CAIRN.INFO : Matières à réflexion

L’intérêt croissant de la communauté internationale pour la préservation de l’environnement s’est accompagné d’une reconnaissance de droits aux peuples autochtones, victimes immédiates des catastrophes écologiques et porteurs d’un rapport à la terre qui ne peut être entièrement saisi par les catégories juridiques dominantes. Interroger les droits fonciers de ces peuples et leur effectivité, c’est observer les conflits d’intérêts – environnementaux, éthiques, culturels, économiques – en présence dans ce domaine. Et mesurer les impasses d’une société organisée autour d’un droit de propriété conçu comme exclusif, absolu et individuel.

1Délibérée : Comment définir les peuples autochtones ?

2Sandrine Clavel : On pourrait répondre par une autre question : faut-il définir les peuples autochtones ? Car la prétention des sociétés coloniales à définir les peuples autochtones s’est heurtée à la revendication forte, portée par ces peuples, de pouvoir se définir eux-mêmes. C’est ce qui explique qu’il n’existe pas de définition universelle de la notion de peuples autochtones. En particulier, la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones adoptée le 13 septembre 2007 a renoncé à toute définition. Une définition est cependant proposée par la convention adoptée par l’Organisation internationale du travail (OIT) [1].

3La notion peut revêtir, d’un forum à l’autre, des sens légèrement différents, mais on s’accorde à considérer que quelques critères sont déterminants, et en particulier : 1) une continuité historique avec des sociétés antérieures aux invasions de leurs territoires ; 2) l’occupation et l’utilisation d’un territoire spécifique avec lequel le peuple considéré a construit un lien identitaire fort ; 3) une culture et/ou une organisation socio-politique distinctives, volontairement perpétuées ; 4) une auto-identification en tant que collectivité distincte, et une reconnaissance comme telle par d’autres groupes.

4Même s’ils représentent moins de 5 % de la population mondiale, les peuples autochtones sont présents partout : en Amérique du Sud où vivent des peuples très connus comme les kayapos (le célèbre chef Raoni) ou les kichwas, dans les « grands pays » de présence autochtone (États-Unis, Canada, Australie ou Nouvelle-Zélande), en Afrique, où de nombreuses tribus ont été reconnues comme peuples autochtones. Mais on les trouve également, même si on y pense moins, en Russie dont l’immense territoire couvre des zones où vivent des peuples autochtones, et enfin en Europe où il existe encore au moins un grand peuple autochtone qui se bat pour la survie de sa culture : le peuple sami, que l’on trouve en Norvège, en Finlande et en Suède. Même sur le territoire français, il y a des peuples autochtones, si l’on songe à la Guyane ou à la Nouvelle-Calédonie par exemple.

5Quel que soit le regard que l’on porte sur la légitimité de l’entreprise de définition des peuples autochtones, la réalité n’en est pas moins que dès lors que des droits et/ou une protection spécifiques leur sont accordés – et il n’est pas contestable que le besoin de ces droits et protections spécifiques est réel –, les juristes ne peuvent faire autrement que les définir. Il leur appartient de le faire avec humilité et prudence, mais ne pas le faire reviendrait à nier que les peuples autochtones méritent la considération des tribunaux, nationaux et internationaux. À cet égard la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples souligne [2] que, même si elle est « consciente de la connotation politique véhiculée par » le concept de peuple autochtone (§ 147), il lui appartient d’en donner « sa » définition, en conservant à l’esprit que « le terme “autochtone” ne vise pas non plus à créer une classe spéciale de citoyens, mais plutôt à prendre en compte les injustices et les inégalités passées et présentes » pour les réparer (§ 149).

6D. : Pouvez-vous nous expliquer la conception du rapport à la terre chez les peuples autochtones, même s’il y a évidemment des spécificités propres à chaque peuple ?

