CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1Comprendre l’interaction entre les visions procurées par les plantes psychotropes et la nature de leurs représentations nécessite de se pencher à la fois sur les modalités historiques qui ont favorisé ou freiné la production de ces représentations ainsi que sur les matrices d’imaginaire mondialisées dans lesquelles celles-ci s’insèrent aujourd’hui.

2Dans le musée imaginaire contemporain mondialisé du bwiti et de l’iboga, on trouve peu de représentations de visions. Contrairement, par exemple, aux visions de l’ayahuasca représentées dans des tableaux, livres et films, les visions de l’iboga n’ont pas fait l’objet d’une importante production iconographique dans l’espace public. Cet article propose en premier lieu d’explorer plusieurs pistes pour expliquer cette rareté : la multitude d’influences et de chapelles ainsi que l’absence d’une Église unifiée du bwiti au Gabon, la culture du secret entourant les visions dues à l’iboga, la focalisation sur les artefacts cultuels plutôt que sur les visions dans le processus de patrimonialisation du bwiti, les réappropriations identitaires et communautaires s’adressant à un public international restreint, la récente inscription de ce rite et de cette plante psychotrope dans le marché mondial du chamanisme. En deuxième lieu, l’article examine les différentes matrices de représentations qui structurent ce musée imaginaire et le type de productions, surtout audiovisuelles, qui alimentent iconographiquement ces matrices. Enfin, il s’agira, à partir d’entretiens, de révéler de quelle manière sont induites, envisagées et investies les visions de l’iboga dans de nouveaux cadres rituels du bwiti aujourd’hui en Europe.

Influences, interdits et émiettements d’une religion fondée sur la révélation

3Deux sortes de bwiti peuvent être distinguées au Gabon. D’une part, celui des Mitsogho, le bwiti disumba, comprenant deux variantes, l’une privilégiant la thérapie psychosomatique et l’autre visant l’acquisition de pouvoirs surnaturels. D’autre part, celui des Fang, l’ethnie majoritaire du nord du Gabon, de la Guinée équatoriale et de la région de l’estuaire, qui ont emprunté le culte du bwiti aux Mitsoghos au début du xxe siècle pour le superposer à leur culte des ancêtres (byeri, interdit par les missions chrétiennes pendant la colonisation) et à des éléments chrétiens.

4Le bwiti fang à lui seul est imprégné d’une triple influence, celle du bwiti des Mitsogho du Sud Gabon, celle de la tradition du culte des ancêtres fang et celle de l’éducation chrétienne missionnaire. Les variantes internes que l’on trouve dans le bwiti fang dépendent de ces sources d’influence : le bwiti disumba revendique son affiliation au bwiti des Mitsogho, le bwiti assumgha ening affirme son identité culturelle fang, et le bwiti ndéa est le plus proche d’une sorte de « christianisme africain ». Une forme de bwiti éclectique se pratique également à Libreville depuis la fin des années 1990, puisant aussi bien dans le bwiti fang que dans celui des Mitsogho, et est empreinte d’une rhétorique ayant trait au New Age[1] et au chamanisme. En dépit de toutes ces variantes, l’activité cérémonielle rituelle (ngoze) du bwiti se compose la plupart du temps de rituels exécutés par les initiés (banzi) et de danses nocturnes accompagnées de chants et de musique instrumentale comme celle de la harpe (ngombi), dont le but est de vivre symboliquement la naissance, la mort et la renaissance du monde et de l’être humain, le culte visant à renouer le lien avec les dieux et les ancêtres et à résoudre les maux éprouvés par les initiés.

5L’initiation repose en grande partie sur l’absorption d’un hallucinogène végétal, l’iboga (tabernanthe iboga, famille des apocynacées), consommée sous forme de râpure et de macération d’écorce de la racine, l’alcaloïde principal (l’ibogaïne) se trouvant abondamment dans les racines. L’iboga, aussi nommée eboka ou eboga, est importante pour le culte du bwiti, au point que le nom de la plante désigne parfois métonymiquement le culte tout entier. L’iboga est considéré par les Fang comme une plante de « passage » (entre le village et la forêt, les morts et les vivants) et les visions engendrées porteuses de réponses sur le passé, le présent et l’avenir (Goutarel et al., 1993). L’iboga peut être soit consommé en petites doses, pour pouvoir rester éveillé sans fatigue pendant toute la nuit, soit en grande quantité dans un but initiatique afin d’obtenir des visions. La surdose d’ibogaïne, en fonction du seuil physiologique des individus, peut entraîner la mort [2].

Productions artistiques du bwiti

6Dans les années 1960, le sociologue Jacques Binet, l’un des rares chercheurs à s’être intéressé aux productions artistiques dans le bwiti, affirme qu’il n’y a aucune limitation à la création des bwitistes fang du Gabon et identifie deux formes d’expression artistiques principales, servant surtout à « embellir » les cérémonies et les lieux de culte (Binet, 1994 : 11). L’art littéraire (pièces, poésies, chants, textes spéciaux pour les fêtes notés sur des cahiers parfois ornés d’illustrations représentant des dessins de corps, de plantes, d’animaux, d’objets, ou des compositions politiques et historiques) et l’art pictural (peintures murales représentant un monde d’esprits).

7Par ailleurs, J. Binet relève « deux caractères de cet art sacré naissant » dans les années 1960 chez les bwitistes fang du Gabon : le passage de la sculpture à la peinture ainsi que le passage du noir et blanc à la couleur. Selon lui, ces passages sont notamment dus à l’utilisation de l’iboga qui engendrerait des visions en couleurs, contrairement à l’alan [3] utilisée précédemment par les Fangs dans le culte du byeri et qui provoquerait surtout des hallucinations auditives et des visions en noir et blanc (Binet, 1974 : 36 ; Binet, 1994 : 11). La nature des visions dépendrait donc de la plante psychotrope qui déterminerait le type de support sur lequel les visions seront représentées : statuettes d’ancêtres couleur du bois patiné et enfumé sculptées en ronde-bosse avec l’alan ; et enluminures, gravures et dessins colorés avec l’iboga. Mais, selon l’anthropologue américain J. W. Fernandez qui a étudié le bwiti fang également dans les années 1960-1970, certains effets physiologiques sont communs à la plupart des substances psychédéliques, qu’il s’agisse du tétrahydrocannabinol, de la mescaline, de l’acide lysergique ou de l’ibogaïne. Ce sont les initiateurs bwitistes qui se servent de chacun de ces effets (changements physiques, perception du corps ; modifications de la vue ; perception du temps ; dissociation ; ouïe, goût, odorat ; activité psychomotrice ; sentiments et émotions) « en leur donnant une interprétation qui colle à l’objet de la religion [bwiti] comme à l’attente des fidèles » (Fernandez, 2000 [1972] : 38 sq.).

