CAIRN.INFO : Matières à réflexion

INTRODUCTION

1 Depuis 1993, la Belgique est officiellement un État fédéral. Plus qu’un aboutissement, c’est une étape dans un processus dont le début remonte à 1970, qui s’est poursuivi au rythme d’une réforme tous les huit à dix ans grosso modo et qui est toujours en cours [1]. Dans cette évolution de plus de quarante ans, le vote de la loi spéciale du 16 janvier 1989 relative au financement des communautés et des régions (ci-après LSF) [2] marque assurément un tournant [3]. Depuis lors en effet, et aujourd’hui plus que jamais, c’est le mécanisme de financement qui constitue l’objet essentiel et, le cas échéant, la pierre d’achoppement de toute négociation entre francophones et néerlandophones. À bien y réfléchir, ce n’est pas étonnant puisque l’efficacité avec laquelle une nouvelle politique peut être mise en œuvre au niveau régional ou communautaire dépend évidemment des moyens que l’institution concernée pourra y consacrer.

2 Si le financement des entités fédérées peut être organisé de multiples façons, le débat porte presque inévitablement sur la conciliation entre quatre objectifs qui forment ce qu’il est désormais convenu d’appeler le « carré magique » : l’autonomie, la responsabilité (ou responsabilisation), la concurrence fiscale et la solidarité. Ces quatre objectifs n’ont pas nécessairement la même importance pour chacune des parties concernées ; surtout, ils ne constituent pas tous un objet d’antagonisme dans la même proportion. En soi, l’autonomie accrue des entités fédérées est sans doute l’objectif le plus largement partagé, en Flandre comme en Wallonie ou à Bruxelles. De la même façon, et pour autant qu’on s’entende sur la signification exacte du concept, la responsabilité est également largement acceptée, y compris du côté francophone. Enfin, il existe également un consensus sur la nécessité d’éviter, au moins, la concurrence fiscale déloyale [4]. En revanche, et quels que soient les discours officiels, c’est sur le niveau réel de la solidarité, ainsi que sur les modalités de son organisation et sur sa durée, que les positions divergent le plus fortement. Ainsi, si le financement constitue le noyau dur de la négociation, c’est la solidarité qui constitue le cœur de ce noyau.

3 La LSF comporte des mécanismes de solidarité importants, dont l’impact budgétaire peut être estimé globalement à plus de deux milliards d’euros par an. Au moment où un accord vient d’intervenir sur la révision de cette loi (11 octobre 2011), l’objet du présent Courrier hebdomadaire est de faire le point sur les mécanismes mis en place en 1989 : leur ampleur, leur évolution et leurs effets pervers éventuels. La discussion est donc volontairement limitée à la solidarité inter-institutionnelle, c’est-à-dire celle qu’on retrouve dans les moyens dont disposent les entités fédérées – ici, les trois régions et les communautés française et flamande – pour mener leurs politiques, à l’exclusion de la solidarité inter-personnelle qui est celle dont bénéficient les individus pour faire face à leurs besoins personnels et qui, en Belgique, est principalement couverte par les mécanismes de la sécurité sociale. De la même façon, et pour des raisons de concision, l’étude ne concerne pas la Communauté germanophone [5] et les commissions communautaires.

4 L’analyse porte sur le système mis en place par la LSF depuis son entrée en application, soit depuis l’année budgétaire 1989, ce qui couvre une période d’un peu plus de 20 ans. Il n’est en effet pas utile de revenir sur la période précédente, régie par la loi ordinaire du 9 août 1980 [6], dont l’impact sur les discussions actuellement en cours est pratiquement inexistant.

5 La première partie permettra de définir les concepts du carré magique. La deuxième partie sera consacrée aux différences économiques et fiscales entre les régions – et donc, implicitement, entre les communautés – qui donnent un sens à l’existence-même d’une solidarité inter-institutionnelle. La troisième partie analysera alors de façon détaillée le mécanisme de solidarité explicite qui caractérise le financement des régions, tandis que la quatrième partie fera de même pour les éléments de solidarité implicite du mécanisme de financement des communautés. Enfin, même si le présent Courrier hebdomadaire a pour seul objectif de faire le point rétrospectivement sur la solidarité telle qu’elle résulte de l’application de la LSF et ne comporte donc pas, en principe, d’analyse prospective, il peut être utile de fournir ici, à titre d’illustration, un aperçu des éléments de la discussion actuelle en matière de solidarité, tels qu’ils ressortent des propositions reprises dans l’accord institutionnel du 11 octobre 2011. Ce sera l’objet de la cinquième partie.

1. LES CONCEPTS

6 Le concept de carré magique est apparu en 2002 [7]. G. Pagano définit alors l’autonomie budgétaire comme la possibilité, pour les entités fédérées, de lever et d’affecter librement les ressources financières, impôts, ressources patrimoniales ou emprunts nécessaires à leur fonctionnement [8].

7 La responsabilité (ou la responsabilisation) – entendue ici comme la responsabilité budgétaire des entités fédérées – est « la situation où les recettes d’une entité fédérée sont prélevées exclusivement à charge de ses propres citoyens ou agents économiques ». Caractéristique importante du fédéralisme belge, les communautés flamande et française n’ont pas accès à une fiscalité propre, de sorte que la notion d’autonomie budgétaire ne se prolonge pas par une autonomie fiscale. Cette dernière notion s’applique uniquement aux régions et ne peut être augmentée en faveur des communautés qu’à travers les régions. La responsabilité est traduite dans l’actuelle loi de financement, d’une part, par l’existence d’impôts régionaux et, d’autre part, par le principe du « juste retour », selon lequel les recettes versées à une entité fédérée sont proportionnelles à la part d’impôt des personnes physiques (IPP) générée sur leur territoire. Dans certains cas, la notion de responsabilité peut porter sur la prise en charge par une institution des conséquences de ses politiques sur les budgets d’autres institutions. Ainsi, dans les négociations de 2011, il a régulièrement été fait allusion à un mécanisme de responsabilisation pour les politiques d’emploi [9] ou les politiques de santé. Formellement, il s’agit cependant, dans ce cas, davantage de la prise en charge d’externalités, c’est-à-dire de coûts engendrés par des éléments extérieurs à la politique menée.

8 La concurrence fiscale reflète la situation où les différences interrégionales dans les taux d’imposition engendreraient des déplacements de personnes ou d’entreprises à la recherche d’une localisation fiscalement plus avantageuse. Le statut de la concurrence fiscale dans la théorie du fédéralisme financier est ambigu. Certains la voient comme un danger – c’est le sens de la définition ci-avant – mais d’autres, au contraire, comme un moyen de réduire globalement, grâce à la pression à la baisse induite par la concurrence, le poids de l’appareil étatique et donc l’importance des prélèvements obligatoires.

9 Quant à la solidarité, G. Pagano la définit, en matière budgétaire, comme la situation dans laquelle les recettes publiques sont prélevées de manière uniforme, en fonction de la capacité contributive de chacun, alors que les dépenses sont réparties entre les individus (il s’agit alors de solidarité inter-personnelle) ou entre les entités fédérées (on parlera dans ce cas de solidarité inter-institutionnelle) en fonction de leurs besoins respectifs. Ainsi définie, la notion de solidarité implique qu’une entité a priori moins riche puisse recevoir in fine une part des ressources totales à partager plus élevée que la part qui lui revient en fonction de sa population. Des responsables politiques flamands qualifient, toutefois, une telle situation d’« over-solidariteit »[10]. Quoi qu’il en soit, le concept de solidarité sera utilisé ci-après dans un sens légèrement différent, plus large, à savoir toute dérogation au principe du juste retour, ou même toute dérogation aux principes traditionnels de répartition, quelle que soit la situation financière de l’entité qui en bénéficie.

2. LES ÉCARTS ÉCONOMIQUES ET FISCAUX

10 Par nature, la solidarité vise une plus grande égalité entre les citoyens ou entre les entités fédérées. Elle n’a de sens que si elle permet de réduire des différences de richesse ou de besoins jugées injustifiées.

11 Dans le cas des entités fédérées belges, les différences de moyens ou de besoins sont bien réelles, de sorte que la solidarité a un sens, même s’il faut s’entendre sur la mesure dans laquelle on s’accorde à les réduire. Il existe de nombreux indicateurs de richesse et de besoins. L’objet de ce Courrier hebdomadaire n’étant pas de discuter leurs mérites respectifs, il se limitera à en présenter les deux indicateurs le plus souvent utilisés et qui, par ailleurs, sont repris dans les dispositions de la LSF. Il s’agit d’une part, du produit intérieur brut (PIB) (cf. 2.1) et, d’autre part, de la capacité fiscale, mesurée par le rendement de l’IPP (cf. 2.2) [11]. Il existe cependant une différence considérable entre les conclusions qu’on peut tirer, à propos de la Région bruxelloise, selon qu’on utilise l’un ou l’autre de ces deux critères. Ceci amène à s’interroger sur ce qu’on peut appeler l’énigme du PIB bruxellois (cf. 2.3).

2.1. LE PRODUIT INTÉRIEUR BRUT

12 Le PIB est la somme des valeurs ajoutées créées sur un territoire donné au cours d’une période donnée, quelle que soit la nationalité ou le lieu de résidence des agents économiques qui sont à leur origine. Parce que la valeur ajoutée se transforme nécessairement en revenus (distribués ou non), le PIB mesure aussi l’ensemble des revenus générés dans les mêmes circonstances.

13 Rapporté au nombre d’habitants (ou à tout autre critère pertinent de taille), le PIB mesure la capacité d’une zone géographique à créer de la richesse – que les économistes appellent de la valeur ajoutée – sur son territoire.

Tableau 1

PIB par habitant (1989 -2009, indices base Belgique = 100)

Année Région flamande Région wallonne Région bruxelloise
1989
1990
1991
1992
1993
1994
1995
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
96,18
96,62
96,22
96,42
96,45
97,44
98,02
97,65
98,36
97,92
98,15
98,97
98,95
98,86
99,08
99,44
99,35
99,87
100,46
100,05
99,01
74,45
73,82
75,36
75,14
75,06
74,39
74,08
73,85
73,17
73,32
72,57
72,17
72,01
71,70
71,85
71,91
72,05
72,24
71,83
73,11
72,89
208,65
209,16
207,89
208,07
208,69
204,96
202,93
205,90
203,80
207,31
206,96
202,91
202,49
202,95
200,69
198,13
197,52
193,26
190,21
187,17
192,75
figure im1

PIB par habitant (1989 -2009, indices base Belgique = 100)

ICN ; SPF Économie ; calculs propres.

14 Le tableau 1 reprend l’évolution du PIB régional par habitant entre 1989 et 2009 en pourcentage par rapport à la moyenne nationale. À sa lecture, on peut dégager principalement quatre constatations. En premier lieu, l’analyse en niveau montre que c’est manifestement sur le territoire de la Région bruxelloise que se concentre le plus nettement la création de valeur ajoutée par habitant. Jusqu’en 2003, le niveau du PIB par habitant y est supérieur ou égal au double de la moyenne nationale. Sur le reste de la période, il reste supérieur à 190 % de cette moyenne, à l’exception de l’année 2008 (187 %). En deuxième lieu, si on s’en tient cette fois à l’évolution, c’est vers la Région flamande que la création de richesses par habitant semble se concentrer au fil des années. Ainsi, le niveau du PIB par habitant qui, en début de période, était inférieur à la moyenne nationale (96,18 %) la rejoint en 2007 et, sous réserve de l’évolution récente, semble ensuite devoir durablement se maintenir au-dessus de cette moyenne. En troisième lieu, l’évolution du PIB par habitant en Région bruxelloise est manifestement moins favorable que la moyenne puisque, sur les 21 ans considérés, la statistique bruxelloise cède près de 16 points d’indice, passant de 208,65 à 192,75. Enfin, en Région wallonne, le PIB créé par habitant était déjà très sensiblement inférieur à la moyenne nationale en début de période (74,45 %) et il l’est encore davantage en fin de période (72,89 %), même si les plus optimistes remarqueront surtout le redressement sensible enregistré entre 2002 et 2008. Puisque le PIB flamand par habitant est désormais très proche de la moyenne nationale, l’écart de la Wallonie par rapport à cette moyenne donne aussi ipso facto l’écart par rapport à la Flandre. Ainsi en 2009, la capacité de création de richesse est, sur le territoire wallon, inférieure de plus d’un quart à ce qu’elle est sur le territoire flamand.

2.2. LA CAPACITÉ FISCALE

15 À côté du PIB, un autre indicateur pertinent en matière de solidarité inter-institutionnelle est la capacité fiscale. En Belgique, elle est approchée traditionnellement par l’impôt des personnes physiques (IPP) par habitant. La mesure porte cette fois sur la capacité des contribuables résidant dans une zone géographique donnée à alimenter, via leur revenu, les recettes fiscales de cette zone. C’est aussi l’indicateur retenu à l’article 48 de la LSF pour calculer l’intervention de solidarité nationale (cf. infra).