7S. C. : Ce serait prétendre que je l’ai comprise… Or ni ma propre culture ni ma discipline de spécialité ne me prédisposent à saisir la singularité de la relation qui lie les peuples autochtones à leur(s) terre(s). Mais je peux vous en dire ce que les peuples autochtones eux-mêmes et les anthropologues en disent ; et tenter de vous expliquer comment le droit s’efforce de capturer la spécificité de cette relation.

8Ce qui est certain, c’est que la relation à la terre par l’appropriation et par l’exploitation, qui est celle que consacrent l’ensemble des systèmes juridiques étatiques modernes, ne correspond en rien à la culture autochtone : parfois décrit comme un « savoir traditionnel » [3], le lien entre les peuples autochtones et la terre est celui d’un gardien à une entité distincte, titulaire de droits propres, la terre [4]. Et cela implique pour les hommes l’existence non seulement de droits sur la terre, mais aussi de devoirs à l’égard de la terre.

9Comment le droit traduit-il cette singularité ? Il le fait tout d’abord en consacrant formellement la nature spirituelle de la relation qu’entretiennent les peuples autochtones avec la terre [5]. Cette consécration est plus que symbolique, car elle marque la reconnaissance formelle par le droit de l’existence d’autres relations à la terre que celle que consacre la culture juridique dominante. Cependant, cette reconnaissance n’est rien si elle n’est pas assortie de dispositifs juridiques destinés à la rendre effective. Et là, il faut bien admettre que le passage à l’effectivité soulève encore d’importantes difficultés…

10D. : Nos catégories juridiques du droit de propriété sont-elles par conséquent appropriées pour saisir ce rapport au foncier ?

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11S. C. : Je dirais que non, mais il faut savoir progresser par étapes : si déjà nos catégories juridiques pouvaient être utilisées pour garantir une protection suffisante des peuples autochtones dans leur relation à leurs terres, ce serait une bonne chose. Et d’ailleurs les peuples autochtones eux-mêmes ne s’y trompent pas. Si notre approche par l’appropriation ou la réservation de l’usage de la terre n’est pas conforme à la conception très spirituelle que se font la plupart d’entre eux de leur relation à la terre, cela ne les a pas empêchés – parfois avec l’aide d’ONG qui font un travail remarquable – d’acculturer ces conceptions pour bâtir des stratégies juridiques recevables devant les justices étatiques, nationales ou supranationales. Ils ont ainsi obtenu des victoires juridiques majeures pour faire valoir « leurs » droits fonciers, et ce non seulement dans la dimension matérielle que nous leur conférons dans notre culture, mais aussi parfois dans leur dimension spirituelle. D’ailleurs, ce n’est pas toujours au titre de la protection du « droit à la propriété » que ces victoires ont été obtenues, mais parfois au titre du « droit à la culture » ou du « droit à la religion ». C’est par exemple en établissant la valeur culturelle du Mont Taylor et en obtenant ainsi son classement sur la liste des Traditional Cultural Properties, que les Premières Nations du Nouveau-Mexique ont acquis un droit de regard (mais pas un droit de veto) sur l’attribution par l’agence gouvernementale compétente des autorisations d’exploitation minière sur ce site riche en uranium [6].

12D. : Comment dès lors articuler les deux conceptions de la propriété sans que ce ne soit au détriment des droits des peuples autochtones ? Vous avez vous-même souligné que malgré une reconnaissance grandissante des droits, leur effectivité rencontre différents obstacles.

13S. C. : La difficulté que rencontrent les peuples autochtones à obtenir la reconnaissance et la protection effective de leurs droits fonciers ne tient pas à une incompréhension mutuelle d’ordre théorique ou conceptuel, mais principalement à l’existence de conflits d’intérêts. Or ces conflits d’intérêts sont loin d’être aisés à résoudre.