8Malgré un fonds culturel et religieux [4] commun fang qui structure les récits visionnaires, l’absence à la fois d’un corps de doctrine rigoureux, d’une Église unifiée défendant une orthodoxie, et d’une langue liturgique commune [5] – susceptibles d’être les vecteurs de représentations et d’un discours communs – explique la diversité des liturgies et l’invention de rituels par chaque chapelle. Les prophètes, prêtres et initiés consommant l’iboga adaptent leurs liturgies en fonction de leurs visions. Chaque temple ou chapelle produit donc ses propres interprétations [6] et représentations des images vues pendant les initiations. Les symboles de celles-ci sont parfois également retranscrits dans les temples (poteaux sculptés, gravures, peintures murales), dans les instruments de musique (cithares sculptées, arcs musicaux) [7].

9L’iconographie visionnaire, notamment celle des enluminures et des panneaux muraux, circule peu entre les communautés et les familles, malgré leurs liens de filiations, car les chapelles sont repliées sur elles-mêmes. En outre, la divulgation des visions des initiés est interdite, ce qui peut expliquer en partie la rareté de leurs représentations. Cet interdit provient du secret initiatique qui caractérise le bwiti : les initiés font le serment de ne pas divulguer aux profanes les secrets portant sur les contenus (mythes, sacra, rituels [Bonhomme, 2006 : 1938]), de ne pas mettre par écrit l’enseignement initiatique (ibid. : 1945) et de ne pas parler de leurs visions en dehors du cadre initiatique [8]. Les écrits existant (textes de chants ou de prières) ne circulent pas car, devenus publics et accessibles à tous, ils seraient susceptibles de mettre en péril le monopole des aînés touchant le savoir initiatique et son interprétation (ibid. : 1938, 1945-1946).

L’absence de l’iconographie visionnaire dans le processus de patrimonialisation du bwiti au Gabon

10L’expérience visionnaire due à l’iboga a toujours été et reste absente du processus de patrimonialisation du bwiti au Gabon. Le pays, et notamment ses hommes politiques, a constamment entretenu des relations complexes avec le bwiti [9], même si ce dernier est l’un des éléments du patrimoine le plus mis en avant par la politique culturelle gabonaise, tout comme l’iboga, plante décrétée « patrimoine national et réserve stratégique » en l’an 2000.

11Le musée des Arts et Traditions du Gabon, amorcé dans les années 1960 [10], s’est focalisé sur les masques, les reliquaires, les musiques et les danses cérémonielles du bwiti ; le musée virtuel www.gabonart.com, créé en 2006, le présente en tant que rituel sacré esthétique et festif ; le Centre international des civilisations bantu (CICIBA) promeut le bwiti en religion nationale car il représente une pièce essentielle du patrimoine religieux bantu, prouvant ainsi l’importance culturelle du Gabon au sein de la sous-région (Bonhomme, 2007).

12Les œuvres les plus connues, les plus vendues et les plus exposées des arts du Gabon à l’échelle internationale sont les masques ainsi que les figures de reliquaire fang liées au culte des ancêtres, alors que les représentations du bwiti dans l’art contemporain sont minimes. La peinture gabonaise moderne qui a émergé dans les années 1960 [11] a certes fait de l’univers cultuel et de la symbolique initiatique ses thèmes de prédilection, mais les tableaux faisant référence aux sociétés initiatiques gabonaises représentent surtout les masques anthropomorphes, les instruments rituels de ces sociétés et ne s’attachent pas à retranscrire les visions engendrées par les plantes psychotropes, l’arbuste de l’iboga étant, lui, parfois représenté [12]. Ces tableaux ont été très peu exposés et ne sont pas connus ni reproduits par les initiés. Enfin, ce sont les rites et artefacts cultuels mais surtout les performances des corps des adeptes des sociétés secrètes gabonaises, plutôt que leur vécu visionnaire, qui ont attiré l’attention des photographes et des réalisateurs de films contemporains, cela étant certainement dû à la fois à l’aspect esthétique et photogénique des danses, maquillages, masques et tenues rituels qu’à la difficulté de représenter des visions par l’image fixe ou animée.

La récente internationalisation du bwiti

13Les appropriations de l’iboga hors du Gabon ont d’abord eu lieu au sein des mouvements américains de « contre-culture » et de « drug culture » à partir des années 1960 qui associent chamanisme et psychotropes. Contrairement à d’autres formes religieuses pour lesquelles la plante psychotrope a été largement médiatisée dans le cadre de son rituel initiatique (tels le peyotl chez les Yaqui par Carlo Castaneda et l’ayahuasca au Pérou chez les Shipibos par Jan Kounen), c’est d’abord l’iboga qui a attiré un public restreint en Occident. Howard Lotsof, Américain toxicomane dans les années 1960 a révélé l’iboga en tant que plante miracle sevrant les addictions, et c’est bien plus tard qu’elle a été perçue comme étant partie intégrante du rituel du bwiti. La récente médiatisation auprès du grand public depuis le début des années 1990-2000 de l’iboga a inscrit le bwiti au rang des autres traditions chamaniques dans le monde et a constitué le Gabon comme la principale destination africaine de tourisme mystico-spirituel.

14L’intégration du bwiti et de l’iboga dans le marché mondial des identités (Amselle, 2001 : 24-25), dans celui des ressources religieuses exotiques (Altglas, 2014) et dans les circuits transnationaux du tourisme chamanique (Chabloz, 2014) est d’abord due à la création de sites internet par des initiateurs gabonais et français vivant au Gabon, quelques Gabonais vivant en France et au Costa Rica (ibid. : 24-41, 199-200). Ces sites proposant des initiations clés en main et de nombreux témoignages d’initiés européens et américains ont été les premiers à opérer une traduction du bwiti et de l’iboga dans des termes liés au développement personnel et à la thérapie psychologique tout en rassurant les futurs candidats à l’initiation sur l’accessibilité de ce rituel à un public occidental. Mais ce sont surtout des personnalités telles que l’écrivain Vincent Ravalec, le journaliste Bruce Parry ou le réalisateur de cinéma Jan Kounen [13] qui ont contribué à faire connaître le bwiti et l’iboga à un large public européen depuis les années 2000 par des reportages photographiques magazines et télévisuels [14] et des films documentaires montrant ces personnalités en train de s’initier. Ces films, reportages et récits ont participé au processus de « domestication » (Foster, 1982) et de psychologisation (Altglas, 2014) susceptible de convaincre que le « chamanisme africain » du bwiti et de l’iboga pouvait constituer une technique de soi efficace, y compris pour des non-Africains. Le bwiti est – de la même manière que pour des mouvements religieux néo-hindous et de la kabbale (Altglas, 2014) – désormais modelé par « l’ethos de la culture psy » qui rend les altérités religieuses désirables et familières au monde euro-américain féru de techniques de développement personnel et d’amélioration de soi.