16 Le tableau 2 reprend l’évolution de l’IPP régional par habitant entre 1989 et 2009.

Tableau 2

IPP par habitant et écart par rapport à la moyenne nationale (1989-2009, en euros ou en %)

Année Belgique Flandre Wallonie Bruxelles
IPP/hab.
(euros)
IPP/hab.
(euros)
Écart
(%)
IPP/hab.
(euros)
Écart
(%)
IPP/hab.
(euros)
Écart
(%)
1989
1990
1991
1992
1993
1994
1995
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
1 576,16
1 605,61
1 571,75
1 682,48
1 804,41
1 914,25
2 061,43
2 099,42
2 231,43
2 303,91
2 407,07
2 522,82
2 639,03
2 794,61
2 947,18
2 971,65
2 935,37
2 763,68
2 949,35
3 045,87
3 211,04
1 614,31
1 657,20
1 633,62
1 760,82
1 895,69
2 020,91
2 180,37
2 234,41
2 371,59
2 460,45
2 574,47
2 704,68
2 839,87
3 023,15
3 208,07
3 241,61
3 202,99
3 038,44
3 228,88
3 334,86
3 526,05
+ 2,42
+ 3,21
+ 3,94
+ 4,66
+ 5,06
+ 5,57
+ 5,77
+ 6,43
+ 6,28
+ 6,79
+ 6,95
+ 7,21
+ 7,61
+ 8,18
+ 8,85
+ 9,08
+ 9,12
+ 9,94
+ 9,48
+ 9,49
+ 9,81
1 442,89
1 453,99
1 407,08
1 492,76
1 595,82
1 689,92
1 823,67
1 855,54
1 984,16
2 038,71
2 131,56
2 222,64
2 309,33
2 420,01
2 538,50
2 536,41
2 546,38
2 351,39
2 565,51
2 656,76
2 792,70
– 8,46
– 9,44
– 10,48
– 11,28
– 11,56
– 11,72
– 11,53
– 11,62
– 11,08
– 11,51
– 11,45
– 11,90
– 12,49
– 13,40
– 13,87
– 13,74
– 13,25
– 14,92
– 13,01
– 12,78
– 13,03
1 792,87
1 806,79
1 757,32
1 855,80
1 966,61
2 037,96
2 156,58
2 116,32
2 226,56
2 258,93
2 330,33
2 441,65
2 543,12
2 686,22
2 757,44
2 726,21
2 640,31
2 505,09
2 567,72
2 628,01
2 739,06
+ 13,75
+ 12,53
+ 11,81
+ 10,30
+ 8,99
+ 6,46
+ 4,62
+ 0,81
– 0,22
– 1,95
– 3,19
– 3,22
– 3,63
– 3,88
– 6,44
– 8,26
– 10,05
– 9,36
– 12,94
– 13,72
– 14,70
figure im2

IPP par habitant et écart par rapport à la moyenne nationale (1989-2009, en euros ou en %)

B. BAYENET, G. PAGANO, Le financement des entités fédérées, op. cit., p. 184.

17 Les conclusions qu’on peut tirer de ce tableau sont, en partie, parallèles à celles qui découlaient du tableau 1. Ainsi en est-il de la position, moins favorable que la moyenne, que la Wallonie occupe en début de période et encore davantage en fin de période, avec, aussi, une certaine tendance au redressement, à partir de 2003, si on excepte 2006. L’écart par rapport à la moyenne nationale (de – 8,46 % à – 13,03 %) est, cependant, moins marqué qu’en termes de PIB, mais il est du même ordre de grandeur (23 points d’indice en fin de période) par rapport à la Flandre. De même, l’évolution est favorable à la Flandre, dont l’écart par rapport à la moyenne nationale passe de + 2,42 à + 9,81 %. Cependant, contrairement aux résultats en termes de PIB, la Flandre se situe ici au-dessus de la moyenne nationale dès le début de la période. De plus, en fin de période, l’écart est nettement plus marqué en termes d’IPP (9,81) qu’en termes de PIB (proche de 0). Enfin, les constatations les plus frappantes concernent la Région bruxelloise. Si, en début de période, l’IPP bruxellois par habitant est supérieur à la moyenne (+ 13,75 %) – quoique dans une proportion bien inférieure à ce qu’on constatait pour le PIB – et si, comme pour le PIB, l’évolution est clairement défavorable, le résultat en fin de période (– 14,70 %) fait de Bruxelles la région fiscalement la plus pauvre du pays, en net contraste avec son niveau de PIB (192,75% de la moyenne nationale).

2.3. LA SIGNIFICATION DU PIB BRUXELLOIS

18 Cette dernière constatation amène tout naturellement à se demander comment une région peut être fiscalement la plus pauvre alors que la richesse par habitant créée sur son territoire atteint grosso modo le double de la moyenne nationale. C’est ce qui apparaît à première vue comme une énigme, qui se résout à vrai dire aisément.

19 Le PIB mesure la capacité à créer de la richesse sur un territoire, ici celui de la Région bruxelloise, mais il ne dit rien sur la façon dont ce PIB est ensuite réparti entre les facteurs de production, et sur le lieu de résidence de ces facteurs. Ainsi, le capital qui permet aux entreprises localisées à Bruxelles de produire leur valeur ajoutée est, certes, pour une part, détenu par des résidents bruxellois qui en tirent, alors, légitimement, des revenus (intérêts, loyers, dividendes), mais il aussi détenu par des résidents wallons, flamands ou même étrangers qui en tirent également, et à due concurrence, des revenus dont la Région bruxelloise ne bénéficie donc pas. Il est difficile d’estimer la proportion dans laquelle le capital investi à Bruxelles est détenu, respectivement, par des résidents bruxellois, belges hors Bruxelles ou étrangers.

20 Mais le phénomène s’applique aussi aux revenus du travail, pour lesquels des statistiques plus précises existent. La colonne « Étranger » reprend les personnes qui résident dans l’une des trois régions, mais qui travaillent à l’étranger [12]. Le tableau 3 répartit l’emploi régional selon le lieu de résidence pour 2009.

Tableau 3

Emploi régional selon le lieu de résidence (2009)

Lieu de travail
Résidence Région
bruxelloise
Région
flamande
Région
wallonne
Étranger Total
Région bruxelloise
Région flamande
Région wallonne
Total
338 236
234 330
123 608
696 174
42 310
2410 994
42 513
2495 817
18 073
24 529
1080 257
1122 859
5 138
45 004
55 717
105 859
403757
2 714857
1 302095
4 420 709
figure im3

Emploi régional selon le lieu de résidence (2009)

Enquête sur les forces de travail, 2009.

21 Ce tableau aide à résoudre l’énigme du PIB bruxellois, en illustrant bien la différence entre la taxation au lieu de travail (en vertu de laquelle tout l’IPP prélevé sur les revenus des personnes qui travaillent à Bruxelles est attribué à la Région bruxelloise) et la taxation au lieu de domicile (en vertu de laquelle seul l’IPP prélevé sur les revenus des résidents bruxellois est attribué à la Région bruxelloise). Sur les 696 174 personnes occupées à Bruxelles, 338 236 (48,59 %) résident dans cette région, 234 330 (33,66 %) résident en Flandre, et 123 608 (17,76 %) résident en Wallonie. Dès lors, rapporter le PIB bruxellois au nombre d’habitants revient à « attribuer » à ceux-ci la valeur ajoutée produite par les 357 938 non-Bruxellois qui travaillent à Bruxelles.

22 Trancher entre ces deux logiques n’est pas simple. Certes, la règle, en matière de relations internationales, est celle de la taxation au lieu de travail, mais, d’une part, cette règle connaît nombre d’exceptions et d’adaptations et, d’autre part, il ne s’agit pas ici d’un État indépendant mais d’une région au sein d’un État fédéral. Par ailleurs, il ne faut pas négliger l’effet « rétractant » que pourrait avoir la taxation au lieu de travail. Dans ce cas, les deux autres régions, et notamment la Flandre, pourraient être tentées de retenir sur leur territoire les emplois les plus mobiles, on pense par exemple aux administrations. En fin de compte et surtout, la logique voudrait que les citoyens payent leurs impôts au bénéfice de la région dont ils utilisent les services publics. Il faut alors se demander si les navetteurs consomment davantage de services publics au lieu de travail ou au lieu de résidence.

2.4. CONCLUSION

23 L’examen de deux indicateurs, le PIB et l’IPP, fait ressortir sans équivoque les différences de richesse produite et de capacité fiscale qui caractérisent les trois régions de Belgique. Ces différences donnent un sens à une intervention correctrice au titre de la solidarité institutionnelle, afin que tous les citoyens aient accès aux services publics dans des conditions sinon égales, au moins analogues.

24 L’examen des indicateurs met aussi en évidence un autre phénomène : alors que les milieux radicaux flamands (et certains milieux bruxellois) critiquent de façon constante la situation économique de la Wallonie [13], c’est manifestement l’évolution de la Région bruxelloise – à la gestion de laquelle les partis flamands sont associés depuis 1989 – qui est la plus préoccupante. En dehors de ces aspects plus polémiques, la réduction constante de la capacité fiscale relative de la Région bruxelloise plaide objectivement en faveur d’un effort spécial de solidarité sous la forme d’un « refinancement » dont l’ampleur et les modalités doivent encore être fixées, mais nous sortons là du cadre du présent Courrier hebdomadaire.

3. LES RÉGIONS : LA SOLIDARITÉ EXPLICITE

25 Le financement des régions repose fondamentalement sur le principe de responsabilité. Celui-ci se marque, d’abord, par l’existence d’impôts régionaux pour lesquels chaque région dispose d’une autonomie totale et assume, en contrepartie, pleinement la responsabilité. Il se marque également par la ristourne d’une partie de l’IPP – qui n’est pas une dotation – où la part reçue par chaque région est strictement proportionnelle au rendement de l’IPP perçu sur son territoire, selon le principe dit du « juste retour ».

26 Mais à côté de ces deux éléments d’autonomie et de responsabilité, l’article 48 de la LSF prévoit explicitement une intervention de solidarité nationale (ISN) à charge de l’État fédéral qui, pour la ou les régions fiscalement moins riches que la moyenne, s’ajoute aux autres recettes. Pour 2010, cette disposition bénéficie aux régions wallonne et bruxelloise, à concurrence de respectivement 833,8 et 285,3 millions d’euros.

27 Le tableau 4 reprend, pour les trois régions, les principales recettes du budget 2010.

Tableau 4

Principales recettes des régions (budget 2010, en millions d’euros)

Région flamande Région wallonne Région bruxelloise
IPP ristourné *
Impôts régionaux
Intervention de solidarité nationale
8280,7
4289,3
0,0
3707,8
2 218,3
833,8
1 080,3
1 050,8
285,3
figure im4

Principales recettes des régions (budget 2010, en millions d’euros)

* Avant déduction du terme négatif.
Budget de la Communauté flamande et de la Communauté française.

3.1. MÉCANISME, MONTANTS ET CARACTÉRISTIQUES

28 L’ISN a été appliquée à partir de 1990 selon la formule suivante : la Région dont l’IPP par habitant est inférieur à la moyenne nationale reçoit 468 francs belges (11,60 euros) indexés par habitant et par point d’écart en % entre son IPP par habitant et la moyenne nationale (cf. schéma de synthèse 1).

Schéma de synthèse 1

L’intervention de solidarité nationale

Base légale LSF, article 48
Institutions concernées
Base du calcul
Règle d’évolution
Règle de répartition
Régions dont IPP par habitant < moyenne nationale (soit,
actuellement, la Région wallonne et la Région bruxelloise)
468 francs belges ou 11,60 euros
Indexation, nombre d’habitants, écart en % entre l’IPP par habitant de
la région et la moyenne nationale
Calcul propre à chacune des régions concernées
figure im5

L’intervention de solidarité nationale

B. BAYENET, G. PAGANO, Le financement des entités fédérées, op. cit., p. 72.

29 Le montant de base pour le calcul de l’ISN, qui figure à l’article 48 de la LSF, 468 francs belges ou 11,60 euros, a été fixé lors des négociations institutionnelles de 1988. L’idée était de transposer, dans la LSF, la solidarité qui existait implicitement dans la loi du 9 août 1980, mais en rendant le mécanisme explicite, transparent et réversible. En effet, le recours à la « règle des trois tiers » – superficie, population, IPP – pour le partage des dotations qui prévalait jusqu’en 1988 était, pour la Région wallonne, plus favorable que le recours au principe unique du juste retour, puisque celui-ci constituait, pour la Wallonie, le tiers le moins favorable. Or, le principe du juste retour s’appliquait au financement des nouvelles compétences transférées en 1988, mais aussi au financement des compétences déjà gérées par les régions avant la réforme. Comme les auteurs de la réforme voulaient lier la solidarité à un critère objectif et réversible, à savoir l’écart de capacité contributive, le calcul a été fait « à l’envers » : partant d’un montant à compenser de 8 538,5 millions de francs belges, pour une population de 3 200 000 habitants avec un égard de capacité contributive de 5,7 %, on obtint 468 francs belges [14].