14On peut distinguer trois formes de conflits d’intérêts, par ordre de difficulté (apparemment) décroissant. Lorsque les terres dont la propriété est revendiquée par les peuples autochtones appartiennent et sont occupées par des personnes privées, le conflit est très fort, car il est impossible de remplir les peuples autochtones de leurs droits sans priver corrélativement d’autres individus des leurs. Or leur droit de propriété est aussi un droit fondamental, protégé par exemple au titre de la Convention européenne des droits de l’homme. On pourrait décider qu’il faut remonter la chaîne des propriétaires fonciers successifs pour démontrer, in fine, l’illégitimité du titre du propriétaire actuel, mais l’on voit bien la difficulté, y compris éthique, dans le fait d’exproprier une personne qui peut avoir mis toutes ses économies dans l’acquisition d’un terrain, ou dont la famille peut être installée là depuis des générations. C’est pour cela que beaucoup d’États ont mis en place des procédures de restitution « par remplacement », consistant à attribuer aux peuples autochtones d’autres terres que celles qui étaient les leurs originellement. Mais cette solution ne préserve pas la dimension spirituelle que nous évoquions, lorsqu’elle existe.

15Il peut arriver, ensuite, que le conflit d’intérêts entre peuples autochtones et propriétaires privés se noue à propos de droits fonciers de nature distincte. C’était la situation dans l’affaire Handölsdalen Sami Village c. Suède, qui a été tranchée par la Cour européenne des droits de l’homme en 2010 [7] : les samis revendiquaient le droit de pâturage gratuit sur des terres appartenant à des propriétaires privés. Dans un tel cas de figure, on peut avoir le sentiment qu’il est possible de concilier les droits, droit d’usage gracieux au profit du peuple autochtone et droit de propriété pour le propriétaire privé. Et de fait, dans de nombreuses zones des pays scandinaves, c’est la solution retenue par la loi qui consacre un reindeer herding right (droit de pâturage des rennes à titre gratuit) au profit des samis.

16Enfin, le conflit peut opposer les peuples autochtones à l’État, propriétaire des terres. C’est en apparence la situation la plus simple, car la restitution est alors plus aisée dans la mesure où elle ne porte pas atteinte au droit subjectif d’un autre individu clairement identifié. La victoire historique obtenue par le Village Sami Girjas devant la Cour suprême de Suède le 23 janvier 2020 n’aurait sans doute pas pu advenir si le propriétaire foncier dont les droits étaient contestés par les samis n’avait pas été l’État. Encore faut-il souligner ici qu’il ne s’agissait pas d’un conflit de droits de propriété, mais d’un conflit de droits d’usage et d’exploitation (droit de chasse et de pêche). Et l’on en vient alors au cœur du problème dans les conflits d’intérêts opposant peuples autochtones et État, qui sont finalement loin d’être simples : quid si la dépossession de l’État emporte la perte de ressources véritablement stratégiques, dont l’exploitation bénéficie au pays tout entier ? Comment arbitrer alors le conflit entre les intérêts du peuple autochtone, dont on peut soutenir qu’il n’est finalement qu’un intérêt « particulier », et l’intérêt général ?

17D. : L’intérêt de la recherche et du grand public pour ce rapport à la terre paraît surtout renouvelé avec la prise de conscience plus prégnante ces dernières années de l’urgence environnementale. Avez-vous identifié une évolution, une inflexion de notre conception dite « classique » du droit de la propriété sous l’influence de ces modèles différents, ou bien ces modèles divergents sont-ils encore totalement écrasés ?

18S. C. : L’intérêt de la communauté internationale pour l’écologie et/ou la protection de l’environnement a apporté en effet un éclairage nouveau sur la situation des peuples autochtones, qui ont souffert à la fois physiquement et spirituellement de grandes catastrophes écologiques. Les peuples autochtones sont à la fois l’emblème du problème, comme premières victimes de la dégradation de l’environnement, et l’emblème de la solution, car leur relation à la terre, plus respectueuse que ne l’est celle induite par notre modèle de développement, peut être source d’inspiration.

