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« De quelque manière qu’une cause agisse, elle ne devient violence, au sens prégnant du terme, qu’à partir du moment où elle touche à des rapports moraux. »
W. Benjamin

1Je voudrais soutenir ici que la question de la « violence » occupe une place importante au sein de notre vie politique ; que nos démocraties ne se définissent pas par leur capacité à exclure la violence de la vie politique. Je pense au contraire que leur conjoncture actuelle se trouve définie par le traitement qu’elles font de la violence qui habite et traverse nos sociétés. Mais quelle est cette place de la violence au cœur de notre vie politique ?

2Le couple conceptuel violence-politique structure grandement le cadre de la pensée politique. Chez beaucoup d’auteurs les deux concepts se trouvent confondus, d’autres les séparent radicalement. Ainsi dans son célèbre essai « Sur la violence », l’auteure de La condition humaine a contribué à faire de cette dichotomie une opposition fondamentale pour la pensée du politique [1]. Sans prétendre échapper à la force de la tenaille que cette double tradition représente (celle qui considère violence et politique comme intrinsèquement liées et celle qui les considère au contraire comme radicalement séparées), je voudrais revenir ici sur l’articulation de ces deux termes dans un cadre spécifique qui se définit au croisement de deux axes. Le premier résulte du constat que la démocratie a perdu ses ennemis et qu’elle règne sans partage. Le second est donné par la présence, à l’intérieur des sociétés occidentales, de nouvelles classes populaires qui se définissent dans un cadre postclasse ouvrière. L’hypothèse que je veux présenter ici à la discussion est que ces deux axes donnent une teneur politique à la violence qui la distingue des modes sur lesquels elle a été pensée jusqu’aux années 1980.

3À partir des années 1980 la conjoncture ainsi redéfinie pouvait se lire à partir de la place que la violence occupe dans nos sociétés. Il n’est plus question, comme au temps des analyses proposées par Hannah Arendt, des rapports entre violence et domination, violence et pouvoir ou encore violence et État. Les rapports entre violence et émancipation ne semblent pas non plus occuper le centre de la réflexion. À suivre les recherches sur « les violences », les « incivilités », ou sur les « illégalismes », il semblerait, en ce début du xxie siècle, que la violence aurait quitté le domaine de la vie politique pour aller se diffuser dans les interstices de la vie sociale. À en croire les analyses contemporaines en sociologie et dans la presse, mais aussi chez les gouvernants, la violence aurait définitivement déserté la vie politique pour aller s’installer au sein de la société civile. C’est ainsi qu’elle se trouve liée à des thèmes tels que le sentiment d’insécurité ou la délinquance. Mais c’est aussi qu’elle apparaît comme disséminée, omniprésente, polymorphe. Face à une telle diffusion, il est vrai que les sciences sociales semblent perdre pied et ne plus savoir comment contribuer à la réflexion politique. Ainsi, des publications récentes croient-elles voir de la violence partout. On parle alors de violences familiales et conjugales, de violences à l’école, de violence urbaine ou de violence des banlieues, de « violence dans les médias », de violence au travail, de violences politiques, de criminalité et de pédophilie, de « ces violences qu’on ne voit pas » (l’immigration, le handicap, ou les maltraitances invisibles), de la violence des enfants, de la violence juvénile, des ambiguïtés de la figure de victime et de la « culture de la peur » [2]. Et dans un magma similaire, le troisième congrès de l’Association française de sociologie a réuni en 2009 plus de 2 000 communications autour du thème « violence et société ».

4La disparition de la violence collective traditionnelle donne une nouvelle visibilité à d’autres usages de la contrainte qui semblent donc interpeller autrement le pouvoir et le vivre ensemble. Quelle est leur teneur politique ? Suffit-il de dire simplement que ces formes de la violence sont une conséquence des nouveaux conflits sociaux ? Quels sont les mécanismes sociaux et/ou politiques qui leur sont associés ? Ce sont là quelques-unes des questions posées aujourd’hui aux sciences sociales, bien différentes de celles soulevées par les régimes autoritaires, la guérilla ou le terrorisme d’État. Dès lors, il s’agit de savoir si les sciences sociales ont élaboré les outils conceptuels nécessaires pour penser, sans les réduire à des simples effets des structures sociales, ces formes de violence qui, faute d’être tout à fait nouvelles, dominent la sphère publique aujourd’hui. Je prendrai successivement deux exemples tirés de recherches récemment menées. Le premier renvoie au cas des violences observées en Argentine depuis le retour de la démocratie en ce pays à partir de 1983. Le second est donné par les violences observées en France depuis les années 1980.

Violence et politique en Argentine

5À la sortie de la dernière dictature militaire (1976-1983), la société argentine ratifie l’ancien pacte politique de 1853 par lequel les acteurs politiques renoncent à l’utilisation des armes. L’acte électoral, seul, légitime le pouvoir. Rien de moins banal pour une société qui vient de traverser la plupart du xxe siècle dans l’instabilité et dans une perpétuelle remise en question de l’institution démocratique, tant les coups d’État et les dictatures militaires ont été fréquentes. Or, près de trente ans après le 10 décembre 1983, le système institutionnel semble avoir acquis une solidité et une force inédites. Les crises économiques de 1989-1991 et de 1998-2002 ont été de dures épreuves mais ont pu être surmontées dans et par le système. Le traitement des violations des droits de l’homme, certes laborieux, donne aussi la mesure de la fermeté des nouvelles modalités de gestion des conflits. De nouveaux mouvements sociaux de défense des droits de l’homme comme les Mères de la place de Mai ont contribué à fixer une limite morale forte à l’usage de la violence en politique.

