CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1. Introduction

1Les connaissances scientifiques sont un élément clé pour l’innovation des entreprises. La plupart des biens et services caractérisés par une forte valeur ajoutée contiennent des connaissances scientifiques. Les médicaments sont issus de la recherche en chimie, biologie, biochimie et génie génétique ; les logiciels et le matériel informatique sont le fruit de mathématiques, de physique et d’ingénierie des systèmes avancés ; les services mobilisent des méthodes et des connaissances issues des sciences humaines, telles que la psychologie, la sociologie ou encore la science économique (Caraça et al., 2009).

2Cependant, l’intégration de ces connaissances scientifiques à l’innovation industrielle n’est pas homogène entre les secteurs d’activité et les domaines technologiques et scientifiques (Klevorick et al., 1995 ; Narin et al., 1997). Les flux de connaissances sont conditionnés par la nature de l’industrie concernée, par le contexte institutionnel associé au transfert de connaissances ainsi que par l’intensité des réseaux de collaboration. Or peu d’attention est portée à la question de la spécificité du processus d’innovation dans les entreprises de défense qui pourtant se distinguent des autres activités innovantes sur tous ces points. En effet, les entreprises de défense entretiennent et valorisent, sous l’impulsion étatique, des liens étroits avec la recherche scientifique. Du projet Manhattan aux dernières avancées dans le laser, les apports de la science aux innovations de défense sont cruciaux. Les entreprises de défense sont aussi caractérisées par leur appartenance à des industries aussi diverses que l’aérospatial, les télécommunications ou le naval. Cet article cherche ainsi à comprendre comment les caractéristiques liées à la production de défense influencent le processus d’intégration de connaissances scientifiques dans les innovations des entreprises.

3Pour traiter cette question, nous mobilisons les données de brevets des 1 722 plus grandes entreprises en termes de dépenses de R&D sur la période 2010-2016 issues de la base de données COR&DIP (JRC/OCDE, 2015, 2017, 2019). Les références scientifiques contenues dans les brevets sont utilisées comme indicateur des connaissances scientifiques intégrées dans les innovations technologiques. À l’aide d’un modèle suivant une loi négative binomiale, cette recherche met en avant que les entreprises de défense mobilisent significativement moins de connaissances scientifiques que les entreprises civiles. Nous interprétons cela comme le résultat de l’intégration croissante d’innovations civiles dans les productions militaires et de la prédominance des entreprises civiles dans les secteurs les plus intenses en connaissances scientifiques.

4La section suivante est une revue de littérature couvrant l’analyse des déterminants de l’intégration de connaissances dans l’innovation technologique et des particularités de l’environnement dans lequel les entreprises de défense opèrent. Ensuite, nous présentons notre stratégie empirique avant de discuter les principaux résultats économétriques obtenus. Enfin, la dernière section conclut.

2. Revue de littérature : connaissances scientifiques et industries de défense

2.1. Flux de connaissances entre science et industrie

5La science est considérée comme une activité de recherche qui vise à décrire, expliquer et prédire les phénomènes en identifiant les liens de cause à effet qui les unissent. La technologie est pour sa part associée à une activité de fabrication et de transformation. Ces deux activités sont intrinsèquement liées et dépendantes l’une de l’autre. Historiquement, les interactions systématiques entre la technologie et la science remontent à la moitié du 19e siècle et ont donné lieu à ce que l’on appelle la « révolution techno-scientifique » (Braverman, 1974). Elle se définit comme la transformation de la science en capital (Noble, 1979). À partir des années 1980-1990, l’utilisation accrue de capital immatériel combinée à la révolution des technologies de l’information et de la communication a permis l’essor d’une économie fondée sur la connaissance (Foray et Lundvall, 1998).

6Dans ce contexte, la littérature s’intéresse à l’évolution de la place des connaissances en développant notamment des analyses systémiques des processus d’innovation, i.e. l’étude des interactions entre les éléments participant à l’innovation (Lundvall, 1992 ; Nelson, 1993). Parmi les outils utilisés par ces approches, l’étude des flux de connaissances est centrale (Meyer, 2002). Elle reprend l’idée que les innovations résultent de combinaisons nouvelles et non éprouvées d’éléments existants (Schumpeter, 1912 ; Usher, 2013). Dans ce cadre conceptuel, le processus d’innovation identifie des connaissances pouvant être combinées pour générer de nouvelles connaissances (Weitzman, 1996, 1998 ; Fleming, 2001 ; Fleming et Sorenson, 2001 ; Sorenson, Rivkin et Fleming, 2006). L’analyse quantitative des connexions entre connaissances permet d’aborder de manière renouvelée les liens entre science et technologie. Ce type d’approche a permis de caractériser la nature de cette relation, et d’en distinguer les aspects nationaux, internationaux ou encore d’en identifier les attributs temporels.

7Afin d’innover, les entreprises ont développé leur faculté à mobiliser les connaissances qu’elles détiennent et à les combiner à des connaissances extérieures (Subramaniam et Youndt, 2005 ; Yli-Renko et al., 2001 ; Van den Bosch et al., 1999). En particulier, les connaissances scientifiques participent à l’innovation technologique des entreprises via trois canaux. Premièrement, elles évitent des expériences non pertinentes et permettent aux entreprises de se concentrer sur les voies de recherche pertinentes (Sorenson et Fleming, 2004). Deuxièmement, elles favorisent la capacité d’absorption interne et externe des nouvelles connaissances par la firme (Cockburn et Henderson, 1998). Troisièmement, elles participent à l’amélioration de la qualité et de la valeur économique des technologies produites par les entreprises (Arora et Gambardella, 1994).

