CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1 Alors que la quasi-totalité des études antérieures montraient une relation nulle, voire parfois positive, entre le nombre d’enfants et leur scolarisation en Afrique subsaharienne, bon nombre de travaux récents conduits dans cette région du monde ont désormais tendance à rapporter plutôt une corrélation négative entre les deux variables [Eloundou-Enyegue, Williams, 2006, sur le Cameroun ; Vogl, 2013, sur 48 pays en développement dont 32 d’Afrique au sud du Sahara ; Kravdal et al., 2013, sur 26 pays d’Afrique subsaharienne ; Bougma et al., 2014, 2015a, 2015b]. Cependant, les mécanismes associés à l’émergence de cette relation négative entre fécondité et scolarisation dans le contexte africain restent largement méconnus. En effet, dans leur très grande majorité, ces études quantitatives ont traité la scolarisation comme une variable dépendante en essayant parfois d’isoler un effet causal du nombre d’enfants ; et les mécanismes par lesquels cette scolarisation des enfants elle-même peut affecter la fécondité des parents ont été peu explorés. Dans l’ensemble, on sait peu de chose sur la façon dont ceux-ci s’adaptent selon les contextes aux coûts et bénéfices de l’éducation des enfants et sur la manière dont ces derniers sont pris en compte dans les stratégies reproductives. Cet article vise à approfondir ces questions en recourant à une approche qualitative dans le contexte des quartiers périphériques de Ouagadougou, au Burkina Faso.

2 D’après la littérature, la transition de la fécondité [2] (au niveau macro) est susceptible d’affecter positivement la scolarisation des enfants à travers des changements mécaniques engendrés dans la structure par âge de la population. Le ratio de dépendance [3] étant en effet fonction de cette structure, le déclin des taux de fécondité se traduit mécaniquement par une baisse de ce ratio concernant les enfants et adolescents, libérant ainsi des ressources qui peuvent être épargnées et investies dans le développement socio-économique, y compris la scolarisation des enfants [Merrick, 2002 ; Bloom et al., 2003 ; Ross, 2004 ; Schultz, 2007 ; Eloundou-Enyegue et Giroux, 2013]. La plupart des pays d’Afrique subsaharienne, notamment dans leurs centres urbains, ont amorcé cette transition de fécondité [Locoh, 2003 ; National research council, 2003 ; National academies of science, engineering and medecine, 2016].

3 Au niveau de la famille ou du ménage (niveau micro), la réduction du nombre d’enfants peut cependant ne pas être systématiquement suivie d’un meilleur investissement scolaire. Certes, selon la théorie de dilution [Blake, 1981, 1989], moins les enfants sont nombreux dans une famille ou un ménage, plus grandes sont les ressources disponibles en moyenne pour chacun – matérielles telles que l’argent, mais aussi non matérielles telles que le temps. Néanmoins cette allocation des ressources à la scolarisation des enfants dépend aussi des rapports des parents à l’école [Lange, 2006]. Par exemple, si ces derniers ne sont pas convaincus que l’institution scolaire est une voie de réussite pour leurs enfants, en raison du chômage des diplômés, les ressources supplémentaires peuvent être investies dans d’autres activités non scolaires jugées plus rentables. À l’opposé, s’ils adoptent l’école comme la meilleure voie pour préparer l’avenir de leurs enfants, les ressources dégagées suite à la réduction du nombre d’enfants dans un ménage pourront effectivement être investies dans la scolarisation.

4 Il y a aussi des effets de feedback intergénérationnels entre fécondité et scolarisation qui ne sont pas à exclure dans l’émergence de la relation négative entre ces variables. En effet, plusieurs études ont montré que l’amélioration du niveau d’instruction des couples, notamment celui des femmes, s’accompagne d’un comportement de faible fécondité [Bloom et al., 2003 ; Shapiro, 2012]. Par conséquent, une hausse du niveau d’éducation d’une première génération est susceptible d’être associée plus tard à une faible fécondité dans la génération suivante, d’autant que la scolarisation peut également réduire la fécondité légitime en retardant l’âge au mariage et ces effets de feedback peuvent se renforcer au fil du temps. Par ailleurs, la réduction des risques de décès et, plus généralement, l’amélioration de la santé des enfants peuvent accroître les préférences des parents pour une plus grande « qualité » de leur progéniture – par rapport à leur quantité ou leur nombre –, les encourageant finalement à limiter le nombre d’enfants compte tenu des investissements qui leur sont consacrés [Notestein, 1945 ; Cohen, Montgomery, 1998]. Ainsi, John Cleland [2001] et Kingsley Davis [1963] rapportent que, dans un contexte de baisse de la mortalité, les coûts d’opportunité – c’est-à-dire le renoncement aux revenus tirés du travail des enfants que les parents pouvaient espérer s’ils n’avaient pas scolarisé ces derniers – augmentent avec le nombre d’enfants.

