

31Parmi ces trafics, il est encore plus ardu de déterminer ceux qui concernent des hydrocarbures lourds. Les quelques statistiques existant sur le sujet ne correspondent généralement pas aux critères retenus par les Européens (API inférieur à 25,7) pour qualifier un hydrocarbure de lourd [9]. Les données concernant les États-Unis, qui sont les plus précises, ont été recueillies auprès du Ministère fédéral américain de l’énergie. Dans le cas des échanges ne concernant que la zone « reste du monde », il a été impossible de trouver des données précises : les chiffres avancés dans le tableau ne sont donc que des hypothèses de travail fondées sur les résultats disponibles pour l’Europe et les États-Unis.

Tableau 4

part des hydrocarbures lourds dans le total des échanges maritimes

Tableau 4
Tableau 4 : part des hydrocarbures lourds dans le total des échanges maritimes Type d’échange Brut Produits Europe - Europe 12% 25% Europe - reste du monde hors États-Unis 10% 45% Europe - États-Unis 10% 10% États-Unis – États-Unis 25% 10% États-Unis – reste du monde hors Europe 30% 25% Reste du monde hors Europe et États-Unis 25% 20%

part des hydrocarbures lourds dans le total des échanges maritimes

Prévisions de croissance des trafics

32Les prévisions de croissance de trafics ont été réalisées en s’appuyant sur les données publiées par l’administration fédérale américaine dans sa publication International Energy Outlook 2002. Elles conduisent à prévoir une croissance annuelle des transports maritimes d’hydrocarbures de 2,5%, à comparer au 2,1% de la décennie quatre-vingt-dix et au-0,4% de la décennie quatre-vingt. Cette croissance moyenne masque cependant, comme l’illustre le tableau ci-dessus, des progressions très différenciées des trafics selon les types de produits et les zones géographiques (accroissement significatif des échanges avec l’Asie). Faute d’informations précises, il a été considéré que les échanges d’hydrocarbures lourds progressaient au même rythme que les légers.

Tableau 5

hypothèses de croissance annuelle moyenne des échanges maritimes d’hydrocarbures sur la période 2003-2020

Tableau 5
Tableau 5 : hypothèses de croissance annuelle moyenne des échanges maritimes d’hydrocarbures sur la période 2003-2020 Type d’échange Brut Produits Europe – Europe-1% stable Europe – reste du monde hors États-Unis 1% 1% Europe – États Unis stable 1% États Unis – États-Unis 1% 1% États-Unis – reste du monde hors Europe 1% 4% Échanges hors Europe et États-Unis 4% 3%

hypothèses de croissance annuelle moyenne des échanges maritimes d’hydrocarbures sur la période 2003-2020

Détermination du déficit de tonnage et du programme de construction

33La détermination du déficit de tonnage installé chaque année par rapport aux besoins de trafics implique à la fois de calculer les capacités de transport requises à chaque période, de prendre en compte les destructions programmées de navires et enfin d’identifier à chaque période dans quels zones et pour quels usages (transport d’un hydrocarbure lourd ou non) chaque pétrolier est autorisé à se déplacer.

Calcul des capacités requises pour transporter les trafics futurs

34Par définition, les pétroliers existants permettent de faire face aux besoins actuels de transport maritime d’hydrocarbures. Ainsi, les capacités de transport nécessaires afin de répondre à la croissance du trafic ont été déterminées en partant de la situation actuelle et en considérant qu’une amélioration de 5% de la productivité opérationnelle de la flotte de pétroliers était possible dès 2003 (CNUCED, 2001). Par ailleurs, l’analyse historique du niveau de productivité de la flotte de pétroliers de plus de 50 000 tpl suggère que l’utilisation qui est faite actuellement des navires demeure de15 à 20% moins efficace à ce qu’elle était en 1970.

35La même méthode est utilisée pour déterminer la capacité de transport requise pour un type particulier de trajet et de cargaison (par exemple le transport de brut léger entre l’Europe et le reste du monde), en supposant que la capacité requise est proportionnelle à l’importance relative de ce type de trajet dans le total des échanges maritimes d’hydrocarbures. Cependant, les possibles variations saisonnières de l’importance relative de chaque trajet sont prises en compte, de manière à rendre compte du fait que par exemple 25% de la flotte doit être en mesure d’effectuer un type d’échange requis (même si en moyenne ce dernier ne représente que 20% du total mondial). L’examen historique de la saisonnalité des trafics au cours des dernières années nous a conduit à prévoir un tonnage 10% supérieur au tonnage théorique qui résulterait de la méthode décrite précédemment pour l’ensemble des trafics impliquant une zone géographique qui, dans le scénario considéré, a durci sa législation conformément au projet européen [10]. E n conséquence, les capacités de transport requises pour les autres trajets ont été réduites du montant des « surcapacités » décrites précédemment, si bien qu’au total, la capacité globale de transport requise n’est pas modifiée par cette façon (sommaire) de prendre en compte la saisonnalité des trafics [11].

Calcul du déficit de tonnage de période

36La détermination du tonnage manquant à chaque période n’est pas aisée.

37Tout d’abord, la multiplicité des calendriers réglementaires existants selon les zones géographiques implique de calculer à chaque période les pétroliers qui peuvent effectuer un ou plusieurs types de trafics géographiques. On distingue ainsi, selon les scénarios, au maximum sept niveaux d’autorisations pour chacun des pétroliers :

  • ceux qui sont seulement autorisés dans une des deux zones géographiques considérées (Europe,
  • tats-Unis et reste du monde) [12];
  • ceux qui sont seulement autorisés dans deux des trois zones;
  • ceux qui peuvent circuler partout.

38En outre, il convient d’analyser les éventuels problèmes de capacité pour chacun des sous-marchés que sont respectivement les transports de brut, de produits, de brut lourd et de produits lourds.

39La méthode retenue dans le modèle pour allouer de manière optimale les différents pétroliers aux différents usages est de type séquentielle : elle affecte en priorité les pétroliers les plus contraints (en l’occurrence les pétroliers non munis de serpentins de réchauffage qui ne sont pas des double coque [13] et sont utilisables seulement dans une zone géographique), puis les autres navires, et enfin les tankers autorisés en tout point du globe pour tous les trafics afin de tenter de satisfaire l’ensemble des trafics pour lesquels des problèmes de capacité subsistent.

40L’hypothèse a été faite que dans l’ensemble des flottes transportant du brut et respectivement des produits hydrocarburés, les bateaux de différentes tailles étaient parfaitement substituables entre eux. Dans la réalité, la part des gros pétroliers dans l’approvisionnement en brut est plus faible aux États-Unis qu’ailleurs, du fait du nombre limité de terminaux portuaires capables d’accueillir des navires de très grande dimension et des contraintes imposées par la canal du Panama, qui ne permet pas à l’heure actuelle le passage des VLCCs (very large crude carriers). Ainsi, le durcissement du calendrier des simple coque pourrait dans certains cas particuliers impliquer unemodification des routes de transport. Il reste que ces changements ne seraient probablement que transitoires (jusqu’à ce que des nouveaux pétroliers adaptés soient construits) et que dans certains cas, des travaux d’élargissement des goulets d’étranglement du transport maritime d’hydrocarbures sont d’ores et déjà programmés, comme dans le cas du canal de Panama.

41Enrevanche, ilest à noterquele modèle n’intègrepas la possibilité (probablement réaliste dans certains cas) que des serpentins de réchauffage soient rajoutés à des pétroliers déjà existants, de manière à leur permettre de transporter des hydrocarbures lourds, alors même que cette solution serait très vraisemblablement moins coûteuse que la construction d’un nouveau navire. Ainsi, sur ce point, le modèle surestime probablement légèrement les coûts d’un durcissement de la réglementation.

Programme de destructions

42Les destructions sont plafonnées à 25 Mtpl par an et supposées avoir toutes lieu le 31 décembre de la dernière année où les pétroliers sont autorisés. Encas de dépassement de cette limite, les pétroliers qui ne sont plus autorisés à circuler sont mis à quai et détruits l’année suivante. À titre de comparaison, les destructions de pétroliers se sont élevées à 15 Mtpl en 2001 et 19 Mtpl en 2002 [14].

43Chaque pétrolier simple coque est mis à la casse à la date la plus tardive possible compte tenu des différents calendriers d’élimination des simples coques existants (OMI, et dans certains scénarios États-Unis et règlement européen), de manière à refléter le comportement rationnel des propriétaires de pétroliers, qui chercheront toujours à affréter leur pétrolier dans une aire géographique où il est encore accepté, plutôt que de le détruire.

44Un faible nombre de pétroliers double coque anciens est également détruit chaque année dans le modèle (pour des considérations de vétusté et non plus d’interdiction réglementaire). Le programme génère pour ce type de pétroliers une date de mise à la casse aléatoire qui vérifie la loi de probabilité indiquée ci-dessous, déterminée à partir de l’examen historique des mises à la casse (hors choc réglementaire). L es simulations effectuées suggèrent que la modification de l’âge de départ des doubles coques n’a qu’un très faible impact sur le surcoût des différents scénarios envisagés.