8Cependant, de nombreux auteurs mettent en évidence que l’intégration de ces connaissances scientifiques au sein des innovations des entreprises n’est pas homogène entre les secteurs d’activité et les domaines technologiques et scientifiques (Klevorick et al., 1995 ; Narin et al., 1997). Gertner et al. (2011) montrent que les flux de connaissances entre les universités et l’industrie dépendent de multiples facteurs. Ils sont conditionnés par la nature de l’industrie concernée, par le contexte institutionnel associé au transfert de connaissances et par l’intensité des relations avec les acteurs producteurs de connaissances scientifiques. L’objet de cet article est de comprendre comment les caractéristiques liées à la production de défense influencent le processus d’intégration de connaissances scientifiques dans les innovations technologiques des entreprises. Or l’innovation des entreprises de défense se distingue sur ces trois points.

2.2. Lien entre connaissances scientifiques et industrie de défense

9Les connexions entre défense et science sont largement documentées dans la littérature (Serfati, 2005 ; Geiger, 1992 ; Feaver, 1999). Cependant, à l’exception des travaux traitant de la question plus globale de la défense et du système national d’innovation (James, 2009), peu d’intérêt a été porté à l’intégration de connaissances scientifiques dans le processus d’innovation des entreprises de défense depuis la fin de la Guerre froide. Le faible nombre de recherches sur la période récente ne permet pas de dégager un consensus sur la spécificité ou non des entreprises de défense dans leur mobilisation de connaissances scientifiques. Alors que Bellais (2005) évoque une sous-exploitation des connaissances scientifiques par les entreprises défense, Serfati (2005) s’inscrit en opposition en discutant de la relation privilégiée qu’entretiennent les entreprises de défense avec le monde scientifique. Cet article apporte une vision quantitative de la spécificité de l’innovation des grandes entreprises de défense dans un contexte économique globalisé. Cette section discute les différents canaux de transmission entre les connaissances scientifiques et l’innovation des entreprises de défense.

10Le premier facteur affectant la capacité des entreprises à mobiliser des connaissances scientifiques est le contexte institutionnel. Sempere (2015) définit l’innovation militaire comme l’action ou l’introduction de nouvelles idées essentielles à l’accomplissement des missions de défense, directement définies par l’État. La production de systèmes d’armement se réalise dans un contexte de collaboration d’une entreprise, intégrateur de systèmes et maître d’œuvre, avec l’État, maître d’ouvrage et client (Lazaric et al., 2009). Les firmes de défense fournissent l’État-client et construisent les nouveaux systèmes d’armes en étroite relation avec lui. Par exemple, en France, ce rôle étatique est assuré par la Direction Générale de l’Armement (DGA). L’État-client peut aussi imposer ses conditions en termes de diffusion ou non des innovations au sein de la société et affectent les innovations des entreprises de défense de deux manières opposées. D’une part, l’État peut pousser au secret en limitant la diffusion des droits de propriétés des innovations militaires ou en imposant une organisation fermée du processus d’innovation au sein des entreprises. D’autre part, l’État peut motiver à la diffusion de ces innovations dans la société pour accroitre l’impact des dépenses publiques dans ce secteur et ainsi adjoindre une justification économique à la justification sécuritaire. En ce sens, le cadre institutionnel dans lequel s’inscrivent les entreprises de défense semble avoir un effet ambigu sur l’ouverture du processus d’innovation à des acteurs et des connaissances extérieures.

11Ce contexte institutionnel des entreprises de défense est d’autant plus intéressant à étudier que l’essor de l’ère du numérique combiné à la fin de la Guerre froide a affecté directement les entreprises de défense. Les vagues de privatisations, les concentrations et l’imposition de contraintes budgétaires strictes poussent les entreprises de défense à s’ouvrir à la sphère civile. L’État cherche à favoriser l’intégration des technologies en provenance du civil (spin-in). La nécessité d’une innovation de haute technologie implique la mobilisation d’un corpus de connaissances extrêmement divers, notamment issue de recherches civiles. Ces deux enjeux influencent les relations des entreprises de défense avec le marché civil et le monde scientifique et participent à questionner l’innovation militaire (Meunier, 2020).

12La deuxième caractéristique affectant la mobilisation de connaissances scientifiques par les entreprises est la nature de la production. En effet, au-delà de cette relation directe entre entreprises de défense et État-client, l’innovation de défense est, par nature, pluri-industrielle et porte en elle des exigences de complexité et de fiabilité spécifiques. L’innovation militaire a pour objet l’avance technologique sur l’adversaire (Dupuy, 2013) et l’adaptabilité des matériels aux situations incertaines. La prédominance des conflits asymétriques, associée à un contexte international incertain, mène à des demandes polyvalentes (Badie et Vidal, 2016). Pour s’adapter aux exigences de la demande, les entreprises doivent posséder une base évolutive de connaissances et de compétences scientifiques et technologiques (Dittrich et al., 2006). Les porte-avions, les sous-marins ou encore les avions de chasse sont composés d’une grande quantité de sous-systèmes, de connaissances technologiques et scientifiques et d’une grande variété de compétences organisationnelles (Versailles, 2005). Cette exigence de produits de haute technologie et la diversité des domaines industriels concernés influencent l’intégration de connaissances scientifiques dans leur processus d’innovation des entreprises (Caraça et al., 2009).

13Le troisième facteur affectant l’intégration de connaissances scientifiques au sein de l’innovation des entreprises est l’intensité des relations avec l’extérieur, notamment la recherche publique. La demande étatique associée à la complexité des productions amènent à des processus de R&D militaire à long terme. Cette temporalité facilite les relations avec la science qui produit de nouvelles connaissances à des échelles temporelles plus longues que la recherche industrielle. Mowery (2012) montre que, par rapport à la R&D dans les autres secteurs, la R&D orientée vers des missions de défense tend à davantage développer des solutions techniques à des problèmes complexes qui requièrent souvent des années – voire des décennies – pour produire un matériel militaire.