Le musée imaginaire des « plantes alliées »

15Les nouvelles représentations liées aux visions de l’iboga ne peuvent se comprendre sans explorer le musée imaginaire des « plantes alliées » qui s’élabore sur Internet et dont l’iconographie est alimentée par des productions visuelles éparses (extraits de films, tableaux, créations personnelles) et qui, malgré les spécificités de chaque plante, tend à uniformiser leur valeur et leur fonction : outil d’introspection salvateur pour le développement personnel, pour la communication avec les disparus et le divin. Des centaines de témoignages d’initiation aux plantes alliées, sous forme écrite ou vidéo, principalement en anglais et en français sont publiées sur différents sites. Certains des témoignages vidéo décrivent les visions induites par ces plantes. Il n’est pas aisé de déterminer si les visions qu’ont eues ces internautes sont celles qui sont représentées dans leurs vidéos. Il est possible en revanche de montrer l’influence qu’ont, sur le contenu de ces témoignages vidéo, des productions visuelles et audiovisuelles largement diffusées au préalable. Par exemple, la vidéo intitulée « Ayahuasca : Into the Dark Abyss », postée sur YouTube par Your Mate Tom le 26 mai 2017 [15], illustre l’expérience visionnaire de ce « youtubeur » en recourant à des images animées (sans en citer les sources d’inspiration) qui représentent notamment des serpents entrelacés, à la manière des effets spéciaux réalisés par Jan Kounen (2003, 2004) dans ses films sur l’ayahuasca D’autres mondes et Blueberry, l’expérience secrète (Chabloz, Fig. 1, Cahier central).

16Dans cette même vidéo, on retrouve l’inspiration des peintures visionnaires colorées des chamanes-artistes péruviens tel que Pablo Amaringo où apparaissent notamment des botos, dauphins roses d’Amazonie (Chabloz, Fig. 2, Cahier central).

17L’iboga et le bwiti font également l’objet de témoignages vidéo qui évoquent les visions de ceux qui les postent, mais majoritairement sous la forme de récits que de représentations visuelles. La vidéo « Iboga Meeting the Divine », postée le 24 mai 2014 par Paulina Alanis [16] est exemplaire car elle est l’une des seules qui mobilise une iconographie, et, afin d’illustrer son vécu visionnaire ayant trait notamment à son expérience de mort puis de renaissance, son auteure a notamment recours à des images de type kaléidoscopique (référence au psychédélique), à des représentations anthropomorphes évoquant la régression et la renaissance (iconographie du rebirth de la psychologie humaniste) (Chabloz, Fig. 3, Cahier central). L’auteure de cette vidéo vit à San Francisco, a étudié l’« Integral Theory » ainsi qu’à la Fondation of Shamanic Studies de Michael Harner et exerce en tant que coach en Integral Transformative Practice [17] ».

18Les productions visuelles concernant les visions de l’iboga restent rares, contrairement à celles de l’ayahuasca qui ont largement été représentées et diffusées, par les films et la peinture, mais aussi dans la littérature [18], ce qui explique que les témoignages d’initiés à l’iboga postés sur Internet ne peuvent les mobiliser. À défaut de pouvoir s’inspirer d’une iconographie visionnaire quasiment inexistante dans les expositions, livres et films (Chabloz, 2014 : 63-92) [19] portant sur le bwiti et l’iboga, les internautes puisent dans les matrices de représentations ayant trait à la psychologie, au psychédélique, à la narco-analyse et à la drug culture ayant émergé dans les années 1960, matrices dans lesquelles a été intégré ce rite à plante psychotrope depuis sa médiatisation due à H. Lotsof, mais surtout à la sortie de livres et de films depuis le début des années 2000. L’inscription de l’iboga dans le paradigme du chamanisme globalisé et, plus particulièrement, dans ses sous-branches psychédélique [20] et psychologique, a été préparée par certains écrits de chercheurs qui ont par exemple établi un lien dès les années 1970 entre les quêtes des initiés gabonais ingérant l’iboga et des expérimentateurs occidentaux de LSD (Swiderski, 1976 : 131-132) et des similitudes entre les visions procurées par l’iboga et les near death experiences (NDE) [21].

19La structure même du déroulement du rite du bwiti et sa fonction sociale (voir sa propre mort et les proches disparus pour comprendre les causes de ses maux et ainsi renaître en ayant la maîtrise sur sa vie) se greffent relativement aisément aux idéologies psycho-thérapeutiques du « développement du potentiel humain (DPH) » ou « psychologie humaniste », une des idées fortes du New Age, formulée à Esalen en Californie entre les années 1960 et 1980 qui regroupe une série d’approches psychologiques et de pratiques thérapeutiques telles que la gestalt-thérapie, la thérapie primale, le rebirthing. La quête d’une « guérison » rapide, d’un pouvoir personnel accru, d’expériences ésotériques et transcendantes, d’aperçus du « vrai soi », compte parmi les motivations communes. Ce discours, relayé par les films et la littérature, l’est aussi par les centres de développement personnel et de désintoxication aux drogues s’appuyant sur des plantes psychotropes « alliées [22] » qui participent également à intégrer l’iboga dans le marché mondial du chamanisme très présent sur Internet [23] et, de plus en plus, dans les festivals [24].

Appropriations politiques du « substrat africain »

20La seule particularité du bwiti et de l’iboga sur le marché mondial des formes religieuses exotiques à psychotropes est leur « africanité » du fait de leur origine gabonaise. Ce substrat africain induit toute une série de représentations primitivistes du bwiti et de l’iboga (Chabloz, 2009a), ainsi que des réappropriations n’appartenant pas seulement au registre du développement personnel mais également au registre politique. Des mouvements noirs américains tels que le Black Coalition on Drug et l’African Descendants’ Awareness Movement ont par exemple intégré l’iboga dans leurs quêtes de guérison et d’identité (Bonhomme, 2010 : 322). Des rappeurs gabonais investissent les images, les instruments, les maquillages du bwiti dans un objectif de « réafricanisation » du rap au Gabon avec une vision New Age (Aterianus-Owenga, 2011 : 7-8). La valorisation des traditions religieuses locales sert à ces musiciens comme aux défenseurs du bwiti et de l’iboga sur la scène internationale, à critiquer le caractère inégal des relations économiques et politiques entre l’Afrique et l’Occident et l’acculturation des jeunes Africains. Par ailleurs, certains ajoutent à la caractérisation « africaine » de l’iboga une dimension « panafricaine », à l’instar des Rastafaris avec la marijuana, ces psychotropes végétaux acquérant ainsi une valeur politique d’émancipation en sus de leur fonction rituelle (Chabloz, 2014 : 114-130).

21Les acteurs contemporains de l’internationalisation du bwiti prennent en quelque sorte le relais des Fang qui, ayant progressivement délaissé leur culte des ancêtres pour adopter le bwiti dans les années 1900-1910, l’ont revendiqué comme une religion ouverte à tous, nationale dès les années 1950 et comme religion internationale depuis l’indépendance du Gabon (Balandier, 1950 : s. p.). L’influence du christianisme a favorisé le fait que certains prophètes fang œuvrent à la personnalisation, à l’accessibilité aux femmes et à l’universalisation du bwiti [25] ; l’inscription récente du bwiti dans le paradigme chamanique permet qu’il soit désormais appréhendé en tant que thérapie et spiritualité alternatives accessibles à tout un chacun.