Graphique 2

fonction de répartition de l’âge de mise à la casse des pétroliers double coque probabilité de sortie

Graphique 2
Graphique 2 : fonction de répartition de l’âge de mise à la casse des pétroliers double coque probabilité de sortie 1,0 0,9 0,8 0,7 0,6 0,5 0,4 0,3 0,2 0,1 0,0 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38 39 40 41 42 43 44 45 âge du pétrolier

fonction de répartition de l’âge de mise à la casse des pétroliers double coque probabilité de sortie

Programme de construction

45Le programme de constructions de pétroliers est déterminé sous l’hypothèse que les acteurs du transport maritime anticipent parfaitement l’évolution des trafics et la mise à la casse des pétroliers devenus trop vieux ou simplement interdits de circulation du fait du calendrier réglementaire en vigueur. Pour tenir compte des délais de construction et de livraison des navires, le modèle considère qu’un pétrolier commandé au cours de l’année n est livrable au début de l’année n + 2.

46Afin de minimiser le coût de construction total des pétroliers ( c’est-à-dire en engageant les constructions le plus tardivement possible tout en veillant à ce qu’elles permettent d’absorber les déficits prévisionnels de tonnage), le programme de construction est élaboré à rebours. Le modèle commence par calculer les constructions nécessaires en 2020 compte tenu des déficits de capacité prévus en 2022 en l’absence de construction pendant la période 2003-2020. Puis il détermine les constructions de 2019 au regard des besoins de 2021 et des constructions qui n’auraient pu être satisfaites en 2020 du fait d’une saturation des capacités de construction des chantiers navals. Par itération, on établit ainsi le programme de construction de 2003 jusqu’à 2020.

47Il est supposé que la capacité maximale annuelle des chantiers navals est de 25 Mtpl dans l’immédiat et de 30 Mtpl à partir de 2006 (quand l’offre aura pu commencer à s’adapter aux pics prévisionnels de demande). À titre illustratif, les données recueillies auprès de l’Isemar montrent que les livraisons annuelles de pétroliers, qui ont culminé à près de 45 Mtpl en 1973, sont demeurées inférieures à 20 Mtpl après cette date jusqu’à la fin des années quatre-vingt-dix ( résorbage progressif du surtonnage de la flotte de pétroliers) et sont depuis 2000 supérieures à 20 Mtpl.

48Conformément aux règles internationales en vigueur, dans le présent modèle, tous les pétroliers construits sont munis d’une double coque. Il n’est pas spécifié expressément si les pétroliers nouvellement construits sont dotés de serpentins de réchauffage nécessaires au transport de certains hydrocarbures lourds. Cependant, on fait l’hypothèseque le coûtde constructiondespétroliers ne dépend pas de la présence d’un serpentin, si bien que le programme de construction est supposé s’ajuster parfaitement aux besoins de transport d’hydrocarbures lourds.

49Le profil de reconstruction de la flotte de pétroliers (distribution de taille des navires) a été calqué sur celui des livraisons prévues sur la période 2002-2005, elle-même assez similaire aux années précédentes. Par rapport à la structure du parc existant, cela correspond à un accroissement de la taille moyenne de la flotte de pétroliers transportant du brut (+ 32%) et de celle transportant des produits d’hydrocarbures (+ 12%). Bien entendu, dans la réalité, la structure des pétroliers construits dépendrait des besoins précis du marché, si bien que le coût de construction des navires serait légèrement modifié et peut-être un peu supérieur [15].

50Dans le modèle, seule la partie du prix d’achat d’un navire construit l’année n qui peut être imputée aux années antérieures à 2020 est prise en compte [16]. En effet, l’étude porte uniquement sur la période 2003-2020 et il n’y aurait pas de sens à considérer qu’une construction réalisée en l’année n +5 a la même valeur, au taux d’actualisation près, qu’une construction effectuée en l’année n, alors même que la valeur résiduelle de cette construction serait différente dans les deux cas en 2020.

Tableau 6

profil et coût de reconstitution de la flotte de pétroliers

Tableau 6
Tableau 6 : profil et coût de reconstitution de la flotte de pétroliers llions Catégorie de pétrolier Capacité (tpl) % dans le tonnage total desconstructions* Prix d’achat (mid’euros)** Small Range (produits) 17 000 5% 22,8 Medium Range (produits) 40 000 57% 26 Long Range (produits) 65 000 38% 29,5 Aframax (brut) 108 000 29% 35,4 Suezmax (brut) 157 000 22% 42,2 U-VLCC (brut) 307 000 49% 63 * Les pourcentages indiqués représentent par catégorie le tonnage de pétroliers construits par rapport au tonnage total des pétroliers construits transportant selon les cas du brut ou des produits. Source : Total. ** Les prix des pétroliers ont été modélisés à partir de données de marché Clarkson Research Studies pour 2002 selon l’équation suivante : prix (euros) = 138 *tonnage(tpl) + 20 500 000.

profil et coût de reconstitution de la flotte de pétroliers

Total.

Coûts économiques bruts des différents scénarios

51Pour chaque scénario, le modèle calcule un coût net quicorrespond àla différence entresoncoût brut et le coût du scénario réglementaire au fil de l’eau retenu (c’est-à-dire le maintien aux États-Unis des règles édictées par l’Oil Pollution Act en 1990, le statu quo en Europe et, pour le reste du monde, la persistance de la législation de l’OMI telle qu’amendée en 2001). L’économie mondiale est supposée utiliser à plein les facteurs de production existants, si bien que les recettes liées à l’accroissement du nombre de pétroliers construits nesont pas considérées comme un gain supplémentaire. En tout état de cause, ces recettes profiteraient essentiellement à l’Asie et peu à l’Union européenne, et en son sein la France, qui ne représentent respectivement qu’environ 10% et 2% du marché mondial de la construction navale.

52Faute depouvoirquantifierlecoût decetteprocédure et le pourcentage de navires pouvant être déclarés hors d’état de circuler à son issue, il n’a pas été tenu compte de l’impact des modifications des règles d’évaluation de l’état des navires prévues par le règlement.

Typologie des coûts pris en compte dans l’étude

53Trois types de coûts économiques sont pris en compte dans le modèle :

  • les coûts de construction des nouveaux pétroliers nécessaires à la satisfaction des besoins de transport d’hydrocarbures, selon un profil de reconstitution de la flotte décrit ci-dessus au tableau 6;
  • les surcoûts d’exploitation des pétroliers double coque par rapport aux simple coque;
  • enfin, les gains liés à la vente d’un vieux pétrolier retiré du service aux chantiers (le plus souvent situés en Asie du Sud) qui en récupèrent la ferraille.

54Les prix d’achat des pétroliers sont ceux indiqués au tableau 6 et correspondent au mois de novembre 2002.

55Il est généralement admis que les pétroliers double coque entraînent un surcoût d’exploitation, du fait notamment de coûts de maintenance plus importants (la surface de revêtement à inspecter est plus importante dans le cas d’un double coque) et de primes d’assurance un peu plus élevées. En effet, du point de vue des assureurs, la plus grande valeur en capital des double coque joue plus que la moindre probabilité de naufrage escomptée par cette technologie, dans la mesure où ceux-ci sont responsabilisés sur la valeur intrinsèque du pétrolier et de sa cargaison, et non sur l’intégralité des dommages provoqués par une éventuelle marée noire. Les valeurs retenues dans cette étude sont tirées de travaux de Drewry Shipping Consultants de 1994 et 2000 (National Research Council, 1998) : le coût d’exploitation annuel par tonne de capacité, estimé à 32,7 euros pour le brut et 92,7 euros pour les produits [17], est majoré de respectivement 9% pour le brut et de 13% pour les produits sur un double coque. À titre de comparaison, BP France estime entre 10 et 15% des frais de transport le surcoût lié au fait de ne transporter du fioul lourd que dans des double coque de moins de 15 ans [18].

56Certaines années, du fait des capacités limitées de construction, le tonnage installé de pétroliers diffère selon les scénarios, alors même que la demande de transport est en tous points identique [19]. Ainsi, pour apprécier les surcoûts d’exploitation selon les scénarios, nous ne prenons en compte que le pourcentage de double coque actifs [20] et normalisons la taille de la flotte au niveau de celle du scénario au fil de l’eau de référence. Cette hypothèse revient à considérer que, pour une catégorie donnée de pétroliers et de cargaison, les coûts d’exploitation sont exactement proportionnels au nombre de jours passés en mer.

57Lesgainstirésde lavente delaferrailled’un pétrolier hors d’usage (soit en moyenne 15% du tonnage port en lourd) sont supposés être de 140 euros par tonne de ferraille. Ce prix, considéré comme exogène, est dans une large mesure déterminé par l’évolution de la demande d’acier en Chine.

58En sus de ces trois catégories de dépenses (ou de revenu), un élément éventuel de surcoût n’est pas pris en compte : la variation de la taille des bateaux transportant les hydrocarbures, du fait notamment des nouvelles contraintes liées à l’élimination progressive des simple coque. En effet, les coûts de chargement et de déchargement d’un navire étant pratiquement indépendants de sa taille, il est raisonnable de supposer que les transporteurs choisissent les pétroliers les plus larges possibles, compte tenu à la fois de leur disponibilité et des contraintes physiques des ports dans lesquels ils doivent faire escale et charger ou décharger leur cargaison. Ainsi, une « désoptimisation » de la taille des pétroliers du fait de nouvelles contraintes réglementaires pourrait représenter un surcoût important.