14Ces dynamiques de long terme favorisent l’intégration des entreprises de défense dans un large réseau de collaboration. Pour innover, les industriels de défense doivent gérer l’échange des connaissances entre des acteurs hétérogènes incluant ceux de la recherche académique (Avadikyan et Cohendet, 2005). Amin et Cohendet (2004) insistent sur la nécessité de prendre en considération les diverses communautés d’acteurs afin de structurer, développer et maintenir les connaissances au sein des entreprises. En particulier, la relation entre entreprises de défense et recherche académique s’intensifie fortement à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Serfati (2005) montre, en analysant le Projet Manhattan, l’importance prise par la contribution des connaissances scientifiques à l’innovation de défense. Ce projet, débuté en 1942, réunissant plus de 150 000 personnes et 26 milliards de dollars [1], avait pour objectif la mise au point la première bombe nucléaire. Il a mobilisé des industriels, des militaires et des scientifiques des États-Unis, du Canada et du Royaume-Uni. Plus récemment, en 2016, la création du Manufacturing Innovation Institute réunit aux États-Unis, sous l’égide du Massachusetts Institute of Technology (MIT) et du Ministère de la Défense américain, plus de 32 universités, 16 industries, 72 entreprises et 26 incubateurs de start-up. Cet institut a pour objet la création de fibres et tissus permettant de stocker et convertir de l’énergie, contrôler la température ou encore changer de couleur. Ce projet témoigne de la diversité des acteurs avec lesquels les entreprises de défense opèrent afin d’innover.

15Cet environnement de collaborations des entreprises de défense est d’autant plus intéressant qu’il a connu de nombreux bouleversements depuis la fin des années 1980. Mowery (2012) met en avant que les changements structuraux dans les systèmes d’innovation nationaux ont particulièrement affecté l’environnement dans lequel les entreprises de défense réalisent leurs innovations. Belin et al. (2019) montrent que les entreprises ont dû s’adapter à des évolutions radicales du système techno-scientifique. Selon eux, l’augmentation significative de la R&D civile, le rôle prédominant des entreprises civiles et la complexification des connaissances ont incité les entreprises de défense à développer des coopérations, autant entre elles qu’avec la sphère civile et la recherche scientifique. Pour surmonter les contractions budgétaires de la fin de la Guerre froide et l’intensification de la R&D civile, les entreprises ont dû se diversifier. Cette diversification s’est réalisée de deux manières : d’une part, une diversification de marché sans diversification des compétences (valorisation de ses compétences en s’adaptant à de nouveaux clients) ; d’autre part, une proposition de nouveaux produits aux mêmes clients (militaires ou civils) en faisant appel à des compétences nouvelles venant de l’autre sphère complétant celles que l’entreprise possède déjà (Meunier, 2019).

16Ces évolutions du contexte ont ainsi fortement affecté les relations des entreprises de défense avec le marché civil et le monde scientifique et nécessitent des études approfondies de ce phénomène dans la période contemporaine. Or, malgré toutes ces caractéristiques communes aux entreprises de défense, la littérature ne documente pas de manière quantitative l’intégration de connaissances scientifiques dans le processus d’innovation technologique. À notre connaissance, cet article constitue la première analyse économétrique réalisée à l’échelle mondiale cherchant à comprendre les différences d’intégration des connaissances scientifiques dans les innovations technologiques entreprises civiles et de défense.

3. Stratégie empirique

17Pour étudier l’intégration de connaissances scientifiques dans le processus d’innovation technologique, nous mobilisons les données de brevets comme proxy de l’innovation technologique (Funk, 2018). Plus précisément, nous étudions les brevets déposés par les 2 000 plus grandes entreprises en termes de dépenses de R&D dans le monde sur la période 2010-2016. Ces données proviennent de la base de données COR&DIP (JRC/OECD, 2015, 2017, 2019) et contiennent les caractéristiques individuelles des entreprises (chiffre d’affaires, dépenses de R&D, etc.) et leur portefeuille de brevets consolidé à l’échelle du groupe. Cette liste est recoupée avec la base de données PATSTAT19B de l’European Patent Office (EPO) afin d’extraire les caractéristiques des brevets. Cette étude des plus grands groupes en termes de dépenses de R&D est en cohérence avec les spécificités des grandes entreprises de défense à travers leur rôle de maître d’œuvre (Lazaric et al., 2009). Le choix de la période 2010‑2016 est dicté par l’identification et le maintien des données d’entreprises et de leurs portefeuilles de brevets réalisés par le travail conjoint du Joint Research Center de la Commission européenne (JRC) et l’OCDE.

18Conformément à la littérature économique, nous utilisons le nombre de brevets détenus par une firme comme une variable rendant compte de son niveau d’innovation technologique (voir Jaffe et Trajtenberg, 2002 ; Nesta et Saviotti, 2005 ; ou Piperopoulos et al., 2018, pour une discussion détaillée). Dans notre base de données sont uniquement considérés les brevets qui réunissent simultanément trois critères. Tout d’abord, ils doivent avoir été déposés par l’une des 2 000 firmes de notre panel. Ensuite, nous conservons uniquement les brevets déposés et accordés (granted), ce qui atteste de la nature innovante de la technologie considérée. Enfin, nous sélectionnons les brevets dont la première date de dépôt appartient à la période 2010-2016. En effet, les inventions peuvent faire l’objet de plusieurs demandes de brevets auprès de différents offices nationaux ou régionaux des brevets ou auprès de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI). Retenir la première date de dépôt comme date effective permet de se situer au plus proche de la date réelle de l’invention. Par ailleurs, nous travaillons à l’échelle de la famille de brevets (INPADOC) [2]. Cela permet de capter une innovation effective, et non simplement la reproduction d’une innovation dans un contexte national ou régional. Au final, parmi les 2 000 firmes composant la base de données entre 2010 et 2016, seules 1 722 d’entre elles ont déposé quelque 1 442 430 brevets regroupés en 812 795 familles de brevets. Ainsi, 13,9 % des entreprises investissant le plus en dépenses de R&D au monde ne déposent aucun brevet. Ce chiffre s’explique par deux éléments : i) le choix du secret industriel comme protection de la propriété intellectuelle ; ii) le fait que le domaine d’activité des firmes ne fait pas partie des domaines couverts par les brevets, commepar exemple les entreprises fournissant des logiciels.