30 Le montant de base étant indexé, l’ISN par habitant est, par construction, constante en termes réels, pour autant que les capacités contributives relatives soient elles-mêmes constantes.

31 Enfin, la réversibilité du mécanisme a été vérifiée dans les faits en 1997, année où la Région bruxelloise, au départ exclue du mécanisme de solidarité en raison d’une capacité fiscale très supérieure à la moyenne, a commencé à en bénéficier elle aussi. Le mécanisme ne s’est, cependant, encore jamais retourné au bénéfice de la Flandre, puisque la capacité contributive de cette région a été supérieure à la moyenne nationale de façon constante depuis 1990.

32 Les capacités contributives à l’IPP des habitants des différentes régions et les écarts par rapport à la moyenne nationale figurent au tableau 2, et leurs évolutions depuis 1990 ont été commentées à la section 2.2. Sur cette base, le montant de l’ISN allouée aux Régions wallonne et bruxelloise depuis respectivement 1990 [15] et 1997 – la Flandre, rappelons-le, n’en ayant jamais bénéficié – est repris au tableau 5.

Tableau 5

Montant de l’ISN (1990-2010, en millions d’euros)

Année Région wallonne Région bruxelloise
1990
1991
1992
1993
1994
1995
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
377,8
434,0
481,1
508,8
531,0
531,8
548,7
528,3
559,0
562,8
601,6
648,1
657,9
747,2
758,0
754,2
869,1
775,2
800,3
820,7
833,8
0,0
0,0
0,0
0,0
0,0
0,0
0,0
3,0
27,1
44,9
46,6
54,2
55,0
101,1
134,2
169,2
161,6
230,0
257,9
280,8
285,3
figure im6

Montant de l’ISN (1990-2010, en millions d’euros)

B. BAYENET, G. PAGANO, Le financementdes entités fédérées, op. cit., p. 187.

33 Pour la Région wallonne, la valeur nominale de l’ISN a varié de 377,8 en 1990 à 833,8 millions d’euros en 2010. Le cas de la Région bruxelloise est particulièrement intéressant, dans la mesure où elle bénéficiait en début de période d’un IPP par habitant très supérieur à la moyenne (13,75 %, cf. tableau 2), et dès lors ne bénéficiait logiquement pas de l’ISN. Cependant, la capacité fiscale bruxelloise s’est rapidement réduite, de sorte que l’IPP qui lui était ristourné en application du principe du juste retour tendait lui aussi à diminuer. Cette réduction de l’IPP ristourné à Bruxelles s’est faite jusqu’en 1997 sans compensation au titre de la solidarité nationale, car le niveau de l’IPP par habitant restait au-dessus du seuil que représente la moyenne nationale [16].

34 Représentant un milliard d’euros par an environ, l’ISN a un effet comparable, en ordre de grandeur, à la solidarité implicite des communautés (cf. infra). Cependant, et sans doute en raison de son caractère explicite et de la relative facilité avec laquelle on peut se procurer les données quantifiées, l’ISN a fait l’objet, depuis son introduction en 1990 et plus que la solidarité implicite des communautés, de nombreuses discussions et, dans les milieux radicaux flamands notamment, de nombreuses critiques. Elle partage en cela le sort de nombreuses mesures dont le but avoué est de modifier la répartition primaire ou spontanée des variables économiques, et auxquelles on reproche systématiquement soit leur inefficacité – lorsqu’elles ne parviennent pas à modifier sensiblement ladite répartition primaire –, soit leur caractère anti-économique ou même contreproductif – lorsque, précisément, elles atteignent leur objectif et donc conduisent à une situation différente de celle qui aurait été en leur absence.

35 En l’occurrence, les débats autour de l’ISN portent essentiellement sur deux phénomènes : d’une part, le paradoxe des recettes, c’est-à-dire, la situation dans laquelle les régions initialement les plus pauvres fiscalement obtiendraient, après application de l’ISN, des recettes par habitant plus élevées que la région initialement la plus riche (cf. 3.2), et, d’autre part, le piège à la pauvreté, c’est-à-dire la situation dans laquelle les régions bénéficiaires de l’ISN n’auraient budgétairement aucun intérêt à s’enrichir, ce qui freinerait leur développement économique et contribuerait donc à l’augmentation permanente de l’ISN (cf. 3.3).

3.2. LE PARADOXE DES RECETTES ET L’EFFET ÉGALISATEUR

36 L’intervention de solidarité nationale a pour objet de diminuer les inégalités entre les recettes sur lesquelles les régions peuvent compter, indépendamment de leurs richesses propres, pour mener leurs politiques. Si, sur le principe de cette « égalisation », il existe sans doute un large consensus, il en va tout autrement dès lors qu’il s’agit de fixer le point jusqu’auquel cette égalisation doit aller. Doit-elle conduire à une égalité totale ou, même, peut-elle aller au-delà ? Ici interviennent les conceptions que les différents acteurs ont de la solidarité.

37 Si, conformément à la définition de la première partie, la solidarité consiste à prélever les recettes publiques en fonction de la capacité contributive et à les répartir en fonction des besoins, il est évidemment possible d’aboutir au paradoxe suivant : la région présentant les besoins par habitant les plus élevés, dès lors que sa contribution à l’impôt était plus faible, obtiendra logiquement des moyens également plus élevés, même si, au départ, sa contribution à l’impôt était plus faible. Si on considère, par exemple, que les régions sont en charge du développement économique, il n’est pas insensé que la Wallonie, dont le PIB par habitant atteint à peine 75 % de la moyenne nationale, dispose, en fin de compte, de plus de moyens que la moyenne nationale pour relancer son économie, malgré une capacité fiscale de 13 % inférieure à cette moyenne.

38 Dans la situation belge, cependant, une telle proposition est controversée. Il suffit pour s’en convaincre de reprendre les discussions qui ont conduit au vote, par le Parlement flamand, des résolutions sur une réforme de l’État, le 3 mars 1999. Lors des discussions en commission, les représentants du VEV [17] avaient précisé qu’« un mécanisme transparent de solidarité est nécessaire. Cependant, cette solidarité ne peut avoir pour conséquence que, par habitant, la région aidée ait finalement plus de moyens à sa disposition que celle qui finance la solidarité ». En séance plénière, L. Van den Brande, alors ministre-président du gouvernement flamand, avait ajouté que « la solidarité passe après la responsabilité et ne peut pas constituer le principe de base de communautés qui vivent en voisins » [18]. On parla alors d’over-solidariteit[19].

39 Une autre difficulté tient à la mesure-même du paradoxe. Faut-il tenir compte de toutes les recettes, en ce compris les impôts régionaux, ou se limiter aux recettes transférées au départ du budget fédéral, à savoir l’IPP et l’ISN ?

40 Les tableaux 6a, 6b et 6c nous indiquent qu’en 2010, il n’y a pas de paradoxe des recettes. En effet, les IPP ristournés à la Région flamande, à la Région wallonne et à la Région bruxelloise s’élèvent à respectivement 110,0 %, 87,0 % et 84,3% de la moyenne nationale et, l’ajout de l’ISN conduit les trois régions précitées à recevoir 101,1 %, 98,9 % et 98,1 % de la moyenne nationale.

41 Un paradoxe des recettes est néanmoins présent de 1990 à 2002, quand la Région wallonne reçoit davantage que la Région flamande en termes d’IPP + ISN par habitant (cf. aussi le graphique 1). On constate en outre qu’entre 2008 et 2009, la Région wallonne a vu son IPP baisser (tableau 6b) et que l’intervention de solidarité nationale n’a pas fait en sorte que ses revenus globaux par habitants augmentent, sauf en pourcentage de la moyenne nationale.

Tableau 6a

Effet égalisateur et paradoxe des recettes : Région flamande (en euros, en %)

Année IPP
(milliers d’euros)
IPP/hab.
(euros)
IPP/hab.
(% moyenne
nationale)
ISN
(milliers
d’euros)
(IPP +
ISN)/hab.
(milliers
d’euros)
(IPP +
ISN)/hab.
(% moyenne
nationale)
1990
1991
1992
1993
1994
1995
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
2 334 286
2 593 915
2 872 676
3 187 160
3 514 843
3 845 597
4 218 004
4 638 424
5 066 172
5 560 262
5 844 454
6 040 014
6 278 035
6 491 990
6 737 677
6 985 893
7 395 617
7 697 768
8 136 052
7 906 868
8 186 626
406,7
449,7
495,7
547,2
601,1
655,6
717,3
786,3
856,9
938,2
983,9
1 016,4
1 051,1
1 082,8
1120,0
1156,0
1 216,7
1 258,3
1 320,4
1 275,4
1 308,3
98,6
99,6
100,4
101,2
102,1
102,7
103,7
104,3
105,4
106,9
107,2
107,7
108,2
108,9
109,1
109,1
110,0
109,5
109,5
109,9
110,0
0,0
0,0
0,0
0,0
0,0
0,0
0,0
0,0
0,0
0,0
0,0
0,0
0,0
0,0
0,0
0,0
0,0
0,0
0,0
0,0
0,0
406,7
449,7
495,7
547,2
601,1
655,6
717,3
786,3
856,9
938,2
983,9
1 016,4
1 051,1
1 082,8
1120,0
1156,0
1 216,7
1 258,3
1 320,4
1 275,4
1 308,3
90,3
90,9
91,5
92,6
93,7
94,9
96,2
97,5
98,5
100,1
100,3
100,4
100,5
100,6
100,7
100,7
101,0
101,2
101,2
101,0
101,1
figure im7

Effet égalisateur et paradoxe des recettes : Région flamande (en euros, en %)

Tableau 6b

Effet égalisateur et paradoxe des recettes : Région wallonne (en euros, en %)

Année IPP
(milliers
d’euros)
IPP/hab.
(euros)
IPP/hab.
(% moyenne
nationale)
ISN
(milliers
d’euros)
(IPP +
ISN)/hab.
(milliers
d’euros)
(IPP +
ISN)/hab.
(% moyenne
nationale)
1990
1991
1992
1993
1994
1995
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
1 271 853
1 371 239
1 500 099
1 645 708
1 789 176
1 935 506
2 085 030
2 272 786
2 426 923
2 590 351
2 700 461
2 761 240
2 830 045
2 888 609
2 993 246
3 120 761
3 216 214
3 435 155
3 640 467
3 513 318
3 626 629
392,1
420,8
457,9
499,7
541,4
584,2
629,1
684,4
729,5
777,3
808,6
825,1
842,6
857,6
885,4
919,0
942,1
999,8
1 053,1
1 009,6
1 035,1
95,1
93,2
92,7
92,4
92,0
91,5
91,0
90,8
89,8
88,6
88,1
87,4
86,8
86,3
86,3
86,8
85,2
87,0
87,4
87,0
87,0
378 011,0
434 021,1
480 747,1
509 037,2
531149,4
532 252,8
548 485,0
532 013,8
558 938,2
562 999,8
601 242,5
648 241,3
708 392,7
747 174,6
757 959,5
754 198,9
868 177,1
775 231,3
800 280,9
820 693,5
839 024,2
508,6
554,0
604,7
654,3
702,2
744,9
794,5
844,6
897,5
946,3
988,7
1 018,8
1 053,6
1 079,4
1109,7
1141,1
1196,4
1 225,4
1 284,7
1 245,5
1 274,5
112,9
112,0
111,6
110,7
109,5
107,8
106,6
104,8
103,1
101,0
100,8
100,7
100,8
100,3
99,8
99,4
99,4
98,5
98,5
98,6
98,5
figure im8

Effet égalisateur et paradoxe des recettes : Région wallonne (en euros, en %)

Tableau 6c

Effet égalisateur et paradoxe des recettes : Région bruxelloise (en euros, en %)