59À plus long terme, on ne peut exclure qu’un renchérissement du transport d’hydrocarbures conduise à une accélération de l’ajustement entre l’offre de raffinage et la demande locale de produits raffinés (afin de diminuer les besoins de transport entre le lieu de transformation et le lieu de consommation). Cela pourrait, dans le cas de l’Europe, conduire à la fermeture de certaines raffineries ou au moins à une diminution de leur production. Ce type de coûts de long terme n’est pas intégré.

Modélisation des gains associés aux marées noires évitées dans les différents scénarios

60La mise en œuvre du règlement communautaire en Europe (et éventuellement au niveau mondial) devrait logiquement conduire à une diminution du nombre moyen de marées noires, en contribuant à rajeunir la flotte de pétroliers et en augmentant la proportion des pétroliers double coque jugés plus sûrs. Pour déterminer les gains associés aux marées noires qui devraient être évitées, nous tentons d’évaluer le coût collectif moyen d’une marée noire en Europe et dans le monde, ainsi que la baisse de probabilité de survenance d’une marée noire dans les différentes zones géographiques selon les différents scénarios envisagés. En effet, une société (a priori neutre au risque) cherche à minimiser l’espérance du coût collectif associé aux marées noires, noté E(C), qui peut être décomposée comme le produit du coût moyen d’unemaréenoire (noté c), quel’on considère constant dans tous les scénarios [21] et de l’espérance du nombre de marées noires survenant dans l’année notée E(Nb).

Coûts des marées noires

Difficultés méthodologiques

61La détermination d’un coût moyen d’une marée noire pose de multiples problèmes méthodologiques (Bonnieux et alii, 2001b) :

  • tout d’abord, l’historique malgré tout assez retreint de marées noires et les données parcellaires dont on dispose sur leur coût ne permettent pas d’établir rigoureusement un coût moyen statistique d’une marée noire;
  • le coût d’une marée noire est extrêmement variable car il dépend de multiples facteurs tels que le type de produit transporté (les produits les plus légers se dispersent plus rapidement), la météo (le gros temps favorise une dispersion rapide des produits), la vitesse de diffusion du produit dans la mer (plus elle est lente, plus les dommages sont importants), la concentration de population et d’activités économiques dans la zone impactée, ou encore la richesse des écosystèmes et la sensibilité des côtes polluées (un espace fermé comme la mer Baltique est plus vulnérable, de même qu’une côte rocheuse est plus difficile à nettoyer qu’une plage). Enfin, la distance à la terre du lieu où se produit la marée noire : celles qui ont lieu tout près des côtes (dommage très localisé) ou inversement au grand large (côtes non touchées) entraînent des dommages bien moindres que dans des situations comme l’Erika (naufrage à une quarantaine de miles nautiques de la côte bretonne) ou le Prestige, où plusieurs centaines de kilomètres de côtes sont pollués [22].
  • la détermination du coût collectif d’une marée noire est peu aisée en ce qu’elle renvoie à la fois à des dommages monétaires et non monétaires et doit être distinguée du coût financier habituellement mis en avant dans les médias lors de la survenance de catastrophes;
  • enfin, les effets environnementaux des marées noires s’étalent parfois sur de longues périodes, si bien qu’il est délicat de les évaluer peu après l’accident. Par exemple, dans le cas de l’Exxon Valdez, on considère que les écosystèmes touchés ne sont pas encore rétablis.

62Plusieurs types de coûts pour la collectivité peuvent être établis, selon que l’on considère leur temporalité, leur caractère marchand ou non et le type d’impact du dommage (économique, sanitaire ou environnemental) :

  • le coûtdesactions de nettoyageetde restauration;
  • les pertes de revenus des différents secteurs économiques (tourisme, pêche, ostréiculture…) [23] et le coût des actions judiciaires intentées afin d’obtenir réparation des préjudices subis;
  • les pertes d’aménités qui correspondent aux pertes de qualité d’usages du littoral pollué;
  • l’impact sur la santé des populations ayant eu un contact avec les hydrocarbures déversés (parfois cancérigènes) et enfin la perte de valeur d’existence [24] de la faune ou de la flore dégradée ou disparue.

63Or les méthodologies d’évaluation de ces différentes catégories de coûts peuvent prêter à contestation et leur addition ne permet pas de mesurer réellement le coût collectif net du dommage :

  • le coût des services publics utilisés lors de la survenance de marées noires (opérations de nettoyage conduites par les militaires, mobilisation des préfectures maritimes…) est particulièrement difficile à évaluer;
  • en matière de pertes économiques, certains évaluent le préjudice à partir des pertes de chiffres d’affaires quand d’autres se limitent aux pertes de marge (ce qui suppose notamment que les employés dessecteurs dont l’activité diminue trouvent un autre emploi);
  • il est probable qu’une partie au moins des pertes de revenu touristique constatées à proximité dela marée noire sont compensées par des augmentations de fréquentation touristique dans d’autres régions françaises;
  • en ce qui concerne les pertes non-marchandes, l’estimation des dommages peut varier fortement selon les hypothèses retenues et les méthodes utilisées (évaluation contingente, préférences révélées… ). Dans le cas de l’Amoco Cadiz, l’estimation des pertes écologiques pures a varié dans des proportions de un à dix. Pour d’autres marées noires plus anciennes, cette évaluation n’a pas été réalisée. À l’évidence, la valorisation de ce type de coût, très peu documenté, constitue le facteur d’incertitude le plus important;
  • il faudrait idéalement (ce qui n’est pas fait dans cette étude) déduire du coût collectif brut d’une marée noire les dédommagements versés par les assureurs et le FIPOL (fonds international spécialisé dans l’indemnisation des pollutions marines) et y ajouter le montant des cotisations des entreprises pétrolières de la zone géographique considérée (8% du total pour la France).

Coût passé des marées noires

64Comme l’illustre le tableau joint en annexe 2, nous avons tenté de synthétiser l’ensemble des informations que nous avons pu trouver sur le coût des dix marées noires qui ont eu lieu en Europe depuis 35 ans. Ces données, parfois parcellaires, reposent sur trois types distincts d’évaluation des coûts : les estimations de coûts réalisées par des experts, les demandes d’indemnisations lors des procès et les demandes d’indemnisations reconnues comme légitimes par les assureurs et/ou le FIPOL (et remboursées partiellement ou intégralement selon que le volume de ces demandes excède ou non le montant maximal de remboursement disponible). En règle générale, ce dernier type de coûts correspond à l’évaluation la plus faible des dommages, tandis que les estimations réalisées par des économistes, qui valorisent également des dommages non indemnisables à partir de méthodes diverses (comme par exemple les sondages ou la valorisation d’un milieu environnemental à partir du consentement à payer pour s’y rendre), sont les plus élevées.

65Afin de pouvoir comparer les différentes marées noires, l’ensemble des coûts ont été exprimés en euros de 2002. Pour cela, nous avons émis l’hypothèse que les coûts de nettoyage progressaient au rythme de l’inflation et les dommages marchands pour 2/3 comme les revenus du tourisme et pour 1/3 comme ceux de la pêche. L es dommages non-marchands ont été actualisés avec le revenu. Cela constitue une hypothèse plutôt conservatrice, puisqu’il est généralement admis que l’environnement est un bien supérieur.

66Compte tenu de l’importance de la fourchette d’incertitude sur le coût collectif effectif des marées noires selon les différentes évaluations (en particulier pour ce qui est des dommages non marchands), nous avons choisi de retenir deux estimations du coût moyen d’une marée noire en Europe. La valeur centrale (c ), égale à 700 millions B d’euros, correspond environ au coût moyen des marées noires en Europe une fois reconstitués les différentesdonnéesmanquantes [25]. La valeurhaute (  c ), égale à 1500 millions d’euros, prend également H en compte l’évaluation du coût de la marée noire de l’Exxon Valdez de 1989 (estimé au total à près de 7 milliards d’euros). Nous avons en effet considéré que les dommages non marchands ( mieux documentés dans le cas de l’Exxon Valdez) étaient peut être systématiquement sous-évalués, du fait notamment d’une connaissance encore limitée des impacts sanitaires des marées noires et de la valeur d’existence qu’il convient d’attribuer à la biodiversité marine.

67Peu d’informations précises sur le coût des marées noires dans le reste du monde ont pu être trouvées (International Group of P&I Clubs, 2001). Aussi, deux cas de figure ont été testés. Dans le premier, nous faisons l’hypothèse que le coût des marées noires est identique partout dans le monde, en considérant notamment implicitement que les milieux naturels dégradés ont un caractère de bien public mondial ayant une valeur commune. Dans le second, seules les pertes marchandes associées aux marées noires sont supposées être identiques quel que soit le lieu de la marée noire. En revanche, les autres composantes du coût des marées noires, dont les coûts de nettoyage de restauration du littoral (qui dépendent étroitement des coûts salariaux), varient selon les aires géographiques en proportion de leur revenu par tête (exprimé en parité de pouvoir d’achat) [26]. Ainsi, cela nous conduit à retenir, lorsque le coût moyen d’une marée noire est de 700 millions d’euros en E urope, des valeurs, respectivement, de 250 millions d’euros et 885 millions d’euros pour le « reste du monde » et les États-Unis.