19Cet article questionne l’effet de la spécificité de l’activité des entreprises de défense sur l’intégration de connaissances scientifiques dans ses innovations technologiques. À cette fin, nous mobilisons les données de citations de non-patent literature (NPL) contenues dans les brevets. En d’autres termes, la littérature scientifique citée est utilisée comme proxy de l’intégration des connaissances scientifiques dans les innovations technologiques, elles-mêmes mesurées par les familles de brevets. Étudier les citations de littérature scientifique au sein des familles de brevets constitue la meilleure mesure des interactions entre science, technologie et créativité humaine permettant l’innovation industrielle (Tijssen, 2004). L’intégration de connaissances scientifiques dans les innovations des entreprises est mesurée par le nombre de citations scientifiques dans les brevets de l’entreprise f à la date t, noté NPLf,t. Nous utilisons cet indicateur pour comparer les processus d’innovation des firmes de défense et civiles en termes d’intégration de connaissances scientifiques. Cette prise en compte du nombre de références NPL dans les brevets plutôt que de prendre en compte le nombre moyen de ces références par brevet reflète de notre intérêt pour la base de connaissances de l’entreprise en opposition à la qualité des brevets. En effet, la qualité des brevets est souvent évaluée à l’aune de ses citations qu’elles soient scientifiques ou technologiques (Hottenrott et al., 2016). À l’inverse, d’autres auteurs s’intéressent aux nombres absolus de citations émises ou reçues au sein des entreprises pour caractériser la nature cumulative de l’innovation (Belenzon, 2012). Or cet article cherche à comprendre comment une activité particulière, la défense, affecte les connaissances possédées et maîtrisées par une entreprise. Notre approche renvoie à la nature cumulative de la connaissance et au processus d’innovation combinant des connaissances existantes présentée dans la partie précédente. Dans ce cadre, il est pertinent de considérer les connaissances possédées par l’entreprise comme un ensemble de ressources que l’entreprise mobilise afin d’innover. Il nous semble ainsi plus intéressant de mobiliser le nombre de références scientifiques au sein de l’entreprise. Cependant, ce choix peut porter à discussion et c’est pourquoi nous proposons en annexe 6 l’ensemble de nos estimations réalisées avec comme variable dépendante le nombre moyen de NPL par brevet au sein d’une entreprise (IntensiteNPLf,t). Cette annexe met en évidence la robustesse de nos résultats principaux.

20Les entreprises ne sont pas estampillées « défense » dans la base de données COR&DIP. Pour les identifier, nous avons utilisé les montants de chiffre d’affaires militaire disponible dans la base de données Arms Industry collectée par le Stockholm International Peace Reasearch Institute (SIPRI). Cette base de données recense les 100 plus grandes entreprises de défense dans le monde chaque année en matière de volume de ventes d’armes. Bien que limitée, cette identification par le chiffre d’affaires est le mode d’identification des entreprises de défense le plus courante (Dunne, 1995 ; Brauer, 2007 ; Meunier et Bellais, 2019). Nous recoupons cette liste de firmes issues du SIPRI avec celle les 2 000 entreprises de notre base de données, et nous obtenons que 54 d’entre elles ont à la fois une production de défense et déposent des brevets. Ce non-recouvrement total entre les deux bases de données s’explique par la petite taille des entreprises de défense par rapport aux autres entreprises innovantes dans le monde. Nous identifions 54 entreprises de défense parmi le top 100 mondial. Cela implique que ces entreprises dépensent assez en R&D pour appartenir aux 2 000 entreprises de notre échantillon et qui déposent des brevets. Ce croisement de bases de données permet de construire une variable indicatrice, notée Defensef, qui prend la valeur de 1 si la firme se trouve au moins une fois dans le top 100 du SIPRI entre 2010 et 2016 et 0 sinon. Dans notre étude, une firme de défense est donc définie comme une entreprise faisant un chiffre d’affaires de défense important durant au moins l’une des années de la période étudiée. Cette variable indicatrice est complétée par la variable Part-Defensef,t représentant le rapport du chiffre d’affaires issu de ventes de matériel militaire et du chiffre d’affaires total. Celle-ci permet d’approcher la dépendance des entreprises au marché de défense. Enfin, précisons que nous ne retenons que les firmes à l’échelle du « groupe » et non des filiales afin d’avoir une adéquation valide entre les entreprises identifiées dans le top 100 du SIPRI et celle de COR&DIP (JRC/OCDE, 2015, 2017, 2019).

21Nous utilisons comme variables de contrôle des variables issues des caractéristiques des brevets à la manière de Quintana-García et Benavides-Velasco (2008). D’une part, la notion de stock d’innovation de l’entreprise est captée par le log du nombre de familles de brevets déposées et accordées par l’entreprise f, l’année t, notée lnSpanf,t. D’autre part, pour connaître la diversité de connaissances technologiques au sein de l’entreprise, nous utilisons la concentration des classes technologiques contenues dans les brevets des entreprises. Nous calculons un indicateur de Hirshman-Herfindhal appliqué aux classes technologiques, noté HHif,t à l’échelle de chaque entreprise f et chaque année t (Quintana-García et Benavides-Velasco, 2008).

