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Dans ce riche numéro de la revue Les Études Sociales publié en 2014, dans la foulée d’une journée d’étude organisée à l’université de Lille 3, Carole Christen poursuit l’exploration des expériences réformatrices et éducatives à destination des classes populaires au XIXe siècle. Ce vaste chantier recoupe plusieurs traditions historiographiques qui s’ignorent souvent : l’étude des expériences émancipatrices par l’éducation dans la foulée notamment des travaux de Jacques Rancière sur l’autodidaxie ; l’histoire de l’éducation au sens strict qui s’est de plus en plus développée et institutionnalisée ces dernières décennies ; et enfin l’étude du paternalisme sous sa forme éducative. D’emblée est soulignée la difficulté de définir ce que recouvrent « l’éducation industrielle » et les ouvriers au XIXe siècle, catégories floues qui renvoient à des situations très diverses et hétérogènes. Pourtant la question est importante tant la période 1800-1870 voit se transformer en profondeur l’enseignement comme les mondes du travail alors que s’engage le double mouvement d’élargissement de la souveraineté populaire et d’expansion industrielle. Évoquer « l’éducation industrielle » à destination des ouvriers adultes, c’est par ailleurs aller au-delà de l’étude de l’enseignement professionnel et technique au sens strict, qui a suscité divers travaux récents. Il s’agit bien de penser les enjeux politiques et moraux de l’éducation, d’explorer comment s’opère l’acculturation aux nouvelles valeurs bourgeoises et libérales portées par les élites philanthropiques, et comment le « peuple » y répond en cherchant la voie d’une autre éducation émancipatrice…
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- Mis en ligne sur Cairn.info le 15/05/2018
- https://doi.org/10.4000/rh19.5354