Variation de la probabilité de survenance d’une marée noire dans les différents scénarios

68Nous tentons ici d’estimer la baisse de probabilité de survenance d’une marée noire lorsque, comme cela est le cas dans certains des scénarios envisagés, la flotte de pétroliers est renouvelée de manière anticipée.

Détermination de la probabilité de survenance d’une marée noire pour chaque pétrolier

69Par souci de simplification et du fait du manque de données disponibles, nous considérons que la probabilité d’occurrence d’une marée noire au niveau d’un bateau i au cours d’une année, notée p m( ), ne dépend que de son ancienneté et de sa i technologie (simple ou double coque) [27]. Dans la réalité, son pavillon, la qualité de la gestion du navire, l’historique du pétrolier (durée des périodes en dehors de l’eau, nombre de changements de propriétaire… ) et la fréquence des inspections semblent également être des variables très discriminantes.

Gains apportés par les doubles coques

70Le gain de sécurité apporté par la généralisation des pétroliers double coque demeure l’objet de certaines controverses : du fait de l’introduction récente de ce type de pétroliers, il n’est en effet pas possible de se fonder sur l’historique des sinistres pour évaluer sa moindre dangerosité supposée, et nombreux sont ceux qui mettent en avant que, même munis de double coque, les pétroliers Amoco Cadiz ou Exxon Valdez auraient probablement aussi répandu leur cargaison dans l’océan. En outre, les risques de corrosion associés aux double coque semblent être accrus, du fait d’une surfacede structure supérieure à celle des simples coques. Enfin, les espaces vides entre les deux coques pourraient être aisément gazables en cas de fuite des citernes et peuvent donc être le siège d’explosions dans une zone particulièrement sensible du navire.

71Quoi qu’il en soit, même si les double coque ne constituentpas la panacée en matière desécurité, une majorité d’experts s’accorde à penser qu’en moyenne, les double coque sont plutôt plus sûrs que les simple coque ou les technologies intermédiaires (double fond, doubles côtés…). Pour estimer le gain attendu des double coque, nous nous sommes appuyés sur deux travaux américains réalisés dans la foulée de l’adoption de l’Oil Pollution Act en 1990. À notre connaissance, aucune recherche aussi fouillée et publiquement accessible n’a été réalisée sur le sujet en Europe.

72Pour évaluer la part de chaque type d’accident noté si (collision, incendie, guerre…) dans l’ensemble des marées noires, nous avons privilégié les données disponibles qui portent sur la période la plus longue, si bien qu’il a été supposé que les échouages et les collisions étaient responsables en moyenne de respectivement 34 % et 28 % des marées noires.

73Une première étude a été réalisée aux États-Unis en 1998 sous l’égide d’un organisme de recherche financé principalement par des fonds publics américains à partir de l’examen de 60 marées noires passées (National Research Coucil, 1998). Elle a conclu que le risque de marée noire en cas de collision ou d’échouage était quatre à six fois inférieur sur des double coque, tout en mettant en avant la fragilité de ces résultats quantitatifs.

74Un second travail de recherche plus ambitieux a été effectué en 2001 (National Research Council, 2001) à partir de l’analyse de 80 000simulationsd’accident (10 000 échouages et 10 000 collisions pour chacune des simple coque et des double coque de deux tailles différentes : 40 000 tpl et 150 000 tpl) [28]. Il en ressort que, quelle que soit la taille du pétrolier, les double coquepermettentde diviser par trois la probabilité de survenance d’une marée noire en cas de collision. Par ailleurs, les simulations aboutissent à la conclusion que le risque de marée noire lors d’un échouage pour les double coque est deux à trois fois inférieur à celui d’un simple coque [29]. Par souci de simplicité, nous considérons ici qu’en cas de collision ( sinistre noté s ) ou d’échouage 1 (événement s ), les doubles coques permettent 2 d’éviter deux marées noires sur trois.

75On peut alors en déduire la probabilité de survenance d’une marée noire sur un double coque pendant une année, notée p m( ), par rapport à celle d’un simple DC coque d’âge identique, notée p m SC ( ).

equation im9

76Soit en notant ? p m s p m s= ( / ) / ( / ) la j DC j SC j probabilité relative de survenance d’une marée noire m pour undoublecoquelorsquele sinistre de type j se produit

equation im10

77En supposant que p s p s SC j DC j ( ) ( )=, on a alors :

equation im11

Dans le cas présent, faute de données, on considère que la technologie double coque n’affecte que la probabilité de survenance d’une marée noire lorsque se produit une collision ou un échouage. En notant s1 la collision et s2 l’échouage, on aboutit alors à :

equation im12

Finalement, on estime dans le modèle que la probabilité de survenance d’une marée noire sur double coque est, quel que soit son âge, égale à 58,6% de celle d’un simple coque d’âge identique.

Gain imputable à l’âge

78Comme l’illustre letableau ci-dessous, la probabilité de perte [30] d’un navire (pétrolier ou non) a tendance à croître avec l’âge d’un navire.

79Compte tenu du faible nombre de données disponibles, il a été considéré à titre d’hypothèse que l’influence de l’âge sur le taux de perte pouvait être approximée par la moyenne arithmétique des taux observés pour la flotte de pétroliers et celle de l’ensemble des navires de commerce.

80Au cours de la décennie quatre-vingt-dix, environ 10% des sinistres de pétroliers ont entraîné une marée noire sur des navires de plus de 10 000 tonnes (données SCOR) [31]. Par ailleurs, afin de déterminer l’impact réel de l’âge du navire sur sa probabilité de marée noire, il convient d’isoler la diminution du taux de perte pour les bateaux les plus jeunes qui est imputable à l’accroissement de la part des double coque dans la flotte de pétroliers au cours des années quatre-vingt-dix. En estimant la proportion de double coque dans chaque tranche d’âge de pétroliers et l’influence de la technologie double coque sur le risque de marée noire (voir supra), il est alors possible de déterminer l’influence de l’âge pour le sous-ensemble des pétroliers simple coque.

Tableau 7

taux de perte totale des navires de plus de 500 tonneaux de jauge brute en fonction de leur âge au cours de la décennie quatre-vingt-dix

Tableau 7
Tableau 7 : taux de perte totale des navires de plus de 500 tonneaux de jauge brute en fonction de leur âge au cours de la décennie quatre-vingt-dix Type entre 0 et 4 ans entre 5 et 9 ans entre 10 et 14 ans entre 15 et 19 ans entre 20 et 24 ans 25 ans et plus Pétroliers 0,02% 0,09% 0,39% 0,39% 0,32% 0,50% Tous navires 0,03% 0,08% 0,14% 0,40% 0,64% 0,61% Moyenne arithmétique 0,025% 0,085% 0,265% 0,395% 0,480% 0,555% Source : International Underwriting Association

taux de perte totale des navires de plus de 500 tonneaux de jauge brute en fonction de leur âge au cours de la décennie quatre-vingt-dix

International Underwriting Association

81La probabilité de marée noire pour un double coque étant proportionnelle à celle d’un simple coque, la probabilité moyenne de marée noire, notée p m moy ( ), est la moyenne de la probabilité de marée noire parmi les simple coque ( ( ))p m et parmi les double moySC coque ( ( ))p m pondérée par leur effectif (notés moyDC NSC et NDC ) [32] :

equation im14

D’où finalement :

equation im15

En intégrant les probabilités de perte mentionnées dans le tableau 7 et les pourcentages de double coque par classe d’âge, on peut alors approcher à l’aide d’une fonction linéaire la probabilité de marée noire d’un simple coque en fonction de son âge, notée A.

equation im16

82Il est à noter que cette probabilité de marée noire est pratiquement proportionnelle à l’âge du simple coque.

Détermination du nombre moyen de marées noires dans l’année

83Ayant déterminé la probabilité individuelle de survenance d’une marée noire pour chaque pétrolier au cours d’une année en fonction de deux paramètres (l’âge et sa technologie), il est possible d’en déduire, pour chacun des scénarios considérés, le nombre moyen de marées noires dans chacune des zones géographiques étudiées. En effet, ce nombre moyen, noté E(Nb), est égal à la somme des probabilités individuelles de marées noires de chacun des navires.

equation im17

84Dans notre modèle, p m( ) dépend à la fois j linéairement de l’âge et de la technologie du pétrolier. Aussi est-il possible d’écrire :

equation im18

Or, on sait que p m cA d( ) ( )= +? et que moyDC DC p m cA d( ) = + avec A et A l’âge moyen moySC SCSCDC des sous-ensembles de la flotte de pétroliers que constituent les simple coque et les double coque.

85Dans le cas d’une analyse au niveau mondial, cette égalité permet de déterminer facilement le nombre moyen de marées noires attendues dans l’année :

equation im19

Simplement, compte tenu des contraintes sur les capacités de construction présentes dans le modèle, le nombre total de pétroliers existant à chaque période varie légèrement selon les scénarios envisagés, alors même que la quantité d’hydrocarbures à transporter ne dépend pas du type de scénario. Ainsi, il est nécessaire de « neutraliser » les différences de taille de flotte entre scénarios en prenant comme taille de référence, notée N, celle du scénario au fil de l’eau (calendrier OMI inchangé).

equation im20

86Appliquée au scénario au fil de l’eau, cette formule donne par exemple pour l’année 2003 une espérance du nombre de marées noires d’environ 0,7.