22Notre modèle empirique comporte aussi des variables de contrôle pour capter la stratégie d’investissement en R&D des entreprises. À la manière de Nesta et Saviotti (2005), nous utilisons l’intensité des investissements en R&D pour retranscrire l’intensité d’exploitation du « knowledge capital ». L’intensité en R&D, notée RDintf,t, est le rapport entre les dépenses en R&D et les ventes nettes (exprimées en millions d’euros). De plus, puisque les politiques de défense et leurs organisations diffèrent grandement d’un pays à l’autre, nous mettons un effet fixe sur le pays d’appartenance des entreprises. Enfin, de nombreux travaux mettent en évidence des différences structurelles d’intensité scientifique entre des innovations traitant dans des technologies dites de « high tech » et de « low tech » (Caraça et al., 2009). Afin de prendre en compte ce facteur, nous utilisons la classification des industries sur la base du code NACE rev 2.2 à 3-digit (Eurostat) et distribuant les industries entre celles high-tech, medium high-tech, medium low-tech, low-tech et les entreprises non manufacturières. Une variable indicatrice pour chaque groupe d’industries est créée et celles-ci sont notées respectivement, Hightechf,t, MediumHightechf,t, MediumLowtechf,t, Lowtechf,t. Nous proposons en annexe 1 les statistiques descriptives de l’ensemble de ces variables. De même, l’annexe 2 présente les statistiques descriptives de ces variables par type d’entreprise (civil ou défense), l’annexe 3, la table de corrélation entre variables de contrôle et enfin l’annexe 4, la table de corrélation entre variables de contrôles et variables dépendantes.

23Nous recourons à une régression négative binomiale en raison de la nature discrète de notre variable dépendante – le nombre de citations scientifiques faites dans les brevets de la firme – et le nombre important de zéros observés dans ces citations [3] à la manière de Yu et Wu (2014) et Kim et Jun (2016). Ces auteurs mettent en avant que cette sur-représentation de zéros dans les données de citations de brevets peut nécessiter de mobiliser un modèle zero-inflated. C’est à cette fin que nous présentons en annexe 8, nos estimations principales réalisées à l’aide d’un modèle zero-inflated négative binomiale. Ces estimations principales se résument en deux modèles. Le premier prend la forme suivante :

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NPLf,t = β0 + β1Defensef + β2Xf,t–1 + β3Yf,t–1 + εf,t

25Avec NPLf,t représente la quantité de références scientifiques dans les brevets des entreprises f et l’année t. Defensef est notre variable dépendante principale et permet de caractériser l’activité défense ou civile des entreprises. Xf,t–1 est le vecteur contenant les variables associées aux caractéristiques des brevets des entreprises. Yf,t–1 est le vecteur composé de variables de contrôle associées aux caractéristiques économiques des entreprises. Finalement, εf,t représente le terme d’erreur. Notons que toutes les variables indépendantes sont retardées d’une année afin d’éviter les suspicions d’endogénéité (Nesta et Saviotti, 2005) du fait de l’utilisation des brevets en variables dépendantes et indépendantes. Le second modèle est similaire à l’exception de notre variable explicative principale qui est la dépendance de l’entreprise à l’activité de défense. Il prend la forme suivante :

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NPLf,t = β0 + β1PartDefensef,t–1 + β2Xf,t–1 + β3Yf,t–1 + εf,t

27Avec PartDefensef,t–1, le rapport entre le chiffre d’affaires militaire des entreprises et leur chiffre d’affaires total. Enfin, il est nécessaire de noter que notre panel entreprises-années n’est pas cylindré à cause de données manquantes dans la base de données COR&DIP. Plus précisément, les dépenses de R&D et les ventes nettes ne sont pas disponibles pour l’ensemble des entreprises sur la totalité de la période.

4. Résultats et discussion

28Le tableau 1 présente nos principaux résultats. Le modèle M1 a pour variable indépendante principale la variable binaire Defensef alors que dans le modèle M2, la principale variable explicative est la part du chiffre d’affaires liée aux ventes d’armes dans le chiffre d’affaires global des entreprises, Part-Defensef,t-1. Pour chaque modèle, nous présentons les coefficients et les Incident Rate Ratio (IRR) issus de nos régressions afin d’apprécier la magnitude des effets observés.

29Tout d’abord, le tableau 1 montre que les variables liées aux caractéristiques des brevets des entreprises, i.e. la quantité de brevets (lnSpan f,t-1) et la concentration technologique au sein des entreprises (HHif,t-1), ont un effet positif et significatif sur les citations de références scientifiques. Cela s’explique aisément car plus l’entreprise dépose des brevets, plus le nombre de citations est important. Concernant la concentration technologique, son effet positif traduit le fait que plus une entreprise est spécialisée dans un domaine technologique plus son innovation sera intense en connaissances scientifiques. Cela apporte un éclairage sur la relation entre la diversification au sein des entreprises et leur capacité à intégrer simultanément des connaissances scientifiques. Ce résultat s’inscrit dans la lignée des travaux sur la capacité d’absorption des organismes. Concernant les contrôles économiques, la variable d’intensité de la R&D a un impact positif sur les citations de références scientifiques dans les brevets. Ce résultat est en cohérence avec la littérature sur les liens entre l’investissement en R&D et la capacité des entreprises à absorber de nouvelles connaissances (Cohen et Levinthal, 1990). Cependant, il convient de noter que cet effet n’est pas robuste à l’ensemble de nos tests présentés dans les annexes 5, 6 et 7. La variation du niveau de significativité du coefficient associée à l’intensité des dépenses de R&D s’explique par la sensibilité de la variable aux variations du chiffre d’affaires des entreprises, contrairement aux dépenses de R&D engagées sur plusieurs années.

Tableau 1. Intensité scientifique et entreprises de défense

Figure 0

Tableau 1. Intensité scientifique et entreprises de défense

avec *, **, *** notant respectivement une p-value inférieure à 10 %, 5 % et 1 %.