Année IPP
(milliers
d’euros)
IPP/hab.
(euros)
IPP/hab.
(% moyenne
nationale)
ISN
(milliers
d’euros)
(IPP +
ISN)/hab.
(milliers
d’euros)
(IPP +
ISN)/hab.
(% moyenne
nationale)
1990
1991
1992
1993
1994
1995
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
496 428
542 647
575 526
610 793
642 532
685 555
710 663
753 788
789 689
811 402
849 661
873 501
905 294
914 057
937 584
957 123
1 015 805
1 025 996
1 080 795
1 045 173
1 078 882
514,8
565,1
605,0
642,7
677,0
720,4
749,5
793,0
828,5
850,1
885,7
905,7
925,3
921,4
937,7
950,7
997,1
994,9
1 030,8
983,9
1 002,2
124,8
125,2
122,5
118,9
115,0
112,9
108,4
105,2
101,9
96,9
96,5
96,0
95,3
92,7
91,4
89,8
90,1
86,6
85,5
84,8
84,3
0,0
0,0
0,0
0,0
0,0
0,0
0,0
2 996,2
27 138,0
44 932,1
46 567,0
54 171,6
59 078,3
101 055,4
134 211,4
169 212,1
161 406,4
230 029,7
257 935,8
280 846,7
299 812,1
496 428
542 647
575 526
610 793
642 532
685 555
710 663
756 784,2
816 826,7
856 334,4
896 228,2
927 673,0
964 371,9
1 015 112,5
1 071 795,4
1126 335,5
1177 211,6
1 256 025,8
1 338 730,5
1 326 019,6
1 378 693,9
114,3
114,2
111,7
108,7
105,6
104,3
100,5
98,7
98,5
95,8
95,3
95,0
94,3
95,1
96,4
97,5
96,0
97,9
97,9
98,8
98,9
figure im9

Effet égalisateur et paradoxe des recettes : Région bruxelloise (en euros, en %)

Graphique 1

Effet de l’ISN sur les recettes par habitant (recettes par habitant en % de la moyenne nationale après attribution de l’ISN)

figure im10
115
110
105
100
95
90
85
80
1991 1993 1995 1997 1999 2001 2003 2005 2007 2009
1990 1992 1994 1996 1998 2000 2002 2004 2006 2008 2010
Fl W Bxl

Effet de l’ISN sur les recettes par habitant (recettes par habitant en % de la moyenne nationale après attribution de l’ISN)

42 Le graphique 1 illustre bien l’effet paradoxal et sa concentration sur la période 1990-2002. Sur cette période, la Région wallonne obtient, par habitant, davantage de moyens que la Région flamande ou que la Région bruxelloise, qui disposent, pourtant, toutes deux d’un IPP par habitant plus élevé. L’explication de ce phénomène tient aux règles qui, dans la LSF, s’appliquent en période transitoire, soit de 1989 à 1999 inclus. Pendant cette période en effet, la proportionnalité à l’IPP entre en application progressivement, à concurrence de 10 % (cumulés) par an. En revanche, l’ISN s’applique entièrement dès le début. Il en résulte que l’ISN marque ses effets au bénéfice de la Région wallonne, alors que les conséquences négatives de la proportionnalité la touchent encore seulement en partie [20]. Le caractère paradoxal du financement de la Région wallonne se réduit dès lors, assez rapidement, au fur et à mesure que la proportionnalité est appliquée, et disparaît en 2003.

43 Dans un premier temps, la situation de la Région bruxelloise échappe au paradoxe, puisque la région la plus riche est aussi celle qui bénéficie, par habitant, des recettes ristournées les plus élevées. La Région bruxelloise est même victime d’un effet paradoxal à l’envers puisque, à partir de 1997 et malgré l’accès au bénéfice de l’ISN, les recettes qui lui sont ristournées passent en dessous de la moyenne nationale alors que l’IPP qui lui est ristourné est encore, à ce moment, supérieur à cette moyenne. À partir de 1999, le paradoxe disparaît, la Région bruxelloise se situant en dessous de la moyenne nationale tant pour l’IPP « juste retour » que pour la somme de cet IPP et de l’ISN.

44 Si l’ISN ne provoque plus de paradoxe de recettes depuis 2003, elle engendre cependant encore un puissant effet égalisateur. Ainsi, en 2010, les recettes par habitant de la Région wallonne passent, avec l’attribution de l’ISN, de 87,0 % à 98,5 % de la moyenne nationale, alors que parallèlement les recettes de la Région flamande passent de 110,0 % à 101,1 % de cette moyenne.

3.3. LE PIÈGE À LA PAUVRETÉ BUDGÉTAIRE

45 Si le rendement de l’IPP augmente dans une région, alors que, par hypothèse, il ne varie pas dans les autres régions, l’IPP par habitant (IPPH) de cette région augmente par rapport à la moyenne nationale. Cette augmentation a, à son tour, deux effets sur les recettes versées par l’État fédéral à la région dont l’IPP augmente et aux deux autres régions : un effet ISN et un effet juste retour.

46 En termes d’effet ISN, si l’IPPH de la région concernée se situait déjà au-dessus de la moyenne nationale, comme c’est le cas pour la Région flamande, rien ne change car il n’existe pas d’ISN négative. Par contre, si l’IPPH de cette région se situait initialement en dessous de la moyenne nationale, comme c’est le cas pour les Régions wallonne et bruxelloise, l’ISN allouée à cette région diminue.

47 Hors ISN, la partie de l’IPP attribuée à chaque région est fonction de la part de celle-ci dans l’IPP. C’est l’effet juste retour. Dès lors, toutes autres choses égales par ailleurs, l’augmentation de l’IPP d’une région entraînera une augmentation du montant reçu par celle-ci hors ISN.

48 Les deux effets ont tendance à se compenser. Néanmoins, l’effet ISN est plus important que l’effet juste retour. Il existe dès lors un « piège à la pauvreté budgétaire » : une région qui bénéficie de l’ISN a, du strict point de vue budgétaire, intérêt à s’appauvrir et par conséquent à réduire sa part dans l’IPP [21]. Les tableaux 7a et 7b illustrent l’effet sur les recettes des trois régions et de l’État fédéral d’une augmentation de l’IPP de chaque région successivement, à concurrence de 100 millions d’euros dans chaque scénario envisagé, et ce en 2000 pour le tableau 7a et en 2010 pour le tableau 7b.

49 Dans le tableau 7b, une hausse de l’IPP flamand supposée intervenir en 2010 est profitable à toutes les régions, la Flandre bénéficiant alors de 13,8 millions d’euros de plus, la Wallonie de 5,6 millions supplémentaires et Bruxelles d’1,7 millions supplémentaire. Une hausse de l’IPP wallon ne bénéficie qu’à la Région de Bruxelles-Capitale. La Région wallonne perd en effet davantage en termes d’ISN qu’elle ne gagne en termes de juste retour. Un piège à la pauvreté est donc bien présent. L’État fédéral bénéficie par contre de recettes excédentaires largement supérieures aux 100 millions initiaux, en raison de l’économie réalisée sur l’ISN. Une hausse de l’IPP bruxellois ne bénéficie qu’à la Région wallonne et à l’État fédéral, Bruxelles étant par conséquent à son tour victime du piège à la pauvreté budgétaire.

Tableau 7a

Effet de l’augmentation de l’IPP d’une région, à concurrence de 100 millions d’euros (2000, en millions d’euros)

Effets Région wallonne Région flamande Région bruxelloise État fédéral
En cas d’augmentation de l’IPP wallon
ISN
Retour
Total
– 44,2
+ 26,9
– 17,3
0
– 23,4
– 23,4
+ 5,7
– 3,4
+ 2,3
+ 138,5
En cas d’augmentation de l’IPP flamand
ISN
Retour
Total
+ 18,2
– 10,9
+ 7,3
0
+ 14,4
+ 14,4
+ 5,7
– 3,4
+ 2,3
+ 76,1
En cas d’augmentation de l’IPP bruxellois
ISN
Retour
Total
+ 18,2
– 10,9
+ 7,3
0
– 23,4
– 23,4
– 56,5
+ 34,3
– 22,2
+ 138,3
figure im11

Effet de l’augmentation de l’IPP d’une région, à concurrence de 100 millions d’euros (2000, en millions d’euros)

F. DOCQUIER, La solidarité entre les régions : bilan et perspectives, De Boeckuniversité, Bruxelles, 2000.
Tableau 7b

Effet de l’augmentation de l’IPP d’une région, à concurrence de 100 millions d’euros (2010, en millions d’euros)

Effets Région wallonne Région flamande Région bruxelloise État fédéral
Augmentation de l’IPP wallon
ISN
Retour Total
– 41,3
+ 27
– 14,2
0
– 23,9
– 23,9
+ 4,8
– 3,2
+ 1,7
+ 136,5
Augmentation de l’IPP flamand
ISN
Retour Total
+ 16,2
– 10,6
+ 5,6
0
+ 13,8
+ 13,8
+ 4,8
– 3,2
+ 1,7
+ 79
Augmentation de l’IPP bruxellois
ISN
Retour Total
+ 16,1
– 10,6
+ 5,5
0
– 23,9
– 23,9
– 52,6
+ 34,5
– 18,2
+ 136,5
figure im12

Effet de l’augmentation de l’IPP d’une région, à concurrence de 100 millions d’euros (2010, en millions d’euros)

G. PAGANO, J. VANDERNOOT, « La solidarité dans le financement des régionset des communautés », Revue bancaire et financière, n° 5, 2010.

50 Le piège à la pauvreté budgétaire doit cependant être nuancé. En effet, en ce qui concerne les communautés, l’IPP est ristourné selon une stricte règle de proportionnalité n’intégrant pas de mécanisme de solidarité. Ainsi en 2010, les communautés bénéficient d’une rétrocession de 16,7311 % de l’IPP perçu sur leur territoire. Par conséquent, si l’IPP wallon augmente de 100 millions d’euros, il en résulte une hausse de l’IPP ristourné à la Communauté française de 16,7 millions d’euros, montant supérieur à la perte en termes de recettes régionales résultant de l’augmentation de l’IPP wallon, perte s’élevant à 14,2 millions d’euros. Si l’IPP bruxellois augmente de 100 millions d’euros, le gain pour la Communauté française s’élève à 80 % de 16,7 millions d’euros, soit 13,4 millions d’euros, montant cependant inférieur à la perte en termes de recettes régionales résultant de l’augmentation de l’IPP bruxellois, perte se montant à 18,2 millions d’euros. Il subsiste donc dans ce dernier cas un léger piège à la pauvreté budgétaire.

51 Enfin, si on se limite aux seuls effets régionaux, le piège à la pauvreté s’épuise progressivement avec le temps. On peut démontrer mathématiquement (cf. annexe) que sous l’hypothèse d’un taux annuel d’inflation de 1,7 % et d’un taux de croissance réelle du PIB de 1,7 %, le piège à la pauvreté budgétaire disparaîtra complètement dans 25 ans, soit pour l’année budgétaire 2035. Cette disparition n’est pas étonnante, puisque le montant de base de l’ISN augmente uniquement à concurrence de l’inflation (1,7 % par an, sous notre hypothèse) alors que la partie ristournée de l’IPP augmente annuellement à concurrence de l’inflation (1,7 % par an) et de la croissance réelle du PIB (1,7 % par an supplémentaire). Il est donc logique que le poids de l’effet juste retour se trouve progressivement renforcé, même si le phénomène est plutôt lent.

3.4. L’EFFET DE CONVERGENCE-DIVERGENCE

52 Outre le piège à la pauvreté, les tableaux 7a et 7b illustrent l’effet de convergence-divergence qui affecte, cette fois, l’État fédéral. En effet, si les IPP versés par les contribuables qui résident dans les régions convergent, c'est-à-dire si l’IPP perçu dans une ou deux régions les moins riches augmente ou si l’IPP de la région la plus riche diminue, l’État fédéral réalise une économie sur le montant de l’ISN. C’est l’effet de convergence.

53 En revanche, une évolution divergente de l’IPP, caractérisée par une augmentation de l’IPP de la région la plus riche ou une baisse de l’IPP des régions les moins riches, engendre une hausse de l’ISN à charge de l’État fédéral. C’est l’effet de divergence.

54 Ainsi, le piège à la pauvreté budgétaire qui caractérise les mécanismes de l’ISN et de la rétrocession de l’IPP a aussi pour conséquence de récompenser l’État fédéral pour les politiques de réduction des inégalités économiques qu’il mettrait en oeuvre.

3.5. LA CHARGE DE L’ISN

55 Enfin, il convient aussi de quantifier de façon plus précise la charge de l’ISN in fine.

56 En première analyse, c’est l’État fédéral qui octroie l’ISN aux régions dont l’IPP par habitant est inférieur à la moyenne nationale. Cependant, ce sont les contribuables flamands, wallons ou bruxellois qui versent les recettes fiscales de l’État fédéral. L’ISN est par conséquent implicitement financée par les trois régions elles-mêmes. Ainsi, les Régions wallonne et bruxelloise financent implicitement, pour partie, la solidarité dont elles bénéficient [22].

57 Le tableau 8 fournit le détail du phénomène depuis 1990. Si on s’en tient à 2010 (dernière ligne du tableau), la contribution des trois régions à l’IPP – qu’on prend ici, pour la facilité, comme approximation de la contribution des régions à l’ensemble des recettes fiscales – est de 63,43 %, 28,18 % et 8,38 %, respectivement pour la Flandre, la Wallonie et Bruxelles. Dès lors, la Région wallonne, qui perçoit 833,1 millions d’euros d’ISN, contribue simultanément à concurrence de 28,18% au financement de ce montant et finance également 28,18% de l’ISN bruxelloise. En fin de compte, la solidarité nette en sa faveur n’est plus que de 517,9 millions.