87En revanche, dans le cas d’une analyse au niveau régional, le calcul du nombre moyen de marées noires est plus ardu. Il convient en effet de déterminer à la fois l’ensemble des pétroliers qui sont autorisés à circuler dans la zone et, pour chacun de ces pétroliers, la probabilité qu’il a de se trouver dans la zone considérée plutôt qu’ailleurs sur le globe. En effet, cette probabilité n’est pas identique pour chacun des pétroliers, puisque certains sont uniquement autorisés dans une zone (et s’y trouvent donc à coup sûr), tandis que d’autres (comme par exempleles double coque) peuvent circulerpartout.

88Pour ce faire, nous commençons par calculer le tonnage affecté (noté TA) de chaque type de pétroliers (définis selon les zones dans lesquelles ils sont autorisés à circuler) dans chacune des zones géographiques considérées dans le modèle (Europe, États-Unis et reste du monde). Cette affectation est réalisée selon la même méthode séquentielle que celle exposée plus haut lors de la description du programme de construction : les pétroliers qui ne peuvent circuler que dans une zone sont naturellement affectés à cette dernière, les « bizone » et les simple coque trizone sont affectés au prorata de l’importance de chaque zone dans le commerce mondial qui peut être effectué par ce type de pétroliers (dans la limite des besoins de trafic requis), et enfin les double coque sont attribués de manière à satisfaire les besoins de trafics dans l’ensemble des zones.

89À partir de ces affectations, il est possible de déterminer les caractéristiques (âge et proportion de doublecoque) de laflottede pétroliers autorisée dans une zone particulière. Par exemple, dans l’option 1 (application unilatérale par l’Europe de son règlement), l’âge moyen des simple coque circulant danslerestedumonde, noté A(RdM), estcalculé de la manière suivante, en notant Ax l’âge moyen des simple coque autorisés seulement dans la région X et TA RdM( ) le tonnage affecté dans la zone « reste du X monde » des pétroliers uniquement autorisés dans la région X :

equation im21

On peut alors déterminer l’espérance du nombre de marées noires dans chaque région X :

equation im22

avec respectivement Cx et C le commerce monde maritime (exprimé en tonnes ? milles) réalisé dans la région X et dans l’ensemble du monde, P le DC x, pourcentage de double coque dans la zone X et N le nombre total de pétroliers disponibles chaque année dans le monde dans le scénario fil de l’eau

Analyse coûts-bénéfices des différents scénarios

Méthodologie d’analyse aux échelons régionaux

90Pourchaquescénario, nousavons réalisé une analyse coûts-bénéfices à la fois des points de vue européen, américain, « reste du monde » et mondial. Faute d’une connaissance précise de l’historique des localisations des marées noires, nous supposons que le risque de marée noire est partout identique à quantité de flotte égale. Il est possible que cette hypothèse conduise à minimiser les gains que l’Europe pourrait retirer d’un durcissement de la réglementation, dans la mesure où la part des marées noires qui se sont produites dans cette région est apparemment plus élevée que l’importance de l’Europe dans le commercemondial : par exemple, la moitié des principales marées noires survenues depuis 20 ans se sont produites en Europe. En outre, en Europe, les routes maritimes sont souvent des routes côtières, si bien qu’en moyenne les dégâts des marées noires sont, toutes choses égales par ailleurs, peut-être un peu plus élevés.

91Dans le modèle, nous faisons l’hypothèse (qui semble économiquement rationnelle) que l’ensemble des pétroliers battant pavillon d’un pays de l’Union Européenne préféreront changer de pavillon plutôt que de devoir être détruits de manière anticipée [33]. Si tel n’était pas le cas, le surcoût net lié au remplacement de ces pétroliers serait de l’ordre d’un milliard d’euros (pour un bénéfice sans doute très inférieur). En 2003, un peu plus d’un quart des pétroliers simple coque de plus de 5000 tpl bat pavillon européen (Union européenne et pays candidats inclus). La proportion de pétroliers battant pavillon européen sans double coque est inférieure à celle des autres pavillons (51% contre 40%), mais leur âge moyen est légèrement plus élevé (21,4 contre 20,6). Actuellement, plus de la moitié des pétroliers contrôlés par des pays de l’Union européenne sont déjà sous pavillon libre.

92Il est à noter que le modèle surestime légèrement l’impact environnemental du durcissement de la réglementation dans le scénario 1 pour l’Europe : en effet, le règlement communautaire n’est pas applicable aux pétroliers qui ne font que passer au large des côtes européennes sans s’arrêter (même si les États peuvent décider de demander à un pétrolier jugé dangereux de quitter leur zone économique exclusive). Ainsi, un pétrolier similaire au Prestige qui se rendrait de Russie à Singapour (comme c’était le cas pour le Prestige) ne sera pas en infraction.

93Par ailleurs, dans le scénario 2 (durcissement mondial), il est supposé que chaque zone géographique supporte les surcoûts économiques au prorata de son importance dans le commerce mondial.

Impact des différents scénarios au niveau régional

Analyse à l’échelon européen

94Tant dans le scénario 1 que le 2, la sécurité maritime progresse en Europe, dans la mesure où les pétroliers les moins sûrs y sont bannis : les pétroliers double coque y sont plus nombreux que dans le scénario au fil de l’eau, tandis que l’âge moyen des simple coque y est inférieur jusqu’à 2008.

95Ainsi, lescénario 1 apparaît justifié, quellequesoitla valorisation retenue des marées noires (gains compris entre 97 et 208 millions d’euros). Ce résultat s’explique parle fait que lamise en œuvre unilatérale du règlement européen entraîne un déplacement des pétroliers les moins sûrs vers des eaux extra-européennes, sans pour autant qu’il soit nécessaire de construire des pétroliers supplémentaires par rapport au scénario au fil de l’eau ( le surcoût économique associé au durcissement réglementaire est nul).

96À l’inverse, le scénario 2 est très défavorable : les gains associés pour l’Europe sont inférieurs à ceux du scénario 1 (cela est dû à la mise en œuvre plus précoce de cette dernière option) [34] tandis que les coûts économiques sont considérables : il est désormais nécessaire de construire un nombre très important de nouveaux pétroliers pour satisfaire la demande mondiale. Il est à noter que même si l’on avait supposé que l’Europe « accaparerait » une part plus importante des gains liés aux marées noires évitées, le résultat de l’analyse eût été identique. Il faudrait que le scénario 2 permette d’éviter en moyenne plus d’une marée noire chaque année (soit une fréquence de marée noire plus élevée que ce qui est constaté actuellement) pour qu’il devienne justifié d’un point de vue européen.

Analyse à l’échelon américain

97La mise en œuvre du scénario 1 n’entraîne pas de dégradation globale de la qualité de la flotte : la proportion de double coque, tout comme l’âge moyen des pétroliers autorisés, y sont pratiquement les mêmes que dans le scénario au fil de l’eau. À l’inverse, le scénario 2 entraîne une baisse importante de l’âge moyen des bateaux ainsi qu’une augmentation précoce de la proportion des double coque.

98Du point de vue américain, l’application du scénario 1 n’augmente que très faiblement la probabilité de marée noire pour un surcoût nul (perte globale comprise entre 4 et 11 millions d’euros). Le scénario 2 conduit bien à une diminution importante de la probabilité de marée noire, mais les surcoûts économiques associés sont dans tous les cas supérieurs d’un facteur six à quinze.

Analyse à l’échelon du « reste du monde »

99Pour ce qui est de l’analyse coûts bénéfices, tant le bilan du scénario 1 que celui du scénario 2 sont indiscutablement négatifs. C’est cette zone géographique qui ressort comme le principal « perdant » d’une mise en œuvre unilatérale d’un durcissement par l’Europe.

100Dans le scénario 2, le bilan est près de dix fois plus dégradé pour le reste du monde que dans le premier scénario.

Tableau 8

bilan du scénario 2 du point de vue européen

Tableau 8
Tableau 8 : bilan du scénario 2 du point de vue européen En millions d’euros Gains provenant des marées noiresévitées Surcoût par rapport au scénario fil del’eau Solde Coût d’une marée noire = 700 M euros 42 879-836 Coût d’une marée noire = 1500 M euros 91 879-766

bilan du scénario 2 du point de vue européen

Tableau 9

bilan du scénario 2 du point de vue américain

Tableau 9
Tableau 9 : bilan du scénario 2 du point de vue américain En millions d’euros Gains provenant des marées noiresévitées Surcoût par rapport au scénario filde l’eau Solde Coût d’une marée noire = 700 M euros 50 699-648 Coût d’une marée noire = 1900 M euros* 137 699-562 * cas où le coût de la marée noire est en moyenne de 1500 M euros.

bilan du scénario 2 du point de vue américain

Tableau 10

bilan du scénario 1 du point de vue du « reste du monde »

Tableau 10
Tableau 10 : bilan du scénario 1 du point de vue du « reste du monde » En millions d’euros Gains provenant des marées noiresévitées Surcoût par rapport au scénario filde l’eau Solde Coût d’une marée noire = 250 M euros* -34 0-34 Coût d’une marée noire = 1500 M euros-197 0-197 * cas où le coût de marée noire est de 700 Meuros en Europe.

bilan du scénario 1 du point de vue du « reste du monde »

Tableau 11

bilan du scénario 2 du point de vue du « reste du monde »

Tableau 11
Tableau 11 : bilan du scénario 2 du point de vue du « reste du monde » En M euros Gains provenant des maréesnoires évitées Surcoût par rapport au scénario filde l’eau Solde Coût d’une marée noire = 250 M euros 11 3390-3273 Coût d’une marée noire = 1500 M euros 694 3390-2696

bilan du scénario 2 du point de vue du « reste du monde »

101Le scénario 1 déplace les pétroliers les moins sûrs – et donc les marées noires – vers les eaux extra-européennes. Ainsi, sa mise en œuvre entraîne une diminution de la part des double coque affectés dans les eaux du « reste du monde » par rapport au scénario au fil de l’eau pendant les périodes 2003-2007 et 2010-2015. En revanche, l’âge moyen des pétroliers demeure inchangé.