30Concernant notre variable d’intérêt, le tableau 1 montre un effet négatif et significatif de l’appartenance et de la dépendance à la défense sur le nombre de NPL cités par les familles de brevets. La lecture des IRR nous permet cependant de dire que le fait d’être une entreprise de défense a un effet relativement faible en comparaison des effets des variables de contrôle, notamment technologiques. Ainsi participer au marché de défense (Defensef,) diminue d’un facteur 0,285 le nombre de références scientifiques dans les brevets des entreprises. La dépendance à la défense (Part-Defensef,t-1) affecte aussi négativement la quantité de références scientifiques. Pour une augmentation de 1 % de la dépendance au marché de défense, le nombre citations scientifiques diminuent de facteur 0,977. À l’inverse, une variation d’une unité de la concentration des connaissances (HHif,t-1) et du nombre de dépôts de brevets (lnSpanf,t-1) multiplie respectivement par 14,3 et 3,8 le nombre de références scientifiques dans les brevets des entreprises. De même, l’appartenance à un secteur industriel de haute technologie en comparaison des activités non manufacturières fait plus que doubler la quantité de références scientifiques (IRR de 2,245). Ainsi, bien que l’activité de défense influence significativement et négativement le nombre de références scientifiques dans les brevets, l’ampleur de cet effet est faible comparé à celui des caractéristiques technologiques de l’innovation des entreprises.

31Notre résultat principal est robuste aux différents tests présentés dans les annexes 5, 6 et 7. Tout d’abord, dans l’annexe 5 nous adoptons une définition plus large de notre variable dépendante pour s’assurer que les résultats obtenus ne sont pas le fruit d’un mauvais référencement des citations de NPL. Alors que notre variable dépendante principale est uniquement composée des citations identifiées de façon certaine telles qu’un article ou un ouvrage scientifique, une alternative consiste à y ajouter l’ensemble des références dites « en ligne » [4] (base de données, url, etc.). Le coefficient associé à Defensef demeure stable. Afin de consolider nos résultats, nous présentons aussi des modèles alternatifs avec des changements de variables indépendantes permet de limiter les suspicions de biais d’estimation induits par nos indicateurs de quantité de brevets, de concentration technologique et de taille de l’entreprise (annexe 5). En annexe 7, la sensibilité de notre modèle à une classification industrielle alternative est testée à l’aide d’une approche technologique. En effet, de nombreux travaux ont montré les limites des classifications des entreprises actuelles reposant sur le marché le plus important en termes quantitatifs et prônent le recours aux domaines technologiques contenus dans les brevets afin de caractériser l’activité d’une entreprise (Gkotsis et al., 2018 ; Xu et al., 2020). La stabilité de nos résultats dans les différents tests nous permet d’être confiants quant au fait qu’une firme de défense mobilise significativement moins de connaissances scientifiques que les autres firmes. Avant de discuter des implications de ce résultat, il est nécessaire de préciser que l’analyse des citations scientifiques se limite à l’étude d’une forme de relation asymétrique entre science et industrie. Les données de citations dans les brevets traduisent la mobilisation de connaissances scientifiques par les entreprises sans révéler de relation directe et collaborative entre la recherche scientifique et industriel. Murray (2002) signale que d’importants aspects de l’interaction entre science et industrie ne sont observables ni au sein des brevets ni au sein de la littérature scientifique.

32Au regard de la convergence des pratiques entre la sphère civile et de défense, il peut apparaître surprenant d’obtenir une différence significative de citations scientifiques dans les innovations technologiques des entreprises civiles et de défense. La première explication est l’existence du secret imposé aux innovations à destination militaire. Les entreprises de défense ne diffusent dans la sphère civile que les innovations qu’elles peuvent exploiter sur le marché civil et gardent au secret les innovations à unique visée militaire ou/et comportant un enjeu stratégique. Ces innovations « militaires », réalisées dans un contexte de fortes interactions avec des acteurs de la recherche scientifique sont potentiellement plus mobilisatrices de connaissances scientifiques. Ce résultat a des implications importantes pour les politiques publiques. En effet, le financement public alloué pour l’innovation militaire joue un rôle, au-delà des enjeux sécuritaires évidents, dans la politique de soutien à l’innovation d’un État et participe au système d’innovation national (Guichard, 2005). Or les innovations les plus intenses en connaissances scientifiques sont les plus porteuses d’innovations de rupture (Malva et al., 2015 ; Cammarano et al., 2017). L’usage de ces innovations gardées au secret pose la question de l’efficacité des politiques de spin-off prôner par les États.

33L’argument de la mise au secret nécessite d’être complété par l’importance croissante que prennent les technologies issues de la R&D civile au sein des systèmes de défense combinée à l’intensité scientifique croissante des innovations civiles. Les grandes entreprises de défense agrègent des technologies issues du civil et des technologiques dédiées à des visées militaires (Lazaric et al., 2009). À titre d’illustration, les entreprises de défense doivent intégrer des technologies liées aux télécommunications, aux nanotechnologies ou encore aux biotechnologies. Ces innovations sont aujourd’hui les plus intenses en connaissances scientifiques et celles-ci, développées dans la sphère civile, ne font pas l’objet de dépôt de brevets de la part des entreprises de défense. Ce résultat, sans remettre en cause la spécificité de l’innovation à visée proprement militaire, pose question quant à la contribution des entreprises de défense et de leurs financements publics à la dynamique d’innovation globale. Si les innovations les plus intenses en connaissances scientifiques et les plus probables d’être des innovations de rupture sont développées par des entreprises civiles, la question des sources et de l’efficacité des financements de l’innovation militaire se pose. Ce résultat tend à mettre en avant le rôle d’intégrateur des entreprises de défense, qui mobilisent des innovations intenses en connaissances scientifiques développées par les entreprises civiles. Les entreprises de défense seraient plus investies dans la partie développement et les entreprises civiles, présentes aux premiers stades de la recherche utilisent davantage les connaissances scientifiques. Ce constat est en cohérence avec l’observation de spin-in des technologies civiles vers le milieu militaire depuis les années 2000 (Bellais et Guichard, 2006). Galbraith et al. (2004) mettent en avant l’importance des spin-in en provenance de co-développements civils entre entreprises et université pour les biotechnologies de défense aux États-Unis. Cette relation entre innovations civiles et de défense s’observe aussi dans les financements de la R&D. Moretti et al. (2019) montrent que, aux États-Unis, une hausse de 10 % des investissements publics en R&D militaire entraîne une hausse de 5 % à 6 % des investissements de R&D privés et mettent en avant l’importance des relations entre les recherches civiles et militaires. Ainsi, notre travail contribue à cette littérature et est un indicateur supplémentaire de l’interdépendance entre le marché de l’innovation civile et militaire.