58 La Région bruxelloise constitue à plusieurs égards un cas intéressant. Elle a vu sa part de l’IPP passer de 11 % en 1990 à 8,38 % en 2010, soit une diminution d’un peu moins d’un quart. Par conséquent, elle est passée d’une situation où elle finançait en termes nets l’ISN (contribution nette à l’ISN de 1,677 milliard de francs belges en 1990) à la situation en 2010 où elle reçoit 285,1 millions d’euros d’ISN nominale soit une solidarité nette de 191,3 millions d’euros après déduction de sa contribution à sa propre ISN et à l’ISN wallonne. De plus, alors que l’IPPH bruxellois se situe en dessous de la moyenne nationale depuis 1997 (– 0,22 %), la Région bruxelloise bénéficie d’une ISN nette positive seulement depuis 2003. En effet, de 1997 à 2002 inclus, l’ISN nominale perçue par la Région bruxelloise était inférieure à sa contribution au financement des ISN wallonnes et bruxelloises, de sorte que son ISN nette restait négative.

59 Enfin, la Flandre n’ayant jamais bénéficié de l’ISN, elle est forcément contributrice nette sur l’ensemble de la période. En 2010, sa charge dans les ISN wallonne et bruxelloise se monte à 709,3 millions d’euros.

Tableau 8

Prise en charge de l’ISN (en milliers de francs belges (1990 -2002) ou d’euros (2003-2010), et en %)

ISN perçue nominale
Rég. Rég. Rég.
Année fl. wal. bxl.
Part de l'IPP total (%)
Rég. Rég. Rég.
fl. wal. bxl.
ISN financée par la Région
flamande
Rég. Rég. Rég.
fl. wal. bxl.
ISN financée par la Région
wallonne
Rég. Rég. Rég.
fl. wal. bxl.
ISN financée par la Région
bruxelloise
Rég. Rég. Rég.
fl. wal. bxl.
ISN perçue nette
Rég. Rég. Rég.
fl. wal. bxl.
1990 0,00
1991 0,00
1992 0,00
1993 0,00
1994 0,00
1995 0,00
1996 0,00
1997 0,00
1998 0,00
1999 0,00
2000 0,00
2001 0,00
2002 0,00
2003 0,00
2004 0,00
2005 0,00
2006 0,00
2007 0,00
2008 0,00
2009 0,00
2010 0,00
15 242 727,43
17 501 248,52
19 385 405,44
20 526 161,70
21 417 803,23
25 839 633,19
22 116 837,13
21 452 660,55
22 538 343,58
22 702 124,27
24 244 201,60
26 139 359,82
28 384 897,33
746870,89
757651,32
753892,29
867824,18
774916,17
799955,56
820770,30
833081,85
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
120 817,21
1 094 298,14
1 811 821,10
1 877 743,46
2 184 388,91
2 324 672,71
101 014,29
134 156,80
169 143,28
161 340,80
229 936,16
257 830,92
280 873,01
285 086,10
59,49
59,97
60,44
60,75
61,07
61,89
61,63
61,62
61,94
62,04
62,21
62,43
62,70
63,06
63,15
63,14
63,60
63,31
63,28
63,43
63,43
29,51
29,19
28,95
28,91
28,88
28,17
28,90
29,06
28,89
28,90
28,74
28,54
28,26
28,06
28,06
28,21
27,66
28,25
28,31
28,18
28,18
11,00
10,84
10,61
10,34
10,05
9,94
9,47
9,33
9,16
9,05
9,04
9,03
9,04
8,88
8,79
8,65
8,74
8,44
8,41
8,38
8,38
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
9 068 315,98
10495507,03
11717076,14
12468962,14
13080789,17
15992314,89
13630203,70
13218238,66
13960696,26
14084974,62
15082545,57
16318976,46
17796337,26
470 989,82
478 493,39
476 022,83
551 969,04
490 596,63
506 208,38
520 620,60
528 429,91
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
74442,55
677829,94
1124099,84
1168161,85
1363728,55
1457488,44
63701,38
84726,50
106800,49
102618,86
145571,75
163154,28
178159,80
180832,20
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
4497611,78
5108764,30
5612254,96
5933867,85
6184767,58
7279812,52
6392441,26
6233508,02
6512149,46
6561746,44
6968969,72
7460347,92
8022325,43
209566,79
212573,00
212650,50
240040,91
218930,42
226502,35
231331,23
234801,20
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
35 105,90
316 182,64
523 682,74
539 755,34
623 439,19
657 014,21
28 343,91
37 640,16
47 710,27
44 627,00
64 961,89
73 003,19
79 163,07
80 350,52
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
1 676 799,67
1 896 977,19
2 056 074,35
2 123 331,71
2 152 246,48
2 567 505,78
2 094 192,17
2 000 913,87
2 065 497,86
2 055 403,21
2 192 686,31
2 360 035,44
2 566 234,64
66 314,27
66 584,93
65 218,95
75 814,23
65 389,11
67 244,82
68 818,47
69 850,74
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
11 268,76
100 285,56
164 038,52
169 826,27
197 221,17
210 170,06
8 969,01
11 790,15
14 632,52
14 094,94
19 402,51
21 673,45
23 550,13
23 903,39
– 9 068315,98
– 10 495507,03
– 11 717076,14
– 12 468962,14
– 13 080789,17
– 15 992314,89
– 13 630203,70
– 13 292681,21
– 14 638526,20
– 15 209074,46
– 16 250707,42
– 17 682705,00
– 19 253825,69
– 534691,20
– 563219,89
– 582823,32
– 654587,90
– 636168,39
– 669362,66
– 698780,40
– 709262,11
10 745 115,65
12 392 484,22
13 773 150,49
14 592 293,85
15 233 035,65
18 559 820,67
15 724 395,87
15 184 046,63
15 710 011,47
15 616 695,09
16 735 476,53
18 055 572,72
19 705 557,68
508 960,18
507 438,17
493 531,52
583 156,26
491 023,86
500 450,01
510 275,99
517 930,13
– 1 676799,67
– 1 896977,19
– 2 056074,35
– 2 123331,71
– 2 152246,48
– 2 567505,78
– 2 094192,17
– 1 891365,42
– 1 071485,28
– 407620,63
– 484769,12
– 372867,71
– 451731,99
25731,02
55781,72
89291,80
71431,64
145144,53
168912,65
188504,41
191331,97
figure im13

Prise en charge de l’ISN (en milliers de francs belges (1990 -2002) ou d’euros (2003-2010), et en %)

4. LES COMMUNAUTÉS : LA SOLIDARITÉ IMPLICITE

60 Contrairement à ce qui prévaut pour les régions (cf. supra), la LSF n’instaure aucun mécanisme explicite de solidarité au bénéfice des communautés. Elle comporte cependant diverses formes implicites de solidarité (cf. 4.1).

61 Si la première bénéficiaire de ces dispositions est incontestablement la Communauté française (cf. 4.2), certaines d’entre elles bénéficient néanmoins à la Communauté flamande (cf. 4.3). Dans ce cas, on parlera plutôt d’« effet Mathieu » ou de solidarité à l’envers, puisque c’est la communauté la plus riche qui est aidée au détriment de la communauté la moins riche. Les dispositions en faveur de la Communauté flamande sont examinées ci-dessous pour deux raisons. D’une part, dans la première partie, le concept de solidarité a été défini au sens large comme toute dérogation à la proportionnalité ; d’autre part, les dispositions favorables à la Flandre atténuent certes l’ampleur de la solidarité au bénéfice de la Communauté française, mais elles sont loin de l’annuler.

4.1. LE FINANCEMENT DES COMMUNAUTÉS

62 S’il n’est pas utile de revenir ici de façon détaillée sur les règles qui régissent le financement des communautés [23], on peut néanmoins rappeler, de façon synthétique, que les communautés n’ont pas de fiscalité propre et tirent l’essentiel de leurs recettes de quatre sources. Ainsi, elles se voient ristourner une partie de l’IPP perçu auprès des personnes qui résident sur leur territoire ; elles bénéficient d’une dotation à charge de l’État fédéral (dite « masse TVA ») répartie entre elles proportionnellement au nombre d’élèves qui fréquentent l’enseignement obligatoire qu’elles subventionnent ; elles bénéficient également de moyens supplémentaires liés au refinancement intervenu en 2001 ; enfin, elles reçoivent de l’État fédéral une dotation visant à compenser la redevance radio et télévision (RTT), ancienne recette communautaire qui a été transférée aux régions.

63 L’importance de ces quatre recettes communautaires dans les budgets de 2010 est reprise au tableau 9.

Tableau 9

Les principales recettes communautaires (budget 2010 initial, en millions d’euros)

Recettes Communauté flamande Communauté française
IPP ristourné
Masse TVA
Refinancement
Dotation compensatoire de la RRT
3 774,0
6 656,5
963,3
530,4
1 997,5
5 050,1
549,3
294,2
figure im14

Les principales recettes communautaires (budget 2010 initial, en millions d’euros)

Budgets de la Communauté flamande et de la Communauté française.

64 Dans ces mécanismes de financement communautaires, on peut relever principalement trois dispositions qui constituent des formes de solidarité telle qu’elle a été définie dans la première partie, au sens étroit ou au sens large.

65 En premier lieu, les moyens attribués aux Communautés flamande et française pour financer leurs compétences en matière d’enseignement sont répartis entre elles, pour une part, selon les besoins, c’est-à-dire proportionnellement au nombre d’élèves, et non pas selon le principe dit du « juste retour », à savoir proportionnellement à l’IPP.

66 En deuxième lieu, les montants concernés par le paragraphe précédent varient annuellement en fonction d’un coefficient démographique qui reflète l’évolution de la population de moins de 18 ans depuis 1988 [24]. Ce coefficient démographique est calculé séparément pour chacune des communautés. On utilise ensuite, pour le calcul de ces montants attribués aux communautés, le coefficient le plus favorable, ce qui entraîne inévitablement un avantage, c’est-à-dire une autre forme de solidarité, pour l’autre communauté.

67 En troisième lieu enfin, l’IPP payé par les résidents bruxellois est affecté à l’une ou l’autre des communautés sur une base forfaitaire et non pas sur une base réelle [25]. Pour ce faire, on utilise la proportion 80 % pour les francophones et 20 % pour les néerlandophones. La même clé est utilisée pour la répartition de la redevance radio-télévision des Bruxellois et, depuis 2002, pour la dotation compensatoire qui la remplace. Il est probable, cependant, que la réalité sociologique soit plus proche de 90 % de francophones et 10 % de néerlandophones, comme le montrent les votes émis sur les listes francophones et néerlandophones à Bruxelles lors des élections régionales [26] ou encore le nombre de documents délivrés en français ou néerlandais dans les administrations bruxelloises.

4.2. LA SOLIDARITÉ AU BÉNÉFICE DE LA COMMUNAUTÉ FRANÇAISE

4.2.1. La masse TVA initiale

68 La LSF accorde une dotation d’un montant initial de 167,4 et 128,9 milliards de francs belges aux Communautés flamande et française, soit respectivement 56,49 % et 43,51 %, en vue de financer les compétences relatives à l’enseignement communautarisées en 1988 [27]. Ces montants initiaux étaient basés sur les budgets prévus pour l’enseignement dans les deux communautés l’année précédant la réforme (1988). Cette proportion correspond au nombre total d’élèves recensés en 1987 de l’école maternelle à l’université, en ce compris l’enseignement de promotion sociale mais à l’exception des étudiants universitaires étrangers.

69 Jusqu’en 1998, ces montants sont indexés annuellement, puis adaptés en fonction de l’évolution démographique, prise en compte à concurrence de 80%, à la hausse comme à la baisse. Les montants obtenus sont alors additionnés et le total ainsi obtenu est réparti selon la clé « élèves », à concurrence de 57,55 % pour la Communauté flamande et 42,45 % pour la Communauté française. La part de chaque communauté étant ainsi différente de ce qui prévalait avant la réforme, une correction transitoire est instaurée, de sorte que le passage d’un système à l’autre s’effectue sans heurts trop marqués. En 1989, 1990 et 1991, cette correction de transition est appliquée entièrement et la répartition de mise avant la réforme est alors d’application. Dès 1992, la correction est appliquée de façon dégressive à hauteur de 12,5 % par année, de sorte que la correction disparaît entièrement en 1999.

70 À partir de 1999, début de la période dite « définitive », les montants de base continuent à être indexés et adaptés au facteur démographique. Ils sont ensuite répartis proportionnellement au nombre d’élèves dans les Communautés française et flamande (cf. schéma de synthèse 2) À noter que le nombre d’élèves exclut les doubleurs, qui sont plus nombreux en Communauté française qu’en Communauté flamande.