102Comme pour les autres zones géographiques, l’application du scénario 2 entraîne une amélioration très sensible de la qualité de la flotte.

Graphique 3

pourcentage moyen de double coque

Graphique 3
Graphique 3 : pourcentage moyen de double coque dans la flotte présente dans les eaux du « reste du monde » 110% 100% 90% 80% 70% fil de l'eau 60% durcissement Europe durcissement de tous 50% 40% 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020

pourcentage moyen de double coque

Impactdes différents scénarios au niveau mondial

103Comme l’illustre le graphique ci-dessous, c’est uniquement dans le cas d’un durcissement mondial de la réglementation (scénario 2) que le rythme des destructions et des constructions diffère du scénario au fil de l’eau (et que par conséquent le risque global de marée noire diminue).

Graphique 4

démolitions annuelles dans les trois

Graphique 4
Graphique 4 : démolitions annuelles dans les trois scénarios envisagés Mtpl 25 option 1 et scénario fil de l'eau OMI option 2 20 15 10 5 0 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020

démolitions annuelles dans les trois

104Dans les scénarios au fil de l’eau et n°1, le niveau de démolition leplus important intervient en 2015 (eten 2016 du fait du report des destructions qui n’ont pu être effectuées l’année précédente), année qui correspond à la date butoir d’élimination de l’ensemble des simple coque dans le calendrier de l’OMI. A l’inverse, les destructions arrivent plus tôt dans le scénario 2, avec l’élimination dès 2005 de l’ensemble des pétroliers pré-Marpol puis l’interdiction des simple coque en 2010. Ce profil heurté se retrouve dans le programme de constructions des différents scénarios (qui est simplement avancé de deux ans par rapport aux démolitions du fait des délais de construction retenus).

105L’impact favorable du deuxième scénario s’explique en partie par l’accroissement transitoire de la proportion de double coque dans la flotte mondiale au cours des années 2005-2009 et 2011-2015. Le solde provient du rajeunissement moyen de la flotte au cours des premières années qui suivent l’adoption du calendrier réglementaire européen. Par la suite, l’âge moyen des pétroliers non munis de double coque converge dans l’ensemble des scénarios (puisque la quasi-totalité est détruite en 2015, seuls certains pétroliers double fond et doubles côtés survivant au-delà), tandis que l’âge moyen des double coque devient plus élevé dans le scénario 2 à partir de 2015, dans la mesure où les constructions massives ont eu lieu de manière plus précoce que dans les autres scénarios.

106Le graphique 5 illustre le fait que, dans le scénario 2, l’essentiel des gains issus des marées noires évitées sont enregistrés en 2006 et au cours de la période 2011-2015, avec des baisses respectives de près de 20% de l’espérance du nombre de marées noires par rapport au scénario au fil de l’eau. À l’inverse, le risque global de marées noires est légèrement plus élevé entre 2015 et 2020, dans la mesure où l’âge moyen des pétroliers double coque est un peu plus important (puisque les constructions sont arrivées plus tôt).

107Le bilan de l’analyse coûts-bénéfices au niveau mondial n’est pas identique selon que l’on considère que le coût moyen d’une marée noire est identique ou non en tout point du globe.

108Dans le premier cas, le bilan de l’option 1 est neutre : les surcoûts économiques sont nuls, tout comme les gains induits par les marées noires évitées. À l’inverse, si l’on suppose que les coûts des marées noires sont en moyenne un quart supérieurs aux États-Unis qu’en Europe et de 60% inférieurs dans le reste du monde, le bilan de l’analyse devient favorable : l’application de l’option 1 permet(au prix d’une bonne dose de cynisme) de concentrer les marées noires là où elles sont le moins coûteuses (gain global inférieur ou égal à 115 M euros).

Graphique 5

comparaison de l’espérance annuelle du nombre de marées noires entre le scénario 2 et le scénario fil de l’eau

Graphique 5
Graphique 5 : comparaison de l’espérance annuelle du nombre de marées noires entre le scénario 2 et le scénario fil de l’eau 0,65 scénario fil de l'eau scénario 2 (durcissement mondial de la réglementation) 0,60 0,55 0,50 0,45 0,40 0,35 0,30 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020

comparaison de l’espérance annuelle du nombre de marées noires entre le scénario 2 et le scénario fil de l’eau

109Pour ce qui est de l’option 2, compte tenu des hypothèses retenues sur le coût collectif moyen des maréesnoires, le bilan de l’analyseestnégatifdeplus de 4 milliards d’euros. Cela s’explique à plus de 80% par les surcoûts de construction. Cette fois, l’hypothèse selon laquelle le coût moyen d’une marée noire est disparate selon les zones géographiques empire le résultat de l’analyse coûts-bénéfices (puisque cela entraîne une diminution du coût moyen des marées noires évitées au niveau mondial). Il faudrait retenir comme coût moyen d’une marée noire dans le monde plus de 10 milliards d’euros pour qu’il devienne justifié d’un point de vue économique de mettre en œuvre ce scénario. Enfin, près de 80% des gains provenant des marées noires évitées trouvent leur origine uniquement dans le rajeunissement de la flotte.

Analyses de sensibilité

110Comme indiqué en introduction, le choix d’un taux d’actualisation différent de 6% ne change pas les conclusions de l’étude. On constate simplement que, quelles que soient les options examinées, le fait de retenir un facteur d’actualisation inférieur améliore légèrement le résultat de l’analyse coûts-bénéfices. Ce résultat provient du fait que les surcoûts de construction interviennent assez rapidement après 2003 (2005 puis 2007-2008 dans l’option 2) [35], alors que les bénéfices environnementaux sont étalés sur une période plus longue.

111De même, la quantification du gain de sécurité apporté par les pétroliers double coque par rapport aux simple coque ne modifie que faiblement les résultats de l’analyse coûts-bénéfices. Dans le modèle, nous avons considéré, faute d’informations précises, que l’apport des double coque se limitait au cas d’échouage et de collision. Toutefois, même en supposant que les double coque permettent de réduire à néant le risque de marée noire provoquée par d’autres causes (soit une probabilité globale de marée noire pour un double coque réduite d’un facteur cinq par rapport à un simple coque), les gains associés à l’option 2 du point de vue mondial n’augmentent que d’un quart et, pour un coût de la marée noire moyen de 700 M euros en tout point du globe, le résultat de l’analyse coûts-bénéfices ne s’améliore que de 2% (du fait de la prédominance des coûts économiques sur le secteur des transports) [36]. Enfin, même en supposant que les double coque permettent à coup sûr de se prémunir contre les marées noires et que le coût d’une marée noire est identique en tout pointdu globe, il faudrait un coût de la marée noire supérieur à 8 milliards d’euros pour que l’option 2 apparaisse justifiée.

112Ce dernier constat démontre que même en anticipant une forte croissance de la valorisation collective du coût des marées noires au cours des vingt prochaines années, l’élimination précoce des simple coque est probablement une voie très onéreuse pour mieux prévenir les marées noires.

Tableau 12

bilan du scénario 2 du point de vue mondial

Tableau 12
Tableau 12 : bilan du scénario 2 du point de vue mondial En M euros Gains provenant des marées noiresévitées Surcoût par rapport au scénariofil de l’eau Solde Coût d’une marée noire de 1500 M euros (partout) 727 4968-4241 Coût d’une marée noire variable (700 M euros en Europe) 247 4968-4721

bilan du scénario 2 du point de vue mondial

Conclusion

113Dans le cas d’une mise en œuvre unilatérale par l’Europe, l’analyse coûts bénéfices conduitesuggère que le règlement communautaire est bénéfique pour les Européens. En dépit des craintes affichées par certains professionnels du transport maritime, sa mise en œuvre n’entraînera vraisemblablement pas de problème d’adéquation entre l’offre etla demande pour le segment considéré dans cette étude (pétroliers de plus de 10 000 tpl). Au niveau mondial toutefois, cette option ne permet pas de diminuer le risque global de marée noire mais aboutirait simplement à un déplacement des pétroliers les moins sûrs vers les eaux extra-européennes.

114La généralisation du durcissement réglementaire au niveau mondial (actuellement recherchée par l’E urope) permettrait de réduire dans des proportions significatives lerisque demarée noire au niveau mondial. Toutefois, cette amélioration de la sécurité aura vraisemblablement un coût économique nettement supérieur au bénéfice que l’on est en droit d’en attendre : le bilan de l’analyse coûts-bénéfices est toujours négatif de plus de 4 milliards d’euros. Incontestablement, de grandes incertitudes demeurent quant à la bonne valorisation des dommages non marchands occasionnés par les marées noires et il est possible que la fourchette de coûts retenue dans cette étude sous-estime l’impact des maréesnoires. Toutefois, les conclusions decette étude semblent relativement robustes, dans la mesure où les analyses de sensibilité effectuées suggèrent que même si la valorisation collective du coût des marées noires augmentait significativement au cours des prochaines années ou que le surcroît de sécurité apporté par les double coque était réévalué à la hausse, l’analyse coûts-bénéfices demeurerait défavorable.

