CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1Au cours du xixe siècle et de la première moitié du xxe siècle, l’Algérie a connu une forte émigration espagnole, composée de travailleurs et, à certaines périodes, de réfugiés. Depuis le début de la crise économique de 2009, la présence espagnole en Algérie a fortement augmenté. Ce sont aussi bien des travailleurs que des entreprises intervenant en particulier dans les secteurs de la construction et du BTP. Alors que dans les années 1990 et 2000, il n’y avait pratiquement plus d’Espagnols en Algérie, ce pays est en passe de devenir une destination importante de la nouvelle « émigration espagnole ».

2La crise en Espagne caractérisée par une baisse de la consommation et l’effondrement de secteurs de l’économie, notamment de la construction, conjuguée avec l’ouverture économique de l’Algérie et l’augmentation des liquidités explique ce revirement de situation. Les relations historiques entre les deux pays ainsi que leur proximité physique ont contribué à renforcer cette présence espagnole en Algérie.

3À partir d’études publiées sur l’expatriation de travailleurs, des statistiques disponibles et de trente-cinq entretiens semi-directifs réalisés dans les deux pays auprès d’Espagnols travaillant en Algérie, nous analyserons la situation des entreprises espagnoles ainsi que les principales difficultés auxquelles sont confrontés les travailleurs espagnols en Algérie.

Crise, internationalisation et migration

Les antécédents de la mobilité actuelle

4Les relations et les migrations entre le « Levant » de la péninsule ibérique et l’ouest de l’Algérie ont été intenses à plusieurs périodes de l’histoire. À l’époque moderne, la ville d’Oran fut occupée par l’Espagne, et durant la période coloniale (1830-1962), une très forte émigration s’était développée vers l’Algérie [Vilar, 1989]. Les Espagnols en Algérie représentaient entre un quart et un tiers des Européens d’Algérie selon tous les recensements réalisés entre 1836 et 1901. Toutefois, la décision en 1889 d’accorder automatiquement la nationalité française aux Européens nés dans la colonie, combinée au système d’intégration mis en place grâce à l’école républicaine fit naître chez les descendants d’Espagnols le sentiment d’appartenance au peuple français en l’espace de quelques générations. Au cours de la deuxième moitié du xxe siècle, à la fin de la guerre d’indépendance, la plupart des Français d’Algérie durent quitter leur terre natale. Plusieurs milliers de ces pieds-noirs, dont beaucoup étaient d’origine espagnole, s’installèrent dans le sud-est de la péninsule [Sempere, 1998].

5Après l’indépendance de l’Algérie, le mouvement d’Européens entre ces deux régions a été remplacé par celui des Algériens musulmans qui, dans le cadre d’une mobilité sud-nord, ont effectué des allers et des retours. Certains d’entre eux étaient des exilés du régime à parti unique des années 1970 [2] ou de la « décennie noire » [3] des années 1990 ; ils s’installèrent en Espagne comme le firent quelques milliers de travailleurs et de familles algériennes. Lors du recensement de 2001, on comptait 22 652 Algériens en Espagne et lors de celui de 2011 on en dénombrait 59 623, la plupart étant installés dans le sud-est de la péninsule. En dépit de la proximité physique des deux pays, le nombre d’immigrés algériens en Espagne est resté limité par rapport aux 713 334 recensés en France en 2008. Plus qu’un pays d’émigration pour tous les Algériens, l’Espagne est plutôt la destination d’une mobilité importante, mais peu connue. Il s’agit de personnes appartenant à une classe aisée algérienne qui font du tourisme ou qui acquièrent des résidences secondaires sur le littoral ou encore de commerçants qui achètent des biens de consommation [Sempere, 2000] pour les revendre dans leur pays. À partir du milieu des années 2000, alors que la crise s’est accentuée en Espagne et que le pouvoir d’achat s’est amélioré en Algérie, le nombre d’Algériens venant faire du tourisme ou acheter des résidences et autres produits en Espagne a aussi fortement augmenté (figure 4).

La construction en Espagne : un secteur particulièrement touché par la crise économique

6L’intérêt que portent des entreprises espagnoles et certaines institutions comme les chambres de commerce à l’égard du marché algérien a augmenté dans les années 2000 en lien avec l’essor de l’économie algérienne et il s’est confirmé à compter de 2009 avec la crise gagnant l’Europe. Avec l’effondrement de pans entiers de l’économie espagnole, nombreuses ont été les entreprises à réduire drastiquement leurs dépenses et à réorienter notablement leur politique. La restructuration ou l’internationalisation sont devenues alors leurs seules alternatives pour éviter la faillite.

7De nombreux secteurs ont été affectés en raison du manque de liquidités des banques ou de l’administration et de la baisse de la demande qui s’est ensuivie. La construction est le secteur le plus représentatif, tant des périodes de crise que de prospérité. C’est ainsi que l’évolution du nombre d’entreprises et du nombre de logements « approuvés » [4] (figure 1) montre à quel point ce secteur était florissant avant 2008 et rend compte de l’effondrement brutal qu’il a subi depuis. Selon le Répertoire central des entreprises [5], en 2008, 604 626 sociétés étaient enregistrées dans la « construction de bâtiments » et les « activités de constructions spécialisées », toutes catégories juridiques confondues. Ces deux sous-secteurs représentaient 17,7 % des 3 422 239 entreprises en Espagne. À eux deux, ils dépassaient tous les autres secteurs, y compris celui du « commerce au détail » ou des « services de restauration et boissons ». En 2015, les entreprises des deux sous-secteurs de la construction susmentionnés ne sont plus que 392 115, ce qui veut dire que 35,1 % des sociétés ont disparu. L’Enquête de population active [6], qui porte sur la force de travail en Espagne, montre comment les personnes actives dans la construction sont passées de 2 973 800 début 2008 à 1 266 100 (-57,4 %) fin 2015. Le nombre de personnes employées dans le secteur a été divisé par 2,5, passant de 2 679 500 à 1 058 500 au cours de cette même période.