Schéma de synthèse 2

Masse TVA (période définitive)

Base légale
Institutions concernées
Base du total à transférer
Règle d’évolution
Règle d’imputation pour la
population bruxelloise
Règle de répartition
LSF, article 38 §3
Communautés flamande et française
Montants de l’année précédente
Indexation et coefficient démographique le plus favorable (80 %)
80 % à la Communauté française et 20 % à la Communauté flamande
Proportionnellement au nombre d’élèves de 6 à 17 ans dans les écoles de
chaque communauté
figure im15

Masse TVA (période définitive)

B. BAYENET, G. PAGANO, Le financement des entités fédérées, op. cit., p. 104.

71 Pour mesurer la solidarité que ce mécanisme comporte implicitement, le tableau 10 reprend la masse TVA attribuée à la Communauté française de 1989 à 2010 (colonne a) et la compare avec les montants qui auraient été attribués à cette entité si la répartition avait été effectuée selon le principe du juste retour (colonnes c et g), c’est-à-dire en fonction du rendement de l’IPP prélévé sur le territoire de chaque communauté.

Tableau 10

Partie attribuée de la TVA et solidarité au bénéfice de la Communauté française (en millions d’euros, en%)

Année Mont.
LSF
(a)
IPP 1
(%)
(b)
Mont.
IPP 1
(c)
Écart 1
(euros)
(d)
Écart 1
(%)(e)
IPP 2
(%)
(f)
Mont.
IPP 2
(g)
Écart 2
(euros)
(h)
Écart 2
(%)
(i)
1990
1991
1992
1993
1994
1995
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010 *
3 283,8
3 378,3
3 442,5
3 537,6
3 613,6
3 660,0
3 726,2
3 777,8
3 810,4
3 843,1
3 989,8
4 109,1
4 196,4
4 277,6
4 384,7
4 517,3
4 611,8
4 708,6
4 936,5
4 962,0
5 060,1
37,96
37,51
37,09
36,83
36,56
36,45
36,12
36,16
35,87
35,80
35,64
35,43
35,17
34,84
34,76
34,80
34,36
34,71
34,76
34,61
34,61
2 870,4
2 919,2
2 950,6
3 020,6
3 071,9
3 110,8
3 146,5
3 202,5
3 212,2
3 241,2
3 313,0
3 383,2
3 246,0
3 460,0
3 534,9
3 647,6
3 678,7
3 795,5
3 981,8
3 981,0
4 059,7
+ 413,4
+ 459,1
+ 491,9
+ 517,0
+ 541,7
+ 549,2
+ 579,7
+ 575,3
+ 598,2
+ 602,0
+ 676,8
+ 725,9
+ 770,4
+ 817,6
+ 849,8
+ 869,7
+ 933,1
+ 913,0
+ 954,7
+ 981,0
+ 1 000,4
+ 12,59
+ 13,59
+ 14,29
+ 14,62
+ 14,99
+ 15,00
+ 15,56
+ 15,23
+ 15,70
+ 15,66
+ 16,96
+ 17,67
+ 18,36
+ 19,11
+ 19,38
+ 19,25
+ 20,23
+ 19,39
+ 19,34
+ 19,77
+ 19,77
39,07
38,60
38,16
37,87
37,57
37,44
37,07
37,10
36,79
36,71
36,55
36,34
36,07
35,73
35,65
35,67
35,23
35,56
35,60
35,45
35,45
2 954,0
3 004,0
3 035,4
3 105,9
3 156,8
3 195,2
3 229,5
3 285,6
3 294,7
3 323,6
3 397,6
3 469,9
3 514,5
3 548,7
3 624,7
3 738,8
3 772,7
3 888,2
4 078,5
4 077,8
4 158,4
+ 329,8
+ 374,3
+ 407,1
+ 431,7
+ 456,7
+ 464,8
+ 496,7
+ 492,2
+ 515,7
+ 519,6
+ 592,2
+ 639,2
+ 681,9
+ 729,0
+ 760,0
+ 778,5
+ 839,1
+ 820,4
+ 858,0
+ 884,2
+ 901,6
+ 10,04
+ 11,08
+ 11,82
+ 12,20
+ 12,64
+ 12,70
+ 13,33
+ 13,03
+ 13,53
+ 13,52
+ 14,84
+ 15,56
+ 16,25
+ 17,04
+ 17,33
+ 17,23
+ 18,20
+ 17,42
+ 17,38
+ 17,78
+ 17,82
figure im16

Partie attribuée de la TVA et solidarité au bénéfice de la Communauté française (en millions d’euros, en%)

* Provisoire.
SPF Budget ; calculs propres.

72 La loi de financement impute l’IPP bruxellois, de façon forfaitaire, à concurrence de 80 % pour la Communauté française et de 20 % pour la Communauté flamande. Cette clé de répartition sera reprise sous l’appellation IPP 1 dans nos tableaux (colonnes b, c, d et e). Cependant, on considère généralement que la population bruxelloise compte vraisemblablement plutôt 90 % de francophones et 10 % de néerlandophones. Cette clé de répartition est reprise dans les tableaux sous la colonne IPP 2 (colonnes f, g, h et i).

73 Ainsi, la solidarité au bénéfice de la Communauté française et relative à la masse TVA a représenté, de 1990 à 2010, entre 413,4 et 1 000,4 millions d’euros ou, si on applique une clé plus réaliste pour la répartition de l’IPP, entre 329,8 et 901,6 millions d’euros. Plus marquant encore, l’importance de la solidarité dans le total reçu augmente au fil du temps : en 2010, elle représente 19,77 % (ou 17,82 %) de la dotation, contre 12,59 % (ou 10,04 %) en 1990. Cette augmentation de l’importance relative de la solidarité s’explique aisément par la diminution de la part de la Communauté française dans l’IPP total, passant de 37,96 à 34,61 % dans l’hypothèse 1 et de 39,07 à 35,45 % dans l’hypothèse 2. On retrouve ici les effets des évolutions décrites à la section 2.2.

74 S’agissant des effets de la répartition entre les deux communautés d’un montant qui est fixé par ailleurs sans rapport avec la clé de répartition, la solidarité identifiée ci-dessus au bénéfice de la Communauté française est à charge de la Communauté flamande.

4.2.2. Le refinancement

75 La loi spéciale du 13 juillet 2001 [28] accorde aux communautés des moyens supplémentaires afin d’assurer leur refinancement. Ces moyens sont répartis selon deux critères : le nombre d’élèves et l’IPP. Le poids du premier critère diminue cependant au fil du temps : il est de 65 % en 2002, il diminue de 5 % par an de 2003 à 2009, puis de 10 % par an jusqu’en 2012, année à partir de laquelle la répartition des moyens supplémentaires est effectuée de façon entièrement proportionnelle à l’IPP (cf. schéma de synthèse 3).

Schéma de synthèse 3

Le refinancement des communautés

Base légale
Institutions concernées
Base du total à transférer
Règle d’évolution
Règle de répartition (2010)
Règle de répartition
(à partir de 2012)
LSF, articles 38 §3 bis et 3 ter, 40 bis et 40 ter
Communautés flamande et française
Montants fixés à l’article 38 §3 bis
Indexation, 91 % de la croissance du PIB et coefficient démographique
le plus favorable
20 % proportionnellement au nombre d’habitants de moins de 18 ans
et 80 % proportionnellement à l’IPP
Proportionnellement à l’IPP de chaque communauté
figure im17

Le refinancement des communautés

B. BAYENET, G. PAGANO, Le financement des entités fédérées, op. cit., p. 108.

76 Le tableau 11 présente les moyens accordés à la Communauté française en vertu des dispositions susmentionnées et expose les conséquences d’une répartition proportionnelle à l’IPP 1 et à l’IPP 2. La répartition prévue par la loi du 13 juillet 2001 accorde, en 2010, 550,4 millions d’euros à la Communauté française, soit 25,9 millions de plus que ce qui résulterait d’une répartition proportionnelle à l’IPP 1 et 13,1 millions de plus que ce qu’octroierait une répartition proportionnelle à l’IPP 2.

77 Après avoir progressé de 2002 à 2007 (de 8,4 à 34,7 millions d’euros de solidarité selon l’IPP 2), le montant de cette solidarité est en train de décroître depuis 2008. De même, l’importance relative de la solidarité décroît de façon régulière, passant de 12,77 % (10,51 %) à 4,71 % (2,38 %) entre 2002 et 2010. S’agissant des effets de la répartition entre les deux communautés d’un montant qui est fixé par ailleurs sans rapport avec la clé de répartition, la solidarité identifiée ci-dessus au bénéfice de la Communauté française est à charge de la Communauté flamande.

Tableau 11

Refinancement des communautés et solidarité au bénéfice de la Communauté française (en millions d’euros, en %)

Année Mont
LSF (a)
IPP 1
(%)
(b)
Mont
IPP 1
(c)
Écart 1
(euros)
(d)
Écart 1
(%)
(e)
IPP 2
(%)
(f)
Mont
IPP 2
(g)
Écart 2
(euros)
(h)
Écart 2
(%)
(i)
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010 *
79,9
139,9
200,8
350,3
401,1
529,7
612,1
482,5
550,4
35,17
34,84
34,76
34,80
34,36
34,71
34,76
34,61
34,61
69,7
122,6
177,3
313,0
360,0
483,2
564,7
449,3
524,5
+ 10,2
+ 17,4
+ 23,4
+ 37,3
+ 41,1
+ 46,5
+ 47,4
+ 33,2
+ 25,9
+ 12,77
+ 12,44
+ 11,65
+ 10,65
+ 10,25
+ 8,78
+ 7,74
+ 6,88
+ 4,71
36,07
35,73
35,65
35,67
35,23
35,56
35,60
35,45
35,45
71,5
125,7
181,8
320,8
369,2
495,0
578,4
460,2
537,3
+ 8,4
+ 14,2
+ 18,9
+ 29,5
+ 31,9
+ 34,7
+ 33,7
+ 22,3
+ 13,1
+ 10,51
+ 10,15
+ 9,41
+ 8,42
+ 7,95
+ 6,55
+ 5,51
+ 4,62
+ 2,38
figure im18

Refinancement des communautés et solidarité au bénéfice de la Communauté française (en millions d’euros, en %)

* Provisoire.
SPF Budget ; calculs propres.

78 La solidarité au profit de la Communauté française contenue dans le refinancement deviendra nulle en 2012, année à partir de laquelle la répartition des moyens supplémentaires sera entièrement proportionnelle à l’IPP. Plus encore, selon la clé IPP 2, plus réaliste, on assistera à une solidarité implicite au profit de la Communauté flamande et à charge de la Communauté française dès 2012, solidarité qui sera, cette fois, illimitée dans le temps.

4.3. LA SOLIDARITÉ AU BÉNÉFICE DE LA COMMUNAUTÉ FLAMANDE

4.3.1. La masse TVA initiale

79 L’article 38 §4 de la LSF dispose qu’une fois indexée, la masse TVA initiale est multipliée par un facteur démographique représentant 80% du rapport entre la population de moins de 18 ans au 30 juin de l’année considérée et la population de moins de 18 ans au 30 juin 1988. Ce facteur est calculé séparément pour les deux communautés – en appliquant à Bruxelles la proportion forfaitaire désormais traditionnelle : 80 FR-20 NL ; le coefficient le plus favorable est ensuite appliqué aux deux communautés. Depuis 1990, le coefficient le plus favorable a été, de façon constante, celui de la Communauté française : 0,99540 contre 0,991 pour la Communauté flamande en 1990 et 1,02848 contre 0,97656 en 2010, avec un écart nettement croissant (cf. tableau 12). Dès lors, son application aux recettes de la Communauté flamande conduit, en quelque sorte, à subsidier pour celle-ci des enfants qui n’existent pas, ou encore à subsidier de façon plus avantageuse les enfants réels.

Tableau 12

Les coefficients démographiques (1990-2010, sur la base de la population au 30 juin de l’année précédente)

Année Communauté flamande Communauté française
1990
1991
1992
1993
1994
1995
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
0,99118
0,98667
0,98546
0,98777
0,99007
0,99138
0,98994
0,98686
0,98383
0,97886
0,96851
0,96933
0,96651
0,96408
0,96328
0,96451
0,96656
0,96890
0,97040
0,97580
0,97656
0,99540
0,99255
0,99057
0,99390
0,99458
0,99550
0,99577
0,99595
0,99759
0,99690
0,99821
0,99972
1,00416
1,00750
1,01021
1,01280
1,01729
1,02020
1,02097
1,02766
1,02848
figure im19

Les coefficients démographiques (1990-2010, sur la base de la population au 30 juin de l’année précédente)

B. BAYENET, G. PAGANO, Le financement des entitésfédérées, op. cit. p. 103.

80 Le tableau 13 présente la masse TVA accordée à la Communauté flamande (colonne a) ainsi que les montants qu’elle obtiendrait en cas d’application du coefficient démographique flamand (CDF) (colonnes b et c). Y figurent aussi les montants que la Communauté flamande obtiendrait, avec son propre coefficient démographique, en cas de répartition proportionnelle à l’IPP 1 (colonnes d et e) et à l’IPP 2 (colonnes f et g).