5 Comme on peut le constater, divers mécanismes, qui ne sont pas mutuellement exclusifs, mais peuvent, pour certains d’entre eux, coexister au sein d’une même population, sont susceptibles de conduire à la corrélation négative observée entre le nombre d’enfants et leur scolarisation dans les récentes études conduites en Afrique subsaharienne. Avec une telle complexité de facteurs, il est parfois difficile pour les études quantitatives d’isoler l’effet de « compétition pour les ressources » dans les familles de grande taille et, par conséquent, de mesurer l’effet d’un nombre élevé d’enfants sur les investissements scolaires. L’objectif de cet article est donc de compléter ces études quantitatives en essayant de comprendre le rôle de la scolarisation des enfants dans les stratégies reproductives des parents à Ouagadougou. Un tel objectif soulève deux questions essentielles. Il s’agit tout d’abord de s’interroger sur les perceptions qu’ont les parents de l’école et des coûts et bénéfices de la scolarisation des enfants. Ensuite, il importe de se demander dans quelle mesure ces perceptions sont prises en compte dans les décisions en matière de fécondité.

Entre politiques volontaires et contraintes économiques

6 En 2006, la capitale du Burkina Faso, Ouagadougou, comptait 1,5 million d’habitants, soit 46,4 % de la population urbaine et 10,5 % de la population totale du pays [Bayala-Ariste, 2009]. À l’instar de la situation dans plusieurs autres villes africaines [Locoh, 2003 ; National Research Council, 2003], les comportements de fécondité et les systèmes éducatifs y ont fortement évolué. Entre 1993 et 2010, la prévalence de la contraception moderne est passée de 19,9 % à 33 % à Ouagadougou et la fécondité y a baissé de 4,7 à 3,4 enfants par femme [4] [INSD, Macro International Inc., 2012].

7 Cette situation est à mettre en rapport avec l’évolution des politiques et des programmes de réduction de la fécondité dans le pays. Le premier plan d’actions de planification familiale (PF) a été défini en 1985 et sa mise en œuvre a nécessité différentes mesures législatives concernant essentiellement l’abrogation de la loi de 1920 [5]. Les prestations de PF ont été mises en place à Ouagadougou dans quatre centres de santé maternelle et infantile (SMI) dès février 1985, puis dans trois centres SMI à Bobo-Dioulasso en mai 1985. Depuis cette date, les prestations de PF se sont étendues progressivement à l’ensemble du pays ; et il faut noter que d’autres centres assurent les prestations de PF à Ouagadougou dont la clinique des sages-femmes, l’Association burkinabè pour le bien-être familial (Abbef) et quelques cliniques privées [ministère de la Santé, 2012]. Cette expansion de la planification familiale fournit un environnement propice aux couples pour contrôler efficacement leur fécondité.

8 Sur le plan scolaire, le Burkina Faso a réalisé des progrès considérables depuis son accession à l’indépendance en 1960 et la ville de Ouagadougou a connu une progression encore plus rapide [6]. Cette amélioration de la scolarisation est le résultat de politiques publiques, mais aussi de l’adhésion des populations, en particulier urbaines, à l’école. Depuis 1996, la loi d’orientation de l’éducation fait obligation aux parents d’inscrire leurs enfants à l’école à partir de leur sixième anniversaire et de les y maintenir au moins jusqu’à leur seizième anniversaire [Assemblée nationale du Burkina Faso, 2007].