5. Conclusion

34Cet article montre que, entre 2010 et 2016, les grandes entreprises de défense ont intégré moins de connaissances scientifiques dans leurs innovations technologiques que les entreprises civiles. Ce résultat s’explique à la fois par les changements de pratiques au sein de la société civile et les contraintes posées sur la production militaire telles que la stratégie du secret-défense. Ce travail contribue à la littérature d’économie de défense en participant au débat sur l’effet de la spécificité défense sur la relation en science et industrie. Plus largement, cette étude montre que l’insertion d’une entreprise sur le marché de la défense joue un rôle important dans l’intégration de connaissances scientifiques à son processus d’innovation.

35Dans le contexte actuel de nouvelles politiques d’innovation de défense, notamment à l’échelle européenne, cet article apporte un élément de compréhension du processus d’innovation au sein des entreprises défense. Nos résultats illustrent la nécessité de prendre en compte les spécificités des productions et innovations militaires pour la définition et la mise en œuvre de politiques de collaboration dans les processus de R&D des industriels. Il serait nécessaire dans de futures recherches de compléter cette analyse par l’étude des relations directes entre les entreprises de défense et le monde académique dans des domaines technologiques précis, comme l’étude de recherches communes entre entreprises et centres de recherche publics soit à travers des projets bien précis, soit via l’existence de centres de recherche collaboratifs.

Annexes
Annexe 1. Statistiques descriptives globales

Tableau 2. Statistiques descriptives globales

Figure 1

Tableau 2. Statistiques descriptives globales

Annexe 2. Statistiques descriptives des entreprises civiles et des entreprises de défense

Tableau 3. Statistiques descriptives par type d’entreprises

Figure 2

Tableau 3. Statistiques descriptives par type d’entreprises

Annexe 3. Table de corrélation entre variables indépendantes

Tableau 4. Table de corrélation entre variables indépendantes

Figure 3

Tableau 4. Table de corrélation entre variables indépendantes

Annexe 4. Table de corrélation avec variables dépendantes

Tableau 5. Table de corrélation entre variables indépendantes et variables dépendantes

Figure 4

Tableau 5. Table de corrélation entre variables indépendantes et variables dépendantes

Annexe 5. Tests de robustesse

36Les tableaux 6 et 7 présentent des modèles alternatifs. Le tableau 6 présente des modèles avec comme variable d’intérêt une variable dichotomique d’appartenance à la défense, le tableau 7 résume les résultats avec la variable de dépendance à l’activité de défense. Les modèles R1 et R5 utilisent comme variable dépendante, le nombre de références scientifiques en ajoutant les citations de type « derwent citation » et « database citation » selon la documentation de Patstat, 2019 [5]. L’objectif est de vérifier la stabilité de nos résultats lorsque le périmètre de la variable dépendante varie. Les modèles R2 et R6 mobilisent la variable de citations scientifiques avec un retard de 2 ans pour tenir compte d’un processus d’innovation plus long. En effet, les pratiques et dynamiques de R&D ne varient pas toujours simultanément aux évolutions du contexte économique. Les modèles R3 et R7 présentent les résultats où le nombre de brevets, lnSpanf,t-1, est remplacé par le logarithme des dépenses en R&D, noté lnRDf,t-1. Enfin, dans les modèles R4 et R8 la variable de diversité technologique, HHif,t-1, est remplacée par le comptage des classes technologiques IPC uniques à l’échelle 11-digit, notée Scopf,t-1. L’ensemble de ces régressions alternatives confirme l’existence d’un effet négatif et significatif de l’appartenance et de la dépendance à la défense sur le nombre de citations scientifiques associées aux innovations technologiques. Ces différentes spécifications attestent de la robustesse de nos estimations.

Tableau 6. Dichotomie défense/civil

Figure 5

Tableau 6. Dichotomie défense/civil

avec *, **, *** notant respectivement une p-value inférieure à 10 %, 5 % et 1 %.

Tableau 7. Dépendance à la défense

Figure 6

Tableau 7. Dépendance à la défense

avec *, **, *** notant respectivement une p-value inférieure à 10 %, 5 % et 1 %.

Annexe 6. Test de robustesse avec variable de contrôle alternative

37Les tableaux 8, 9 et 10 présentent des modèles alternatifs répliquant les modèles précédant en remplaçant la variable dépendante principale, le nombre de références scientifiques dans les brevets par le ratio entre nombre de références scientifiques et nombre de familles de brevets déposées par les entreprises. Ainsi, le tableau 8 est une réplication du tableau 1, où M’1 et M’2 sont identiques à M1 et M2 avec la variable dépendante alternative, IntensiteNPLf,t. De même, les tableaux 9 et 10 sont similaires, à l’exception de la variable dépendante, aux tableaux 6 et 7. Les modèles I1 et I5 utilisent comme variable dépendante, l’intensité de références scientifiques par famille de brevets en ajoutant les citations de type « derwent citation » et « database citation » selon la documentation de Patstat2019 [6]. Les modèles I2 et I6 appliquent un retard de 2 ans pour tenir compte d’un processus d’innovation plus long. Les modèles I3 et I7 présentent les résultats où le nombre de brevets, lnSpanf,t-1, est remplacé par le logarithme des dépenses en R&D, noté lnRDf,t-1. Enfin, dans les modèles I4 et I8, la variable de diversité technologique, HHif,t-1, est remplacée par le comptage des classes technologiques IPC uniques à l’échelle 11-digit, notée Scopf,t-1.