8La figure 1 permet de comparer la situation actuelle avec les deux bulles immobilières que le secteur a connues auparavant : celle des années 1960, avec l’exode rural, le décollage économique et touristique du pays ; et celle des années 1980, plus réduite avec des hauts et des bas. Cela n’a rien à voir avec les 900 000 habitations visées en 2006, après quinze années de croissance constante au cours desquelles huit millions et demi de projets de logements ont été approuvés. Alors que pendant les crises qui ont suivi les deux premières bulles, le nombre d’habitations n’était pas tombé en dessous de la barre des 200 000 par an, on assiste depuis 2007 à une chute brutale du secteur. En plus de l’effondrement du secteur de la construction, les prix des logements neufs sont maintenus à un niveau bas, en raison de l’importance du parc immobilier, ce qui rend difficile la reprise du secteur.

Figure 1

Projets de logements approuvés en Espagne (1960-2015)

Figure 1

Projets de logements approuvés en Espagne (1960-2015)

(*) Logements approuvés par les Ordres provinciaux des architectes, (**) équivalent à la société d’HLM en France.
Source : Rapports trimestriels de statistiques de la construction du Conseil supérieur des ordres des architectes d’Espagne.

9Le secteur de la construction reflète certainement l’image la plus dure de la crise, mais il n’est pas le seul à en avoir subi les conséquences. Les secteurs associés, tels que la production de matériaux, les infrastructures ou le BTP et des secteurs indépendants tels que la santé, l’industrie de la chaussure, alimentaire ou chimique, ont également été fragilisés du fait de la baisse considérable de la consommation et de l’effondrement des investissements publics et privés. Dans ces conditions, les entreprises en déficit tout comme les travailleurs au chômage de ces secteurs ont commencé à rechercher des débouchés dans d’autres pays.

Les retombées de la crise : internationalisation et migrations

10Au cours des dernières années, les entreprises espagnoles de la construction, du BTP et des secteurs dérivés ont acquis des connaissances, une expérience et un savoir-faire très appréciés à l’échelle internationale qu’elles ont essayé d’exporter en Amérique latine et dans d’autres pays émergents, à la suite de l’effondrement de l’économie espagnole. À compter des années 1990, et jusqu’en 2008, ce sont surtout de grandes sociétés qui se sont redéployées à l’internationale pour élargir et diversifier leurs marchés. Attirées par les liquidités croissantes des pays émergents et par les grands travaux qui s’y développaient, les entreprises espagnoles des secteurs de l’énergie, de la construction et du BTP ont créé des filiales à l’étranger à partir d’accords de coopération commerciaux. Ce processus implique généralement le déplacement pendant plusieurs mois, voire plusieurs années, d’expatriés hautement ou moyennement qualifiés (techniciens ou cadres dirigeants) chargés de diriger des équipes, de mettre en œuvre les systèmes de travail et de diffuser les valeurs des sociétés mères [Espinosa Romero, 2009]. Depuis 2009, en lien avec le début de la crise, les PME ont également envisagé la voie de l’internationalisation et des milliers de jeunes Espagnols ont tenté de trouver du travail à l’étranger. Ces différents groupes constituent ce que l’on appelle la « nouvelle émigration espagnole ».

11Le Registre des résidents espagnols à l’étranger (PERE) publié depuis 2009 à partir des registres consulaires permet de suivre l’évolution de l’émigration selon le pays de naissance [7]. La figure 2 montre que le nombre de ressortissants espagnols résidant à l’étranger est passé de 1,47 à 2,18 millions, soit une croissance de près du 50 % en six ans. Toutefois, cette augmentation englobe deux grandes réalités très différentes qu’il est nécessaire de préciser : la majorité de ces résidents à l’étranger (60 %), et celle qui a le plus augmenté depuis 2009 (+72 %) sont des Espagnols nés dans le pays de résidence. Il s’agit majoritairement d’anciens immigrés arrivés en Espagne dans les années 1990 et 2000, en provenance essentiellement des pays latino-américains, qui ont acquis par la suite la nationalité espagnole [8]. Ils sont retournés, soit en raison de la crise, soit parce qu’ils ont été attirés par l’amélioration des conditions de travail dans leur pays d’origine [López de Lera, 2010]. Les résidents à l’étranger nés en Espagne ne représentent que 40 % des personnes enregistrées, et leur nombre n’a augmenté que de 16 % depuis 2009. Ils s’orientent soit vers des pays d’ancienne émigration (France, Allemagne, Royaume-Uni et Suisse en Europe et Argentine, Venezuela, États-Unis, Brésil et Mexique en Amérique) soit vers des destinations émergentes comme l’Arabie Saoudite, le Qatar, Singapour et les Émirats Arabes Unis. Dans ces cas, il s’agit souvent d’entreprises et de travailleurs expatriés dans le cadre entrepreneurial.

