CAIRN.INFO : Matières à réflexion

Filiation – Adoption – Droit international privé allemand

1Propositions du Comité allemand de droit international privé pour une réforme des articles 19-20, 22 et 23 EGBGB*

2La première Commission du Comité allemand de droit international privé (Deutscher Rat für Internationales Privatrecht) a discuté, à l’occasion de leur réunion des 21 et 22 novembre 2014 à Würzburg, sur la base d’un exposé de Kurt Siehr sur le droit international privé de la filiation [1] et d’un exposé de Tobias Helms sur le droit international privé de l’adoption [2], la réforme des Art. 19–20, 22 et 23 de l’introduction au code civil allemand (EGBGB). Un accent particulier a été mis sur les questions de droit international privé de la maternité de substitution. Se fondant sur les réflexions des deux orateurs, la première Commission a adopté la proposition législative suivante :

3Art. 19 EGBGB-E

4(1) L’établissement de la filiation d’un enfant par effet de la loi est régi par la loi de l’État dans lequel l’enfant a sa résidence habituelle au moment de sa naissance [3].

5(2) La reconnaissance d’un enfant par un parent est régie,

61. soit par la loi de l’État dans lequel l’enfant a ou avait sa résidence habituelle au moment de la naissance ou de la reconnaissance,

72. soit par la loi de l’État dans lequel le parent reconnaissant a sa résidence habituelle au moment de la reconnaissance,

83. soit par la loi de l’État dont le parent reconnaissant a la nationalité au moment de la reconnaissance.

9La reconnaissance est valable lorsqu’elle remplit les formes exigées soit par l’une des lois visées par l’alinéa 1, soit par la loi de l’État dans lequel elle est effectuée.

10(3) La constatation judiciaire de la parenté est régie

111. soit par la loi de l’État dans lequel l’enfant avait sa résidence habituelle au moment de sa naissance ou dans lequel l’enfant a ou avait sa résidence habituelle au moment de l’introduction de l’instance,

122. soit par la loi de l’État dans lequel la partie demanderesse a sa résidence habituelle au moment de l’introduction de l’instance,

133. soit par la loi de l’État dont la partie demanderesse a la nationalité au moment de l’introduction de l’instance.

14(4) Si plusieurs liens de filiation existent qui se contredisent, seul le lien de filiation établi en premier est déterminant. En cas de liens de filiation établis simultanément, la loi visée par l’alinéa 1 désigne quel lien de filiation est déterminant.

15(5) La filiation légale d’une personne avec plusieurs personnes dont aucune n’est son parent biologique est régie par les dispositions applicables à l’adoption.

16Art. 20 EGBGB-E

17L’action en désaveu de la filiation par effet de la loi ou de la reconnaissance peut être exercée conformément à chaque loi visée par l’article 19, alinéa 1 ou alinéa 2. L’enfant peut de plus contester la paternité selon la loi de l’État dont il a la nationalité au moment de l’introduction de l’instance.

18Art. 22 EGBGB-E Adoption

19(1) Le droit allemand s’applique aux

201. conditions d’une adoption à prononcer en Allemagne,

212. effets d’une adoption prononcée en Allemagne concernant le lien de parenté de l’adopté avec l’adoptant ainsi qu’avec les personnes avec lesquelles l’adopté a un lien de filiation.

22(2) Au surplus, la validité d’une adoption est régie par la loi de l’État dans lequel l’adopté a sa résidence habituelle au moment de l’adoption, pour autant que l’adoption ne repose pas sur une décision étrangère. Les effets sont soumis au droit en vertu duquel l’adoption a été prononcée [4]

23(3) L’annulation de l’adoption est régie par la loi de l’État en vertu de laquelle elle a été prononcée. Par dérogation, le droit allemand s’applique dans la mesure où l’intérêt de l’adopté l’exige.

24(4) Nonobstant la loi visée par les alinéas précédents, la position de l’adopté, au regard de la succession de l’adoptant, de son conjoint, son concubin ou d’une personne apparentée, est équivalente à la position d’un enfant adopté selon le droit matériel allemand, si le défunt l’a ordonné sous la forme d’une disposition à cause de mort et si la succession est régie par la loi allemande. La même solution s’applique lorsque l’adoption repose sur une décision étrangère. Les phrases 1 et 2 du présent alinéa ne s’appliquent pas lorsque l’adopté a atteint l’âge de 18 ans au moment de l’adoption.[5]

25Art. 23 EGBGB (sera supprimé)

26§ 101 FamFG[6] (inchangé)

27§ 1746 al. 1 phrase 4 BGB [7] (sera supprimé)

Gestation pour autrui

28Réponse du ministre (JO déb. Sénat, 3 déc. 2015, p. 3213)