6La violence ne prend plus les formes typiques de l’avant 1983. Les forces armées ne préparent plus des coups d’État et ne sont donc plus des acteurs directement politiques. La gauche, quant à elle, a cessé de chercher dans la rébellion armée le moyen pour transformer l’ordre social. Le recours ouvert à la force semble avoir été expulsé des conflits pour le pouvoir, qu’ils se logent au sein de l’État, des partis, des syndicats ou des groupes d’intérêt. Est-ce dire que la société argentine a définitivement conjuré le problème de la violence politique ? Certainement pas, aucune société ne peut l’éliminer complètement car une telle prétention équivaut à souhaiter l’abolition de toute forme de conflit. Tout au contraire, il est aisé de montrer que la violence niche au cœur de la vie politique, bien que, par sa forme et le traitement qu’elle reçoit, elle se distingue de sa forme ancienne [3].

7On peut ainsi noter ce qu’il convient d’appeler « crimes politiques ». Faits divers au départ, ils sont réintroduits dans la politique par les médias ou les mouvements de défense des droits de l’homme, qui dénoncent l’implication du pouvoir ou d’acteurs politiques. Ces rapports crapuleux ne sont certainement pas inédits dans l’histoire du pays mais, révélateurs des côtés obscurs de la politique, ils sont d’autant plus insupportables qu’ils semblent indiquer que peu de choses ont changé avec le retour à l’ordre constitutionnel. Comptent ici l’assassinat de deux journalistes et d’un entrepreneur lié au gouvernement pendant les années 1990, la mort suspecte du fils du président de la République, Carlos Menem Jr., et la disparition en 2006 d’un témoin clé dans le procès des tortionnaires.

8De nature fort différente, les nombreuses interventions des forces de l’ordre qui se soldent par la mort de citoyens, suspectés de crimes ou pas, occupent une place particulièrement importante par sa signification. La violence y est présente non seulement en raison de leur brutalité mais du fait de l’utilisation illégale, aux limites de la clandestinité, d’un pouvoir légitime. Même dépourvue de buts partisans, cette violence ne reste pas en dehors du politique car elle est l’œuvre de membres de l’appareil d’État. La fréquence de ces interventions policières illégitimes a conduit à baptiser l’institution de policía de gatillo fácil (« police à la détente facile »), et à dénoncer les nombreux cas de torture de jeunes des quartiers populaires dans les commissariats de police. Parmi ces « bavures », l’assassinat en pleine rue de groupes de jeunes dans la banlieue de Buenos Aires a suscité une inquiétude majeure dans les années 1980. Il est certain que la corruption généralisée au sein de la police et un fonctionnement qu’on a qualifié de mafieux constituent l’un des problèmes les plus graves du système institutionnel démocratique, que les solutions envisagées n’arrivent pas à résoudre [4]. Les effets des réorganisations successives de la police de Buenos Aires sont quasiment nuls, comme l’illustre le « massacre de Ramallo » en septembre 1999 : elle exécute devant la presse les preneurs d’otages dans le braquage d’une banque, puis tue le seul survivant au commissariat où il était détenu. Les excès policiers donnent souvent lieu à de massives « marches du silence », 39 marches entre 1989 et 1999 suite à des meurtres impunis [5].

9La violence policière ne peut pas être séparée de l’extension de la délinquance, notamment après l’hyperinflation de 1989. Avec la montée du chômage et la dégradation quasiment instantanée des revenus des classes moyennes et populaires, la pauvreté, l’indigence et la faim font leur entrée tant dans les statistiques que dans les discours publics. Dans ce cadre, des délits relevant du « droit commun » entrent dans la vie politique car tout indique que ces violences font partie de la nouvelle question sociale. L’association de la délinquance et la pauvreté est telle que le délit se banalise en tant que moyen de vie au sein des couches populaires [6], et l’association entre cette délinquance et les actions illégales de la police (qui en réalité forme la trame de la délinquance) font rentrer ces formes de délit ordinaire au sein de la vie politique. La teneur politique est à chercher aussi dans une opération sous-jacente, engendrée pour l’essentiel par les médias, qui fait d’un ensemble hétérogène de cas individuels un « fait collectif (la délinquance, l’insécurité, la violence) », et ouvre ainsi un vaste champ au politique qui exige une répression plus sévère.

10Les transformations sociales ont relié la violence à une autre mutation : le renouveau du répertoire de l’action collective populaire. L’affaiblissement d’un syndicalisme autrefois tout-puissant ainsi que l’approfondissement de la fracture sociale et le désengagement de l’État font apparaître des modalités de contestation inédites liées à la nouvelle politicité des classes populaires [7]. Le recours à la force y est présent, sous des formes diverses. Tout d’abord celles plus directement liées à un accroissement soudain de la misère, qui explosent violemment au plus fort des crises économiques de 1989 et de 2001, et qu’on appelle saqueos. La détérioration à la fois vertigineuse et profonde des conditions de vie de couches entières de la population est suivie par le saccage de commerces et supermarchés dans les périphéries des grandes villes. La colère et la faim se mêlent pour mettre fin aux gouvernements de Raul Alfonsin (1983-1989) et de Fernando De La Rúa (1999-2001), tenus l’un et l’autre pour responsables du désastre économique, incapables de protéger la population contre une dégradation aussi soudaine.