38L’ensemble de ces estimations alternatives confirment nos résultats principaux sur l’effet de l’activité de défense sur l’intégration de connaissances scientifiques dans leurs brevets. De manière attendue, l’ensemble des variables de contrôle a un impact similaire que l’on considère le nombre de citations scientifiques ou la moyenne de citations scientifiques par brevet à l’exception de la variable de stock de brevets (lnSpanf, t-1). Alors qu’en volume, le nombre de références scientifiques dépend positivement du nombre de brevets, l’intensité des brevets en connaissances scientifiques est influencée négativement par la taille du portefeuille de brevets. Ce résultat peut s’expliquer aisément par les différences de variable expliquée entre les deux estimations, l’une en comptage et l’autre en rapport.

Tableau 8. Modèles principaux avec variable dépendante alternative

Figure 7

Tableau 8. Modèles principaux avec variable dépendante alternative

avec *, **, *** notant respectivement une p-value inférieure à 10 %, 5 % et 1 %.

Tableau 9. Test de robustesse de la dichotomie défense/civil avec variable dépendante alternative

Figure 8

Tableau 9. Test de robustesse de la dichotomie défense/civil avec variable dépendante alternative

avec *, **, *** notant respectivement une p-value inférieure à 10 %, 5 % et 1 %.

Tableau 10. Test de robustesse de la dépendance à la défense avec variable dépendante alternative

Figure 9

Tableau 10. Test de robustesse de la dépendance à la défense avec variable dépendante alternative

avec *, **, *** notant respectivement une p-value inférieure à 10 %, 5 % et 1 %.

Annexe 7. Sensibilité à l’activité des entreprises

39Le tableau 11 regroupe les résultats de nos estimations principales où la répartition industrielle des entreprises entre les secteurs de hightech, medium hightech, medium lowtech, lowtech et non manufacturiers. Cependant, ces indicateurs, issus de la classification NACE, sont construits à partir du principal marché pour l’entreprise en termes quantitatifs. Or cette classification ne correspond pas parfaitement aux pratiques de R&D au sein des entreprises. Il peut exister une déconnexion entre les travaux de R&D d’une entreprise et son marché principal, pour des raisons aussi variées que la diversification industrielle ou en fonction des dynamiques porteuses d’innovation dans certaines technologies encore inexplorées. Afin de s’assurer que nos résultats principaux ne sont pas orientés par cette classification industrielle limitée, nous mobilisons une classification alternative, issues des brevets des entreprises, la classification internationale des brevets (IPC) à 1-digit. (Gkotsis et al., 2018) montrent la pertinence de classer les entreprises à l’aide des technologies qu’elles manipulent plutôt qu’une décomposition par le marché lorsqu’il s’agit d’étudier les innovations. Nous classons les entreprises en fonction de la technologie IPC 1-digit la plus représentée dans les familles de brevets (méthode de comptage par technologie unique par famille de brevet). L’importante intensité scientifique relative du domaine A s’explique par la présence au sein de ce domaine des innovations liées aux « bio-nexus » (Branstetter et Ogura, 2005) et particulièrement intenses en connaissances scientifiques. Le signe négatif obtenu dans notre analyse principale demeure, malgré une légère perte de significativité pour le premier modèle.

Tableau 11. Test de sensibilité à l’activité industrielle

Figure 10

Tableau 11. Test de sensibilité à l’activité industrielle

avec *, **, *** notant respectivement une p-value inférieure à 10 %, 5 % et 1 %.

Annexe 8. Sensibilité au traitement des zéros

40Dans le cadre de notre analyse, nous recourons à une régression négative binomiale. Ce choix se justifie par la nature discrète de notre variable dépendante – le nombre de citations scientifiques faite dans les brevets de la firme – et par le nombre important de zéros observés (environ 30 % de l’échantillon). Un excès de zéros dans les données de citations scientifiques peut nécessiter l’utilisation d’un zero-inflated model, comme le discutent Kim et Jun (2016). Afin de prendre en compte cette structure de données, nous présentons nos résultats selon différentes spécifications (negative binomial et zero-infated negative binomial) dans le tableau 12. La comparaison de la performance des modèles est réalisée par des tests de Vuong et le critère AIC. Le modèle d’estimation alternatif nous permet ainsi de vérifier la robustesse de notre résultat au choix du modèle d’estimations, cependant, il met aussi en avant l’absence de solidité de l’effet de l’intensité de la R&D sur le nombre de citations scientifiques.

Tableau 12. Sensibilité au traitement des zéros

Figure 11

Tableau 12. Sensibilité au traitement des zéros

avec *, **, *** notant respectivement une p-value sous 10 %, 5 % et 1 %.

Notes

Français

Cet article questionne le processus d’innovation des entreprises de défense sous l’angle spécifique de l’intégration de connaissances scientifiques. Alors que les analyses de la contribution de la science à l’innovation technologique se concentrent majoritairement sur les industries des biotechnologies, de la pharmacie et des semi-conducteurs, notre article propose une approche originale en traitant des entreprises participant au marché de défense. En mobilisant les données de brevets de non-patent literature de 1 722 entreprises innovantes entre 2010 et 2016, cet article montre que l’activité de défense influence négativement l’intégration de connaissances scientifiques dans les innovations technologiques des entreprises.
Classification JEL : L64, 033, L16.

  • brevet
  • entreprise de défense
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Cécile Fauconnet
Institut de Recherche Stratégique de l’École Militaire (IRSEM)
Cette publication est la plus récente de l'auteur sur Cairn.info.
Mis en ligne sur Cairn.info le 10/01/2022
https://doi.org/10.4000/rei.10714
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