115En tout état de cause, les analyses conduites du point de vue des États-Unis et du « reste du monde » démontrent qu’en toute vraisemblance, ces derniers ont beaucoup plus à perdre à accepter un durcissement mondial de la réglementation du transport maritime d’hydrocarbures tel que demandé par l’Europe plutôt que d’accepter (dans le cas du « reste du monde ») une dégradation de la qualité de la flotte dans leurs eaux territoriales du fait de la mise en œuvre du scénario n°1 par l’Europe. Ces résultats suggèrent donc que, même si le scénario n°1 s’apparente à un jeu non-coopératif entre l’Europe et les autres régions du globe, il est dans l’intérêt de peu d’acteurs (à l’exception peut-être de ceux qui concentrent en leur sein une part significative des chantiers navals de pétroliers) de reprendre à leur compte la législation européenne.

116Ainsi, il existe peut-être d’autres mesures moins onéreuses pour réduire la probabilité de survenance des marées noires en Europe et réduire leur coût. Par exemple, il serait intéressant d’étudier plus en profondeur le rapport coût-efficacité des mesures de prévention des pollutions diffuses d’hydrocarbures comme les dégazages (qui représenteraient chaque année en France l’équivalent de dix Erika).

117En outre, il importe de noter que les règles d’indemnisation du fonds d’indemnisation des pollutions maritimes ( F I POL ) peuvent probablement être améliorées. En effet, chaque importateur de pétrole contribue au prorata de son importance commerciale et non des marées noires occasionnées, tandis que les armateurs parviennent le plus souvent à ne payer qu’une part minime des dommages provoqués par leur faute. Ainsi, la priorité est donnée à l’indemnisation des victimes et les armateurs sont peu incités à prendre soin de la sécurité de leurs pétroliers. À cet égard, il serait probablement efficace de remonter significativement (ou même de supprimer comme aux États-Unis) le plafond de responsabilité civile des armateurs de pétroliers (actuellement autour de 80 millions d’euros) dans un contexte où, à la suite de la marée noire du Prestige, le plafond d’indemnisation du FIPOL vient de passer depuis mai 2003 à près d’un milliard d’euros et que l’aléa moral sur les armateurs se trouve ainsi renforcé.

118Enfin, une autre voie pour mieux responsabiliser les acteurs du transport maritime d’hydrocarbures sur l’ensemble du coût social d’une marée noire consisterait à élargir le champ des préjudices indemnisables (y compris dommages économiques indirectset dommages environnementaux), à l’instar de ce qui a commencé à être fait aux États-Unis.

Annexe 1 : dates de retrait des pétroliers selon les différents calendriers

tableau im31
Organisation maritime internationale (OMI) États-Unis Règlement européen Date de livraison du Double fond ou Catégorie Catégories C2 navire Catégorie C1* Catégorie C2** Catégorie Simple coque C3*** > 30 000 tpl doubles côtés> 30 000 tpl C1* et C3** 1973 et avant 2003 2003 2003 2001 2001 2003 2003 1974 2004 2004 2004 2001 2002 2003 2003 1975 2004 2004 2004 2001 2003 2003 2003 1976 2005 2005 2005 2001 2004 2003 2004 1977 2005 2005 2005 2001 2005 2003 2005 1978 2006 2006 2006 2001 2006 2003 2006 1979 2006 2006 2006 2002 2007 2003 2006 1980 2006 2007 2007 2003 2008 2003 2007 1981 2007 2007 2007 2004 2009 2004 2007 1982 2007 2008 2008 2005 2010 2005 2008 1983 2007 2009 2009 2006 2011 2005 2009 1984 2007 2010 2010 2007 2012 2005 2010 1985 2007 2011 2011 2008 2013 2005 2010 1986 2007 2012 2012 2009 2014 2005 2010 1987 2007 2013 2013 2010 2015 2005 2010 1988 2007 2014 2014 2010 2015 2005 2010 1989 et après 2007 2015 2015 2010 2015 2005 2010 * pétroliers pré-Marpol (absence de ballasts séparés) simple coque > 20 000 tpl et double fond ou doubles côtés > 30 000 tpl ** pétroliers Marpol (présence de ballasts séparés) simple coque > 20 000 tpl et double fond ou doubles côtés > 30 000 tpl *** pétroliers simple coque (resp. double fond ou doubles côtés) > 5 000 tpl et inférieurs à 20 000 tpl (resp. 30 000 tpl)

Annexe 2 : coût estimé des marées noires s’étant produites en Europe (en millions d’euros 2002)

tableau im32
Sinistre TorreyCanyon AmocoCadiz Tanio Amazzone Haven AegeanSea Braer SeaEmpress Erika Prestige ExxonValdez Caractéristiques Date de l’accident 1967 1978 1980 1988 1991 1992 1993 1996 1999 2002 1989 Typed’hydrocarbure brut brut fioul n°5 fioul lourd brut brut brut brut fioul n°2 fioul n°2 brut Milliers de tonnesdéversées 30 220 6,5 2,25 10 73,5 84,5 72 19,8 37,5 38,8 Linéaire de côtescontaminées(km) nd 350 200 500 nd 100 nd 150-200 400 0 2000 Coûts (M€) Coûts de nettoyage 125,2 336,4 136,1 0,3 nd nd nd 97,6 137,2 1 000,0 3 046,7 Pertes marchandes(pêche et tourisme) 108,7 142,4 2,0 5,4 nd nd nd 5,4 222,4 nd nd Pertes d’aménités nd 124,6 nd nd nd nd nd 8,1 1 060,7 nd nd Perte de valeurd’existence nd 99,6 nd nd 611,0 nd nd 63,4 300,0 nd 3 864,0 Total des coûts 233,9 703,0 138,1 5,7 611,0 nd nd 174,4 1 720,4 1 000,0 6 910,7 Indemnisation (M€) Demandesd’indemnisation nd 2 155,6 143,7 nd 1 157,1 375,0 311,1 74,0 nd nd nd Indemnisationspayées 108,7 546,4 91,7 4,0 87,4 18,0 116,4 49,6 180,0 170,0 1487,1 N.B. : Les coûts pour les tiers indiqués excluent la perte de cargaison et du navire Sources : Les données concernant les demandes d’indemnisations et les indemnisations payées proviennent généralement des rapports annuels du FIPOL. Pour le reste, selon les marées noires, des sources différentes ont été utilisées (Burrows, 1974; Carlson et alii, 1992; Hay, 2002; Thébaud, 2002; rapports du cabinet Mazars et Guérard et de l’inspection générale des finances sur les conséquences de l’Erika, 2000).

Les données concernant les demandes d’indemnisations et les indemnisations payées proviennent généralement des rapports annuels du

