1 Nous vivons dans un monde en constante mutation, où l’Internet des objets connectés et la digitalisation de l’entreprise tiennent le premier rang des préoccupations. Où le monde des affaires est immoral, où les entreprises sont de plus en plus nombreuses à explorer d’autres voies que les outils traditionnels tels que ceux empruntés aux domaines de la stratégie, de la communication ou encore du marketing, et qui peinent à remplir leurs missions fondamentales : vente, performance, croissance, rentabilité, pérennité, emplois. En toute logique, les actionnaires, les cadres dirigeants responsables de la stratégie et du marketing se tournent de plus en plus vers des approches plus fines, telles que l’intelligence économique, un mode de gouvernance qui, s’il est utilisé dans une approche globale, pensé pour « le long terme » et déployé dans une manœuvre d’ensemble, démontre des performances intéressantes.

2 Aujourd’hui la force appartient aux entreprises qui savent habilement décrypter des situations complexes, qui disposent de chiffres et de prévisions dans tous leurs secteurs-clefs pour mieux connaître les enjeux en forte croissance, identifier les risques et les nouveaux produits les plus porteurs. Pour ce faire, les entreprises doivent disposer d’analyses très fines sur le climat politique, social, sécuritaire et sanitaire dans différents pays afin de suivre et anticiper les tendances du marché, sécuriser le développement, rechercher de nouvelles opportunités commerciales. Pour y arriver, un état des lieux périodique doit être réalisé. C’est ensuite seulement que toute la palette des leviers de persuasion peut être déployée, que sont mis en place d’habiles mécanismes d’influence, des stratégies innovantes, mêlant la technologie et l’humain, qui favorisent le développement et l’atteinte de l’objectif fixé avec les dirigeants.

Agir sur les perceptions et l’environnement opérationnel d’une entreprise

3 Comment est-il possible d’agir sur les perceptions et l’environnement opérationnel d’une entreprise d’une part, pour favoriser l’adhésion des parties prenantes à une vision commune et d’autre part, pour emporter la victoire sur la concurrence ?

4 Dans un monde globalisé où l’image et la réputation sont devenues des préoccupations supplémentaires pour les entreprises, l’influence est à la fois, un enjeu stratégique, un habile levier d’action pour toute opération tant sur le plan du développement que sur le plan de la gestion des situations d’urgence, et enfin, une véritable arme pour le leadership. En effet, elle développe les capacités à imposer naturellement ses vues, sans être vu et sans contraindre, par la légitimité, la crédibilité, la sincérité, l’exemplarité et l’authenticité [1]. Le leader suscite l’adhésion et le respect par son exemplarité et sa capacité à faire progresser son équipe. On ne naît pas leader, mais on peut le devenir. Pour ce faire, cela nécessite une connaissance profonde de soi-même, mais également une bonne connaissance de « la présentation de Soi » et de « l’estime de Soi » de l’entreprise. C’est en étant « soi-même », qu’un leader [2] exemplaire, sincère et authentique, pourra alors exercer une influence positive et efficace dans son environnement opérationnel.

Une image positive globale

5 Comment cette image positive globale s’élabore-t-elle concrètement ? Comment construit-elle une identité forte et exerce-t-elle une influence stratégique ? Pour y parvenir, il s’agit non pas de viser directement le consommateur, mais l’environnement et plus particulièrement ceux qui fabriquent et relayent l’opinion. Aussi, cela consiste à se détourner de la concurrence et à sculpter une identité forte et assumée de l’organisation en développant ses idées et en les articulant astucieusement. Cela nécessite une forte capacité d’anticipation et une vision réaliste de l’environnement dépourvue de toute forme d’universalisme, en commençant par une réalité scientifique, c’est-à-dire observable et vérifiable. C’est en partant d’une image en trois dimensions du monde « réel », de la Terre et des Hommes, de la Géographie et de l’Histoire, de la réalité économique et conjoncturelle, des réalités socioculturelles, que l’on peut analyser les situations d’une manière objective. En analysant les choses avec du recul. La capacité à influencer l’ensemble des acteurs d’un projet complexe ou stratégique contribue directement au succès de la stratégie de l’entreprise. Elle s’inscrit parmi les modes d’action essentielles sur lesquelles le dirigeant doit s’appuyer dans le cadre de la déclinaison opérationnelle de sa stratégie, c’est-à-dire : décliner la tactique.

6 L’idée consiste à fédérer les actions d’une part sur les perceptions [3] et l’environnement opérationnel menées en direction d’un public cible et d’autre part envers la concurrence pour atteindre un objectif final, en d’autres termes : remporter la victoire. En fin stratège, l’action du dirigeant doit viser à agir simultanément sur le monde réel comme dans celui des perceptions dans le but de réaliser une synergie entre les capacités d’actions classiques de l’entreprise et celles, plus fines et subtiles d’une opération d’influence, propres à l’environnement efficient au profit d’une finalité à atteindre. En mettant en œuvre d’astucieux jeux d’alliances et d’influences visibles et invisibles, directes et indirectes, le dirigeant va réussir à fixer les règles du jeu dans son environnement et à imposer naturellement ou plutôt à asseoir une position dominante sur l’adversaire.