11On doit de même noter les révoltes survenues dans certaines capitales de province, soumises aux plans dits « d’ajustement structurel » imposés dès le premier gouvernement de Carlos Menem. Si le non-paiement des salaires de la fonction publique est généralement l’étincelle initiale, elles sont dirigées plus largement contre la corruption et l’arbitraire des systèmes politiques locaux, népotistes et autoritaires en dépit de leur origine électorale. Des véritables rébellions locales surviennent entre 1989 et 1999 dans les provinces de Chaco, Chubut, Tucumán, Jujuy, Catamarca, Chubut, Córdoba Mendoza, Río Negro, San Juan, Santa Fe et Santiago del Estero. Des explosions de colère que la presse baptise de estallidos débutent par la mise à feu et le saccage d’édifices qui représentent le pouvoir (le siège du gouverneur, des tribunaux, des mairies, des assemblées législatives locales) suivies de la mise à sac et l’incendie du domicile des autorités. Leur démission forcée semble traduire le bien-fondé des mouvements qui ont été souvent interprétés comme des réponses à la surdité des autorités face à la souffrance populaire. De ce point de vue, on peut dire que ces estallidos ont anticipé la révolte des journées de décembre 2001 culminant avec la démission du président Fernando De La Rúa.

12L’utilisation du terme estallidos (explosions), qui dénote exclusivement leur caractère soudain et collectif, met en évidence la difficulté à les nommer. Ce sont ainsi des « événements » qui résulteraient directement de l’insatisfaction, voire de l’ire, déliés des structures établies. Or les analyses détaillées montrent que la prétendue spontanéité de ces comportements violents censés exprimer, à l’état brut, une réaction à la misère, s’insère dans le fonctionnement ordinaire du système politique. Car si ces « explosions » constituent la réponse à une situation, elles ne sont pas pour autant des conduites collectives désorganisées, dépourvues de sens et de rapport entre fins et moyens. Comme les « émeutes » en France, l’utilisation d’étiquettes telles qu’« explosions » ne fait que rendre invisibles leurs liens avec la politique, visible aussi bien dans leur déclenchement que dans leur continuité. Mais il y a aussi d’autres indications du contenu politique de ces révoltes. À la différence des attaques de commerces (les saqueos), et en dépit des conséquences du retard dans le payement des salaires sur les budgets des familles, dans le cas des estallidos, la révolte ne prend pas pour cible les commerces mais le siège des autorités [8].

13Il faut citer également les mouvements collectifs organisés, dotés d’une certaine continuité, parmi lesquels les invasions de terres urbaines (asentamientos) et les piqueteros. La difficulté, voire l’impossibilité d’accéder au logement est à l’origine des occupations illégales de terrains, publics et privés, qui se généralisent pendant la seconde moitié des années 1980 dans l’ensemble des grands centres urbains. Différents degrés de violence semblent inhérents à l’organisation même de ces mouvements et sont aussi monnaie courante à l’intérieur des asentamientos ; comme les affrontements avec la police ou avec des groupes d’habitants de quartiers voisins qui résistent à leur installation [9]. Quant aux piqueteros, il s’agit du mouvement social le plus important par sa répercussion et sa durée. Constitués au départ par des chômeurs et des travailleurs refusant la fermeture d’usines, ils se manifestent tout d’abord vers 1996, dans les provinces de Neuquén et de Salta, pour devenir ensuite la force contestataire centrale parmi les diverses modalités de mobilisation collective qui fourmillent lors de la crise de 2001 [10]. Par une sorte de collective bargaining by riot, pour reprendre l’expression d’Eric Hobsbawm, leurs demandes de travail et d’allocations sociales adoptent une stratégie inédite en Argentine : le barrage des routes, des rues ou des points d’accès aux centres urbains, et ce, pendant des périodes relativement prolongées. À la place de grèves impossibles, les chômeurs optent pour un moyen de contrainte dont l’efficacité provient aussi bien de leur capacité à perturber la circulation des biens et des personnes que de leur visibilité, que les médias contribuent à accroître. Les piquetes ne manquent pas de susciter des réactions analogues : ils soulèvent l’indignation des classes moyennes et ils sont accusés de violer des droits constitutionnels par une fraction importante de l’opinion, qui dénonce simultanément l’inaction des autorités. La répression n’a pas été absente de ce mouvement, notamment à ses débuts : l’institutrice Teresa Rodriguez est assassinée par la police à Cutral-Co en 1997, et l’autonomie d’action de la police de la province de Buenos Aires, ainsi que d’obscures manœuvres politiciennes se soldent par l’assassinat de deux militants à Avellaneda en 2002. Mais la nature politique de la violence résulte ici du conflit que le fait de barrer les voies de communication provoque entre ceux qui dénoncent leur exclusion sociale suite à une modernisation impulsée par le haut, qui les laisse sans travail, et ceux qui, bénéficiaires de la modernisation, revendiquent le droit à la circulation.

Violence et politique en France

14Cette description sommaire de formes de violence couramment qualifiées de « sociales » nous permet maintenant de les resituer dans le contexte français pour mettre en évidence leur caractère éminemment politique. En effet, en France comme en Argentine, l’opposition radicale existant entre « violence » et « politique » conduit à des formes de négation et de disqualification qui conduisent à enfermer la politique dans le cadre institutionnel ; il est dès lors impossible d’observer les modes d’articulation entre vie politique et vie sociale.