Figure 2

Espagnols enregistrés à l’étranger par pays de naissance (en milliers de personnes)

Figure 2
2009 2015 Nés Total Esp. Pays de résidence Total Esp. 2009 2015 Pays de résidence 2009 2015 Total 1 472 633,8 755,9 2 183 733,4 16 % 1 303,0 72 % Argentine 300,4 94,0 202,1 423,0 92,6 -2 % 325,7 61 % France 179,7 115,2 51,8 223,6 124,2 8 % 80,9 56 % Venezuela 158,1 57,0 97,1 190,6 56,2 -2 % 130,0 34 % Allemagne 103,1 52,0 47,4 130,3 61,9 19 % 60,1 27 % Brésil 78,5 28,6 44,2 123,3 29,8 5 % 89,5 103 % Mexique 69,6 17,4 49,7 115,6 17,5 1 % 94,7 91 % États-Unis 67,0 37,3 13,4 113,5 48,5 30 % 26,1 96 % Suisse 87,7 43,3 41,2 107,0 46,9 9 % 54,4 32 % Royaume-Uni 57,8 37,6 12,8 91,3 54,4 45 % 20,3 59 % Équateur 5,5 2,2 3,0 40,6 11,9 443 % 28,0 836 % Pérou 9,0 2,8 5,8 22,6 5,4 97 % 16,3 181 % Bolivie 3,8 1,4 2,1 10,7 3,9 174 % 6,4 198 % EAU 1,0 0,6 0,1 3,3 2,2 248 % 0,4 294 % Arabie S. 0,5 0,2 0,2 1,7 1,1 513 % 0,2 36 % Singapour 0,4 0,2 0,1 1,4 0,9 276 % 0,2 169 % Qatar 0,3 0,2 0,0 1,3 1,0 301 % 0,1 289 % Algérie 0,422 0,227 0,137 0,615 0,347 53 % 0,182 33 %

Espagnols enregistrés à l’étranger par pays de naissance (en milliers de personnes)

Source : Registre des résidents espagnols à l’étranger (Padrón de residentes españoles en el extranjero, PERE), Institut national de statistiques (INE).

L’Algérie : une opportunité pour travailleurs et entreprises

12La figure 2 montre que, selon les registres consulaires, seulement 615 Espagnols résideraient dans ce pays, ce qui place l’Algérie en 63e position, derrière d’autres pays plus éloignés, moins peuplés ou qui n’ont pas tissé de relations historiques particulières avec l’Espagne.

Une certaine ouverture économique de l’Algérie

13Après l’indépendance de l’Algérie, la population européenne a drastiquement diminué. Dans les années 1960 et 1970, l’économie a été nationalisée et, contrairement au Maroc et à la Tunisie, ses voisins, le pays ne s’est pas ouvert au tourisme. L’Algérie, ayant obtenu la libération par la force et disposant d’hydrocarbures assurant l’entrée de devises, elle jouit d’une certaine liberté économique et politique par rapport à l’Occident. Seule la France, ancienne métropole, entretient avec l’Algérie des relations intenses et quelque peu controversées, fondées sur la coopération, des intérêts partagés et une bonne connaissance de la société et du territoire [Simon, 2011].

14En dépit de la proximité spatiale et de l’importance des échanges historiques, l’Algérie de Boumédiène et l’Espagne de Franco avaient des désaccords politiques et entretenaient des relations commerciales limitées. À la fin des années 1980 et dans les années 1990, l’instabilité et la « décennie noire » ont fait fuir les entreprises, les institutions et les résidents étrangers [9]. Au début des années 2000, il n’y avait pratiquement plus d’étrangers d’origine européenne en Algérie, avant que plusieurs événements ne fassent évoluer la situation. D’une part, le président Bouteflika, élu en 1999, a mis fin au conflit civil et a stabilisé le pays, réduisant ainsi le sentiment de danger. D’autre part, l’augmentation du prix des hydrocarbures a permis au pays de rembourser sa dette, d’enregistrer un excédent commercial et d’accroître ses réserves de devises. Alors qu’entre 1987 et 1997 le PIB par habitant avait baissé de 47 %, entre 1997 et 2007, il a été multiplié par 2,4 et par 3,6 jusqu’en 2014. Enfin, au début des années 2000, l’Algérie a signé un accord commercial avec l’Union européenne, libéralisé en partie les échanges de marchandises et de services, mettant fin à une période de commerce irrégulière et facilitant l’entrée d’entreprises étrangères.

15Depuis le milieu des années 2000, le pays connaît une pleine ouverture économique combinée à une certaine effervescence sociale. Il dispose également d’abondantes liquidités dans les secteurs public et privé. Dans le même temps, les classes aisées et moyennes se renforcent, encourageant la consommation de produits étrangers et notamment de voyages à l’étranger. L’État investit par le biais de plans quinquennaux ambitieux afin de diversifier et d’améliorer son économie. Selon l’ambassade d’Algérie en Espagne, le plan quinquennal 2010-2014 a consacré 286 milliards de dollars (176 % du PIB de 2010) à la construction et à l’amélioration de logements, d’infrastructures, de centres de santé et d’enseignement, ainsi qu’à la promotion des entreprises et de la jeunesse.

Les entreprises espagnoles en Algérie : internationalisation et survie

16Jusqu’à la fin des années 1990, les relations commerciales entre l’Espagne et l’Algérie se limitaient à l’énergie et à d’autres secteurs tels que l’alimentation, la pêche, l’industrie, en plus de l’échange informel de biens de consommation. L’importation d’hydrocarbures algériens acquiert une portée stratégique après le choc pétrolier de 1973. Souhaitant diversifier ses sources d’énergie et réduire sa dépendance vis-à-vis du golfe Persique, l’Espagne a commencé à acheter du gaz naturel liquéfié algérien à partir de 1974 [Marquina, 2012]. Dans les années 1990, malgré l’instabilité qui régnait en Algérie, l’Espagne a augmenté ses importations après avoir conclu un accord pour la construction d’un gazoduc sous-marin [10].