22Cette volonté des bwitistes gabonais de faire connaître le bwiti à l’international et à « travailler main dans la main avec les Blancs » est médiatisée à partir des années 2000 dans plusieurs films (Kelner, 2002 ; Ponte, 2004) et livres (Ravalec, Mallendi et Paicheler 2004 ; Ravalec et Sazy 2004, Ribenga 2004 ; Laval-Jeantet 2005). Même si ces livres comportent peu d’illustrations susceptibles d’informer les visions des futurs initiés [26], il est à signaler, en prenant l’exemple de la couverture de l’un d’entre eux, que le substrat africain du bwiti est valorisé visuellement dans la version originale française, alors qu’il est remplacé par une iconographie psychédélique dans sa version anglaise (Chabloz, Fig. 4, Cahier central). Pour ce même livre, le titre français est Bois sacré, initiation à l’iboga alors que la version anglaise parue trois ans plus tard en 2007 s’intitule Iboga : The Visionary Root of African Shamanism, ce qui montre notamment que le titre anglais inscrit d’emblée l’iboga dans le paradigme du chamanisme et du psychédélique, en spécifiant dans le titre son origine « africaine » (et non gabonaise). S’il est communément admis que, dans le chamanisme globalisé, l’altérité religieuse est souvent neutralisée par la croyance en une vérité universelle transcendant cultures et traditions, cet exemple montre que dans le cas de l’iboga, sa caractéristique « africaine » semble avoir de l’importance, tout au moins être susceptible, du point de vue des auteurs et/ou des éditeurs, d’attirer un public.

Expériences visionnaires

23Le format de cet article ne permet pas de tenter une analyse des différences et des points communs entre les récits des vécus visionnaires d’individus dont l’initiation s’est déroulée dans un cadre rituel villageois au Gabon et ceux, dont le nombre a fortement augmenté depuis les années 2000, qui expérimentent l’iboga hors de ce cadre. Relevons simplement que les visions servent infiniment plus rarement qu’auparavant à forger un sentiment de cohésion au sein d’une même branche ou chapelle réunissant un groupe d’adeptes, comme l’observait James W. Fernandez chez les Fang du Gabon dans les années 1970. Les individus qui expérimentent aujourd’hui le bwiti et l’iboga hors du cadre initiatique villageois, que ce soit au Gabon ou dans les pays occidentaux, forment plutôt une communauté virtuelle de personnes qui poursuivent le même but : mieux connaître les mystères de la psyché et du monde invisible grâce à des plantes alliées dont l’usage est encadré par des « chamanes ».

Ne rien voir

24L’expérience initiatique centrale du bwiti reste la vision d’iboga, qu’elle ait lieu au Gabon, en Europe ou aux États-Unis. Les visions sont déterminantes dans la perception du processus du mieux-être. Pourtant, environ un tiers des personnes qui absorbent de l’iboga n’auraient pas de vision. Un bwitiste français ayant initié plus de 200 individus en France et en Angleterre depuis 2010 souligne que 25 à 30 % d’entre eux déclarent ne rien voir [27]. Selon lui, le défaut de vision n’est pas un échec en soi – il est dû à l’état de la personne, trop « mentalisée » ou en situation de « burn out » – n’a pas de conséquence néfaste et entraîne généralement une seconde initiation : « Les gens trop surmenés, en général n’ont pas de vision. Leur réflexion est accélérée, ils tombent dans une sorte de coma, ils ont besoin de passer par là pour décrocher d’une hyperactivité mentale » (entretien, novembre 2017, Paris). Dans le bwiti fang gabonais des années 1980 en revanche, si l’explication de l’échec de la vision n’était pas recherchée du côté d’un manque d’engagement personnel, cet échec était en revanche interprété comme « un défaut dans la confession, qui peut conduire à la folie ou à la mort » (Mary, 1983 : 298-299). Dans le cadre rituel villageois gabonais, un mensonge ou une omission volontaire de l’initié envers son initiateur avant d’ingérer l’iboga était susceptible d’engendrer des conséquences désastreuses pour l’initié, ce qui révèle entre autres une moralisation de la relation initié/initiateur ainsi que les rapports de domination qui s’y jouent ; alors que dans les nouveaux cadres, c’est la psychologisation de l’état de l’initié qui prévaut comme schème explicatif du défaut de vision. Dans les deux cas, l’initiateur ainsi que l’iboga sont hors de cause dans l’échec de la vision de l’initié, la responsabilité étant attribuée à ce dernier.

25Étudier les récits visionnaires est une opération délicate, car ils font l’objet d’un important processus d’élaboration secondaire. La stéréotypie des récits de vision et le jeu des variantes individuelles confirment ce travail de réélaboration secondaire que subit le vécu du visionnaire, d’abord dans le cadre des relations avec son initiateur qui est le premier à recevoir le récit (Fernandez, 2000 [1972] : 29 ; Mary, 1998 : 182, note 5), ensuite dans les retranscriptions que l’initié peut en faire, notamment à l’ethnologue, mais aussi, aujourd’hui, dans des livres, films et témoignages vidéo. Ce processus de réélaboration est confirmé par l’initiateur bwitiste précité : « La quête de visions est problématique dans le bwiti. C’est pour ça que c’est interdit de parler de ses visions. Car ce n’est pas parce que tu n’as pas de vision que l’initiation ne fonctionne pas et il faut du temps pour les interpréter et les digérer. Parfois des gens que tu revoies deux semaines, un mois, six mois, deux ans après, ne racontent pas du tout la même chose à propos de leurs visions » (novembre 2017, Paris).

Les contextes des visions

26Par ailleurs, la stéréotypie des visions rappelle que le contenu, et plus encore la formulation de l’expérience visionnaire, sont très largement tributaires des dispositions du sujet et du contexte social et culturel dans lequel s’inscrit son acte (Fernandez, 2000 [1972] : 36-37). Notre interlocuteur bwitiste considère que le rapport aux visions diffère selon le « contexte culturel des initiés » :

27

« Les Afro-descendants vont derrière les images. En Afrique, le mode de communication est visionnaire, tu permets à l’autre de voir ce que tu lui racontes. Par exemple, quand tu donnes une adresse, tu vas lui expliquer qu’il faut passer par tel rond-point, passer devant telle boutique ou tel manguier, les gens sont poussés à se projeter. Dans notre culture occidentale, la vision c’est l’écran, c’est passif. Les Occidentaux minimisent les visions car ils voient tellement de choses sur écrans qu’ils sont blasés, alors que la plupart des Africains, avec leur tradition, y croient déjà et sont habitués à une tradition orale : ils voient tout de suite, ils sont moins formatés par les écrans, plus souples, plus créatifs dans l’interprétation des visions. Un Africain qui va voir un film ne va pas forcément faire la distinction entre la fiction et la réalité par exemple. Un Africain qui va voir une porte, il va chercher à l’ouvrir, il est plus curieux que l’Occidental qui ne va pas forcément essayer de l’ouvrir et d’interagir avec la porte, sauf peut-être les artistes, et les gens de culture du Sud vont être plus créatifs. »
(Entretien, novembre 2017, Paris.)

