CAIRN.INFO : Matières à réflexion

I. – Le contexte

11. Depuis l’adoption de la Loi sur le mariage civil[1] au Canada en 2005, de nombreux mariages gais ont été célébrés dans une des provinces canadiennes entre des futurs époux dont l’un ou l’autre, ou même les deux, avait son domicile dans un État où de tels mariages sont nuls ou annulables. Pourtant, la loi québécoise [2], comme celle de la majorité des systèmes juridiques [3], fait de la condition concernant la différence de sexes une condition de fond du mariage qui relève dans certains États de la loi nationale et dans d’autres États, du domicile de chacun des futurs époux, consacrant l’application distributive de la loi personnelle de chaque futur époux.

22. Quelques précisions sur la répartition constitutionnelle des pouvoirs entre les gouvernements fédéral et provincial au Canada en matière de mariage et de divorce selon la loi constitutionnelle canadienne de 1867 [4] s’imposent. Conformément au paragraphe 91 (26) de la dite loi, le gouvernement fédéral est l’autorité législative compétente en ce qui concerne « le mariage et le divorce ». Cependant, selon le paragraphe 92 (12) de cette loi, les provinces sont les autorités législatives compétentes concernant « la célébration du mariage dans la province ». En vertu de la théorie générale du partage des compétences, le fait que le parlement du Canada s’abstienne de légiférer dans la totalité de ses pouvoirs ne saurait avoir pour effet de transférer à une législature provinciale la compétence législative attribuée au gouvernement fédéral. Néanmoins, les lois adoptées par les législatures provinciales peuvent compléter les textes fédéraux silencieux sur un aspect qui relèverait des conditions de fond sur le mariage et qui s’avèrerait essentiel à leur application. Il s’agit de la doctrine du champ non complètement occupé. Ainsi, puisque la loi fédérale sur le mariage civil de 2005 [5] ne précisait pas son champ d’application international et ne prévoyait pas de règle de conflits sur les conditions de fond du mariage, le droit privé supplétif en vigueur dans la province s’appliquait à titre supplétif ; en l’occurrence la règle de conflit sur les conditions de fond du mariage.

33. Nonobstant les avis et les avertissements qui ont été émis par la doctrine à travers les articles et dans les conférences après l’adoption de la loi de 2005 [6], aucune initiative que ce soit par le biais de la législation, par les directives données aux célébrants, ou autrement, n’a été donnée par les autorités provinciales ou fédérales. Pourtant les mariages entre des personnes de même sexe célébrés au Canada nuls ou annulables selon la loi de leur domicile commun ou du domicile de l’une d’entre elles, ne sont pas valides au Canada selon les règles de conflits provinciales.

44. Enfin, le problème de la validité de ces mariages au Canada a été finalement porté à l’attention d’un tribunal canadien lorsqu’un couple non-résident de lesbiennes marié au Canada a tenté d’obtenir le divorce au Canada en 2012 étant donné que ni l’une ni l’autre des épouses ne pouvait obtenir un divorce dans l’État de leur domicile ou de leur résidence. Les deux femmes ont donc présenté une demande conjointe de divorce au Canada devant le tribunal de l’Ontario, la Province où leur mariage a été célébré. La demande a été contestée par le procureur général du Canada parce qu’elles n’avaient pas la capacité de se marier selon les règles du droit international privé en vigueur au Canada, et de toute façon, aucune des épouses n’a résidé au Canada pendant au moins un an avant la demande de divorce, tel que requis par la Loi sur le divorce[7]. Par conséquent, le tribunal de l’Ontario n’avait pas de compétence pour ordonner un divorce [8].

5Sous le poids des pressions exercées [9], le gouvernement fédéral a décidé d’écarter la solution existante, tant pour les mariages futurs que pour ceux ayant déjà été célébrés dans des circonstances spécifiques, par l’adoption de la Loi sur le mariage civil des non-résidents[10].

6De toute évidence, le parlement canadien avait effectivement la compétence législative pour adopter la règle de conflit sur la validité des conditions de fond du mariage ainsi que la compétence en matière de divorce.