17Profitant du vide relatif laissé par le retrait d’institutions et d’entreprises françaises pendant la « décennie noire », des sociétés étrangères et notamment espagnoles ont entrevu l’Algérie comme une terre d’opportunités et se sont orientées plus particulièrement vers la région ouest. En 2002, deux traités ont ainsi été signés faisant de l’Algérie et de l’Espagne des partenaires de premier ordre [Thieux, 2007] : le « Traité bilatéral d’amitié, de bon voisinage et de coopération » [11] dans le cadre duquel des réunions de haut niveau sont périodiquement organisées entre les deux pays ; et « l’Accord d’association » signé la même année entre l’Algérie et l’Union européenne.

18Les exportations espagnoles vers l’Algérie (figure 3) sont également un indicateur permettant d’appréhender l’engagement croissant des entreprises et des institutions dans ce pays. Alors que les exportations étaient restées faibles, mais stables pendant les années 1990, en 2002, 2005 et 2008 leur volume augmente respectivement de 30 %, 50 % et 60 %. Ce sont essentiellement de grandes entreprises qui s’installent dans le pays, étant alors les seules capables de cumuler une solide expérience des marchés étrangers et une volonté de diversifier leur champ d’action. En plus des entreprises du secteur énergétique, telles que Repsol, Cepsa ou Gas Natural, des entreprises d’électricité (Iberdrola et Abener), d’infrastructures de transport (CAF, OHL et Isolux – Corsan), du secteur chimique (Fertiberia) et de l’eau (Aguas de Barcelona) se mettent aussi sur les rangs.

Figure 3

Exportations espagnoles vers l’Algérie (en millions d’euros)

Figure 3

Exportations espagnoles vers l’Algérie (en millions d’euros)

Source : Statistiques du commerce extérieur, ministère espagnol de l’Économie et de la Compétitivité.

19Les exportations espagnoles ont augmenté très fortement à partir de 2010, au lendemain de l’effondrement du secteur de la construction et de la montée du chômage en Espagne. C’est à ce moment-là que les PME sont devenues visibles dans les villes de l’ouest de l’Algérie. Il s’agit notamment de petites entreprises intervenant comme sous-traitants à bas coût auprès de grandes sociétés étrangères déjà installées en Algérie. Cette croissance des entreprises et des échanges contribue à ce que l’Espagne devienne, en 2013 et en 2014, le premier partenaire commercial de l’Algérie [ANDI, 2015], avec 14,70 milliards de dollars échangés en 2014, devant l’Italie (13,35 milliards) et la France (13,09 milliards).

Les Espagnols en Algérie : plus une mobilité qu’une migration

20Il n’est pas facile d’obtenir des statistiques fiables sur le nombre d’Espagnols résidant en Algérie. Les données sur les visas et sur les permis de séjour accordés par les consulats et le ministère de l’Intérieur ne sont pas publiées par les autorités algériennes et les registres consulaires espagnols ne dénombrent, début 2015, que 615 résidents en Algérie dont seulement 347 nés en Espagne (figure 2). Et pourtant le nombre d’Espagnols, ainsi que celui des Européens, travaillant en Algérie a fortement augmenté au regard de ce que l’on peut observer sur le terrain (dans certains chantiers de BTP et dans les vols aériens reliant les deux pays), dans les entretiens et dans les médias ; surtout si l’on compare avec le début des années 2000 et la fin de la « décennie noire » où les Européens étaient pratiquement absents d’Algérie.

21D’autres indicateurs comme le trafic aérien montrent, depuis 2007, une très forte croissance du nombre de passagers empruntant les liaisons aériennes entre l’Espagne et l’Algérie. Entre 2004 et 2015, ce nombre a presque quintuplé (figure 4). Même si la proportion des passagers algériens ou espagnols n’est pas renseignée, cet indicateur ainsi que celui relatif aux exportations (cité plus haut) attestent une forte augmentation des échanges commerciaux et de la mobilité des populations entre les deux pays depuis la deuxième moitié des années 2000 ; ce qui contraste avec le petit nombre d’Espagnols enregistrés en Algérie.

Figure 4

Trafic aérien de passagers entre l’Espagne et l’Algérie

Figure 4

Trafic aérien de passagers entre l’Espagne et l’Algérie

Source : Statistiques de trafic aérien. Aeropuertos Españoles y Navegación Aérea (AENA).

22C’est comme si, une part importante des Espagnols travaillant en Algérie n’étaient pas inscrits auprès des représentations diplomatiques. Comme l’a mentionné le Consul général d’Espagne à Oran [12], la mobilité des Espagnols en Algérie se caractérise par des visites professionnelles ponctuelles ou de brefs séjours de travail. La majorité des Espagnols vivant en Algérie conservent leur résidence administrative en Espagne. Bien qu’ils travaillent pour des sociétés mixtes implantées en Algérie, ils gardent les avantages sociaux et économiques d’une résidence en Espagne, perçoivent leur salaire en Espagne, évitant d’avoir à solliciter un titre de séjour. Tout cela est bien évidemment facilité par la proximité physique existant entre les deux pays et par les nombreuses liaisons aériennes et maritimes qui permettent de vivre entre les deux pays ou de rentrer en Espagne au moins une fois tous les trois mois ; ce qui correspond au plus long séjour autorisé avec un visa de tourisme ou d’affaires. De ce fait, les travailleurs espagnols implantés en Algérie sont plutôt dans la circulation que dans l’installation durable en Algérie.