28Selon lui, le contenu des visions peut être typifié en fonction de la profession des initiés :

29

« Les Occidentaux informaticiens vont vouloir absolument donner un sens à ce qu’ils voient, ils mentalisent, ils classent. Les mathématiciens, architectes, scientifiques, vont entrer dans les détails, vont vouloir comprendre, sont plus curieux, vont voir des formes géométriques, vont passer par le langage symbolique. Un ami mathématicien a, pendant ses visions, traduit la musique qu’il entendait en mathématiques. Les architectes vont voir des formes, etc. »
(Entretien, novembre 2017, Paris.)

30La forme que prend la vision peut varier en fonction du traumatisme que les personnes sont venues régler avec l’iboga :

31

« Par exemple, beaucoup de femmes qui prennent l’iboga pour un traumatisme lié à la petite enfance (souvent des viols) vont revivre l’expérience sous forme d’images proches de la bande dessinée ou de dessins animés, une manière je pense de dédramatiser et de prendre de la distance avec un événement traumatique, dont elles rigolent parfois en voyant les scènes sous forme de cartoon. »
(Entretien, novembre 2017, Paris.)

Récurrence des schémas narratifs

32Les schémas narratifs des récits visionnaires que j’ai recueillis entre 2007 et 2014 et, plus récemment, en 2017, correspondent, soit totalement, soit partiellement, à ceux collectés au Gabon dans les années 1970 à 1990. Malgré les différences de contexte, on retrouve des récurrences : série de mises à l’épreuve (franchissements de barrières, de portes, de rivières, choix du bon chemin), rencontres (avec des personnages connus ou inconnus, vivants ou morts, des dieux, des esprits, des paysages ou des lieux), observation de scènes du passé, mort (se voir dépérir), renaissance (avec nouveau nom d’initié), missions pour le futur (Fernandez, 2000 [1972] : 29 sq. ; Mary, 1998 : 183).

33Un Français initié chez le bwitiste fang Atome Ribenga, sur lequel j’ai réalisé un film documentaire (Chabloz, 2010) a, par exemple, suivi toutes les étapes de ce schéma au cours de ses visions avec une seule variante. Ce n’est pas lui-même qu’il a vu mourir, mais son fils, ce qui lui a fait prendre conscience de son amour pour celui-ci et l’a décidé à revenir vivre en France pour s’en occuper. Son nouveau nom d’initié reçu en vision, « fils des sciences », l’a convaincu qu’il était le « trait d’union entre la culture occidentale et la culture africaine » et l’a « missionné » pour défendre et valoriser le bwiti et l’iboga, ce qui s’est traduit notamment par la réalisation d’un film documentaire sur « la tradition bwitiste » visible sur Internet (Guignon, 2008), la participation à des émissions de télévision et de radio au Gabon [28] et en France, la création d’une ONG pour sauvegarder l’iboga. Cet initié s’emploie depuis dix ans à faire connaître le bwiti et l’iboga en tant qu’alternative aux « religions importées », ainsi qu’à la médecine « occidentale », et milite contre l’exploitation des ressources africaines par « l’Occident » (notamment de ses plantes médicinales) afin de changer « le rapport de force entre les pays du Sud riches en biodiversité, et l’industrie pharmaceutique prédatrice du Nord », en se référant au protocole international de Nagoya de 2010. Un autre Français, initié chez une famille franco-gabonaise de Libreville (Chabloz, 2009b) s’est vu mourir, a revécu une scène de sa petite enfance qu’il avait oubliée : alors qu’il avait environ six ans, sa mère lui dit qu’il ne réussirait jamais à lire, scène qui selon lui est responsable de son blocage envers la lecture et l’apprentissage en général. Problème qui s’est réglé après l’initiation. Ses visions l’ont ensuite fait renaître avec le même kombo (nom d’initié) que son initiateur après s’être vu en Saint Michel une épée à la main (entretien téléphonique, décembre 2017). Une jeune femme gabonaise vivant désormais en France, initiée chez un bwitiste français de Libreville, s’est trouvée sur un chemin au gré duquel elle a fait des rencontres lors de sa première initiation en 2010. Une personne dont elle ne voyait pas le visage la guidait, la rassurait en lui indiquant quel chemin prendre et comment éviter les obstacles (entretien, novembre 2017, Paris). Ce schéma narratif se retrouve également dans la plupart des témoignages d’initiation postés sur YouTube. La vidéo « Iboga Meeting the Divine » (voir supra) retrace les visions de son auteure ayant trait notamment à la rencontre avec son grand-père décédé et à son sentiment de mort puis de renaissance.

34Il est intéressant de souligner que mes interlocuteurs ont tous également ingéré de l’ayahuasca, dans un contexte rituel ou non, soit avant, soit après l’iboga. Ils considèrent que les visions engendrées par l’iboga sont plus « réelles », et permettent une « participation » et une « interaction » plus importantes, comme le précise mon interlocuteur initiateur :

35

« Avec l’ayahuasca, il y a plus de sensations physiques, plus colorées, plus rondes, sentiment vivant, organique, tu sens le fluide circuler à travers toi, c’est très court, pas profond, au sens moins contemplatif qu’avec l’iboga. L’iboga est plus proche de l’hypnose, tu vois l’environnement tel qu’il est, tu peux plus vivre le truc de manière participative. […] Avec l’aya, c’est plus du ressenti, pas autant d’interactions qu’avec l’iboga. Par exemple, la première fois que j’ai pris de l’iboga, j’ai vu un enfant, j’étais à côté de l’enfant, puis je me retrouve dans la tête de l’enfant, j’ai pu revivre la scène du passé, il y a plus de discernement entre ce qui est réel ou pas. L’aya c’est du cinéma en 3D à 360e, l’iboga c’est une pièce de théâtre. L’iboga est une plante de travail, tu es actif, tu joues le rôle. L’aya fait appel au cœur, les visions et les états sont proches de ceux qu’on peut avoir avec le MDMA ou le LSD, on se sent cotonneux, sensible. C’est plus féminin, plus doux que l’iboga […]. L’iboga c’est plutôt la tête et le ventre, c’est comme voir avec le 3e œil. Tu creuses, tu sculptes, tu te prends un coup de pied au cul, alors que l’aya, c’est plus enrobant, berçant, peut-être parce que l’aya est plus aérien car c’est une liane, et l’iboga est plus ancré dans la terre, plus masculin car c’est une racine. »
(Entretien, novembre 2017, Paris.)