II. – Les grandes lignes de la loi

A. – Les conditions du fond du mariage

75. Selon le premier paragraphe de l’article 5 de la loi, « un mariage célébré au Canada qui serait valide au Canada si les époux y avaient leur domicile est valide pour l’application du droit canadien, même si les époux ou l’un d’eux n’ont pas, au moment de leur mariage, la capacité de le contracter en vertu de la loi de leur domicile respectif ». Même si ce paragraphe 1 de l’article 5 rend inapplicable toute interdiction fondée sur le sexe des époux qui serait imposée par la loi de leur domicile, l’utilisation de l’expression « capacité » inclut d’autres conditions de fond dans les mariages entre des personnes de même sexe ou de sexes différents, notamment l’interdiction des mariages imposés par la religion ou entre personnes ayant des liens familiaux trop proches. Par conséquent, sur le plan des conditions de fond du mariage, la loi traite les époux de même sexe ou de sexes différents domiciliés à l’étranger au moment de leur mariage comme des époux canadiens de même sexe ou de sexes différents qui se marient au Canada.

86. Selon le second paragraphe de l’article 5, le paragraphe 1 de l’article 5 s’applique rétroactivement à tout mariage qui aurait déjà été célébré au Canada avant l’entrée en vigueur de ladite loi et « qui aurait été valide en vertu du droit applicable dans la province où il a été célébré n’eut été l’absence de capacité des époux ou de l’un d’eux de le contracter en vertu du droit de l’État de leur domicile respectif ».

97. L’article 5 ajoute le paragraphe 3 qui vise les ordonnances annulant le mariage ou accordant le divorce, qui ont déjà été rendues au Canada ou à l’étranger. En vertu de ce troisième paragraphe, ces ordonnances seront réputées avoir dissous le mariage pour l’application du droit canadien, et ce, à compter de la date de leur prise d’effet. Si le mariage célébré au Canada avant l’entrée en vigueur de la loi a été déclaré nul par un tribunal canadien ou par un tribunal étranger, le mariage est alors dissous selon le droit canadien. Conséquemment, lorsqu’elle est prononcée par un tribunal étranger, la décision est reconnue de plein droit, quelles que soient les règles prévues sur la reconnaissance des jugements annulant le mariage ou les divorces.

B. – Le divorce

108. Ayant validé des mariages au Canada de couples de même sexe ou de sexes différents, lesquels sont prohibés en vertu de la loi de leur domicile, la loi prévoit à l’article 7 un régime de dissolution desdits mariages qui est différent de celui applicable aux époux de même sexe ou de sexes différents régi par la Loi sur le divorce [11]. Il est évident que le but de cette disposition est de permettre aux époux divorcés de mettre fin à leur mariage lorsqu’ils ne pourront pas obtenir un divorce selon la loi de l’État où ils résident (parce que le mariage n’est pas valide selon leur droit interne et leur droit international privé).

11Il est donc expressément prévu à l’article 8 que la Loi sur le divorce ne s’applique pas au divorce accordé en application de la présente loi. Ainsi, il y a des différences significatives dans le cas des divorces canadiens des époux qui ne sont pas visés par la loi et ceux qui sont visés par la Loi sur le mariage civil des non-résidents. Les principales différences entre les deux régimes sont liées aux critères de l’exercice de compétence par les tribunaux canadiens, aux motifs qui sous-tendent le divorce, ainsi qu’à l’impossibilité d’obtenir des mesures accessoires (aliments, garde, etc.) [12].

12Selon l’article 3 (1) de la Loi sur le divorce[13], le tribunal d’une province canadienne a compétence pour prononcer le divorce d’un mariage si l’un des époux possède sa résidence habituelle pendant au moins un an dans cette province avant la présentation de la demande. Cependant, selon le paragraphe 1 de article 7 de la Loi sur le mariage civil de non-résidents, le tribunal de la province où les époux se sont mariés peut prononcer un divorce des époux de même sexe ou de sexes différents, lorsque au moment de la demande, aucun des époux ne réside au Canada et si, pendant au moins un an avant la présentation de la demande, chacun réside [14] dans un État où le divorce ne peut être accordé parce que la validité du mariage n’y est pas reconnue [15]. Conformément à la Loi sur le divorce, les tribunaux canadiens ne vont pas exercer leur compétence pour prononcer le divorce si l’un des époux réside dans un État où le divorce peut être obtenu, ou si l’un des époux réside au Canada. Dans ce dernier cas, on applique la Loi sur le divorce. Lorsqu’un époux demande le divorce, selon le paragraphe 2 de l’article 7, il doit obtenir le consentement de l’autre ou encore une ordonnance du tribunal de l’État où l’un d’eux réside qui expose la raison pour laquelle un tel consentement n’a pu être obtenu.