Caractéristiques du collectif espagnol en Algérie

23Mis à part les rares Espagnols survivants de la période coloniale [13] tous de nationalité française, les Espagnols viennent en Algérie essentiellement pour des raisons professionnelles. Presque toutes les personnes interviewées sont des travailleurs laissant leur famille en Espagne et qui s’installent en Algérie seulement le temps de la durée de leur contrat de travail. Une seule des 35 personnes interviewées est venue rejoindre son conjoint et a trouvé un emploi à l’Institut Cervantes d’Oran, l’institut culturel espagnol. Le caractère professionnel de la présence actuelle des Espagnols nous conduit à proposer une typologie en fonction du type d’entreprise les ayant recrutés.

24Le premier groupe s’apparente à un collectif hétérogène incluant des personnes travaillant pour des institutions ou des organisations bénéficiant d’un financement public. Il s’agit de quelques dizaines de personnes liées aux ONG, aux ordres religieux et aux institutions espagnoles – l’Ambassade d’Alger et le consulat d’Oran, les Instituts Cervantes d’Alger et d’Oran –, mais aussi d’universitaires arrivés dans le cadre d’échanges entre le ministère des Affaires étrangères espagnol et l’Algérie et les agences de coopération [14].

25Le deuxième collectif regroupe des expatriés que les grandes entreprises envoient depuis les années 1990 pour travailler dans le secteur des hydrocarbures et, depuis le milieu des années 2000, dans les secteurs de la construction ou du BTP. Ce sont des travailleurs hautement qualifiés qui bénéficient, pour la majorité d’entre eux, de primes d’expatriation [IESE Business School, 2013, p. 23], de garanties de promotion à leur retour, d’un logement ou d’une voiture de fonction… Depuis 2010, une importante précarisation professionnelle de ce groupe a été observée au point que certaines personnes s’expatrient pour conserver leur emploi, sans attendre en retour un complément de salaire. De même, de jeunes chômeurs hautement qualifiés recrutés en Espagne avec des contrats algériens acceptent d’être rémunérés en dinars. Enfin, le chômage et la baisse des salaires permettent aux grandes entreprises espagnoles d’embaucher en Espagne des travailleurs moyennement ou peu qualifiés – techniciens et ouvriers spécialisés – visibles sur les chantiers algériens.

26Le troisième collectif est constitué d’entrepreneurs issus de PME, notamment des micro-entreprises et des petites entreprises, respectivement de moins de dix et cinquante salariés. C’est un groupe qui a fortement augmenté avec la crise et qui considère l’Algérie comme une destination privilégiée. Contrairement aux grandes entreprises, les PME n’élaborent généralement pas de plan d’expatriation et ne disposent pas d’expérience à l’étranger. Lorsqu’il s’agit de micro-entreprises, c’est souvent les gérants et responsables eux-mêmes qui s’installent en Algérie. C’est dans ce groupe que nous incluons aussi les travailleurs indépendants espagnols qui se déplacent de manière individuelle avec un visa de touriste en quête de débouchés. À la fin de leur contrat, quelques-uns restent clandestinement en free-lance ou se marient avec des Algériennes, obtiennent ainsi un titre de séjour et travaillent en tant qu’indépendants. C’est notamment le cas d’un ébéniste interviewé. La croissante précarisation des travailleurs espagnols alimente la rumeur récurrente chez les Algériens de l’arrivée de harraga[15] espagnols, les clandestins qui traversent la Méditerranée dans des embarcations de fortune [16].

Petites entreprises : une réalité quotidienne souvent difficile

Les raisons du choix de l’Algérie

27Les PME ont beaucoup augmenté depuis 2009. Ce sont elles qui contribuent à rendre plus visible la présence espagnole en Algérie. Outre la conjoncture économique favorable, d’autres raisons expliquent le choix fait par les petites entreprises espagnoles de s’établir dans l’ouest de l’Algérie. Alger et Oran se trouvent à une heure de vol de Barcelone et de Madrid et à seulement trente-cinq minutes d’Alicante. Cette proximité géographique permet de faire plusieurs voyages pour un coût mensuel tout à fait raisonnable, ce qui est impossible lorsque l’on s’expatrie en Amérique, en Asie où dans les pays du Golfe. Par ailleurs, le fait de partager le même fuseau horaire (une heure de différence seulement en été) n’introduit pas de déphasage avec l’Espagne. Les 35 interviewés ont déclaré passer la plupart de leur temps libre à regarder la télévision espagnole ou à consulter les réseaux sociaux.

28D’un point de vue économique, bien que l’Algérie ne soit pas un marché facile d’accès pour les petites et moyennes entreprises espagnoles, elle offre la possibilité de rebondir aux sociétés qui se sont retrouvées en grande difficulté après l’effondrement de certains secteurs tel que le BTP. Le manque de compétences à l’échelle locale, et paradoxalement, le fonctionnement du système financier algérien favorisent leur installation. Contrairement à d’autres pays, en Algérie le paiement à crédit n’est pas généralisé. Il est donc acceptable qu’un service ne soit pas fourni ou qu’une marchandise ne soit pas livrée si elle n’est pas payée comptant. Les petits entrepreneurs, qui viennent d’Espagne où la dette a entraîné de nombreuses faillites, voient d’un bon œil de devoir payer en espèces et ne pas « faire confiance » d’emblée à ses fournisseurs ou clients.