9 Pourtant, la contrainte financière pesant sur les familles les plus démunies semble s’être accrue dans la mesure où l’incidence de la pauvreté urbaine est passée de 10,4 % à 20 % entre 1993 et 2010 [INSD, 2010]. Cette contrainte financière est d’autant plus marquée dans les quartiers périphériques de Ouagadougou, caractérisés par une population en moyenne plus pauvre et plus vulnérable que celle du centre-ville [Rossier et al., 2012]. En outre, depuis la rentrée scolaire 2001-2002, les bourses d’études que l’État burkinabè accordait aux enfants issus des couches défavorisées de la société pour leur permettre de poursuivre leurs études au-delà du primaire ont été complètement supprimées [Pilon, Wayack, 2003]. De même, les solidarités familiales qui permettaient d’alléger la charge d’une descendance nombreuse ne semblent plus résister aux changements socio-économiques en cours (généralisation de la scolarisation, pauvreté des ménages, accroissement des coûts de la scolarisation, nucléarisation des familles, etc.) [Bougma et al., 2014]. Enfin, l’insuffisance de l’offre publique d’éducation, en particulier dans les zones péri-urbaines, oblige les parents à scolariser leurs enfants dans les écoles privées, induisant un renchérissement des coûts de la scolarité [Pilon, 2007], qui s’ajoute aux difficultés d’accès au logement éprouvées par les ménages urbains. Dans un tel contexte de limitation générale des ressources, tant sur le plan familial que public, les couples peuvent développer de nouvelles stratégies reproductives pour réaliser leur désir de scolariser leurs enfants.

Une enquête qualitative

10 Notre étude est de type qualitatif selon l’approche de Van der Maren [1996], car elle consiste à comprendre le rôle de la scolarisation des enfants dans les comportements de fécondité des parents à partir d’entretiens – données non métriques – obtenus dans le cadre d’une enquête qualitative. Au regard de notre question de recherche, nous avons utilisé comme méthode d’analyse exploratoire l’analyse inductive générale [Blais, Martineau, 2007]. Comme nous ne disposions pas au préalable d’une grille des pratiques reproductives et scolaires à Ouagadougou, l’utilisation de cette méthode nous a semblé plus appropriée, même si nous restons conscients qu’elle présente aussi des limites à l’instar des autres approches d’analyse qualitative [ibid.].

11 Nos participants à l’enquête proviennent d’un échantillon intentionnel aléatoire de l’Observatoire de population de Ouagadougou (OPO) [7]. Afin de maximiser la diversité des discours, la sélection des participants a été effectuée en tenant compte de quelques caractéristiques sociodémographiques de base (sexe, âge, niveau d’instruction, nombre d’enfants). Au total, 23 participants au vécu différencié en matière de fécondité et de scolarisation ont été interviewés : 12 femmes et 11 hommes dont l’âge varie entre 26 et 75 ans. Dix d’entre eux n’ont aucun niveau d’instruction, et 12 ont entre un et trois enfants. Ils proviennent tout autant des zones loties que non loties [8]. Ils ont signé un formulaire de consentement éclairé et ils étaient libres de mettre fin à l’interview à tout moment sans aucune explication, mais aucun refus n’a été formulé. Par ailleurs, la saturation, une notion très importante en recherche qualitative [Van der Maren, 1996] et qui est atteinte lorsqu’après un certain nombre de sujets, on ne retrouve plus de différences, c’est-à-dire de nouvelles catégories [Laperrière, 1994], a été perçue sur notre terrain autour du vingtième entretien.

12 Les données ont été recueillies au cours d’entrevues individuelles semi-structurées et approfondies. Le choix en faveur de l’entretien individuel se justifie par le souci de garantir la discrétion et de rassurer le participant, étant donné que la fécondité est un sujet très sensible. Après les salutations d’usage et la signature du formulaire de consentement éclairé, l’interviewé était invité à raconter ses pratiques en matière de fécondité et de scolarisation des enfants. Chaque entretien a duré en moyenne 60 minutes et était enregistré avec l’accord du participant. Nous commencions par des questions d’ordre général sur les origines familiales et l’histoire matrimoniale avant d’aborder les questions spécifiques sur les pratiques reproductives, les perceptions concernant l’école et les pratiques en matière de scolarisation des enfants. Cette approche en « entonnoir » permet de ne pas laisser le participant percevoir le lien entre la fécondité et la scolarisation des enfants que nous souhaitions comprendre.