81 En fin de compte, l’utilisation du coefficient francophone entraîne, pour la Communauté flamande, des recettes supplémentaires qui varient de 16,7 à 336,6 millions d’euros entre 1990 et 2010. S’agissant de montants supplémentaires accordés à la Communauté flamande sans affecter les montants perçus par la Communauté française (à laquelle on applique son propre coefficient démographique, et qui n’est donc pas lésée par l’application de ce même coefficient à la Communauté flamande), cette forme de solidarité est à charge de l’État fédéral.

82 Néanmoins, l’application conjointe du coefficient flamand et de la clé IPP 1 aurait fourni à la Communauté flamande, sur la même période, entre 397,4 et 613,4 millions d’euros au-delà du montant effectivement perçu. Le recours à la clé IPP2 réduit logiquement ces montants à respectivement 314,0 et 519,5 millions d’euros. Ces écarts signifient que la répartition de la masse TVA ne comporte pas, globalement, de solidarité au profit de la Communauté flamande, l’utilisation du coefficient démographique francophone compensant en partie seulement, et à charge de l’État fédéral, les effets du recours au nombre d’élèves, plutôt qu’à l’IPP, comme critère de répartition.

Tableau 13

Effet du coefficient démographique pour la Communauté flamande (1990-2010, en millions d’euros)

Année Mont LSF
(a)
Mont
CDF
(b)
Écart
CDF
(c)
Mont
IPP 1
(d)
Écart
IPP 1
(e)
Mont
IPP 2
(f)
Écart
IPP 2
(g)
1990
1991
1992
1993
1994
1995
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
4 275,4
4 403,5
4 512,6
4 663,6
4 788,6
4 873,6
4 958,5
5 077,5
5 143,8
5 210,2
5 306,3
5 439,7
5 546,1
5 653,1
5 784,0
5 963,8
6 095,7
6 225,0
6 520,3
6 540,3
6 669,6
4 258,8
4 378,9
4 490,8
4 636,5
4 768,6
4 855,1
4 958,0
5 032,9
5 085,2
5 124,6
5 185,7
5 272,5
5 338,1
5 409,9
5 514,9
5 679,1
5 791,7
5 912,6
6 194,6
6 210,3
6 333,0
+ 16,7
+ 24,6
+ 21,7
+ 27,2
+ 20,1
+ 18,6
+ 27,5
+ 44,6
+ 58,6
+ 85,6
+ 120,7
+ 167,2
+ 208,0
+ 243,2
+ 269,1
+ 284,7
+ 303,9
+ 312,4
+ 325,7
+ 330,0
+ 336,6
4 672,8
4 835,7
4 980,4
5 150,5
5 308,0
5 402,5
5 534,4
5 603,6
5 665,1
5 707,1
5 839,4
5 976,1
6 079,2
6 192,5
6 325,4
6 507,4
6 678,0
6 780,23
7 101,1
7 141,8
7 282,9
– 397,4
– 432,2
– 467,8
– 486,9
– 519,4
– 528,8
– 548,9
– 526,1
– 521,3
– 496,9
– 533,1
– 536,4
– 533,1
– 539,4
– 541,4
– 543,6
– 582,3
– 555,3
– 580,8
– 601,5
– 613,4
4 589,5
4 751,2
4 895,9
5 065,6
5 223,4
5 318,1
5 452,0
5 520,8
5 583,4
5 626,1
5 757,0
5 892,0
5 994,4
6 107,5
6 239,6
6 420,4
6 589,0
6 691,8
7 009,7
7 049,9
7 189,1
– 314,0
– 347,7
– 383,4
– 402,0
– 434,7
– 444,5
– 466,5
– 443,3
– 439,6
– 415,9
– 450,7
– 452,3
– 448,3
– 454,4
– 455,5
– 456,6
– 493,4
– 466,8
– 489,5
– 509,6
– 519,5
figure im20

Effet du coefficient démographique pour la Communauté flamande (1990-2010, en millions d’euros)

SPF Budget ; calculs propres.

4.3.2. Le refinancement

83 Le refinancement mis en œuvre par la loi spéciale du 13 juillet 2001 ne prévoit pas de solidarité au profit de la Communauté flamande, du moins jusqu’en 2011. Dès 2012 par contre, la disparition du critère « nombre d’élèves » et la prise en considération du seul critère « IPP » établira une forme de solidarité implicite au profit de la Communauté flamande et à charge de la Communauté française. En effet, l’IPP bruxellois restera imputé à concurrence de 80 % à la Communauté française et de 20% à la Communauté flamande alors qu’une imputation de type 90% pour la Communauté française et 10% pour la Communauté flamande serait davantage conforme à la réalité. Il en résultera un avantage illimité dans le temps pour la Communauté flamande. Sur la base des données de 2010, l’avantage théorique au profit de la Communauté flamande peut être estimé à quelque 11,6 millions d’euros.

4.3.3. La dotation compensatoire de la redevance radio-télévision

84 En 2001, les conséquences budgétaires du transfert de la redevance radio-télévision (RTT) des communautés vers les régions ont été neutralisées par l’octroi d’une dotation compensatoire aux communautés. Cette dotation correspond à la moyenne des RRT perçues, respectivement par les deux communautés, en 1999, 2000 et 2001, convertie aux prix de 2002 et indexée annuellement [29] (cf. schéma de synthèse 4).

Schéma de synthèse 4

La dotation compensatoire de la RRT

Base légale
Institutions concernées
Base du calcul
Règle d’imputation à Bruxelles
Règle d’évolution
Règle de répartition
LSF, article 47 bis
Communautés flamande et française
Moyenne de la RRT 1999 à 2001 aux prix de 2002
80 % à la Communauté française et 20 % à la Communauté flamande
Indexation
Calcul propre à chaque communauté
figure im21

La dotation compensatoire de la RRT

B. BAYENET, G. PAGANO, Le financement des entités fédérées, op. cit., p. 119.

85 La RRT bruxelloise étant répartie selon la clé 80 FR-20 NL (soit, dans notre terminologie, IPP 1), il en résulte un gain pour la Communauté flamande par rapport à la clé plus réaliste 90 FR-10 NL (IPP 2). Cette forme implicite de solidarité au profit de la Communauté flamande, et à charge de la Communauté française, est illimitée dans le temps. Le tableau 14 expose l’évolution des montants concernés entre 2002 (8,3 millions d’euros) et 2010 (9,7 millions d’euros).

Tableau 14

Dotation compensatoire de la RRT (2002-2010, en millions d’euros)

Année Montant LSF Montant IPP 2 Écart
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
457,2
464,4
474,2
487,4
496,1
505,1
527,8
527,5
537,0
448,9
456,0
465,6
478,6
487,1
496,0
518,3
518,0
527,3
+ 8,3
+ 8,4
+ 8,6
+ 8,8
+ 9,0
+ 9,1
+ 9,5
+ 9,5
+ 9,7
figure im22

Dotation compensatoire de la RRT (2002-2010, en millions d’euros)

86 S’agissant de répartir entre les deux communautés une dotation dont le montant est fixé par ailleurs indépendamment de la clé de répartition, cette forme de solidarité est à charge de la Communauté française.

4.4. CONCLUSION

87 Les diverses formes de solidarité mises en lumière ci-dessus pour l’une ou l’autre des communautés sont synthétisées, pour l’année 2010, dans le tableau 15, suivant l’hypothèse la plus réaliste (IPP 2).

Tableau 15

La solidarité au bénéfice des communautés (2010, en millions d’euros) *

Réf. Communauté
flamande
Communauté
française
État fédéral
Masse TVA initiale
Refinancement
Coefficient démographique
Dotation compensatoire de la RRT
Total
Tabl. 10
Tabl. 11
Tabl. 12
Tabl. 13
– 901,6
– 13,1
336,6
9,7
– 568,4
901,6
13,1
0,0
– 9,7
905,0
0,0
0,0
– 336,6
0.0
– 336,6
figure im23

La solidarité au bénéfice des communautés (2010, en millions d’euros) *

* Les bénéfices de la solidarité sont précédés d’un signe “+” ; la prise en charge de la solidarité, d’un
signe “–”.

88 Au total, la Communauté française bénéficie, au titre de la solidarité, de 905 millions d’euros, pris en charge, à concurrence de 568,4 millions par la Communauté flamande et de 336,6 par l’État fédéral. Si, poussant le raisonnement jusqu’au bout, on répartit, entre les deux communautés, les 336,6 millions d’euros financés par l’État fédéral en utilisant la clé de répartition IPP 2 (35,45 % de l’IPP est attribué à la Communauté française, 64,55% de l’IPP est attribué à la Communauté flamande), la solidarité perçue par la Communauté française est réduite de 119,3 millions d’euros, ce qui la fixe à 785,6 millions. À l’inverse, la Communauté flamande assume 217,3 millions d’euros supplémentaires de solidarité au bénéfice de la Communauté française, ce qui porte logiquement le total à 785,6 millions.

89 Ainsi, si la LSF ne prévoit aucun mécanisme explicite de solidarité au profit des communautés, elle est loin d’être dépourvue de toute forme de solidarité. De même, si certaines dispositions favorisent la Communauté flamande, elles ne suffisent pas à entraîner, globalement, un effet Mathieu, la communauté la moins riche bénéficiant in fine effectivement de la solidarité, et la communauté la plus riche en finançant indirectement la plus grande part.

5. L’ACCORD DU 11 OCTOBRE 2011

90 Le présent Courrier hebdomadaire a pour objectif de faire le point rétrospectivement sur la solidarité au bénéfice des régions et des communautés, telle qu’elle résulte de l’application de la LSF. Il ne comporte donc pas, en principe, d’analyse prospective, d’autant que le modèle qui, le cas échéant, sera mis en place ultérieurement n’est pas encore définitivement arrêté au moment où cette étude est imprimée.

91 Il peut néanmoins être utile de fournir ici, à titre d’illustration, un aperçu des éléments de la discussion en matière d’ISN, tels que ceux-ci ressortent de l’accord institutionnel du 11 octobre 2011.

92 C’est en effet en vue de répondre aux critiques flamandes formulées de longue date à l’égard de l’actuel mécanisme, notamment l’effet paradoxal et le piège à la pauvreté détaillés aux sections 3.2 et 3.3 supra, que l’accord du 11 octobre 2011 prévoit une révision complète du mécanisme d’ISN.

93 Ainsi, dans cette note, un mécanisme explicite de solidarité au profit des régions est maintenu.

94 Le mécanisme de solidarité en faveur de la région dont la part dans l’impôt des personnes physiques est inférieure à la part dans la population totale du pays sera désormais calculé comme suit [30] :

95 ISN = V x (db - dpb) x X

96 Dans lequel :

97

V représente l’ensemble des montants liés à l’autonomie fiscale et des dotations réparties selon une clé fiscale aux régions ainsi que 50 % de la dotation IPP des communautés ; le montant de base évolue en fonction de l’inflation et de la croissance réelle ;
db est la part de la population de la région dans la population totale du pays ;
dpb est le pourcentage de la région dans l’IPP maintenu au fédéral [31] ;
X est le facteur de compensation de l’écart qui est égal à 80 %.

98 La formule revient à gommer à hauteur de 80 % – pas davantage – les différences de rendement de l’IPP par habitant dans les régions les moins riches par rapport à la moyenne nationale. La correction s’appliquerait à l’ensemble des recettes à liées à l’IPP. Le nouveau mécanisme serait également lié à la croissance réelle du PIB, ce qui n’est pas le cas actuellement.

99 Cette disposition permet de se prémunir contre l’effet paradoxal – qui avait d’ailleurs disparu – ainsi que contre le piège à la pauvreté budgétaire, sans que, pour autant, les montants absolus de la solidarité soient affectés, dans un premier temps.

CONCLUSION

100 Les mécanismes régissant le financement des régions et des communautés établissent plusieurs formes de solidarité. Les montants que ces mécanismes mettent en jeu sont non négligeables, de l’ordre de deux milliards d’euros par an, répartis de façon à peu près égale entre les régions et les communautés.