15En France aussi, la délinquance est devenue un problème directement politique de par son association avec la nouvelle question sociale ; mais ces liens sont différents de ceux observés dans le cas de l’Argentine. En France, la délinquance est associée à la présence, à la périphérie des grandes villes, d’un nouveau segment des classes populaires que la plupart du temps on appelle « les banlieues ». Ces catégories sont, certes, socialement déterminées par la montée du chômage, surtout du chômage juvénile, et de l’appauvrissement. Mais elles sont surdéterminées, d’une part par l’histoire coloniale et les formes d’intégration sociale réservées aux migrants originaires des anciennes colonies, et d’autre part par l’inscription territoriale de ces catégories que certains ont qualifiées de « ghettos » [11]. Cette association banlieues-violence est tellement forte qu’elle en vient à s’apparenter à une stigmatisation très couramment reproduite par les médias et les hommes politiques qui désignent avec récurrence les territoires de ces catégories sociales comme « zones de non droit » ou caractérisent leurs quartiers comme des quartiers « violents ».

16Dans une enquête récente que nous avons faite auprès des bibliothécaires travaillant dans des quartiers d’habitat social de huit villes de la périphérie parisienne, ceux-ci ont caractérisé les quartiers dans lesquels ils travaillaient comme « violents » et traversés par « l’insécurité » [12]. Les bibliothécaires interrogés ont appuyé leur discours sur la réputation de l’environnement dans lequel ils travaillent et sur les échos qu’ils ont pu en avoir avant de prendre leurs fonctions, un imaginaire de « violence » dans les « quartiers difficiles » : « Quand j’ai dit à ma famille que je viendrai dans le 93, ils m’ont dit : “Mais t’es folle !” » (Agnès). « Quand je suis venu travailler ici, je savais que ça allait être dur… L’image que j’en avais, c’était la banlieue, les violences, tout ce qu’on entend à la télé quoi » (Baptiste). Ou encore ce jeune bibliothécaire qui a fait le choix de ne pas communiquer à ses parents son lieu de travail et a préféré leur faire croire qu’il travaillait à Paris pour « ne pas leur faire peur ».

17On sait combien les études sur l’insécurité en France ont hérité des travaux en anglais bâtis autour de l’expression fear of crime. Et on sait combien cette notion a été liée, notamment après les élections présidentielles de 2002, à la question de la violence des « jeunes des quartiers » et au phénomène des « bandes » [13]. Les travaux sur l’insécurité distinguent deux périodes : les années 1970 avec la montée du sentiment d’insécurité telle qu’il apparaît dans les sondages d’opinion, et la seconde moitié des années 1990 où l’insécurité se consolide comme préoccupation politique [14]. À partir de ce moment, on assiste à une poussée des préoccupations sécuritaires, et l’insécurité devient un enjeu électoral de premier plan. C’est alors que l’insécurité est associée à la question urbaine, aux « cités », aux « jeunes » et à l’immigration [15]. En 2005, la resignification du mot « racaille » est venue sanctionner l’intégration de cette question dans le champ politique.

18Ce phénomène est associé aux nouveaux répertoires d’action collective qui ont été décrits au cours des années 1980 comme des « violences urbaines », avant qu’on parle d’« émeutes », mot qui se consolide aussi pendant les événements de l’automne 2005. Se développe alors toute une littérature qui aborde la construction politico-médiatique de ces « violences ». Ces mouvements de révolte collective sont directement liés aux déterminations et aux surdéterminations que nous venons d’évoquer, mais ont un lien immédiat avec les « interventions » de l’État dans ces territoires et ont été instrumentalisés lors de différentes campagnes électorales. Cependant, malgré ces constats, la sociologie et la science politique ont longtemps tardé, et elles l’ont fait à reculons, à reconnaître la nature éminemment politique de ces formes de mobilisation collective [16].

19Une forme spécifique de la violence politique trouve, en France aussi, son épicentre dans l’action de la police à l’égard de ces mêmes populations [17]. Il s’agit ici une réponse directement élaborée par l’État à ce magma de représentations à travers lesquelles sont situées ces nouvelles catégories populaires au sein de l’espace social. Comme pour le cas argentin, l’un des facteurs de politisation de ces violences provient du sentiment, de plus en plus étendu parmi ces fractions des classes populaires, que la police fait un usage illégitime de la force. Le caractère récurrent de ces violences qui tombent « toujours sur les mêmes » contribue à l’élaboration d’une frontière sociale qui laisse d’un côté du corps politique les banlieues, les Arabes, les Noirs, les jeunes garçons, et de l’autre côté la police, les hommes politiques, les enseignants, les Français, les représentants de l’État. Ainsi, le rappeur Mohamed Bourokba, dit Hamé, du groupe La Rumeur accuse : « Les rapports du ministère de l’Intérieur ne feront jamais état des centaines de nos frères abattus par les forces de police sans qu’aucun des assassins n’ait été inquiété » [18]. Et, de la même manière, l’incapacité ou la réticence de l’institution judiciaire à soumettre la force publique à la loi transforme le problème de la délinquance en une opposition entre deux groupes sociaux en conflit. C’est la raison pour laquelle la quasi-totalité des « émeutes » viennent en réponse à la mort d’un jeune dans le cadre d’une confrontation avec la police – la question de savoir si la mort a été provoquée sciemment ou par accident étant le premier objet du conflit et de la dénonciation. L’action policière politise aussi l’ensemble du conflit État-classes populaires car elle réserve fréquemment le même type de répression (souvent illégale) aux faits qui en principe relèvent du droit commun (lorsqu’elle poursuit un vol ou un trafic illégal) et aux soulèvements collectifs. Comme le montre Didier Fassin, l’utilisation systématique des figures de « rébellion », de « légitime défense », et d’« outrage à l’autorité » ne laissent pratiquement aucune chance de résister à la violence policière, la loi aidant à renforcer le caractère asymétrique du rapport de pouvoir [19]. Du côté des classes populaires, la répétition des révoltes sous forme d’émeute vient mettre en question la légitimité de la répression policière et la tentative de contrôle de ces fractions des classes populaires par la force. Le conflit s’installe alors comme un rapport de forces dont l’issue est, de part et d’autre, incertaine et ce malgré l’asymétrie des moyens organisationnels et des instruments de violence dont disposent les deux groupes.