13 Les entretiens se sont déroulés durant les mois de février et mars 2014. Avec l’identifiant du participant, disponible dans les données de l’OPO, nous nous rendions à son domicile afin de lui expliquer sommairement les objectifs de l’enquête et de solliciter directement un rendez-vous pour l’interview. Pour les participants qui étaient absents lors de notre premier passage, nous communiquions par téléphone pour fixer un rendez-vous. L’entretien était réalisé en français ou en mooré [9], selon le choix de chaque personne, et avait lieu en tête-à-tête dans un endroit calme de son domicile pour garantir la discrétion et la confidentialité.

14 Afin de s’assurer de la validité des données, à chaque fois qu’un participant donnait une réponse qui méritait que l’on s’y attarde, nous n’hésitions pas à approfondir la réflexion sur ce sujet au regard de l’intérêt requis pour notre recherche. Par ailleurs, nous avons procédé à une triangulation des données collectées auprès des 23 participants en recueillant d’autres informations similaires auprès de personnes ressources. Deux types d’entre elles ont été sélectionnées par choix raisonné : quatre agents de planification familiale ont été interviewés sur les perceptions et les pratiques des usagers en matière de contraception, et huit directeurs d’école primaire et de collège ont été interrogés sur les perceptions des parents d’élèves concernant l’école et leurs pratiques scolaires. Dans l’ensemble, le discours des personnes ressources interviewées ne s’est pas écarté de celui des 23 participants.

15 Les données recueillies ont été transcrites et analysées à l’aide du logiciel QDA Miner[10]. Afin de s’assurer de la saturation des catégories, nous avons choisi de coder les entretiens selon l’ordre dans lequel ils ont été réalisés. Ne disposant pas au préalable d’une grille des pratiques reproductives et scolaires, nous avons effectué un codage ouvert. En commençant ainsi par la première entrevue, nous avons codé successivement les autres en prenant soin d’actualiser la grille de codage au fur et à mesure. L’évolution du nombre de codes cumulés selon le numéro d’ordre des entretiens montre que la saturation semble atteinte dès la dix-septième entrevue (figure 3 en annexes). La vraisemblance des codes avec les segments codés (verbatims) a été vérifiée à la fin du codage avant d’examiner et synthétiser les données dont les résultats sont présentés dans la suite de l’article. Les verbatims les plus significatifs ont été choisis pour illustrer l’argumentaire en se référant aux numéros des participants dont les profils sociodémographiques sont présentés dans le tableau 1 en annexes.

Les perceptions parentales de l’éducation

16 Les représentations que les parents interviewés ont de la scolarisation peuvent être classées en trois catégories : l’obligation parentale à scolariser les enfants, les changements de perceptions des coûts et bénéfices de l’éducation, et l’effritement des solidarités familiales de soutien à la scolarisation des enfants.

La scolarisation des enfants perçue comme une obligation parentale

17 La scolarisation des enfants est perçue comme une obligation des parents et semble être la première option que ceux-ci adoptent pour préparer l’avenir de leur progéniture. En se fondant sur leur propre expérience ou sur celle de leur entourage en matière d’insertion et de considération dans la communauté, d’accès à l’emploi, que ce soit dans la fonction publique, dans le privé ou dans le secteur informel, de promotion sociale et de soutien dans la vieillesse, les participants semblent convaincus que la scolarisation est la voie d’intégration sociale et professionnelle pour leurs enfants. Inscrire son fils ou sa fille à l’école formelle [11] semble être devenu une norme sociale à Ouagadougou que tout le monde s’efforcerait de respecter, et ne pas le faire constituerait une exception. Pour la plupart des participants, ne pas inscrire son enfant à l’école aujourd’hui, au moins dans le primaire – quitte à ne pas pouvoir le soutenir jusqu’au secondaire ou à l’université –, relève d’une irresponsabilité parentale que les enfants dénonceront vigoureusement plus tard lorsque ces derniers éprouveront des difficultés à s’intégrer dans la vie sociale et professionnelle. De plus, ne pas inscrire son enfant à l’école en ville le prédisposerait à plusieurs vices (oisiveté, vagabondage, délinquance, vol, drogue, prostitution, etc.) qui sont susceptibles de porter atteinte à l’image de la famille et à la dignité des parents. Ainsi, dès que l’enfant atteint l’âge scolaire, qu’il soit garçon ou fille, les parents ne semblent pas s’interroger sur l’opportunité de l’inscrire ou non à l’école formelle, mais s’activent plutôt à trouver une place dans un établissement public pour amoindrir les coûts, ou privé si leurs capacités financières le leur permettent.