19Mais au-delà des discours, quelle est la réalité ? Les inflexions du modèle classique de la propriété, lorsqu’elles existent, ne me semblent pas participer d’une démarche environnementale ni même pouvoir avoir un aspect bénéfique de ce point de vue. Il s’agit surtout de reconnaître une forme d’appropriation collective, ou encore d’admettre une répartition différente des utilités du bien, afin de concilier les intérêts en conflit que j’évoquais précédemment. En outre, lorsque l’on connaît bien la jurisprudence, nationale et internationale, qui s’est lentement forgée pour protéger les peuples autochtones, on constate qu’au-delà de quelques exemples très exceptionnels de personnalisation de la nature (en Inde, en Nouvelle-Zélande et en Colombie notamment) c’est encore et toujours une approche centrée sur l’humain qu’elle consacre : l’environnement est considéré au titre du droit des peuples autochtones à la vie, à un environnement sain, à l’eau, à la culture, à la religion ou enfin à la propriété. Loin de moi l’idée de dire que ce n’est pas une bonne chose. Les droits fondamentaux des peuples autochtones doivent être garantis ; en outre, cette approche ne peut qu’avoir des effets bénéfiques pour l’environnement. Il s’agit juste d’observer qu’il n’y a pas là une approche révolutionnaire du droit de propriété, qui laisserait espérer une relation plus respectueuse de l’humanité vis-à-vis de la terre et des autres êtres vivants qu’elle accueille.

20En revanche je crois – et c’est ce qui constitue l’un des postulats du projet que je conduis –, que si nous restaurons pleinement les droits des peuples autochtones sur leurs territoires, en ce compris le droit de contrôler l’exploitation des ressources qui s’y trouvent, si nous les plaçons en position d’interlocuteurs directs des entreprises multinationales en leur donnant les moyens d’imposer leurs vues, leurs décisions pourraient bien être différentes de celles actuellement prises par les gouvernements. On m’a déjà opposé à maintes reprises la naïveté de ce postulat, naïveté que je reconnais partiellement. Les peuples autochtones, eux aussi, peuvent souhaiter profiter du « développement » économique et de conditions de vie plus faciles induites par « le progrès » : surveiller les rennes par hélicoptère ou en motoneige, obtenir une part des bénéfices générés par l’exploitation des ressources, quel qu’en soit le prix écologique… Oui, leurs aspirations peuvent aussi ne pas totalement être en phase avec l’écologie, et d’ailleurs les conflits entre peuples autochtones et défenseurs de l’environnement ne sont pas rares.

21D. : La tentation d’« importer » dans notre ordre juridique dominant des conceptions des peuples autochtones ne comporte-t-elle pas le double risque d’une « folklorisation » de ces peuples, les figeant dans une vision essentialiste, et un accommodement de ces conceptions avec une vision libérale, capitaliste du développement ?

22S. C. : Le risque existe et va peut-être au-delà même de ce que vous évoquez. Une part importante du développement de nos sociétés « modernes » s’est faite sur la spoliation des peuples autochtones, qui a bien souvent été justifiée par l’exploitation et la dénaturation de leurs propres concepts de la « propriété ». Isabelle Merle a par exemple démontré comment l’État français a, en Nouvelle-Calédonie, théorisé et construit le (prétendu) concept de « propriété collective kanak » pour justifier la décision de l’État de s’approprier ces terres [8]. Il est bien commode de s’appuyer sur la relation « désintéressée » des peuples autochtones à la terre pour leur nier tout droit sur celle-ci, et/ou sur les ressources qu’elle recèle…

23Aujourd’hui, dans un contexte favorisant la « réappropriation » progressive des peuples autochtones, le risque se prolonge sur un autre terrain, celui d’une forme toujours vivace de paternalisme, sous le double couvert d’un souci de protection et d’une volonté de respect des spécificités culturelles. Car cette réappropriation ne se fait pas nécessairement en « pleine propriété » au sens où nous l’entendons, privant ainsi les peuples autochtones de l’accès à une forme autonome de développement, capitaliste – car après tout certains peuples autochtones pourraient le souhaiter (!) – ou alternative au capitalisme. L’exemple australien est à cet égard intéressant. À partir des années 1970, il y a eu un véritable mouvement de restitution des terres spoliées aux aborigènes. Mais certaines évolutions juridiques marquent un ralentissement de ce mouvement, avec d’un côté l’apparition de nouveaux titres fonciers ne conférant pas aux aborigènes un droit de propriété sur leurs terres ancestrales, mais un simple droit d’accès pour la pratique de leurs coutumes et croyances traditionnelles (native titles) [9], et de l’autre, sur les terres restituées en pleine propriété, le transfert insidieux des décisions de gestion aux agences gouvernementales [10].