2916464 – 28 mai 2015 – M. Michel Vaspart attire l’attention de M. le ministre des Affaires étrangères et du Développement international sur la gestation pour autrui (GPA) qui, interdite en France, peut être réalisée par des couples à l’étranger. Dans un entretien au journal La Croix, daté du 2 octobre 2013, répondant à une question sur les moyens de lutter contre la gestation pour autrui, le Premier ministre avait précisé que « la France entend promouvoir une initiative internationale qui pourrait aboutir, par exemple, à ce que les pays qui autorisent la GPA n’accordent par le bénéfice de ce mode de procréation aux ressortissants des pays qui l’interdisent. À la demande du président de la République (…) le ministre des Affaires étrangères prendra dans les semaines qui viennent des initiatives pour trouver le cadre approprié. C’est une action à long terme ».

30Il souhaiterait savoir quel cours ont suivi ces pourparlers depuis octobre 2014.

31Réponse – La gestation pour autrui (GPA) reste prohibée sur le territoire français. Les décisions de la Cour de cassation du 3 juillet dernier n’ont pas remis en cause cet interdit auquel le gouvernement est fortement attaché. La prohibition de la GPA par notre droit ne doit cependant pas aller à l’encontre de l’intérêt supérieur des enfants vivant sur notre territoire. C’est le sens des arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme ayant condamné la France, le 26 juin 2014. À la suite de ces arrêts, la priorité est allée à l’adoption des mesures individuelles demandées par la cour, à savoir le versement des dommages et intérêts alloués aux enfants concernés ainsi que la délivrance de certificats de nationalité aux enfants. Notre approche a consisté à reconnaître à ces arrêts une portée conciliant le strict respect des engagements internationaux de notre pays (articles 8 et 46 de la convention européenne des droits de l’homme, article 3 § 1 de la convention internationale sur les droits de l’enfant) et le maintien du principe d’ordre public de la prohibition des conventions portant sur la procréation ou gestation pour le compte d’autrui.

32Dans le même temps, et alors qu’une initiative isolée n’aurait eu que peu de chance d’aboutir, le gouvernement a consulté plusieurs États européens placés dans une situation comparable à celle de la France. Il leur a été proposé une démarche conjointe visant notamment à sensibiliser les autorités ouvrant le droit à la GPA à des étrangers aux difficultés juridiques, humaines et éthiques engendrées par cette pratique. L’objectif était de convaincre ces autorités de la nécessité de ne plus accorder le bénéfice de ce mode de procréation à nos ressortissants respectifs. Cependant les différences existant à ce stade avec nos partenaires européens concernant tant le cadre juridique que l’importance prise dans le débat public local par les questions liées à la GPA rendent difficile, à court terme, une approche commune, qui plus est dans un contexte international évolutif sur cette question.

33La concertation va se poursuivre dans le cadre du suivi des travaux conduits au niveau multilatéral, au sein de la conférence de La Haye, seule enceinte compétente pour les questions de droit international privé relatives à la famille. Les représentants du ministère de la Justice veillent, dans ce cadre, à ce que les positions françaises soient défendues, que nos engagements internationaux soient respectés et qu’en particulier, l’intérêt des enfants soit préservé.

Notes

  • [1]
    Communiquées par le Professeur Dr. Heinz-Peter Mansel (Köln), Président du Comité allemand et de la première Commission. Publié dans StAZ 2015, 258 ff.
  • [2]
    Publié dans StAZ 2015, 97 ff.
  • [3]
    Cette disposition ne tranche pas la question de la portée de la désignation qu’elle opère, c’est-à-dire la question de savoir si cette désignation embrasse l’ordre juridique dans son ensemble y compris son droit international privé (Gesamtnormverweisung, autorisant le renvoi) ou se limite à ses règles de droit matériel (Sachnormverweisung, exclusif du renvoi).
  • [4]
    Cette disposition ne tranche pas la question de la portée de la désignation qu’elle opère, c’est-à-dire la question de savoir si cette désignation embrasse l’ordre juridique dans son ensemble y compris son droit international privé (Gesamtnormverweisung, autorisant le renvoi) ou se limite à ses règles de droit matériel (Sachnormverweisung, exclusif du renvoi).
  • [5]
    Art. 22 al. 4 EGBGB-E correspond au contenu de l’art. 22 al. 3 EGBGB en vigueur.
  • [6]
    Loi relative à la procédure en matière familiale et dans les affaires de juridiction gracieuse.
  • [7]
    Code civil allemand.
Mis en ligne sur Cairn.info le 07/06/2020
https://doi.org/10.3917/rcdip.161.0216
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