20Dans ce cadre, l’émeute permet l’extension du conflit en deux directions. En premier lieu, elle entraîne une extension du conflit parce que son irruption dans l’espace public sort la violence policière de son invisibilité intrinsèque (la police agissant la plupart du temps dans la clandestinité) et rend possible la prise de parole et le débat. Combien de pages écrites, émissions de radio et de télévision ont été destinées aux émeutes et à leur contexte ? Le sort des quartiers entre dans l’espace public, lié à la fois aux conditions sociales de ces fractions populaires (échec scolaire massif, racisme et discriminations quotidiennes, chômage, relégation urbaine) et à l’action de l’État (limites de la politique de la ville, attitude des forces de l’ordre).

21En deuxième lieu, le conflit s’étend parce que l’émeute se prolonge vers d’autres formes d’action collective. Ainsi les « casseurs », ces groupes de jeunes des banlieues qui depuis les années 1990 s’invitent dans les cortèges des manifestations pour en découdre avec la police, détruire du mobilier urbain, des commerces et des voitures, voler et souvent s’affronter violemment aux manifestants [20]. La manifestation leur offre l’occasion d’agir hors de l’espace confiné de leur quartier. Mais elle leur donne aussi l’occasion de positionner leur action dans une ambivalence tranchante. D’une part, les casseurs se différencient des manifestants. D’autre part, ils viennent inscrire leur condition sociale au sein de conflits sociaux dont ils sont exclus en tant qu’acteurs. Ainsi ont-ils fait irruption lors des manifestations étudiantes des années 1990, lors du mouvement de protestation contre le Contrat première embauche du gouvernement Villepin en 2006 et lors du mouvement d’opposition à la réforme des retraites du gouvernement Fillon en 2010. C’est comme s’ils venaient dire, en même temps et de manière paradoxale, « nous sommes là, parmi vous » et « nous n’avons rien à voir avec vous » ; leur présence dans les cortèges signifiant la première position, la violence de leur action signifiant la seconde.

22Mais les formes de violence développées récemment en France ne sont pas l’exclusivité des « banlieues ». Il faut aussi mentionner d’autres protestations qui sont plus ou moins directement associées à des formes de violence. Depuis la crise économique de 2008, de nombreuses occupations d’usines menacées de fermetures se sont accompagnées de séquestrations de cadres dirigeants et certains travailleurs ont même menacé de faire exploser les usines si leurs patrons refusaient de négocier. Les réformes de l’université et du code du travail ont vu des oppositions fortes se développer parmi les jeunes qui ont occupé des lycées et des universités en 2008. En 1997, des groupes de chômeurs ont occupé des entreprises, des antennes Assedic et d’autres lieux symboliques comme le château de Versailles [21]. Les Enfants de Don Quichotte ont installé des tentes à Paris en 2006 et dans d’autres villes en 2007 pour dénoncer la pénurie de logements. Enfin, au sein de la constellation des mouvements écologistes, des champs de cultures transgéniques ont été détruits, des restaurants de firmes étrangères démontés avec des tracteurs, des oppositions ont régulièrement été organisées contre l’industrie nucléaire.

23Des formes plus classiques de violence politique sont également présentes dans la démocratie française. Ainsi des conflits liés aux revendications nationales, la question basque et la question corse. Entrent dans cette même catégorie les nombreux attentats perpétrés par des mouvements d’inspiration islamiste sur le territoire français, notamment dans les années 1990 – ce dernier cas méritant une attention particulière. Il renvoie en effet aux formes classiques de la violence politique (ceux qui prennent les armes en revendiquant un but politique et sollicitant une réponse de l’État) ; mais, à regarder de plus près, cette forme a également un lien avec les nouvelles formes de violence dont il est question ici, et qui habitent l’intérieur de l’espace démocratique. D’un côté, la cible de ces attentats est l’État dénoncé en tant que représentant de la Nation et de puissance néocoloniale. De l’autre côté, les attentats ont parfois été commis grâce au recrutement d’individus sensibilisés par le mécontentement des « banlieues », associé à la question néocoloniale. L’action de la police sur le plan intérieur est ainsi liée à l’action de l’armée sur le plan extérieur. Comme le rappelle Didier Fassin, la mémoire des répressions policières des années 1960, dans le contexte de la guerre d’Algérie, est vive parmi les populations algériennes en France, et elle est encore ravivée par le caractère raciste de certaines exactions de la police d’aujourd’hui.

