CAIRN.INFO : Matières à réflexion

Les manifestes du convivialisme stipulent que « l’hubris » est « la mère de toutes les menaces » et que sa régulation est la clé pour affronter les importants défis entropiques (matériels et écologiques) et anthropiques (la coexistence entre sociétés et entre humains) auxquels nous faisons face aujourd’hui. Or, qu’entend-on par hubris, ce terme issu du grec qui signifie démesure ou excès, et auxquels les Grecs de l’Antiquité opposaient la mesure, la tempérance et la modération, conçues comme le résultat d’une connaissance de soi et de ses limites ?
La théorie maussienne de l’action [voir Caillé, 2009, 2014 ; Chanial, 2011] offre une porte d’entrée féconde pour penser l’hubris. Cette théorie part de la remarque faite par Marcel Mauss [1949 (1924)] dans l’Essai sur le don suivant laquelle tout don est à la fois obligé et libre, intéressé et désintéressé. Généralisée à tout type d’action sociale, cette formulation permet de dépasser les apories des différentes théories de l’action qui tendent à réduire les motivations à un seul pôle : obligation ou liberté de l’acteur ; intérêt ou altruisme.
Il est important de noter qu’avec le don, Mauss pensait avoir trouvé « le roc de la morale éternelle ». Voilà une prétention qui est à prendre d’autant plus au sérieux que Mauss s’appuyait sur une quantité impressionnante de données issues du monde entier et de toutes les périodes de l’histoire, et qu’il rechignait autrement aux grandes systématisations. Nous sommes dès lors autorisés à convertir cette théorie en une grille analytique et une échelle normative…

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Qu’entend-on par hubris, ce terme issu du grec qui signifie démesure ou excès? Cet article tente de clarifier cette notion en la rapportant à la théorie maussienne de l’action, avant de la lier aux cercles concentriques des contingences entropiques et anthropiques. Enfin, en s’appuyant sur Bataille selon qui l’excès est constitutif et même fondateur des sociétés humaines, l’article distingue entre excès souhaité et condamnable en fonction de sa participation aux cercles vertueux ou vicieux du don, en rapport avec les principes du convivialisme.

François Gauthier
Socio-anthropologue des religions, professeur de sciences des religions à l’université de Fribourg (Suisse).
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Mis en ligne sur Cairn.info le 03/06/2021
https://doi.org/10.3917/rdm1.057.0053
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