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« Présentement que tu le veuilles ou non, tu vas scolariser tes enfants même si tu n’as pas d’argent. C’est comme dit un proverbe mossi “sin woag pagad ntoud soore” [“lorsque la saison de quelque chose arrive, nul ne peut l’éviter”]. Que tu le veuilles ou non, si c’est la saison des arachides, tu verras ses feuilles et ses coques partout [..]. Aujourd’hui, c’est la saison de l’école. Que tu aies l’argent ou pas, tu es obligé de scolariser ton enfant, même si tu vas aller mentir pour pouvoir [te faire] prêter de l’argent, tu vas commencer, quitte à ne pas terminer. Si tu ne fais pas ça, quand l’enfant va grandir et que tu es toujours en vie et que l’enfant n’a rien, il va t’accuser en disant que c’est de ta faute et il aura raison. Comme je ne veux pas ça, je fais tout comme tout le monde pour inscrire mes enfants à l’école. Mais j’avoue que ce n’est pas facile pour nous autres qui n’avons pas les moyens. »

19 La plupart des participants attachés à l’apprentissage de la religion musulmane inscrivent leurs enfants, soit dans une école franco-arabe, soit dans un établissement « classique » [13] en remettant à plus tard la formation religieuse dans une école coranique. Pour ces parents musulmans, qui se réfèrent également à leur expérience personnelle ou à celle des membres de leur communauté, les connaissances acquises à l’école classique sont capitales pour l’intégration sociale et professionnelle et il n’est plus question d’en priver leurs enfants. Le fait de les inscrire d’abord dans ce type d’établissement serait aussi dû à la limite d’âge qui y est imposée à l’entrée (entre 6 et 8 ans), contrairement à l’école coranique qui ne requiert pas en principe de conditions d’âge. Par ailleurs, le passage préalable de l’enfant dans une école classique constituerait, selon ces participants, une phase préparatoire à une meilleure formation religieuse, car elle éveillerait rapidement l’élève, ce qui faciliterait ensuite son apprentissage dans une école coranique.

20 Cette perception de l’école contraste fortement avec celle d’autrefois car, pour la plupart des participants, quand ils étaient eux-mêmes en âge scolaire, loin d’être une obligation parentale, l’école était perçue comme une question tout autant de chance et de malchance. D’un côté, des parents scolarisés disent avoir été choisis parmi plusieurs enfants en âge scolaire par leur père – ou par l’intermédiaire d’un rare membre de la famille élargie qui connaissait déjà l’importance de l’école à cette époque – ; de l’autre côté, d’autres ont été choisis par leur père parce que leur mère était la moins aimée parmi les co-épouses et pour répondre à une obligation administrative. En effet, dans les familles polygames, opposées à la scolarisation, pour respecter cette obligation d’envoyer au moins un enfant à l’école, le mari choisissait les enfants des épouses les moins aimées, c’est-à-dire celles qui n’étaient pas en situation de s’opposer à la scolarisation forcée de leurs enfants. Il y avait aussi une forte discrimination envers les filles ainsi qu’une forte concurrence entre l’école classique et l’école coranique. Le décrochage scolaire était également perçu comme un soulagement, puisque l’enfant pouvait alors se consacrer aux travaux agro-pastoraux.

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« Mes parents ne connaissaient pas l’importance de l’école. Quand le préfet a convoqué mon père pour qu’il envoie un enfant à l’école, mon père m’a choisi car ma mère était son épouse mal aimée. Là, même si ce n’est pas bon, comme c’est l’enfant d’une épouse mal aimée il n’y avait pas de problème pour la famille. »
(P15)

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« Quand j’ai quitté l’école, mes parents ne m’ont pas grondé. Au contraire, comme c’est ma tante qui m’avait inscrit à l’école, ils étaient contents quand je n’ai pas tenu et je suis revenu. Ils m’ont même encouragé à bien garder les animaux. Moi je préférais garder les animaux que d’aller à l’école. Aujourd’hui je regrette mais c’est trop tard. Je ne peux que soutenir mes enfants maintenant. »
(P7)

23 Aujourd’hui, l’engouement pour la scolarisation des enfants semble si intense que le décrochage scolaire est souvent vécu par les parents comme un drame. Un directeur d’école primaire en témoigne :