Dire la violence politique en régime démocratique

24Les sciences sociales se trouvent confrontées à une situation nouvelle qui appelle l’examen de la frontière entre violence et politique. Toute violence n’est pas (en dernière instance) politique, et on peut considérer que la politique n’est pas (en dernière instance) violence, mais tracer une séparation trop radicale entre les deux termes constitue probablement un obstacle à la compréhension des violences émergeant à l’intérieur du régime démocratique et non plus comme des projets visant sa déstabilisation. À la fin des années 1980, tout semble indiquer la fin de la violence politique. Pratiquement aucun groupe politique ne revendique la violence armée dans la poursuite d’objectifs politiques ou doctrinaires. Parallèlement, la démocratie ne connaît plus d’ennemis. Aucun acteur politique, révolutionnaire ou réactionnaire, ne cherche à abolir la démocratie. Ces mouvements cachent pourtant, derrière l’adhésion qu’ils suscitent naturellement, un troisième aspect. Tout se passe comme si l’emploi de la force implosait. À la violence politique organisée succède une dissémination de la violence devant laquelle le système judiciaire semble impuissant. Ses réponses sont insuffisantes, contestées, perçues comme illégitimes. Cependant, aucune autre solution n’est revendiquée, seule la Justice peut répondre légitimement à la violence. Deux problèmes découlent de cette tension : les rapports entre violence, politique et justice (et la légitimité de l’État dans l’utilisation de la force), et la présence de nouveaux répertoires d’action pour les classes populaires.

25Le cas argentin permet de voir comment l’expansion du sentiment d’« impunité » a mis la Justice devant le procès instruit à son encontre par les victimes, les accusés ou les nombreux mouvements sociaux constitués précisément en raison de ses insuffisances. Les difficultés du système judiciaire à fournir une solution aux blessures provoquées par le terrorisme d’État (notamment celle des « disparus ») et par les deux crises majeures qu’ont été l’hyperinflation de 1989-1991 et la récession de 1998-2002, ont alimenté ce sentiment d’impunité tant dénoncé par les Mères de la Place de Mai. Les « puissants » responsables des pires atrocités et des catastrophes économiques ne sont jamais jugés. Puis, à l’intérieur des institutions (police, justice, parlement, gouvernement), la corruption et les dysfonctionnements sont si profonds que les institutions deviennent une partie du problème qu’elles sont censées régler. La corruption du régime protège à la fois politiciens, juges, entrepreneurs et policiers. L’impunité constitue le ciment de cet alliage qui fait le lien entre les violences et les critiques de la corruption politique. Elle permet également de réunir des faits de nature très diverse. Si ces « violences » impliquent très indirectement les pouvoirs en place, l’impuissance ou la lenteur de l’action judiciaire les unifie et les politise.

26À l’image des mouvements revendiquant la vérité sur le sort des victimes de la dictature et le jugement des responsables, les mobilisations récentes en demande de « justice » court-circuitent les partis, portées par des citoyens et les médias. Initiées pour la plupart par les proches des victimes, ces mobilisations reprennent le modèle d’action inventé par les « mères » sous le régime militaire, puis continué par les grands-mères et les fils des « disparus ». La Loi se montre incapable de soumettre le Pouvoir. L’État a bien récupéré son monopole de la force, reste encore qu’il l’exerce dans la légalité. En France, on n’observe pas un tel dysfonctionnement de la Justice. Mais les soupçons de partialité à l’égard des forces de l’ordre, des entrepreneurs et des hommes politiques politisent également la violence au sein de la démocratie. Un sentiment exacerbé d’inégalité à l’égard des riches, des politiciens et des technocrates alimente la distance entre gouvernants et gouvernés. Et la mémoire des guerres coloniales, les guerres que l’Occident mène dans des pays islamistes et les discriminations à l’égard des minorités renforcent cette politisation de la violence.

27Les liens entre l’extension des différentes formes de violence et l’augmentation vertigineuse des exclus, des pauvres et des désaffiliés sont évidents ; et ceci aussi bien en Argentine qu’en France, même si l’objectivité de ces processus de désintégration sociale n’a pas la même ampleur dans les deux pays. Dans la mesure où les liens entre question sociale et extension de la violence sont évidents non seulement pour l’observateur mais également pour les couches sociales aisées, le profil des nouvelles « classes dangereuses » se précise : la si souvent citée « fracture sociale » risque de se doubler d’une frontière quasi statutaire. L’association entre la violence éparpillée et la nouvelle question sociale est telle qu’elle excède le seul traitement de l’illégalité par les institutions judiciaires et de police. Dans ce contexte, la réponse aux questions posées par la violence ressentie comme excessive et insupportable ne semble pouvoir venir que du politique.

28La séparation radicale entre « violence » et « politique » rend impossible toute alternative qui ne se résume pas à une pure et simple condamnation de la violence, et alimente ainsi les tentations sécuritaires. Cette séparation bride aussi bien l’action des hommes et des groupes politiques que les discours des universitaires et des intellectuels. Elle agit comme une contrainte intellectuelle qui débouche sur un véritable aveuglement quand on cherche à comprendre la réalité politique des classes populaires.