139. À l’opposé de ce qui est prévu dans la Loi sur le divorce, le seul motif qui autoriserait le divorce selon paragraphe 1 de l’article 7 de la Loi sur le mariage civil des non-résidents est un échec du mariage, tel qu’il serait établi par la cessation de la vie commune des époux pendant au moins un an avant la présentation de la demande.

1410. Contrairement à la Loi sur le divorce, en vertu de laquelle un divorce canadien produit ses effets trente jours après qu’il soit accordé, la Loi sur le mariage civil des non-résidents, elle, dispose que le divorce prend effet à la date où le jugement qui l’accorde est prononcé [art. 9(1)].

1511. La loi en question ne prévoit pas la possibilité pour un époux d’obtenir du tribunal canadien saisi une ordonnance sur la garde de l’enfant ou des aliments pour l’enfant et l’ex-conjoint. Cependant un projet de loi (projet de loi C-435) visant la modification de l’article 8 de la loi a été introduit le 15 juin 2012, prévoyant, pour les époux divorcés selon l’article 7 de la loi, que le tribunal du divorce de la province où les époux se sont mariés peut, sur demande, rendre une ordonnance relative à la garde des enfants ou une ordonnance alimentaire au profit d’un enfant ou d’un époux si les tribunaux de l’État ou des États où habitent les ex-époux refusent de rendre une telle ordonnance [16].

III. – Quelques observations

A. – Les mesures accessoires : demande d’aliments, de garde d’enfants, de partage des biens des époux divorcés au Canada en vertu de la loi

1612. En vertu du droit constitutionnel canadien, et plus particulièrement de la doctrine du champ non-occupé, ce sont les règles de compétence des tribunaux de la province dans laquelle le mariage a été célébré qu’il faut examiner. Suivant le droit québécois, un tribunal du Québec n’aura pas, en principe, la compétence juridictionnelle pour ordonner la garde des enfants domiciliés en dehors de la province (art. 3142 C. c. Q.), ni même pour ordonner le paiement des aliments si aucun des époux divorcés n’est domicilié ou ne réside au Québec au moment de l’introduction de la demande (art. 3144 C. c. Q.), ni encore pour ordonner un partage des biens (art. 3145 et 3154 C. c. Q.).

17Toutefois, si, selon la loi de l’État de la résidence ou du domicile de l’enfant ou de l’un des époux divorcés, les tribunaux ne prenaient compétence, notamment parce que le mariage entre les personnes de même sexe est interdit, un tribunal québécois pourrait alors décider d’exercer sa compétence conformément à l’article 3136 du Code civil du Québec, afin d’éviter un déni de justice, ou, s’il s’agit d’une demande urgente de protection d’une partie ou de ses biens au Québec, conformément à l’article 3140 du Code civil du Québec. Dans la mesure où un tribunal québécois déciderait d’exercer sa compétence pour ces mesures accessoires, il est possible que la loi étrangère soit écartée au nom de l’ordre public, étant donné la discrimination des époux de sexes différents divorcés au Canada [17]. Évidemment, si le projet de loi n° C-435 est adoptée selon paragraphe 1 de l’article 8, précité, des mesures accessoires selon le droit du divorce pourraient être accordées, Enfin, il n’est pas évident qu’un jugement québécois, quant à ses mesures accessoires et incidentes, ne soit pas reconnu au lieu du domicile ou de la résidence des époux divorcés.

B. – La séparation de corps judiciaire

1813. La séparation de corps relève du domaine provincial au Canada. Le lieu de la célébration du mariage au Canada n’est pas un critère conférant la compétence des tribunaux québécois (art. 3143 C. c. Q.) à moins que l’article 3136 Code civil du Québec ne soit invoqué, advenant qu’il soit impossible d’obtenir une séparation à l’étranger en raison de non reconnaissance du mariage.

C. – La rétroactivité

1914. Eu égard au droit international privé canadien et québécois, l’effet de l’application rétroactive des mariages célébrés au Canada avant l’entrée en vigueur de la loi sur le mariage civil en vertu de l’article 5 (2), est de valider rétroactivement certains actes posés au moment où leur mariage était considéré nul ou annulable selon le droit canadien, tel un testament en faveur du conjoint survivant.