Qu’est-ce que l’influence ?

8 Elle s’articule autour de piliers fondamentaux.

• Par la légitimité : qui permet d’asseoir l’entreprise dans son environnement opérationnel, de renforcer son image et sa position dominante sans avoir à en abuser et de remettre en question la légitimité de la concurrence.
• Par la crédibilité et le leadership [4] : un habile moyen d’action qui renforce le centre de gravité de l’entreprise (là où elle tire sa force).
• Par une narration logique, claire et structurée : en racontant une belle histoire, une argumentation de bon sens fait appel à la raison de la cible et vise à fournir des arguments logiques par des éléments de preuves incontestables. Par exemple, le chef d’un service a un équipier régulièrement en retard au travail : « Si tu arrives en retard, ton travail ne pourra pas être achevé dans les temps, tu auras des sanctions et ton dossier d’avancement ne sera pas bon ! »
• Par une stimulation de l’affectif et en cristallisant les émotions : en faisant appel aux sentiments ou aux émotions de la cible par la flatterie, la séduction, la culpabilisation, l’idéologie, etc. Par exemple, le chef d’un service a un équipier régulièrement en retard au travail : « Tu risques des sanctions et ta famille ne va pas être fière de toi si tu es renvoyé ! »
• Par une stimulation de l’appartenance à un groupe social : en gagnant le cœur et les esprits, en faisant appel au sentiment d’appartenance de la cible à un véritable groupe social, en invoquant les valeurs et les normes propres à l’entreprise. Par exemple, le chef d’un service a un équipier régulièrement en retard au travail : « Tu empêches toute l’équipe de travailler avec tes retards incessants. »

9 Développer des actions d’influence selon ces principes présente des avantages considérables, chose que nous allons tenter de développer grâce au schéma directeur ci-après.

Le schéma directeur : recommandations

10 Une démarche d’influence en entreprise pour qu’elle soit efficace, doit tout d’abord faire comprendre et accepter aux parties prenantes l’enjeu et le bien-fondé de l’action qui est menée. Également, elle vise à parasiter le processus décisionnel de la concurrence grâce à des stratagèmes et astuces. Elle se fait dans un état d’esprit créatif et proactif mêlant rigueur, professionnalisme et travail collaboratif.

11 Une étude de la cible et de sa segmentation est fondamentale, car la modification des perceptions est attendue au niveau des individus et des relais d’opinion. C’est un état des lieux complet de « la présentation de Soi » et de « l’estime de Soi » de la cible qu’il faut réaliser. En effet, les changements d’attitudes, les modes de consommations ou comportements d’achats, les individus et groupes d’individus réagissent différemment aux messages en fonction des lieux de vie, des cultures et des traditions locales, régionales et nationales. C’est pourquoi il est indispensable d’analyser la situation dans une approche socioculturelle, géopolitique et géosécuritaire afin de développer des actions d’influence efficaces adaptées à l’espace géographique de la cible.

12 Une veille et une analyse permanentes doivent être présentes à toutes les étapes. Elle va permettre d’anticiper et de réagir aux différents comportements du public ciblé et va aider le dirigeant dans ses prises de décisions stratégiques. Également cela va permettre de concevoir des messages et de les délivrer par des vecteurs multimédias pour atteindre plus aisément l’objectif et le cas échéant permettre aussi de suivre, d’évaluer et de réajuster la stratégie en cas d’événements imprévisibles.

13 Une cartographie des acteurs doit être réalisée. Elle détermine leur indice d’influence sur votre public cible. Les approches multicanaux sont à privilégier : presse écrite et numérique, supports multimédias, les réseaux formels et informels. Une cartographie réussie présente bien des avantages. Elle va permettre de réaliser une carte mentale qui favorise une meilleure extraction et exploitation de l’information à haute valeur ajoutée sur les acteurs clés, leurs attentes, leurs circuits, leur cycle décisionnel, leur mode de fonctionnement et leur capacité d’influence. Une fois analysées et exploitées, ces informations seront par exemple utiles dans le cadre d’opérations de négociations commerciales.

14 Une approche collaborative consensuelle avec les parties prenantes va favoriser l’adhésion à la vision commune gagnante du dirigeant. Elle doit être intégrée à toutes les étapes de la conception et de la mise en œuvre du schéma directeur de la démarche. Cette stratégie vise à court terme à favoriser l’assimilation de normes de comportement par un public cible et donc à moyen et long termes à un changement d’attitude perceptible dans l’environnement opérationnel.

15 En somme, l’élaboration d’une démarche efficace d’influence doit s’inspirer du contexte dans lequel l’entreprise évolue et doit tendre à transformer les risques en opportunités.