Article
Au cours du siècle dernier, les anciens départements annexés du Grand Empire ont fourni la matière à publication de diverses collections de lettres de militaires, parfois officiers mais le plus souvent simples conscrits. Ce fut ainsi le cas pour l’actuelle Belgique, tant wallonne que flamande (départements respectifs de l’Ourthe et de la Lys), le Luxembourg (département des Forêts), ou la province italienne de Ligurie augmentée de la bordure méridionale du Piémont (département de Montenotte). La récurrence de ces lettres dans les archives départementales était liée à leur fonction officieuse, comme « certificats » de non-désertion de leurs auteurs ou brevets d’immunité temporaire pour leur(s) frère(s) cadet(s). Cette situation était bien sûr aussi valable pour l’Hexagone mais fut sans doute éclipsée par la prégnance de la légende dorée napoléonienne ; de nombreux travaux portant sur désertion et insoumission à l’échelle régionale ou départementale l’ont établi, impulsés par une étude pionnière d’Alan Forrest. Leur présence dans des dossiers espagnols, en revanche, était le fruit des interceptions de courriers par la guérilla et alimenta une guerre psychologique de la part des autorités patriotes, notamment par le biais de la Gazeta de la Regencia. De tels matériaux furent longtemps négligés par les historiens, jusqu’à Alan Forrest, premier à les mobiliser pour réaliser une étude désormais classique de l’armée française à l’orée du XIXe siècle. L’historien – amateur comme professionnel – du Premier Empire ne saurait désormais bouder son plaisir devant ces deux volumes récents de lettres inédites…
Auteur
- Mis en ligne sur Cairn.info le 23/01/2019
- https://doi.org/10.4000/rh19.6257