D. – La loi va créer des mariages et des divorces boiteux

20a) Reconnaissance à l’étranger d’un mariage célébré au Québec entre personnes de même sexe non domiciliés et non-résidents au Québec ou d’un divorce canadien dudit mariage

2115. Si la loi du domicile ou de résidence ne reconnait pas la validité des mariages gais en droit interne et en droit international privé, le mariage célébré au Canada ne sera pas reconnu, sans égard à l’application de Loi sur le mariage civil[18]. Dans ce cas, il n’y aura aucune utilité à obtenir un divorce. Toutefois, si le mariage est reconnu dans cet État ou dans un autre État, il se peut que des conditions pour obtenir un divorce n’existent pas. Dans cette éventualité, il est probable que le divorce canadien fondé sur le seul critère du lieu de célébration du mariage n’y sera pas reconnu.

22b) Mariage de personnes de même sexe célébré à l’étranger en violation de la loi applicable selon l’article 3088 alinéa 1 Code civil du Québec : reconnaissance au Québec ?

2316. Par exemple si le mariage gai a été validement célébré en France entre un citoyen français, domicilié en France et un citoyen américain, domicilié au Texas, ledit mariage est valide selon le droit français, mais non selon la loi du Texas. Le cas échéant, la validité dudit mariage sera apprécié par le juge québécois qui en déterminera sa validité en fonction des règles de conflit régissant les conditions de forme et de fond. Essentiellement, le paragraphe 1 de l’article 5 constitue une exception à la règle prévue par l’article 3088 alinéa 1 du Code civil du Québec. Dès lors, les conditions de fond de mariage des époux qui se sont mariés à l’étranger et non pas au Canada sont régies par la loi de leur domicile [19]. Si la lex causae interdit leur mariage, s’il y a des liens suffisamment étroits avec le Canada, il est probable, suite à l’adoption de la nouvelle loi, que cette solution soit écartée au nom de l’ordre public [20].

24c) Mariage au Québec des personnes de même sexe résidentes et domiciliées au Québec au moment du mariage, mais qui ont établi ensuite leur domicile à l’étranger ou y ont acquis des biens : reconnaissance à l’étranger où un tel mariage est interdit.

25Cette situation n’est pas prévue par la loi. Tout dépendrait du droit étranger. S’il demeure invalide, par exemple aux États Unis où la DOMA [21] s’applique, il s’agit d’un autre cas de mariage boiteux.

IV. – Conclusion

26On peut se demander si l’adoption d’une telle loi en ce qui a trait aux non-résident était réellement nécessaire, étant donné la tendance grandissante des autorités à permettre le mariage entre les personnes de même sexe. Ces dispositions devraient être lettre morte d’ici les dix prochaines années.

27Il est difficile de justifier un régime qui s’avèrerait plus favorable pour les époux de même sexe ou de sexes différents non-résidents, que celui applicable aux personnes de même sexe ou de sexes différents qui résident au Canada. La Loi sur le divorce aurait dû être l’unique loi applicable aux divorces au Canada.

28Je questionne sérieusement cette discrimination et distinction entre la Loi sur le divorce et la Loi sur le mariage civil s’agissant des nonrésidants dans : (i) le traitement des mariages des résidents et nonrésidents au sujet de la compétence pour le divorce, (ii) les effets immédiats du divorce (art. 9), (iii) les motifs de divorce [art. 7(1)a)], (iv) la demande conjointe ou l’ordonnance du tribunal selon l’article 7 (2), et (v) la résidence de chacun des époux pendant un an dans un État où le divorce ne peut être accordé parce que le mariage n’y est pas reconnu (ce qui permet à un époux d’éviter une demande de divorce en changeant sa résidence dans l’année).

29La solution retenue par le législateur canadien, qui, par le fait même, crée une exception à la règle générale, et qui est limitée aux mariages célébrés au Canada, laisse beaucoup à désirer. D’autres options étaient aussi possibles si le besoin était vraiment présent, comme celle suggérée par le soussigné d’adopter une règle de conflit alternative favorisant le mariage. La proposition visant la reconnaissance de la validité des mariages entre les personnes de même sexe lorsqu’ils sont valides selon la loi de la résidence habituelle ou du domicile ou de la nationalité de l’un des futurs époux [22] serait une règle qui respecterait dans une certaine mesure la proximité.

30La solution de la nouvelle loi française va dans ce sens : selon l’alinéa 2 de l’article 202-1 du Code civil, deux personnes de même sexe peuvent contracter un mariage lorsque, pour au moins l’une d’entre elles, soit la loi personnelle, soit la loi de son domicile ou de sa résidence, le permettrait. Sans aucun doute, l’accroissement de la possibilité qu’un tel mariage puisse être contracté en présence de l’interdiction de la loi personnelle de l’un des époux, selon la nouvelle loi française [23], tout comme selon la nouvelle loi canadienne, multiplie les mariages boiteux qui ne seront pas reconnus dans l’État régissant les conditions de fond du mariage, tout comme les divorces canadiens en vertu de la nouvelle loi canadienne.