36Dans le cadre des nouveaux contextes rituels de l’iboga, les entretiens montrent que ce n’est plus tant les images vues pendant les visions qui importent aux initiateurs, que les émotions qu’elles engendrent, notamment la peur. C’est la confrontation avec ces émotions qui aiderait l’initié à ne plus y être soumis :

37

« La vision en tant que telle ne veut pas dire grand-chose, si tu vois un éléphant, ça veut dire quoi ? On demande aux gens de ne pas s’attarder sur les visions mais plutôt sur l’émotion suscitée par la vision. Si la vision suscite la peur, l’important n’est pas tant l’objet qui a suscité la peur, c’est le fait que la personne ait éprouvé la peur. Par exemple éprouver la peur de mourir sous iboga pour une personne suicidaire, expérimenter la mort, lui permet d’aller au bout de son truc et de passer à autre chose car cela provoquera une envie de survivre. […] Le but de l’initiation et des visions est de savoir gérer sa peur et de la faire disparaître. […] Contrairement à ce qui se passe dans le bwiti au Gabon, celui que tu as vu en vision est celui qui te veut du mal par sorcellerie, on travaille plutôt sur les émotions suscitées par la vision, et on évite d’interpréter […] car il peut y avoir de fausses projections sur des personnes. […] Par exemple un Afro-descendant est venu me voir et me dire “j’ai des capacités exceptionnelles mais je n’avance pas dans la vie donc quelqu’un me bloque”, je lui ai dit qu’il fallait qu’il se calme [rires] et qu’il fallait plutôt voir pourquoi il se met lui-même en échec, car le fait de projeter sur quelqu’un d’autre ses propres fautes ou manquements est une manière de se déculpabiliser, c’est trop facile, et nous ne fonctionnons pas comme ça. »
(Entretien, novembre 2017, Paris.)

38Afin de générer ces émotions lors de l’expérience visionnaire des initiés, l’initiateur français précité se sert à la fois du « substrat africain » du bwiti que de films documentaires afin de créer un décor visuel et sonore susceptible de « casser les repères » et de « créer des visions » :

39

« Quand on initie, on fait une induction, on apprend à solliciter la vision. Il faut mettre la personne dans un autre environnement pour casser ses repères. Quand j’initie en Angleterre, je pars avec plusieurs kilos de matériel pour créer un décor : lampes torches, masques, objets rituels… très souvent leurs visions font référence à des objets qui sont présents dans le décor. Elles font aussi référence aux films que je leur projette avant l’ingestion d’iboga, The last dance et pendant les visions, Baraka. Dans les visions dont ils me parlent pendant l’initiation, on retrouve des situations : gens dansant dans des villages pour The last dance, images dures de camps par exemple dans Baraka. Les visions sont également induites par ce que je leur raconte : je leur raconte un proverbe par exemple, ou une histoire qui m’est arrivée avec mon père, ou je traduis un passage d’une chanson du bwiti qui est diffusée, cela favorise la projection et la vision, oriente sur un thème, le thème du père par exemple, et crée des visions. C’est souvent efficace de parler avec des images car en Angleterre comme au Gabon, il existe une sorte de pudeur et, de plus, cela permet d’orienter vers un thème sans que la personne fixe sur son cas particulier, cela donne des clés. »

40Précisons que le film The last dance (Ponte, 2004) porte sur l’initiateur bwitiste français Tatayo faisant découvrir à une équipe de réalisateurs la faune, la flore et les traditions gabonaises à préserver, surtout les cérémonies du bwiti, à l’issue desquelles des initiateurs et initiés se félicitent à l’écran de la médiatisation du bwiti par les Blancs hors du Gabon. Le film Baraka (Fricke, 1992) alterne quant à lui des séquences sans paroles sur les merveilles du monde (paysages naturels et rites religieux ou spirituels sur les cinq continents) et ses atrocités (misère et guerre). Il est intéressant d’observer que ce ne sont pas les films de type ethnographique (Sallée, 1969 ; Bonhomme, 2003) sur le bwiti qu’a choisi d’utiliser cet initiateur, mais ceux appartenant au registre chamanique.

Conclusion

41Bien que ce soient les bwititistes fang qui ont le plus œuvré à l’internationalisation du bwiti et qui ont majoritairement initié ceux qui participent aujourd’hui à sa médiatisation et qui deviennent à leur tour initiateurs, l’iconographie et les références chrétiennes, pourtant très présentes dans les temples et les récits visionnaires gabonais du bwiti fang, n’apparaissent ni dans les nouveaux cadres rituels, ni dans les productions écrites et audiovisuelles. Cette opération de « déchristianisation » du bwiti fang qui a lieu hors du Gabon, dans les productions et sur les réseaux sociaux, peut se comprendre par la quête d’africanité authentique de la part des nouveaux candidats à l’initiation ainsi que par leur rejet des religions monothéistes et des références qui leur sont liées.

42L’expérience visionnaire des initiés au bwiti et à l’iboga au Gabon a été recueillie sous forme de récits depuis les années 1970 mais a peu fourni de représentations sous forme d’images. Le musée imaginaire contemporain de ce rite et de cette plante s’est alors alimenté – depuis leur internationalisation dans les années 2000 – d’une iconographie puisée dans d’autres rites à plantes psychotropes préalablement médiatisés et, plus généralement, dans la matrice du chamanisme avec des représentations relatives aux domaines psychédélique et psychologique, en y adjoignant un schéma narratif visionnaire stable ainsi qu’un substrat africain qui représentent la marque et la valeur ajoutée du bwiti et de l’iboga.

43Les entretiens récents avec des initiateurs et initiés montrent que si les visions d’iboga ont peu informé les représentations du bwiti dans l’espace public, les productions audiovisuelles chamaniques influent en revanche sur le contenu des visions des initiés dans les nouveaux cadres rituels de l’iboga qui se mettent en place hors du Gabon et qui ne négligent pas pour autant l’origine africaine du bwiti. Cette africanité, perçue en tant que « berceau de l’humanité » est également politisée par des initiés qui ne sont pas seulement en quête d’une guérison ou d’un développement personnel mais qui ont aussi la volonté de participer au renversement des relations de domination entre « l’Afrique » et « l’Occident ».

44Les visions sont pourvoyeuses de « missions » pour des individus qui les prennent à cœur et qui réinvestissent ainsi leur apport visionnaire dans leur parcours post-initiatique : parfois la vision commande de devenir soi-même initiateur pour sauver le monde, ou de faire connaître le bwiti et l’iboga pour notamment les sauvegarder [29]. Ce type de missions perçues lors des visions engendre en général des productions écrites et/ou audiovisuelles qui viendront à leur tour nourrir le musée imaginaire du bwiti et de l’iboga. Parfois, la mission commande à l’initié(e) de changer de vie et de s’investir dans une passion, le plus souvent artistique qui, si le projet aboutit, véhiculera également des représentations positives sur les « plantes alliées ».

45Le processus de chamanisation des visions de l’iboga à l’œuvre dans les nouveaux cadres rituels du bwiti et dans l’élaboration du musée imaginaire visible sur Internet représente un lieu stratégique pour l’observation des interactions entre les visions et leurs représentations. Si ce processus tend à uniformiser la valeur de l’iboga et du bwiti en l’assimilant aux autres rituels à plantes alliées (outil salvateur d’introspection), il tend également à les ré-africaniser (en les déchristianisant) et à les re-politiser (en y adjoignant de nouvelles dimensions : panafricaines, écologique, économique et thérapeutique).

