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On connaît l’« argument du singe » souvent avancé dans les débats autour de la théorie de l’évolution. La probabilité pour qu’un singe, tapant sur le clavier d’une machine à écrire, produise un vers de Shakespeare est infiniment faible, – mais non nulle ; la probabilité pour que soit ainsi produite toute une pièce, et a fortiori toute l’œuvre, de Shakespeare, est encore infiniment plus faible – mais toujours non nulle. D’où l’on conclut, par analogie, que le « texte de la Création » a une probabilité très faible, mais non nulle, d’être produit par n’importe quel animal ignorant, sans qu’intervienne aucun « ingénieur » ou « architecte ». Conclusion : Dieu n’est pas nécessaire dans cette affaire ; il peut être remplacé par un singe.
Cette analogie alphabétique est antérieure à la théorie de l’évolution ; elle a déjà servi au xviiie siècle dans le débat entre théologie naturelle et épicurisme physique. La question « Produira-t-on jamais L’Iliade simplement en jetant des lettres ? » permettait alors de se demander si le spectacle de l’ordre de la nature est un indice suffisant de l’existence d’une cause intelligente ou si ce même ordre ne pourrait pas être produit par le simple hasard aveugle. S’opposaient ainsi deux arguments ; d’un côté, l’argument providentialiste du « dessein » (argument from design, dans la littérature de langue anglaise), selon lequel du design (qui en anglais signifie dessein, mais aussi ordre selon un certain plan) ainsi constaté, on peut (et doit) remonter à l’existence d’u…
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- Mis en ligne sur Cairn.info le 25/02/2012
- https://doi.org/10.3917/criti.709.0516
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