24De nombreuses raisons peuvent expliquer ces positions paternalistes. Il existe quelques (rares) expériences malheureuses de délégation pleine et entière par l’État de la « gestion » de terres aux sous-sols riches aux peuples locaux, qui ont conduit à des désastres sociaux ou écologiques ; mais si tous les gestionnaires incapables devaient être dépossédés, les peuples autochtones ne seraient pas forcément les premiers visés. Il existe aussi des mésententes réelles entre les différents peuples autochtones cohabitant sur un même territoire, qui nuisent à l’exploitation collective. Enfin et surtout l’État a des raisons économiques de vouloir conserver la gestion de ces terres, qui regorgent de ressources stratégiques. Mais ce qui est certain, c’est que le « respect » de l’identité culturelle et de la spécificité de la relation des peuples autochtones à la terre est la moins convaincante des justifications à la poursuite d’une forme de spoliation qui, pour être moins radicale, n’en reste pas moins prégnante…

25D. : Les peuples autochtones, dans leur rapport à la terre, ont une approche collective, qui n’est pas sans faire penser à la théorie des communs, largement étudiée et dans le discours actuel de la gauche ; y voyez-vous certains échos ?

26S. C. : La reconnaissance des droits fonciers des peuples autochtones oblige à dépasser le dogme, dominant dans beaucoup d’ordres juridiques et tout particulièrement dans la France post- révolutionnaire, de la « propriété individuelle » absolue et exclusive. Il ne s’agit pas de tomber à bras raccourci sur la propriété individuelle, dont les historiens ont démontré la dimension « émancipatrice » dans l’esprit révolutionnaire français, mais de constater que l’adhésion aux instruments internationaux consacrant les droits des peuples autochtones impose d’ores et déjà aux États de reconnaître aussi la dimension collective des droits, et notamment du droit de propriété. À partir de là, il y a évidemment des questions juridiques communes, par exemple celle du droit à agir, de la « représentation » de la collectivité titulaire de ces droits collectifs. L’exemple des peuples autochtones est à cet égard très intéressant, avec des contestations fortes pour déterminer « qui peut parler pour qui ». Cependant, ce qui me semble le plus intéressant dans l’approche qu’ont les peuples autochtones de leur lien avec la terre, c’est finalement moins de penser ou de repenser le partage, entre les hommes, des droits sur la chose ou sur ses utilités, que de repenser la relation de l’homme à la « chose ».

