CAIRN.INFO : Matières à réflexion

La Révolution de 1789 est pour le 19e siècle un des grands mystères à résoudre : comment un tel événement, une telle disruption dans le cours des choses, ont-ils pu advenir ? De nombreux historiens de l’époque se sont penchés sur cette question, d’Adolphe Thiers à Jules Michelet, pour comprendre les faits, ordonner le récit, rassurer le lecteur. Chacun d’entre eux a achoppé sur un obstacle à la fois historiographique et conceptuel : comment comprendre la nature et le rôle du peuple, et surtout du peuple en colère, et comment traduire ses motivations et son action par le récit historique, étant par essence mouvant, insaisissable, comprenant peu de figures identifiées ? On sait ce que Michelet a écrit de ce sujet collectif auquel il a consacré un livre complet à la suite de son Histoire de la Révolution (1847-1853). Thiers était bien plus ambivalent, mais laissait parfois paraître son admiration pour le combat révolutionnaire qu’il reliait à la construction de l’État français moderne. Ce sujet du peuple en colère a aussi intrigué les artistes, participant à l’intérêt collectif pour cette période, stimulés par les recherches des historiens – les frontières entre la discipline historique naissante et l’art sont poreuses à l’époque romantique – ou sollicités par des éditeurs pour illustrer leurs travaux. Ces artistes ont également été orientés par la commande officielle, nous en verrons ici un exemple. Les artistes des années 1830-1840 ont contribué à créer un imaginaire autour du peuple insurgé, diffusé à différents publics par le biais de la peinture, de la gravure de reproduction et de l’illustration…

Français

Lorsque le peintre d’histoire Paul Delaroche représente Les vainqueurs de la Bastille entre 1830 et 1838, il ne s’est encore jamais intéressé à la Révolution de 1789. Il traite le sujet – l’insurrection d’une partie du peuple parisien contre la prison royale, symbole de l’oppression féodale – dans le contexte d’une commande de quatre œuvres pour l’Hôtel de Ville de Paris, destinées à honorer le rôle historique du peuple. En 1830, où intervient une nouvelle révolution, celle des Trois Glorieuses, l’événement est encore vif dans la mémoire collective, et les historiens commencent tout juste à le traiter comme un fait historique majeur dans l’histoire de France. Ce regard de Paul Delaroche, peintre du 19e siècle romantique, sur la chute de l’Ancien Régime, est donc intéressant pour son écho politique, pour son positionnement artistique – représenter le peuple après la colère – et pour son rôle dans la formation d’un imaginaire collectif de la Révolution au 19e siècle.

Mots-clés

  • Révolution française
  • peinture d’histoire
  • institutions
  • 19e siècle
  • histoire des représentations
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Mis en ligne sur Cairn.info le 02/07/2021
https://doi.org/10.3917/dhs.053.0161
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