29La présence des classes populaires au sein de la démocratie a évolué ces trente dernières années jusqu’à permettre l’identification d’une nouvelle « politicité » populaire. Les classes populaires d’aujourd’hui ne se distinguent pas de la classe ouvrière seulement par leur « sociabilité » (le chômage, la précarité et l’inscription territoriale), elles s’en distinguent aussi politiquement. En premier lieu, parce que l’État a mis en place une véritable batterie de politiques publiques en direction de l’univers populaire, qui peut aller de la création de corps spécialisés de police et de tactiques répressives à la mise en place de politiques sociales de nature diverse (politique de la ville, d’insertion, de lutte contre le chômage, éducatives, etc.). En deuxième lieu, parce que les classes populaires ont développé des stratégies de survie et des modes d’action collective qui les mettent fréquemment en contact avec la violence et qui les laissent souvent en situation d’illégalité. Trafics, occupations illégales de terres, travail au noir, saccages (saqueos), émeutes (estallidos) et barrages de routes en Argentine ; bizness, illégalismes divers dans le parc de logement social, immigration clandestine, occupations d’usines et séquestrations de cadres dirigeants, casseurs et émeutiers, occupations de la voie publique et de locaux d’institutions diverses, destruction de cultures, affrontements répétés avec la police en France.

30La caractérisation de ces formes d’action comme « violentes » a pour conséquence une certaine disqualification des classes populaires qui les met en dehors de l’espace politique ; cette disqualification augmente la perplexité des acteurs politiques censés « réceptionner » les messages portés par ces actions qui s’exercent depuis la périphérie de l’ordre social. Intellectuels, enseignants, travailleurs sociaux, journalistes, et hommes politiques manquent de mots politiques pour nommer ce qu’ils ont en face d’eux – quand toutefois ils ont la volonté de comprendre politiquement cette altérité. Ainsi, dans une enquête récente, nous avons demandé à des bibliothécaires des quartiers de la Seine-Saint-Denis de nous dire quels ont été les faits violents les plus fréquents dont ils avaient été victimes ou témoins. Ils n’ont ainsi que rarement évoqué des violences physiques contre les personnes (moins de 1 %), mais assez fréquemment les violences contre les biens (50 %), et dans l’immense majorité des cas (plus de 90 % de réponses), le mot « violence » vient qualifier des indisciplines, des échanges verbaux et généralement tout refus d’obéir aux injonctions d’une autorité (bibliothécaire, enseignant, policier, animateur). Dans une conjoncture de changement social et politique comme celle que nous vivons, il convient de mettre en question ces distinctions taxinomiques qui séparent radicalement la politique du social, de la violence et de l’économie. C’est pourquoi nous avons proposé le concept de « politicité » qui devrait nous permettre de mieux comprendre la vie politique de nos régimes démocratiques et, surtout, d’observer la manière dont la présence des classes populaires provoque une inflexion politique au sein de nos régimes.

31Hannah Arendt faisait appel aux notions de « bureaucratie » et de « règne de l’Anonyme » pour désigner « le plus tyrannique » des « systèmes de domination », et elle y trouvait l’une des causes qui pouvaient conduire à la violence dans les sociétés contemporaines. En effet, le caractère systémique de la domination « rend impossible la localisation de la responsabilité et l’identification de l’adversaire » [22]. Dans le contexte actuel, on peut penser que quelque chose de cet ordre demeure dans l’analyse de nos régimes politiques. Les mécanismes de domination économique et d’exclusion sociale ayant lieu dans le cadre de la loi et de la légitimité démocratique, il est difficile d’identifier un opposant à l’heure de contester ces formes de domination et d’exclusion. À ceci près qu’on n’observe pas aujourd’hui de revendication idéologique de la violence. Ainsi, les « émeutiers » et les « casseurs » disent seulement, comme beaucoup de leurs pairs des « quartiers », que les voies classiques de la mobilisation politique (vote, manifestation, grève et participation aux politiques sociales), « ça ne sert à rien ». L’évolution sociale des dernières décennies ne les dément pas. La « politicité » populaire se déroule tout à l’intérieur de l’espace démocratique mais dans le cadre d’une dépréciation des formes de participation et de mobilisation qui ont été constitutives de l’espace démocratique lui-même. D’où la situation particulièrement tendue et difficile des catégories les plus exposées : les individus qui les composent revendiquent la citoyenneté et pour ce faire font violemment irruption dans un système politique incapable de les entendre, ce qui risque d’ajouter, comme beaucoup l’ont signalé, une raison politique à leur exclusion sociale.

32Dire la violence à l’intérieur de l’espace démocratique est difficile car celle-ci y est inscrite sur un mode contradictoire. D’un côté, « la violence » apparaît comme un mot fourre-tout, foncièrement indéterminé qui permet de qualifier des formes d’action très hétérogènes, de l’insulte à la contrainte physique. Il est, de ce point de vue, pratiquement impossible de parler de « la » violence sans préciser le sens accordé au signifiant. Mais il y a, au sein de notre régime politique, un usage du mot qui est au contraire surdéterminé : semble être violent tout ce qui sort de l’espace démocratique, et tout ce qui est violent est politiquement exclu. Alors, dans les conditions sociales d’inégalité, de discrimination, d’appauvrissement et de désaffiliation qui marquent le quotidien d’une partie croissante des classes populaires, cet usage du mot sert en pratique à la disqualification de certains modes d’action et à la défense de l’ordre existant.