Notes

  • [1]
    Sur l’utilisation de la rhétorique New Age par les bwitistes gabonais, notamment concernant l’âge du Verseau, voir notamment l’ouvrage d’A. Ribenga (2004 : 86), rare bwitiste fang à avoir publié un livre. Sur les liens entre New Age et réappropriations du bwiti, voir Chabloz (2014 : chap. IV).
  • [2]
    Durant la période 1930-1970, une douzaine de procès criminels ou d’accusations d’empoisonnements ont été lancés contre des leaders du bwiti qui avaient perdu des membres de leur communauté à la suite d’overdoses (Fernandez, 2000 [1972] : 26). Des cas de décès de Français pendant des stages d’iboga ont également eu lieu au Gabon et en France dans les années 2000, ce qui a participé à la décision des autorités sanitaires françaises de classer l’iboga dans la catégorie des stupéfiants de catégorie IV en 2007.
  • [3]
    Durant leurs cérémonies du culte du byeri, les Fang ingéraient un mélange de feuilles d’iboga et d’alan (hylodendron gabonense). L’iboga, avec l’adoption du bwiti, a supplanté l’usage de l’alan.
  • [4]
    Les personnages principaux du panthéon fang sont Nzame et Nyingone : Nzame, « fils » de Dieu, crée ce monde, Nyingone, sa parèdre, participe à son œuvre. Le bwiti conserve ces deux personnages, mais il y voit en outre un symbole et un autre aspect du couple biblique Adam et Ève ou encore Jésus et Marie. Certains prophètes assimilent le Christ, voie pour aller à Dieu, et l’iboga, né d’une côte de Nzame (Binet, 1974 : 36).
  • [5]
    Le bwiti, venant des Mitsogos, emploie d’abord leur langue, puis des réformateurs traduisent en fang les recueils de prières. Dans leur voyage mystique, certains initiés ayant perçu des sons qu’ils ont attribués à la langue des esprits reviennent avec un vocabulaire nouveau désignant les êtres dans l’autre monde et des notions courantes ; la confusion des langues due au principe de la révélation individuelle du bwiti engendre « anarchie et dispersion » (Binet, 1974 : 45).
  • [6]
    Selon J. Binet (1974 : 38), les visions sont interprétées selon des schémas de la culture traditionnelle et un contrôle explicite est exercé par les parrains d’initiation : ils interprètent les visions confuses des initiés, ce qui induit une forme de « formatage » des visions permettant de maintenir une certaine unité des croyances.
  • [7]
    Les cithares en qui s’incarnent des esprits sont sacrées. Elles sont peintes, gravées, leur corps est orné d’une tête ou d’une petite sculpture et leur musique fait passer du monde profane au monde sacré, du monde des vivants à celui des morts.
  • [8]
    Des récits de visions apparaissent néanmoins dans des livres, souvent auto-édités par des bwitistes gabonais (voir par exemple, B. P. Ndzigou, Initiation au Bwiti et au Mboumba-yano, auto-édition, non daté).
  • [9]
    Combattu par les missionnaires pendant la période coloniale, le bwiti a toujours été (et continue d’être) entouré d’un imaginaire sacrificiel. Initié au bwiti, le président Léon M’ba, soupçonné d’être impliqué à deux reprises dans des affaires d’anthropophagie liées à ce rite, fut condamné à la prison et à l’exil en 1932 (Mary, 1999 : 261, 263-264).
  • [10]
    Projet issu d’une convention entre le gouvernement gabonais et l’Office de la recherche scientifique et technique d’Outre-mer (ORSTOM). Ses collections proviennent des recherches des ethnomusicologues H. Pepper et P. Sallée et de l’ethnologue L. Perrois, chargés dans les années 1960 de collecter des enregistrements et des objets sur le territoire gabonais (Perrois, 1971 : 201 ; Perrois, 1999).
  • [11]
    Avec l’ouverture de la section Arts plastiques du Collège technique de Libreville, devenue en 1970 le Centre national d’art et manufacture (CNAM) puis en 1983 l’École nationale d’art et manufacture (ENAM).
  • [12]
    Voir notamment les tableaux du peintre gabonais Nicolas Marien Moussounda sur la « tradition gabonaise » : <https://gaboncelebrites.com/a-la-decouverte-de-nicolas-moussounda-artiste-peintre-gabonais/>, <https://yazomag.wordpress.com/2018/02/27/la-peinture-un-art-muet-au-gabon/>.
  • [13]
    Les films de J. Kounen portent sur l’ayahuasca, mais ils ont influencé les candidats occidentaux à s’initier à des « rites chamaniques », incluant le bwiti. Kounen est, en outre, le co-auteur d’un livre portant sur l’iboga et l’ayahuasca (Kounen, Narby et Ravalec, 2008).
  • [14]
    Voir la vidéo « Bruce tripping on mind-altering drugs-Tribe-BBC », postée sur YouTube le 2 août 2007 (304 494 vues au 2 février 2018), <https://www.youtube.com/watch?v=_gFB4wVPpAU>. Ce reportage – faisant partie de la série Tribes diffusée en prime time sur la chaîne BBC à partir de 2004 et mettant en scène B. Parry –, est celui ayant le plus fait connaître le bwiti et l’initiateur Tatayo en Angleterre et ayant incité des Britanniques à partir s’initier au bwiti et à l’iboga au Gabon (voir leur témoignage sur <https://www.youtube.com/watch?v=OMOhsMKQ88Q>).
  • [15]
    <https://www.youtube.com/watch?v=WKqmutAOCAI> (241 855 vues au 31 janvier 2018). Le même internaute a posté une vidéo le 30 juin 2017 sur son expérience avec l’iboga, « Iboga (Ibogaine) Drug : Existential Depression / Powerful Story », <https://www.youtube.com/watch?v=cYSS_Csxzqw> (32 581 vues au 31 janvier 2018).
  • [16]
  • [17]
  • [18]
    Voir notamment l’ouvrage de P. Amaringo et L. Luna, Ayahuasca Visions : The Religious Iconography of a Peruvian Shaman, Berkeley, North Atlantic Books, 1999.
  • [19]
    L’analyse d’un corpus de films documentaires consacrés à l’expérimentation du « chamanisme » par des Occidentaux montre notamment que les visions des initiés au bwiti ne sont quasiment pas représentées. Les réalisateurs de films (Kelner, 2002 ; Cheyssial, 2003 ; Laval Jeantet et Mangin, 2003 ; Parry, 2007 ; Fackler, 2013) n’ont pas recours à des effets spéciaux pour illustrer les visions dues à l’iboga (excepté celui de Negroponte, 2009).
  • [20]
    Les formes religieuses s’appuyant sur des plantes psychotropes sont toutes travaillées par l’ethos de la culture psychédélique qui prend sa source dans la propagation du LSD dans les années 1960 et qui a donné lieu à une profusion de représentations, largement reprises par les éditeurs, les auteurs et les internautes.
  • [21]
    « L’intoxication par l’iboga est caractérisée par quatre phases. Les trois premières sont essentiellement freudiennes tandis que la quatrième reflète l’inconscient collectif de la tribu et a quelques similitudes avec l’expérience de la mort prochaine » (Goutarel et al., 1993).
  • [22]
  • [23]
    Voir par exemple « l’Iboga House » au Costa Rica pour laquelle officie Moughenda Mickala qui s’autodésigne « chamane » gabonais et présente l’iboga en tant que plante miracle capable de soigner toutes les maladies, en mobilisant les grands thèmes constitutifs du discours New Age (<http://www.ibogahouse.com>).
  • [24]
    Le bwiti et l’iboga sont par exemple représentés au Festival du chamanisme en France (<http://festival-chamanisme.com/intervenants/>), au Festival musical Mos Espa en Suisse (<http://www.mov2nite.ch/event/mos-espa-iboga-talk-jeremy-narby-vincent-ravalec-and-more/>) et à l’Iboga Summer Festival en Espagne (<http://www.ibogasummerfestival.com/>).
  • [25]
    Contrairement au savoir initiatique traditionnel, le christianisme divulgue une part substantielle de sa tradition dans la Bible, document écrit universellement disponible (Bonhomme, 2006 : 1949).
  • [26]
    À l’exception notable des livres de photographies de L. Sazy (Ravalec et Sazy, 2004 ; Sazy, 2016).
  • [27]
    Au Gabon, dans les années 1970, 23 % des 38 réponses utilisables de soixante initiés interviewés n’ont « rien vu ni entendu qui sorte de l’ordinaire » (Fernandez, 1974 : 29).
  • [28]
    Voir notamment « Yann Guignon nous parle de l’importance de l’iboga », radio gabonaise Urban FM l04.5, posté sur YouTube le 15 février 2018, <https://www.youtube.com/watch?v=xnzqTNOfxk4&feature=youtu.be>.
  • [29]
    C’est par exemple le cas d’un initié français dont je suis le parcours depuis 2007 (voir supra). C’est également le cas de deux initiateurs français vivant au Gabon qui ont commencé à initier suite à des événements vécus en vision. De même, H. Lotsof est devenu le porte-parole de l’ibogaïne sur la scène internationale pour promouvoir ses propriétés anti-addictives suite à une voix lui annonçant sa vocation : « Tu feras connaître l’ibogaïne au monde entier afin de le délivrer » (de Rienzo et Beal, 1997 : 26).
Français