101 En ce qui concerne d’abord les régions, la solidarité est prévue explicitement par le biais de l’intervention de solidarité nationale, accordant d’abord à la Région wallonne, puis aux Régions wallonne et bruxelloise un montant supplémentaire fonction de l’écart entre leur IPP par habitant et la moyenne nationale correspondante. Dans la première phase d’application de la LSF, ce mécanisme engendrait le phénomène dit du paradoxe des recettes, c’est-à-dire la situation dans laquelle la région initialement la plus riche (la Flandre ou Bruxelles selon les périodes) disposait, après solidarité, de recettes par habitant moins élevées que la région initialement la moins riche. Depuis 2003, l’intervention de solidarité nationale, si elle donne lieu à un important effet égalisateur, n’engendre plus de paradoxe des recettes. Elle comporte cependant, encore, un piège à la pauvreté budgétaire dans la mesure où si les Régions wallonne et bruxelloise accroissent leur contribution à l’IPP, elles reçoivent alors moins d’argent. L’importance de ce piège ne doit, cependant, pas être exagérée. La prise en compte de la rétrocession d’une part de l’IPP aux communautés suffit à constater que l’effet pervers est entièrement compensé par l’augmentation des recettes communautaires dans le cas d’une hausse de l’IPP wallon, et en quasi-totalité si l’IPP bruxellois augmente. En outre, un effet de convergence-divergence affecte l’État fédéral, celui-ci réalisant un bénéfice en cas de convergence, c’est-à-dire d’augmentation de l’IPP d’une des deux régions les moins riches, et subissant une perte en cas de divergence, c’est-à-dire d’augmentation de l’IPP de la région la plus riche.

102 En ce qui concerne ensuite les communautés, la répartition de la masse TVA initiale selon le nombre d’élèves, plutôt que selon l’IPP constitue indéniablement une forme de solidarité au bénéfice de la Communauté française. Mais d’autres éléments jouent en faveur de la Communauté flamande et tempèrent la solidarité au bénéfice des francophones. Ainsi, l’attribution à la Communauté flamande du coefficient démographique francophone, nettement plus favorable que le coefficient flamand, augmente artificiellement ses recettes.

103 La répartition des moyens supplémentaires accordés aux communautés en 2001, basée à la fois sur le nombre d’élèves et la contribution à l’IPP comportait, elle aussi, une part importante de solidarité au profit de la Communauté française. Cette solidarité diminue néanmoins d’année en année et disparaîtra totalement en 2012. On devrait dès lors assister à l’apparition d’une solidarité au profit de la Communauté flamande, la clé utilisée pour la répartition de l’IPP à Bruxelles surévaluant en effet le nombre de Bruxellois néerlandophones. Ce phénomène s’applique aussi à la dotation compensatoire de la redevance radio-télévision.

104 Au final, les avantages de la Communauté française et de la Communauté flamande ne s’équilibrent cependant pas, et on peut chiffrer à quelque 905 millions d’euros la solidarité nette dont la Communauté française a bénéficié en 2010.

105 La disparition du piège à la pauvreté, plus que la limitation du montant total de la solidarité inter-régionale, est à l’origine des propositions de modification du mécanisme prévues dans l’accord du 11 octobre 2011.

ANNEXE

Contrebalancement de l’ISN par l’effet « juste retour » (exemple de la Région wallonne, inflation et croissance réelle du PIB fixées à 1,7 % par an)

106 La recette totale de la Région (limitée ici à l’IPP ristourné et à l’ISN) est donnée par (chiffres 2010) :

equation im24

107 Pour isoler l’effet que produit une augmentation de l’IPP versé par la Région wallonne sur ses recettes totales, on prend la dérivée partielle de l’équation initiale :

equation im25

108 On calcule alors, le nombre d’années après lesquelles l’effet final est nul :

equation im26

109 Soit 25,1 années.

110 L’effet « juste retour » rattrape l’effet « solidarité » au cours de l’année 2035.

Notes

  • [1]
    Les réformes ont eu lieu en 1970, 1980, 1988-1989, 1993, 1999, 2001 (cf. B. BAYENET, G. PAGANO, Le financement des entités fédérées : un système en voie de transformation, CRISP, Bruxelles, 2011, p. 10). Une nouvelle réforme est en cours de négociation au moment où ce Courrier hebdomadaire est rédigé.
  • [2]
    Moniteur belge, 17 janvier 1989.
  • [3]
    Cf. G. PAGANO, Le financement des régions et des communautés. 1970-2002 : solidarité, responsabilité, autonomie et concurrence fiscale, CRISP, Bruxelles, 2002.
  • [4]
    Cf. art. 9 §1er, 2° de la LSF : « Les régions exercent leurs compétences en matière de réductions ou augmentations fiscales générales, de centimes additionnels ou de réductions d’impôt sans réduire la progressivité de l’impôt des personnes physiques et à l’exclusion de toute concurrence fiscale déloyale. »
  • [5]
    Le financement de la Communauté germanophone n’étant pas réglé par la LSF, son cas n’a pas été traité dans la présente réflexion. Pour une analyse des mécanismes appliqués à la Communauté germanophone, cf. B. BAYENET, S. VEIDERS, « Le financement de la Communauté germanophone », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 1983-1984, 2007 ; B. BAYENET, G. PAGANO, Le financement des entités fédérées, op. cit., p. 135-150.
  • [6]
    Loi ordinaire de réformes institutionnelles du 9 août 1980, Moniteur belge, 15 août 1980. Cf. G. PAGANO, Le financement des régions et des communautés, op. cit., p. 40-49.
  • [7]
    Cf. G. PAGANO, Le financement des régions et des communautés, op. cit., p. 20-23.
  • [8]
    L’auteur précise que l’autonomie fiscale implique la possibilité de créer des impôts ou de les supprimer, de déterminer et de modifier leur base imposable, de fixer les taux d’imposition et donc, le cas échéant, leur progressivité, et de fixer les conditions éventuelles d’exemption. La mesure dans laquelle la législation actuelle remplit ces conditions est analysée dans B. BAYENET, G. PAGANO, Le financement des entités fédérées, op. cit., p. 89-92.
  • [9]
    En effet, les politiques d’enseignement, de formation et de mise à l’emploi dépendent des communautés ou des régions, alors que l’indemnisation du chômage est à charge de la sécurité sociale fédérale.
  • [10]
    Cf. par exemple B. SEUTIN et al., Lambermont : de Staatshervorming 2001, Die Keure, coll. De bevoegdheidsverdeling in het federale België, n° 11, Bruges, 2001.
  • [11]
    Ces indicateurs portent tous deux sur les moyens et non sur les besoins. Il est vrai que ceux-ci sont plus difficiles à synthétiser, car ils peuvent varier fortement en fonction des politiques considérées.
  • [12]
    Nous ne nous intéressons pas aux résidents à l’étranger qui travaillent dans l’une des régions belges, car leur IPP éventuel n’est pas pris en compte pour l’application de la LSF.
  • [13]
    Cf. par exemple A. ACCAPUTO, M. VERBEKE, G. PAGANO, « Le manifeste du groupe In de Warande », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 1913-1914, 2006.
  • [14]
    Sénat, Projet de loi spéciale relative au financement des communautés et des régions. Rapport fait au nom de la commission de la Révision de la Constitution et des Réformes des institutions par F. Erdman et E. Poullet, document législatif 562-2, 10 janvier 1989, p. 211 ; M. DAERDEN, W. DUMAZY, Les finances publiques de la nouvelle Belgique fédérale, Labor, 1992, p. 370 ; G. PAGANO, Le financement des régions et des communautés, op. cit., p. 72.
  • [15]
    L’ISN n’a pas été attribuée en 1989.
  • [16]
    C’est « l’effet de seuil » bruxellois, cf. à ce propos G. PAGANO, Le financement des régions et des communautés, op. cit., p. 207.
  • [17]
    Vlaams Economisch Verbond, association du patronat flamand.
  • [18]
    Cf. G. PAGANO, « Les résolutions du Parlement flamand pour une réforme de l’État », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 1670-1671, 2000, p. 40-42.
  • [19]
    Cf. notamment le point de vue du groupe In de Warande dans son manifeste pour une Flandre indépendante, tel que synthétisé par G. PAGANO, M. VERBEKE, A. ACCAPUTO, « Le manifeste du groupe In de Warande », op. cit., p. 21-28. En particulier : « Pour être raisonnables, les transferts ne peuvent mettre en danger le bien-être, les investissements et la constitution de réserve dans la région qui les verse. De plus, dans la région qui les reçoit, ils ne peuvent entraver le développement d’une dynamique socio-économique propre qui conduit à les réduire, les faire disparaître, voire à inverser leur sens », p. 21.
  • [20]
    Cf. G. PAGANO, Le financement des régions et des communautés, op. cit., p. 66-68.
  • [21]
    Le phénomène est connu de longue date. Cf. G. PAGANO, « Les effets des disparités inter-régionales de croissance sur le financement des régions », Bulletin de documentation du Ministère des Finances, 7 août 1991.
  • [22]
    G. PAGANO, J. VANDERNOOT, « La solidarité dans le financement des régions et des communautés », Revue bancaire et financière, n° 5, 2010.
  • [23]
    Celles-ci sont présentées de façon complète et détaillée dans B. BAYENET, G. PAGANO, Le financement des entités fédérées, op. cit.
  • [24]
    Cette évolution est prise en compte à 80 %.
  • [25]
    Celle-ci est inobservable puisque, en l’absence de sous-nationalité, les contribuables bruxellois ne sont pas répartis entre Flamands et francophones.
  • [26]
    Lors des élections régionales du 7 juin 2009, les listes francophones totalisaient 88,8 % des votes valables.
  • [27]
    Loi spéciale du 8 août 1988 modifiant la loi spéciale de réformes institutionnelles du 8 août 1980, Moniteur belge, 13 août 1988.
  • [28]
    Loi spéciale du 13 juillet 2001 portant refinancement des communautés et extension des compétences fiscales des régions, Moniteur belge, 3 août 2001.
  • [29]
    Article 47bis de la loi spéciale du 13 juillet 2001 portant refinancement des communautés et extension des compétences fiscales des régions, Moniteur belge, 3 août 2001.
  • [30]
    E. DI RUPO, Note du formateur. Un État fédéral plus efficace et des entités plus autonomes, 4 juillet 2011, p. 108.
  • [31]
    L’accord ne donne aucune explication sur ce qu’il faut entendre par « IPP maintenu au fédéral ».
Français

La solidarité prévue par la loi de financement en 1989 a un impact budgétaire de plus de deux milliards d’euros par an. Au moment où un accord a été conclu sur la révision de cette loi, il est opportun de faire le point sur la solidarité mise en place depuis 20 ans : son ampleur, son évolution et ses effets pervers.

En ce qui concerne les régions, l’intervention de solidarité nationale a engendré jusqu’en 2002 une situation paradoxale dans laquelle la région la plus riche disposait, après solidarité, de recettes par habitant moins élevées que la région la moins riche. Depuis 2003 subsiste un piège à la pauvreté budgétaire : si les régions wallonne et bruxelloise accroissent leur contribution à l’IPP, leur financement diminue. La volonté d’abolir cet effet pervers est un des motifs de la réforme du système actée par l’accord du 11 octobre 2011.

Du côté des communautés, la répartition de la masse TVA selon le nombre d’élèves constitue une forme de solidarité au bénéfice de la Communauté française. Mais d’autres éléments jouent en faveur de la Communauté flamande et tempèrent la solidarité au bénéfice des francophones. Ainsi, l’attribution à la Communauté flamande du coefficient démographique francophone, nettement plus favorable que le coefficient flamand, augmente artificiellement ses recettes. Quant au refinancement prévu en 2001, il comportait, lui aussi, une part importante de solidarité au profit de la Communauté française, mais qui s’inversera à partir de 2012 au profit de la Communauté flamande.

Au final, les avantages de la Communauté française et de la Communauté flamande ne s’équilibrent cependant pas, et on peut chiffrer à quelque 905 millions d’euros la solidarité nette dont la Communauté française a bénéficié en 2010.

Le financement des entités fédérées, et en particulier les mécanismes de solidarité entre régions et communautés prévus par la loi de 1989, constituent le noyau dur des négociations entre francophones et néerlandophones. L’impact budgétaire de ces mécanismes dépasse deux milliards d’euros par an. Au moment où un accord a été conclu sur la révision de la loi de financement, il est opportun de faire le point sur la solidarité mise en place depuis vingt ans : son ampleur, son évolution et ses effets pervers.
Les auteurs rappellent d’abord les écarts économiques et fiscaux existant entre les régions, qui donnent un sens à l’existence-même d’une solidarité inter-institutionnelle. Ils décrivent ensuite, à travers une analyse détaillée et chiffrée, l’impact des mécanismes de solidarité sur les moyens dont disposent les trois régions ainsi que les Communautés française et flamande. Ils évoquent les paradoxes initiaux et le piège à la pauvreté budgétaire qui subsiste depuis 2003 au niveau des régions. Ils rappellent les éléments qui jouent en faveur de la Communauté française, mais aussi de la Communauté flamande – avantages qui ne s’équilibrent cependant pas au final.
Ce tableau éclaire les actuelles discussions en matière de solidarité, en pointant certains effets pervers qui sont à l’origine de la réforme actée par l’accord institutionnel du 11 octobre 2011.
Mis en ligne sur Cairn.info le 16/01/2012
https://doi.org/10.3917/cris.2122.0005
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