Notes

  • [1]
    H. Arendt?: «?Sur la violence?», in Du mensonge à la violence, Paris, Calmann-Lévy/Pocket, 2000, p. 105-187 (Crises of Republic, 1972).
  • [2]
    V. Bedin et J.-F. Dortier, Violence(s) et société aujourd’hui, Paris, Sciences humaines, 2011. L’ouvrage réunit une trentaine d’auteurs et d’articles d’anthropologues, sociologues, psychologues, historiens, politologues.
  • [3]
    Pour une description détaillée des formes de la violence dans l’Argentine démocratique, voir Merklen D. et Sigal S., «?Violence et politique. Une approche argentine?», La Nouvelle Revue Argentine, no 2, avril 2009, p. 11-20.
  • [4]
    Deux associations de défense des droits humains ont émergé en réponse aux exactions policières, la Commission de familles des victimes de la violence institutionnelle (cofavi) et la Coordination contre la violence policière et institutionnelle (correpi).
  • [5]
    S. Pereyra, «?Cuál es el legado del movimiento de derechos humanos??», in F. Schuster et alii?: Tomar la palabra. Estudios sobre protesta social y acción colectiva en la Argentina contemporánea, Buenos Aires, Prometeo, 2005, p. 151-191.
  • [6]
    Kessler G., Sociología del delito amateur, Buenos Aires, Paidós, 2004.
  • [7]
    Merklen D., «?Une nouvelle politicité pour les classes populaires en Argentine?», in P. Bouffartigue et S. Béroud?: Quand le travail se précarise, quelles résistances collectives??, Paris, La Dispute, 2009, p. 237-251.
  • [8]
    M. Farinetti, «?Los significados del “santiagueñazo”, un estallido social?», in Merklen D. & Prévôt-Schapira M-F., Argentine?: année zéro??, L’Ordinaire latino-américain, no 188, Toulouse, 2002, p. 109-117.
  • [9]
    D. Merklen, Inscription territoriale et action collective. Les occupations illégales de terres urbaines depuis les années 1980 en Argentine, anrt, 2006 – thèse de doctorat, Paris, ehess, 2001.
  • [10]
    M. Svampa et S. Pereyra, Entre la ruta y el barrio. La experiencia de las organizaciones piqueteras, Buenos Aires, Biblios, 2003.
  • [11]
    D. Lapeyronnie, Ghetto urbain. Ségrégation, violence, pauvreté en France aujourd’hui, Paris, Robert Laffont, 2008.
  • [12]
    D. Merklen, Sociabilité et politicité. Quand les classes populaires questionnent la sociologie et la politique, Mémoire d’habilitation à diriger des recherches (hdr), Paris, Université Paris Diderot, 2011.
  • [13]
    Ph. Robert, L’Insécurité en France, Paris, La Découverte, 2002.
  • [14]
    P. Champagne, «?La construction médiatique des “malaises sociaux”?», Actes de la recherche en sciences sociales, no 101-102, décembre 1991, p. 64-75. Voir aussi, Peralva A., et Macé E., Médias et violences urbaines. Débats politiques et construction journalistique, Paris, La Documentation française, 2002.
  • [15]
    L. Bonelli, La France a peur. Une histoire sociale de l’insécurité, Paris, La Découverte, 2008.
  • [16]
    G. Mauger, L’émeute de novembre 2005. Une révolte protopolitique, Paris, Le Croquant, 2006.
  • [17]
    D. Fassin, La force de l’ordre. Une anthropologie de la police des quartiers, Paris, Le Seuil, 2011.
  • [18]
    P.?Tevanian, «?Entretien avec Mohamed Bourokba?», Mouvements, no 57, janvier-mars 2009, p. 120.
  • [19]
    Ibid., chapitre 4, «?Violences?», p. 175-216. Voir aussi Jobard F. et Névanen S., «?La couleur du jugement. Discriminations dans les décisions judiciaires en matière d’infractions à agents de la force publique?», Revue française de sociologie, no 48 (2), 2007, p. 243-272.
  • [20]
    G. Ricordeau, «?Pourquoi cassent-ils?? Présentation des discours et motivations des casseurs?», Déviance et société, 2001/2, vol. 25, p. 165-183.
  • [21]
    V. Cohen, «?Transformations et devenir des mobilisations collectives de chômeurs?», Les Mondes du travail, no 6, 2008, p. 91-102.
  • [22]
    Op. cit., p. 138.
Denis Merklen
Maître de conférences à l’université Paris Diderot – Paris-7 et chercheur à l’Institut de recherches interdisciplinaires sur les enjeux sociaux – iris, ehess, Denis Merklen a été professeur invité dans plusieurs universités étrangères, en Amérique latine notamment. Depuis 2007, il est responsable du Réseau thématique Mouvements sociaux de l’Association française de sociologie (rt21).
Il s’est spécialisé dans la sociologie politique des classes populaires, domaine dans lequel il est connu par son concept de « politicité populaire ». Actuellement, il dirige une équipe de recherche autour du thème des Cultures populaires et leur rapport à l’écrit entre l’ehess et l’université Paris Diderot. Depuis 2007, il mène une enquête de terrain de type ethnographique sur les attaques faites contre les bibliothèques de quartier dans la périphérie des grandes villes en France. C’est sur ce thème qu’il a rédigé son Habilitation à diriger des recherches, dont le volume principal a pour titre Sociabilité et politicité. Quand les classes populaires questionnent la sociologie et la politique (Paris, novembre 2011, 498 pages). Il est notamment l’auteur de Social Boundaries and Family Upbringing, (European Studies Programme – University of Delhi, Working Paper Series, 2011/IV, avec M. D. Gheorghiuet, M. de Saint Martin, 2011, 24 p.) ; Quartiers populaires, quartiers politiques (Paris, La Dispute, 2009) ; et L’Expérience des situations limites (Paris, Karthala, 2009 – avec G. Bataillon).
Dernière publication diffusée sur Cairn.info ou sur un portail partenaire
Mis en ligne sur Cairn.info le 06/06/2012
https://doi.org/10.3917/cite.050.0057
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