29Comme nous l’avons indiqué plus haut, certaines sociétés exportaient déjà vers l’Algérie depuis les années 1990, connaissaient le marché algérien et avaient des clients. C’est ce qui a été décisif lors de leur installation. C’est par exemple le cas de Dulcesol, une entreprise de pâtisseries installée à Sig, à cinquante kilomètres au sud-est d’Oran, ou de Gallina Blanca Star qui produit des soupes et des pâtes précuites à Oran.

30Outre la proximité et les similitudes qui existent entre ces deux pays, notons l’image positive que conserve l’Espagne dans la population algérienne. Il existe en effet des facteurs historiques et culturels qui, malgré les divergences, rapprochent les deux sociétés. La présence espagnole pendant la période coloniale a marqué l’architecture résidentielle de nombreux villages de l’ouest du pays (ex. Rio Salado, Mostaganem ou Sidi Bel Abbès) et de nombreux quartiers populaires de villes telles qu’Alger et Oran (ex. Bab el Oued ou Sidi El Houari). Certains Espagnols ou Algériens qui ont grandi dans ces quartiers populaires sont toujours en vie et transmettent cette mémoire sociale à leurs descendants [17]. Ce sont des réminiscences sociales, voire familiales qui peuvent jouer en faveur des entreprises espagnoles au sein de la société algérienne ou dans le choix de l’Algérie par ces entreprises. Malgré des siècles d’affrontements, les Espagnols, pourtant acteurs de la colonisation, ne sont pas perçus comme responsables de cet épisode si décrié dans l’Algérie actuelle [18].

31Dans le cadre entrepreneurial, trois chantiers de travaux publics dans l’ouest de l’Algérie ont eu un impact positif sur l’image de l’ensemble des entreprises espagnoles, grandes et petites : la gestion du réseau d’assainissement et d’eau potable par une filiale d’Aguas de Barcelona (AGBAR) depuis 2007 ; la construction du palais des congrès entre 2008 et 2011 par Obrascón Huarte Lain (OHL) et surtout, la construction du tramway par le consortium Isolux-Corsán (2008-2012) qui a marqué un tournant dans l’image et le transport de la ville.

Les principales difficultés : la bureaucratie et l’obligation de créer une société mixte

32La principale difficulté à laquelle sont confrontées les entreprises espagnoles est que, en dépit de la proximité géographique, des relations historiques entretenues et de la sympathie initiale mentionnées plus haut, de grandes différences dans les formes de travail et la culture administrative subsistent entre les deux pays. Les PME, et surtout les nombreuses entreprises frappées par la crise, sont tout particulièrement vulnérables au manque de contacts et d’informations. De ce fait, des sociétés de conseil se créent pour faciliter les démarches relatives au travail et à la fiscalité (ex. Oftex, Ingepar Spa, Pecex Dathyago). Il s’agit d’entreprises ayant une expérience dans d’autres régions du monde ou qui connaissent la réalité locale et qui conseillent de manière plus ou moins réussie sur les différents aspects de l’expatriation.

33On assiste également à l’apparition d’entités espagnoles ou mixtes, et notamment des ordres professionnels et des chambres de commerce qui proposent des formations et des conférences sur le cadre juridique ainsi que des présentations sur la réussite de certaines entreprises [19]. À l’instar du discours tenu par les émigrés qui retournent dans leur région d’origine, les expériences décrites ne mettent pas en avant les échecs ni les difficultés, mais fournissent souvent des informations formelles ou tronquées de la réalité. Ce n’est que la pratique sur place qui permettra à un entrepreneur de connaître les subtilités culturelles, sociales ou législatives, ainsi que les nombreux problèmes liés aux questions administratives, juridiques ou professionnelles [20].

34Les démarches bureaucratiques sont, sans aucun doute, le principal obstacle avancé par les étrangers. Comme dans beaucoup de pays, le fonctionnement de l’administration est hasardeux, les temps d’attente, et la bureaucratie excessifs et l’utilisation d’Internet faible ; autant d’aspects récurrents dont se plaignent les étrangers comme les autochtones. Les difficultés surviennent surtout dans le cadre de deux démarches initiales et décisives : la création et le maintien de la société mixte nécessaire pour exercer une activité à but lucratif et l’obtention du permis de travail et de séjour. Les difficultés pour régulariser la situation administrative sont un problème [21] que de nombreux Espagnols contournent avec des visas de tourisme ou d’affaires ce qui les conduit à quitter le pays tous les trois mois.

35D’autres réalités économiques pouvant faire obstacle à l’activité des entreprises sont également à prendre en compte. Les principaux problèmes sont une forte inflation, l’existence d’un marché noir de devises, les longues transactions bancaires nécessaires pour l’achat de matériel ou le rapatriement légal des bénéfices qui suppose le paiement d’impôts supérieurs à vingt pour cent du montant transféré, assorti de longs délais d’attente.

36Depuis 2009, l’État algérien stipule que, pour s’installer dans le pays, les entreprises étrangères sont dans l’obligation de créer une société mixte avec un associé algérien détenant au moins 51 % des parts de la nouvelle société [22], quels que soient l’expérience et le capital apportés. De ce fait, le choix du partenaire algérien devient une pièce maîtresse dans l’installation en Algérie, surtout pour les PME n’ayant pas de contacts dans ce pays. Certains entrepreneurs prospectent dans des forums sur Internet ou à l’occasion de séminaires organisés par les chambres de commerce, alors que d’autres, souvent ceux qui exportaient auparavant, ont su transformer leur client en partenaire et peuvent s’installer plus facilement. La plupart des PME sont dépourvues d’expérience à l’internationale ; elles ont une connaissance limitée de l’Algérie, sont par ailleurs très endettées et ont besoin de produire rapidement des bénéfices pour éviter la faillite. Elles ne se retrouvent donc pas dans les meilleures conditions pour négocier à leur avantage avec leurs nouveaux associés algériens. Ces derniers savent aussi qu’en cas de litige [23], l’étranger devra entreprendre des actions judiciaires dans un pays, une culture et une langue qui ne sont pas les siens.