Notes

  • (*)
    Lors de la rédaction de cet article, l’auteur travaillait auBureau de l’Agriculture et de l’environnement de la Direction de la Prévision du Ministère de l’Économie, des Finances et de l’Industrie. E-mail : tthomgroh@ yahoo. fr L’auteur tient à remercier MM. Christophe Blanc, François Daron et Olivier Teissier qui lui ont fourni une aide précieuse dans la rédaction de cet article. Les conclusions de cette recherche n’engagent cependant que l’auteur, qui reste seul responsable des erreurs éventuelles. Économie et Prévision n°167 2005-1
  • (1)
    L’OMI, créée en 1948, est basée à Londres et regroupe 162 États membres. Elle a commencé véritablement à agir pour prévenir les marées noires après le naufrage en 1967 au large des côtes du Royaume-Uni du pétrolier Torrey Canyon qui a entraîné le déversement de plus de 120 000 tonnes de pétrole dans la mer.
  • (2)
    Compte tenu des capacités limitées de construction des chantiers navals, une application dès 2003 ne permettrait en effet pas, selon toute probabilité, de satisfaire l’ensemble de la demande de transport d’hydrocarbures au cours de la période 2003-2004.
  • (3)
    À la différence des produits légers, le transport de produits lourds nécessite l’installation d’un système de gaz inerte.
  • (4)
    Le protocole MARPOL de 1978 a introduit l’obligation à compter de 1983 de doter les nouveaux pétroliers de réservoirs à ballast séparés. Ces réservoirs, qui sont vides lorsque le navire transporte des hydrocarbures et sinon remplis d’eau, sont positionnés aux endroits où une collision ou un échouage sont les plus probables, de manière à réduire le volume d’hydrocarbures déversés en cas d’accident.
  • (5)
    La législation de l’OPA ne s’applique toutefois pas aux terminaux offshore ainsi qu’au terminal de Louisiane.
  • (6)
    La convention MARPOL date de 1978. Elle trouve son origine dans la signature en 1973 de la convention internationale pour la prévention des pollutions maritimes.
  • (7)
    Alors que le règlement communautaire sera applicable à tous les pétroliers de plus de 600 tpl (avec toutefois un calendrier aménagé pour ceux de moins de 5000 tpl).
  • (8)
    Par exemple, pour cause de manque avéré d’exactitude des chiffres précédemment fournis, Eurostat ne fournit plus de données sur les trafics maritimes intra-européensdepuis 1997.
  • (9)
    Dans le cas d’Eurostat, les données parcellaires recueillies ne mentionnaient même pas la définition retenue.
  • (10)
    Par exemple, pour l’année 1999, la part de l’Europe dans les importations totales d’hydrocarbures est relativement faible en septembre (-5% par rapport à la moyenne annuelle) et plus élevée en janvier (+8,6%).
  • (11)
    En effet, les capacités de transport créées pour répondre à des besoins de trafics qui impliquent des zones où la législation est la plus stricte pourront toujours être utilisés dans d’autres zones à la législation plus laxiste.
  • (12)
    La possibilité que certains pétroliers ne respectant pas la législation américaine de l’OPA puissent accéder aux terminaux offshore américains n’a pas été prise en compte dans l’étude.
  • (13)
    La catégorie des pétroliers « non double coque » englobe les simple coque, les double fond et les doubles côtés.
  • (14)
    Source : PEL market services, juin (2003).
  • (15)
    Le coût de construction d’un navire n’est en effet pas proportionnel à son tonnage et relativement plus élevé pour les petits navires.
  • (16)
    On peut montrer queC P i i n = ? + ? + ? [ / ( ) ]/[ /( ) ]1 1 1 1 1 1 2020 30 avec P le prix d’achat du pétrolier, i le taux d’actualisation, n l’année de construction et une durée d’amortissement supposée égale à 30 ans compte tenu de la structure du marché de l’occasion.
  • (17)
    Les coûts plus élevés pour les produits s’expliquent en partie car ils sont transportés dans des pétroliers de dimension plus réduite que ceux consacrés au brut.
  • (18)
    Source : Les Échos, mardi 7 janvier (2003).
  • (19)
    C’est le cas lorsqu’une partie des constructions destinées à satisfaire une demande de transport pour l’année n doit être engagée dès l’année n-3 (les capacités de construction en n-2 étant déjà saturées).
  • (20)
    Il peut y avoir temporairement dans certains scénarios un déséquilibre entre une offre surabondante de pétroliers autorisés uniquement à circuler dans une zone géographique et la demande de transport au sein de cette même zone.
  • (21)
    Cette hypothèse a été faite par souci de simplification. En réalité, comme indiqué plus bas, il existe des cas où la technologie double coque entraîne une variation du pourcentage de la cargaison d’hydrocarbures qui s’écoule dans l’océan (et donc une variation du coût moyen d’une marée noire).
  • (22)
    On s’accorde ainsi généralement à considérer que la relation entre la distance à la côte et l’importance des dommages suit une courbe en U inversé.
  • (23)
    Ces coûts peuvent s’étaler dans la durée (coûts rémanents) si l’altération de l’image d’un produit ou d’une zone touristique est durable, et/ou si les actions de nettoyage n’ont pas permis de restaurer totalement l’environnement.
  • (24)
    Cette valeur d’existence mesure l’agrément que les individus peuvent retirer de l’existence de ressources environnementales sans pour autant en avoir un usage particulier (marchand ou récréatif) pour des activités de production ou de consommation. En pratique, ce type de dommage est rarement valorisé en cas de marée noire.
  • (25)
    Ne disposant pas de données précises sur les coûts de l’ensemble des marées noires européennes, nous avons supposé que les coûts de nettoyage, les pertes marchandes, les pertes d’aménités et les dommages environnementaux purs représentaient en moyenne respectivement 50%, 20%, 15% et 15% du coût total d’une marée noire. Par ailleurs, lorsqu’aucune évaluation du coût n’était disponible, nous avons émis l’hypothèse que ce coût était égal aux demandes d’indemnisations.
  • (26)
    On néglige donc le fait que certains milieux environnementaux pollués peuvent être des biens publics mondiaux.
  • (27)
    Dans ce cadre, les technologies intermédiaires que sont les double fond et les doubles côtés sont assimilées à des simples coques.
  • (28)
    Les circonstances de ces accidents (vitesse du pétrolier, conditions météorologiques, emplacement de la collision sur la coque, angle de la collision, force de la marée…) ont été tirées de l’examen des marées noires passées.
  • (29)
    Il est à noter que cette étude, comme la précédente, conclut que, pour certaines tailles de pétroliers, le volume déversé lors d’une marée noire est en moyenne supérieur à celui constaté sur un simple coque. Ainsi, il est possible qu’à ce titre, le gain associé aux doubles coques soit dans le modèle légèrement surestimé.
  • (30)
    Une perte est ici entendue comme l’ensemble des accidents pour lesquels le coût des réparations est supérieur à la valeur d’assurance du navire.
  • (31)
    Il est supposé que le pourcentage de sinistres qui entraînent une marée noire ne varie pas avec l’âge des bateaux.
  • (32)
    L’effectif des simple coque comporte uniquement les pétroliers effectivement utilisés : ceux qui sont seulement dans une zone géographique dans laquelle ils sont surabondants ne sont pas comptabilisés.
  • (33)
    En effet, le réglement européen concerne, pour ce qui est de l’accélération du calendrier d’élimination des simple coque, l’ensemble des pétroliers sous pavillon européen, quelle que soit leur localisation géographique.
  • (34)
    Dans la réalité, à date de mise en œuvre identique, ils seraient supérieurs puisque les pétroliers qui naviguent au large des côtes européennes mais ne s’y arrêtent pas (cas du Prestige) seraient en moyenne de meilleure qualité.
  • (35)
    Par ailleurs, dans le modèle, le coût des constructions est imputé intégralement à l’année de construction.
  • (36)
    Les bénéfices attendus de l’option 2 varient en fait linéairement avec ? (c’est-à-dire le gain de sécurité apporté par les double coque).
Français

Cette étude évalue l’impact du règlement communautaire 1726/2003 restreignant l’usage des pétroliers simple coque au profit des double coque, jugés plus sûrs, en comparant les surcoûts économiques induits et la diminution attendue du nombre de marées noires. Il en ressort que ce règlement est positif pour les Européens mais a pour effet de déplacer le risque de catastrophe dans les autres régions du globe. L’application mondiale de ce règlement permettrait de réduire significativement le risque de marée noire d’ici 2015. Toutefois, son bilan socioéconomique semble négatif et le demeurerait vraisemblablement, même si les niveaux de valorisation des dommages moyens des marées noires retenus dans cette étude (soit 700 millions d’euros et 1,5 milliard d’euros) étaient significativement réévalués.

Mots-clés

  • marée noire
  • double coque
  • analyse coûts bénéfices
  1. Le contexte
    1. Flux de transport maritime d’hydrocarbures
    2. Quelle fréquence des marées noires en Europe et dans le monde ?
    3. Contexte réglementaire
  2. Modélisation du coût pour le transport maritime des différents scénarios
    1. Hypothèses générales de l’étude
      1. Période d’analyse
      2. Actualisation
      3. Paramètres exogènes
    2. Parc de pétroliers disponibles
    3. Flux de transport maritime d’hydrocarbures
      1. Échanges maritimes en 2002
      2. Prévisions de croissance des trafics
    4. Détermination du déficit de tonnage et du programme de construction
      1. Calcul des capacités requises pour transporter les trafics futurs
      2. Calcul du déficit de tonnage de période
      3. Programme de destructions
      4. Programme de construction
    5. Coûts économiques bruts des différents scénarios
      1. Typologie des coûts pris en compte dans l’étude
  3. Modélisation des gains associés aux marées noires évitées dans les différents scénarios
    1. Coûts des marées noires
      1. Difficultés méthodologiques
      2. Coût passé des marées noires
    2. Variation de la probabilité de survenance d’une marée noire dans les différents scénarios
      1. Détermination de la probabilité de survenance d’une marée noire pour chaque pétrolier
      2. Gains apportés par les doubles coques
      3. Gain imputable à l’âge
      4. Détermination du nombre moyen de marées noires dans l’année
  4. Analyse coûts-bénéfices des différents scénarios
    1. Méthodologie d’analyse aux échelons régionaux
    2. Impact des différents scénarios au niveau régional
      1. Analyse à l’échelon européen
      2. Analyse à l’échelon américain
      3. Analyse à l’échelon du « reste du monde »
    3. Impactdes différents scénarios au niveau mondial
    4. Analyses de sensibilité
  5. Conclusion

BIBLIOGRAPHIE

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Thomas Groh (*)
  • (*)
    Lors de la rédaction de cet article, l’auteur travaillait auBureau de l’Agriculture et de l’environnement de la Direction de la Prévision du Ministère de l’Économie, des Finances et de l’Industrie. E-mail : tthomgroh@ yahoo. fr L’auteur tient à remercier MM. Christophe Blanc, François Daron et Olivier Teissier qui lui ont fourni une aide précieuse dans la rédaction de cet article. Les conclusions de cette recherche n’engagent cependant que l’auteur, qui reste seul responsable des erreurs éventuelles. Économie et Prévision n°167 2005-1
Cette publication est la plus récente de l'auteur sur Cairn.info.
Mis en ligne sur Cairn.info le 01/01/2007
https://doi.org/10.3917/ecop.167.0027
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