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« En classe de CM2, il y a un enfant qui a fait une semaine sans venir à l’école. […]. On l’a amené ce matin, je lui dis de rentrer en classe, il refuse. […]. Je le tire par la main pour le faire rentrer, il refuse. Sa maman s’est mise à pleurer. Elle connaît l’importance de l’école, voilà pourquoi elle pleure. Et ce n’est pas la première fois que des parents viennent pleurer chez moi. Il y a une mère d’un élève au CM1 aussi […]. La maman était en train de pleurer en disant qu’elle a une co-épouse dont les enfants vont à l’école, et elle ses enfants ne veulent pas aller à l’école [..]. Or dans le temps, si l’enfant ne venait pas à l’école, le parent même était content. Il disait tant mieux, il va m’aider à faire des travaux domestiques. »

Les changements de perception des coûts et bénéfices de l’éducation des enfants

25 La plupart des participants interviewés ont migré à Ouagadougou. Ils ont passé leur enfance au village dans des familles nombreuses où ils participaient dès leur plus jeune âge aux travaux champêtres et à la garde des animaux. Même ceux qui étaient scolarisés aidaient leurs parents dans ces activités agro-pastorales pendant les jours non ouvrables et les vacances. De fait, à cette époque, avoir un nombre élevé d’enfants était perçu comme une grande richesse, puisque cela conférait beaucoup d’avantages à leurs géniteurs (soutien dans les travaux domestiques et agro-pastoraux, prestige social, capital vieillesse, etc.). Selon le discours des participants cependant, des changements semblent s’opérer dans les coûts et bénéfices de l’éducation depuis leur migration en ville. Il en est de même pour les quelques rares participants autochtones de Ouagadougou dont la plupart des parents pratiquaient également des activités agricoles dans les zones périphériques, maintenant résidentielles (zones loties et non loties). Les changements-majeurs relevés par les interviewés font référence à la longue période de dépendance des enfants et au renchérissement des coûts de la scolarisation.

26 Contrairement au village où les enfants, même scolarisés, peuvent avoir une période de productivité relativement longue, en ville, compte tenu des types d’activités professionnelles menées par les parents, ils ont une période productive plus courte et, par conséquent, une période de dépendance plus longue. La généralisation de l’école, la volonté des parents de financer les études de leurs enfants aussi longtemps que possible en vue de maximiser la rentabilité des investissements scolaires et le chômage croissant des diplômés contribuent à allonger encore cette période de dépendance des enfants en ville. Pour la plupart des participants, cette durée de prise en charge à Ouagadougou devient de plus en plus longue, et il serait difficile pour eux d’avoir beaucoup d’enfants et d’être en mesure de pourvoir convenablement à leurs besoins (alimentation, santé, scolarisation, etc.) si les moyens faisaient défaut.

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« Ici, la vie n’est pas comme au village. Nous ne cultivons pas, nous achetons tout au marché, ce n’est pas facile. Si un enfant est malade, il faut l’amener à l’hôpital. Présentement, si tu mets un enfant au monde, tu es obligé de l’inscrire à l’école et de le soutenir dans ses études, à moins que l’enfant lui-même refuse. Il peut gagner son certificat d’études primaire sans l’entrée en 6e et tu es obligé de payer cher pour qu’il aille au collège. Pour qu’il termine ses études, obtenir un emploi et être indépendant vis-à-vis de toi, il n’aura pas moins de 20 à 25 ans. Mon premier fils a 20 ans et c’est maintenant qu’il est allé à l’université. Dieu seul sait quand il finira ses études. N’en parlons pas avoir un emploi et être capable de s’occuper de lui-même. Quand je pense que je dois faire comme ça pour tous mes enfants, je suis très inquiet et cela ne m’encourage pas à avoir d’autres enfants […]. »
(P23)