37Les études portant sur l’internationalisation des entreprises insistent sur la nécessité de recevoir une préparation culturelle appropriée pour gérer au mieux son équipe dans un univers étranger et réduire les conflits [Muñiz, Labrador, Arizkuren, 2012]. Pourtant, plus de la moitié des 35 personnes interviewées avaient très peu de connaissances préalables sur l’histoire, l’économie, la société ou la culture algérienne. Cette méconnaissance les a conduits à certains jugements. Les plaintes les plus récurrentes concernent le secteur de la construction, là où les ouvriers et les techniciens espagnols travaillent côte à côte avec les Algériens. Ce n’est pas les différences de langue ni de religion que les Espagnols déplorent, mais l’informalité et le manque de formation. Les contremaîtres espagnols travaillant sur des chantiers sont quasi unanimes pour dire que les techniciens-superviseurs sont peu formés et trop pointilleux tout comme les ouvriers ont peu d’expérience professionnelle ou peu l’habitude de travailler. On entend souvent un double discours attribuant cette situation à l’origine rurale des ouvriers, et au manque d’intérêt pour le travail qui serait encouragé par l’État algérien lequel garantirait les produits de base grâce aux revenus des hydrocarbures. Dans les usines et les bureaux, si les entrepreneurs espagnols n’ont pas une vision aussi négative du milieu professionnel, ils se plaignent néanmoins de l’absence de professionnalisme des employés locaux, surtout masculins.

38Les Espagnols expatriés déclarent ne connaître que rarement des Algériens de classe moyenne, ce qui encourage les stéréotypes des deux côtés. D’une part, les Espagnols ont tendance à généraliser l’expérience vécue dans le chantier à l’ensemble de la société et d’autre part, les classes moyennes algériennes se demandent pour quelles raisons les entreprises étrangères s’implantent dans leur pays à la place des entreprises nationales.

Conclusion

39Au cours des dernières années, la présence espagnole en Algérie s’est renforcée. À l’image de ce qui s’était déjà passé il y a un siècle, la précarité sur le sol espagnol associée aux opportunités d’emploi et de débouchés en Algérie a suscité un fort engouement parmi les Espagnols en mal d’activité. Il s’agit de travailleurs et d’entreprises issus en particulier des secteurs de la construction et du BTP. Travailler en Algérie comporte d’importants atouts liés à la grande proximité géographique avec l’Espagne et à une histoire partagée. Mais sitôt installés, les Espagnols sont confrontés à des problèmes administratifs, caractéristiques de l’expatriation, à une certaine vulnérabilité juridique et économique ainsi qu’à des spécificités sociales et culturelles qui les conduisent parfois à reconsidérer leur projet. L’amélioration des transports aériens, combinée à la croissance économique de l’Algérie pourrait conduire à envisager une consolidation de la présence d’Espagnols en Algérie et un renforcement des liens entre les deux pays. Mais, en lien avec la baisse du prix des hydrocarbures, l’Algérie fait depuis 2014 l’expérience de grandes difficultés budgétaires qui auront vraisemblablement des répercussions sur la population étudiée.

40La situation des Espagnols en Algérie n’est pas spécifique, mais renseigne sur les grandes tendances observées dans la mobilité et les migrations internationales. D’une part, la modernisation des transports et des TIC permettent une croissance de la circulation professionnelle ; d’autre part, la précarité et les inégalités croissantes au sein des sociétés riches poussent les jeunes à chercher des débouchés dans de nombreux pays émergents, augmentant ainsi la mobilité nord-sud.