Notes

  • (1)
    L. C. 2005, c. 33. Elle a été sanctionnée le 20 juillet 2005. Selon l’article 4, « il est entendu que le mariage n’est pas nul ou annulable du seul fait que les époux sont du même sexe ».
  • (2)
    L’alinéa 1 de l’article 3088 C. c. Q. prévoit : « Le mariage est régi, quant à ses conditions de fond, par la loi applicable à l’état de chacun des futurs époux » ; V. Jeffrey Talpis, Same-sex canadian marriages are not necessarily recognized abroad, The Lawyers Weekly, p. 351, 22 sept. 2006, en ligne : http://www.lawyersweekly.ca ; Jeffrey Talpis, Quelques développements récents en droit des successions internationales suscitant certains débats ou soulevant quelques incertitudes, SFPBQ, vol. 353, Développements récents en successions et Fiducies, (2012), Cowansville, Éditions Yvon Blais, p. 10 ; v. aussi, Gérald Goldstein, Droit international privé. Conflits de lois : dispositions générales et spécifiques, in Commentaires sur le Code civil du Québec, vol. 1, Éd. Yvon Blais, 2011, p. 140-145.
  • (3)
    La même solution existe selon le droit international privé des provinces et territoires canadiens. V. Castel et Walker, Canadian Conflict of Laws, 6e éd., vol. 2, Markham, LexisNexis Butterworths, 2005, par Walker, chap. 16, § 16.4-16.5. En droit anglais, v. Wilkinson c/ Kitzinger, (2006) EWHC 2022, où le mariage des épouses lesbiennes domiciliées en Angleterre célébré dans la province canadienne de la Colombie-Britannique a été déclaré nul, car la question relève de la loi du domicile. Cependant dans certains pays, il y a des atténuations et des dérogations : selon l’article 46 de la loi belge du 16 juillet 2004, tout en soumettant les conditions de fond du mariage à la loi nationale des futurs époux, le droit belge déclare d’office écarter toute loi étrangère interdisant le mariage homosexuel si la loi nationale de l’un des futurs époux a la nationalité d’un État ou a sa résidence habituelle sur le territoire d’un État dont le droit permet un tel mariage. En Espagne, à la suite de l’adoption de la loi du 1er juillet 2005 qui introduit le mariage gai, un circulaire du 29 juillet 2005 autorise le mariage entre des personnes de même sexe, quelle que soit la loi de leur nationalité, et ce, au nom de l’ordre public. Enfin, selon la nouvelle loi française, la consécration de la règle jurisprudentielle de l’application distributive de la loi personnelle de chaque époux se trouve écartée dans le deuxième alinéa de l’article 202-1 de la loi numéro 2013-404 du 17 mai 2013 : « Toutefois deux personnes de même sexe peuvent contracter mariage lorsque, pour au moins l’une d’elles, soit la loi personnelle, soit la loi de l’État sur le territoire duquel elle a son domicile ou sa résidence le permet ») ; v. aussi : Petra Hammje, « Mariage pour tous » en droit international privé, Rev. crit. DIP 2013. 773 ; Mariel Revillard, Le mariage entre personnes de même sexe en droit international privé, Defrénois 2013. 743-749. Pour d’autres commentaires de la loi française du 17 mai, 2013, v. S. Godechot-Patris, La loi n° 2013-404 du 17 mai, 2013 ouvrant le mariage aux couples de même sexe : perspectives de droit international privé, D. 2013. Chron. 1756 ; H. Fulchiron, Le mariage entre personnes de même sexe en droit international privé au lendemain de la reconnaissance du mariage pour tous, JDI 2013.1055.
  • (4)
    30 et31 Vict. c. 3 (U.K.).
  • (5)
    Loi sur le mariage civil, préc., note 1.
  • (6)
    Ibid.
  • (7)
    L.R.C. 1985, c. 3, art. 2(1) et 3(1).
  • (8)
    M. (V.) &W. (L.), (17 juin 2011), Doc.FS-11-367893 (Ont.S.C.J) ; v. Jean-Gabriel Castel et Matthew E. Castel, The Marriage and Divorce in Canada of Non-Domiciled and Non-Resident Persons, (2012) 31 Can. Fam. Law Q. 297, 298.
  • (9)