Notes

  • [1]
    Il s’agit de la Convention n° 169 relative aux peuples indigènes et tribaux, adoptée en 1989, qui est un instrument juridiquement contraignant pour les États signataires, étant observé que la France ne l’a pas ratifiée. Les peuples autochtones y sont définis comme ceux « considérés comme indigènes du fait qu’ils descendent des populations qui habitaient le pays, ou une région géographique à laquelle appartient le pays, à l’époque de la conquête ou de la colonisation ou de l’établissement des frontières actuelles de l’État, et qui, quel que soit leur statut juridique, conservent leurs institutions sociales, économiques, culturelles et politiques propres ou certaines d’entre elles » (art. 1, § 1b). La convention met également en exergue un critère d’ordre psychologique, celui du « sentiment d’appartenance indigène ou tribale », qui « doit être considéré comme un critère fondamental pour déterminer les groupes » constituant des peuples autochtones au sens de la convention (art. 1, § 2).
  • [2]
    Communication 276/03, 25 nov. 2009, Centre de Développement des Droits des Minorités agissant au nom de la Communauté Endorois c. Kenya.
  • [3]
    Céline Planchou, « Les mobilisations autochtones dans l’Amérique d’Obama : l’exemple des luttes anti-oléoduc », Revue française d’études américaines, n° 152, 2017/3, p. 27-41 ; v. aussi : Alexis Tiouka, Philippe Karpé, « Droits des peuples autochtones à la terre et au patrimoine », Journal d’agriculture traditionnelle et de botanique appliquée, 40e année, 1998/1-2, Conserver, gérer la biodiversité : quelle stratégie pour la Guyane ? sous la direction de Marie Fleury et Odile Poncy. p. 611-633.
  • [4]
    Françoise Morin, « Les droits de la Terre-Mère et le bien vivre, ou les apports des peuples autochtones face à la détérioration de la planète », Revue du MAUSS, n° 42, 2013/2, p. 321-338.
  • [5]
    L’article 13, § 1, de la convention OIT n° 169 souligne ainsi « l’importance spéciale que revêt pour la culture et les valeurs spirituelles des peuples intéressés la relation qu’ils entretiennent avec [c]es terres […], et en particulier des aspects collectifs de cette relation », tandis que l’art. 25 de la Décl. ONU consacre le droit pour les peuples autochtones « de conserver et de renforcer leurs liens spirituels particuliers avec les terres, territoires, eaux et zones maritimes côtières et autres ressources qu’ils possèdent ou occupent et utilisent traditionnellement ».
  • [6]
    Melinda Benson, « Enforcing Traditional Cultural Property Protections » (April 18, 2014), Human Geography, 7(2), 2014, p. 60-72 (consultable sur SSRN : https://ssrn.com/abstract=2468350) ; v. aussi : Susanne Berthier-Foglar, « Uranium Mining on Sacred Land. The Case of Mount Taylor », ELOHI – Indigenous People and the Environment, 2012, n° 2, p. 79 (https://doi.org/10.4000/elohi.304) ; v. aussi, sur l’invocation de la liberté de religion sur un site sacré pour contrer un projet de domaine skiable : Joshua A. Edwards, « Yellow Snow On Sacred Sites: A Failed Application Of The Religious Freedom Restoration Act », American Indian Law Review, 34(1), 2009-2010, p. 151.
  • [7]
    Requête n° 39013/04 : décision sur la recevabilité (CEDH, 17 févr. 2009) et décision sur le fond (CEDH, 30 mars 2010).
  • [8]
    Isabelle Merle, « La construction d’un droit foncier colonial. De la propriété collective à la constitution des réserves en Nouvelle-Calédonie », Enquête, n° 7, 1999, p. 97.
  • [9]
    Sur le système australien, v. Élodie Fache, « Les droits et responsabilités aborigènes envers la terre à Ngukurr (Terre d’Arnhem, Australie du Nord) sont-ils reconnus ? », in Céline Travési et Maïa Ponsonnet, Les conceptions de la propriété foncière à l’épreuve des revendications autochtones : possession, propriété et leurs avatars, Marseille, Pacific-credo Publications, 2015, p. 119.
  • [10]
    Aboriginal Land Rights (Northern Territory) Amendment Act, 2006.
Entretien avec
Sandrine Clavel
Sandrine Clavel est Professeure de droit privé et sciences criminelles à l’Université de Versailles-Saint-Quentin, et participe à un projet de recherche interuniversitaire européen sur le développement du commerce international à l’aune de la protection de l’environnement et des populations vulnérables. Elle s’intéresse aux droits fonciers des peuples autochtones, qui conditionnent leur capacité à s’affirmer comme interlocuteurs face à des entreprises multinationales qui souhaitent exploiter les ressources présentes sur « leurs » territoires.
Propos recueillis par écrit en avril 2020 par
Anne-Laure Maduraud
Magistrate, membre du SM et coordinatrice de la rédaction
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Mis en ligne sur Cairn.info le 16/07/2020
https://doi.org/10.3917/delib.010.0043
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