Notes

  • [1]
    Cette étude a été réalisée dans le cadre du projet « Los expatriados de la provincia de Alicante en Argelia : orígenes, desarrollo y perspectivas de una nueva movilidad de empresas y trabajadores » financée en 2013 et 2014 par l’Instituto de Cultura « Juan Gil-Albert » de la Diputación Provincial de Alicante.
  • [*]
    Enseignant-chercheur au département de géographie humaine de l’université d’Alicante (Espagne).
  • [**]
    Doctorante à l’université d’Alicante (Espagne).
  • [2]
    Pendant la présidence de Boumédiène (1965-1978), l’Algérie a connu une période de dictature et de répression de l’opposition politique particulièrement dure.
  • [3]
    La « Décennie noire » est un des noms donnés en Algérie à la guerre civile qui opposa pendant les années 1990 le gouvernement algérien à divers groupes islamistes.
  • [4]
    En Espagne, tous les projets de bâtiments doivent être approuvés et visés par l’Ordre des architectes de chaque province avant d’être présentés à l’administration pour obtenir l’autorisation de construire.
  • [5]
    Le Directorio Central de Empresas est le système d’information unique qui regroupe toutes les entreprises espagnoles. Il est publié à travers l’Institut national de statistiques (http://www.ine.es/inebmenu/mnu_empresas.htm).
  • [6]
    La Encuesta de Población Activa (EPA) est la principale enquête menée en Espagne concernant le marché du travail. Elle est réalisée trimestriellement par l’Institut national de la Statistique (INE).
  • [7]
    Le principal défaut de cette source est qu’une partie des Espagnols résidant à l’étranger ne sont pas inscrits dans leurs consulats (par exemple, nombreux sont ceux qui ont la double nationalité ou qui font des allers-retours entre l’Espagne et le pays dans lequel ils travaillent).
  • [8]
    Les Latino-américains peuvent demander la nationalité au bout de deux ans de résidence régulière en Espagne.
  • [9]
    Pendant la « décennie noire », les groupes islamiques armés ont exécuté des étrangers, dont des entrepreneurs espagnols.
  • [10]
    Depuis 1996, l’Espagne et l’Algérie sont reliées par le gazoduc Maghreb – Europe qui traverse le Maroc et le détroit de Gibraltar. Depuis 2011, un autre gazoduc, le Medgaz, relie directement Benisaf et Almería.
  • [11]
    Publié dans le Boletín Oficial del Estado du 11 novembre 2003.
  • [12]
    Entretien avec le Consul général d’Espagne à Oran du 24 octobre 2013.
  • [13]
    Depuis 2004, nous avons rencontré dix Français vivant en Algérie depuis la période coloniale parmi lesquels six sont descendants d’Espagnols. Pierre Daum publie en 2012 les entretiens avec quelques pieds-noirs d’origine espagnole vivants en Algérie [Daum, 2012].
  • [14]
    Dans les années 2000, l’Algérie fut qualifiée de pays prioritaire par l’Agence espagnole de coopération internationale pour le développement (AECID) et par plusieurs agences de coopération régionale. Il y eut des dizaines de projets et plusieurs coopérants partirent comme expatriés dans le nord du pays et dans les camps sahraouis de Tinduf.
  • [15]
    Les harraga sont les jeunes maghrébins qui tentent de traverser la mer avec des moyens de fortune pour migrer en Europe. Considérée comme le symbole de l’échec de la jeunesse, cette question est très présente dans les débats et les médias algériens depuis le début des années 2000.
  • [16]
    Le 15 avril 2012, le site Internet du quotidien Réflexions de Mostaganem faisait état de supposés harraga espagnols arrêtés au large d’Oran.
  • [17]
    De nombreux Algériens ayant vécu dans ces quartiers et dans ces villages avant les années 1960 témoignent souvent des voisins espagnols qu’ils avaient à l’époque et avec lesquels ils entretenaient de bonnes relations.
  • [18]
    Des Algériens rappellent que pendant la « Décennie noire », l’Espagne n’a pas fermé ses représentations diplomatiques ni ses centres culturels à Alger et à Oran.
  • [19]
    En ce sens, nous pouvons citer les Chambres de commerce d’Alicante et de Valence qui ont organisé plusieurs séminaires sur la coopération économique et entrepreneuriale entre les deux pays ; celle d’Oran et le Cercle du commerce et de l’Industrie Algéro-Espagnol (CCIAE) qui regroupe depuis 2013 plusieurs dizaines d’entreprises.
  • [20]
    « Plata, paciencia y persistencia » (pognon, patience et persévérance) est la phrase à travers laquelle le gérant de la PME de matériaux de construction, Sido-Al, synthétisait ce qu’il faut avoir pour s’installer en Algérie.
  • [21]
    Le permis n’est pas facilement décerné. Les conditions sont difficiles, voire peu claires, et les démarches administratives sont très lentes.
  • [22]
    Loi des finances complémentaires (Ordonnance no 09-01 du 22 juillet 2009) dont l’article 58 dicte « les investissements étrangers ne peuvent être réalisés que dans le cadre d’un partenariat dont l’actionnariat national résident représente au moins 51 % du capital social ».
  • [23]
    Citons notamment le litige qui a opposé en septembre 2007 les entreprises algériennes Sonatrach et espagnoles Repsol YPF et Gas Natural autour du projet d’extraction de gaz du site Gassi Touil dans le Sahara. En mars 2012, un autre, litige a porté sur le surcoût de la construction du centre de conventions d’Oran par l’entreprise espagnole OHL.
Français

L’Algérie enregistre depuis le début des années 2000 une forte croissance économique. À l’inverse, en Espagne, la crise qui sévit depuis 2009 a mis fin à une longue période de prospérité, entraînant l’effondrement de pans entiers de l’économie et faisant bondir les chiffres du chômage. Cette situation a déclenché une forte augmentation de l’émigration espagnole. Comme au xixe siècle, la précarité dans laquelle se retrouve une partie de la population espagnole et les opportunités professionnelles sont autant de facteurs qui ont permis le développement d’une présence et d’une mobilité espagnole en Algérie. Il s’agit d’entreprises et de travailleurs de nombreux secteurs productifs et particulièrement de la construction et du BTP. Travailler et vivre en Algérie comporte de nombreux avantages pour les Espagnols, notamment liés à la proximité entre les deux pays ; cela va également de pair avec des difficultés administratives et une certaine vulnérabilité juridique et économique.

Mots-clés

  • migrations
  • mobilité
  • expatriation
  • Espagnols
  • Algérie

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Juan-David Sempere Souvannavong [*]
  • [*]
    Enseignant-chercheur au département de géographie humaine de l’université d’Alicante (Espagne).
María-Jesús Cabezón Fernández [**]
  • [**]
    Doctorante à l’université d’Alicante (Espagne).
Cette publication est la plus récente de l'auteur sur Cairn.info.
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Mis en ligne sur Cairn.info le 22/02/2017
https://doi.org/10.3917/autr.077.0035
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