    Cristin Schmitz, Feds fading in face of furor, The Lawyers Weekly, 27 janv. 2012, en ligne : http://www.lawyersweekly.ca/index ; Brenda Cossman, The Canadian Non-Resident Marriage Controversy, Mark S. Bonhm Center for Sexual Diversity Studies, Université de Toronto, 17 janv. 2012, en ligne : storm.uc.utoronto.ca/content/view/1202/2666/ ; Georgialee Lang, Media Misunderstands Same Sex-Divorce Issue , 14 janv. 2012, en ligne : http://lawdiva.wordpress.com/2012/01/14/media-misunderstands-same-sexdivorce-issue/ ; Same Sex divorce case legally straightforward, politically exploited, Double Hearsay LLP, 12 janv. 2012, en ligne : http://www.doublehearsay.com/2012/same-sexdivorce-case-legally-straightforward-politically-exploited-95 ; Kirk Makin, Despite legal about face, Harper has no intention of reopening gay marriage, The Globe and Mail, 12 janv. 2012, en ligne : http://www.theglobeandmail.com/news/politics/despite-legalabout-face-harper-has-no-intention-of-reopening-same-sex-marriage/article1358276/.
  • (10)
    En vigueur le 26 juin 2013. À partir du 14 août 2013, les dispositions de la loi sont intégrées dans la loi sur le mariage civil, V. infra, p. 460.
  • (11)
    Loi sur le divorce, préc., note 7, art. 2(1) et 3(1).
  • (12)
    J. G. Castel et M. E. Castel, préc., note 8, 301.
  • (13)
    Loi sur le divorce, préc., note 7, art. 3(1).
  • (14)
    Contrairement à la Loi sur le divorce, qui utilise la résidence habituelle.
  • (15)
    Le paragraphe (b) de l’article 2320 du Code de la Famille de la Californie a adopté cette solution : « (b) (1) A judgment for dissolution, nullity, or legal separationof a marriage between persons of the same sex may be entered, even ifneither spouse is a resident of, or maintains a domicile in, this state at the time the proceedings are filed, if the following apply :(A) The marriage was entered in California. (B) Neither party to the marriage resides in a jurisdiction that will dissolve the marriage. If the jurisdiction does not recognize the marriage, there shall be a rebuttable presumption that the jurisdiction will not dissolve the marriage ».
  • (16)
    Loi modifiant la Loi sur le mariage civil (divorce et mesures accessoires), projet de loi n° C-435 (dépôt et 1re lecture, 15 juin 2012), 1re sess., 41e légis. (Can.), art. 8(1) – qui n’est toujours pas en vigueur.
  • (17)
    Quoi qu’il en soit, quant à l’obligation alimentaire entre les époux divorcés, la référence à la loi qui est applicable au divorce selon l’article 3096 C. c. Q. écarte tout droit aux aliments.
  • (18)
    V. J.-G. Castel et M. E. Castel, préc., note 8, p. 306.
  • (19)
    J.-G. Castel et M. E. Castel, préc. note 8, p. 300. L’approche visant à créer une exception à la règle distributive des conditions de fond du mariage a été aussi retenue par la nouvelle loi française.
  • (20)
    V. Jeffrey Talpis, L’accommodement raisonnable en droit international privé québécois, 7e Conférence Roger Comtois (2008), Chaire du notariat, Université de Montréal, Éditions Thémis, 2009, p. 7-10 ; J. Talpis, préc., note 2, p. 7-11 ; G. Goldstein, préc., note 2, p. 141.
  • (21)
    Defense of Marriage Act, 1 U.S.C. § 7 (1996).
  • (22)
    V. J. Talpis, Same-sex canadian marriages are not necessarily recognized abroad, préc., note 2 ; J.-G. Castel et M. E. Castel, préc., note 8, p. 307, qui préféreraient soumettre la validité des mariages quant à la forme et quant au fond à la loi du lieu de leur célébration. Une autre solution allant dans le même sens consisterait en une modification de l’article 4 de la Loi sur le mariage civil. « Il est entendu que le mariage n’est pas nul ou annulable du seul fait que les époux soient du même sexe, nonobstant toute loi contraire ».
  • (23)
    V. P. Hammje, préc. note 3 ; M. Revillard, préc. note 3.
Jeffrey A. Talpis
Professeur titulaire à la Faculté de droit de l’Université de Montréal
Cette publication est la plus récente de l'auteur sur Cairn.info.
Mis en ligne sur Cairn.info le 07/06/2020
https://doi.org/10.3917/rcdip.142.0291
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