Les visions engendrées par la consommation de la plante psychotrope iboga n’ont pas fait l’objet d’une importante production iconographique dans l’espace public. Cet article propose, en premier lieu, d’explorer plusieurs pistes pour expliquer cette rareté : la multitude d’influences et de chapelles ainsi que l’absence d’une Église unifiée du bwiti au Gabon ; la culture du secret entourant les visions dues à l’iboga ; la focalisation sur les artefacts cultuels plutôt que sur les visions ; les réappropriations identitaires et communautaires s’adressant à un public international restreint ; la récente inscription de ce rite et de cette plante psychotrope dans le marché mondial du chamanisme. En deuxième lieu, l’article examine les différentes matrices de représentations qui structurent le musée imaginaire des « plantes alliées » et le type de productions, surtout audiovisuelles, qui alimentent iconographiquement ces matrices. Enfin, il s’agira, à partir d’entretiens, de révéler de quelle manière sont induites, envisagées et investies les visions de l’iboga dans de nouveaux cadres rituels du bwiti aujourd’hui en Europe.

  • Gabon
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  • représentations
  • visions
English

The Shamanization of Iboga Visions

Visions produced after consuming the psychotropic plant iboga have not led to significant iconographic representations produced in the public space in Gabon. First, this article explores several possible explanations for this scarceness in imagery among which: the multitude of different spiritual influences and chapels given the absence of a unified Bwiti church in Gabon; the culture of secrecy concerning iboga visions; the iconographic focus on (tangible) cult artefacts rather than on (intangible) visions; identity and community reappropriations targeting a restricted, international public; and the recent inclusion of iboga and its uses, as per Bwiti spiritual practices, in the global market of shamanism. Second, this article examines the different representative matrices that structure an imaginary museum of “plant allies” and the types of generally audiovisual productions that constitute it and feed these matrices. Finally, based on interviews, this article will show how iboga visions are engendered, envisioned, and invested in Bwiti’s new ritual frameworks today in Europe.

  • Gabon
  • Europe
  • Bwiti
  • Iboga
  • shamanization process
  • representations
  • visions
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    • Ribenga, A., 2004 La tradition bwitiste au Gabon. Voie directe de communication avec le divin, Libreville, La Maison gabonaise du livre.
    • Sazy, L., 2016 Bokayé ! Bwity cerermony, auto-édition.
    • En ligneSwiderski, S., 1976 « La fonction psychologique et socio-religieuse des drogues sacrées au Gabon », Journal of Religion in Africa 8 (2) : 123-132.
  • Filmographie

    • Bonhomme, J., 2003 Voir l’invisible. Initiation au Bwete Misoko (Gabon), DV, 35 minutes.
    • Chabloz, N., 2009b Bwiti et iboga en VF (1). Une initiation à Libreville, DVD Pal, autoproduction, 48 minutes.
    • Chabloz, N., 2010 Bwiti et iboga en VF (2). Itinéraire d’un initié militant, DVD Pal, autoproduction, 52 minutes.
    • Cheyssial, J.-C., 2005 La Guérisseuse de la forêt, Grand Angle Productions, Latitude 16/35, 30 minutes.
    • Fackler, N., 2014 Sick Birds Die Easy, North Sea Films, Indalo Productions, 100 minutes.
    • Fricke, R. et Guignon, Y., 2008 La tradition bwitiste et l’iboga au Gabon (Bwiti dissumba fang), autoproduction, 10,08 minutes.
    • Kelner, G., 2002 L’iboga. Les hommes du bois sacré, Artline Films, 53 minutes.
    • Kounen, J., 2004 D’autres mondes, Tawak Pictures, Films, 73 minutes.
    • Kounen, J., 2004 Blueberry, l’expérience secrète, Ajoz Films, La Petite Reine, Union Générale Cinématographique, TF1 Films Production, 120 Films, Crystalcreek Ltd., Ultra Films, 124 minutes.
    • Laval-Jeantet, M. et Mangin, B., 2003 Voyage en Iboga, production Art Orienté Objet, université Paris-VIII, 35 minutes.
    • Negroponte, M., 2009 I’m dangerous with love, Blackbridge Productions, Cactus Three, 82 minutes.
    • Ponte, J., 2009 Gabon, the Last Dance, National Geographic International, 47 minutes, [version française : <https://www.youtube.com/watch?v=tJ8HIybl-fA>].
    • Sallée Pierre, 1969 Disoumba, liturgie musicale des Mitsogho du Gabon central, CNRS, 51 minutes.
Nadège Chabloz
Docteur en anthropologie (Institut des mondes africains, EHESS, Paris), est notamment l’auteure de l’ouvrage Peaux blanches, racines noires. Le tourisme chamanique de l’iboga au Gabon, ainsi que d’une trilogie de films documentaires Bwiti et iboga en VF portant sur les réappropriations du bwiti et de l’iboga.
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Mis en ligne sur Cairn.info le 20/11/2019
https://doi.org/10.3917/cas.017.0177
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