28 Les participants interviewés perçoivent une augmentation des coûts de la scolarisation des enfants, notamment des frais de scolarité. En se référant à la période de leur propre fréquentation de l’école ou à celle de leurs enfants aînés, quand la pression sur l’offre scolaire publique était moins forte et le soutien de l’État encore perceptible, notamment à travers l’octroi de bourses d’études aux enfants des familles démunies, la plupart des participants disent éprouver d’énormes difficultés à supporter les frais de scolarité de leurs enfants au fil du temps. Pour certains d’entre eux, ce coût devient exorbitant, alors que les salaires ou les revenus baissent ou, dans le meilleur des cas, stagnent. La cherté des fournitures scolaires (livres, cahiers, stylos, etc.) est également relevée en dépit de la dotation des écoles primaires – publiques et privées reconnues – en manuels par l’État, et du contrôle des prix des fournitures auprès des commerçants à chaque rentrée scolaire. Pour la plupart des participants, les manuels fournis par l’État ne concernent que le primaire et, de plus, parviendraient souvent en retard à leurs enfants, ce qui les incite parfois à les acheter eux-mêmes. Par ailleurs, pour les plus démunis, le soutien de l’État au primaire semble jouer un rôle marginal dans leurs dépenses scolaires, puisqu’ils continuent d’assumer les cotisations et/ou les frais de scolarité.

29 Ce renchérissement des coûts de la scolarisation peut s’expliquer par plusieurs facteurs. Le problème de disponibilité des places dans les écoles publiques à Ouagadougou conduit tout d’abord les parents à recourir de plus en plus aux établissements privés, où les coûts sont nettement plus élevés. En outre, dans un ménage fécond, plus le temps passe, plus il y a d’enfants d’âge scolaire à inscrire à l’école, et ceux qui étaient déjà scolarisés au primaire accèdent progressivement aux cycles suivants (post-primaire, secondaire, université), ce qui engendre des dépenses cumulatives exorbitantes pour le ménage ou la famille. À cela, s’ajoute le fait que la scolarisation dès la maternelle commence à se développer à Ouagadougou et que les parents s’efforcent ainsi de scolariser les très jeunes enfants, si leurs capacités financières le permettent.

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« Mes enfants ont été tous déscolarisés faute de moyens. Même mon petit-fils qui est là, s’il y avait les moyens, il serait à la maternelle. C’est pour cela que nos enfants, si ce n’est par l’aide de Dieu, ne peuvent pas réussir comme ceux des gens nantis. S’il était allé à la maternelle depuis l’année passée, il serait déjà en train d’apprendre à parler le français et quand il ira au primaire c’est une continuité. Mais si tu n’as pas à manger, tu ne t’inquiètes pas de cela, c’est difficile. »
(P4)

L’effritement des solidarités familiales

31 L’effritement des solidarités familiales de soutien à la scolarisation est également perceptible dans le discours des participants interviewés qui indique une réorientation des ressources parentales vers la famille nucléaire plutôt que vers la famille élargie.

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« De nos jours c’est vraiment difficile. Pour avoir un parent pour qu’il te vienne en aide ce n’est pas facile, lui aussi est préoccupé par ses propres problèmes. J’ai seulement un seul frère de même mère, mais lui est en Côte d’Ivoire et ne vaut pas mieux que moi ; les autres qui sont de même père ne me viennent pas en aide. »
(P4)

33

« Je n’ai pas encore eu à aider les membres de ma famille, sauf quand il y a une famine au village, j’apporte une petite contribution en termes d’alimentation pour qu’ils puissent avoir à manger. Sinon, dans la scolarisation comme ça, je n’ai pas eu à aider. Moi-même, j’ai des difficultés à couvrir les dépenses de mes propres enfants, n’en parlons pas d’aider d’autres personnes. »
(P9)

34 La plupart des participants sont réticents à apporter de l’aide à la scolarisation d’autres enfants de la famille élargie, que ce soit en termes d’accueil dans leur propre ménage ou de participation au paiement des fournitures scolaires et des frais de scolarité. Des raisons financières et les difficultés à assurer les dépenses de leur propre ménage sont couramment évoquées pour justifier cette incapacité à satisfaire aux obligations de la parentèle élargie en termes de scolarisation. Ainsi, au lieu d’accepter les enfants des proches en confiage où ils risqueraient de supporter à eux seuls l’ensemble des dépenses (alimentation, santé, scolarisation), certains participants préfèrent soutenir l’enfant dans son ménage d’origine. Et dans le cas où celui-ci serait tout de même accueilli, une contribution des parents biologiques au moins pour les frais de scolarité sera exigée. La non-reconnaissance des enfants confiés après leur succès scolaire et professionnel a été aussi évoquée comme une raison de ne plus accepter de confiage dans le ménage.

35 De même, plusieurs participants sont également réticents à confier leurs enfants pour des motifs de scolarisation, y compris ceux qui sont dans le besoin. Ils préfèrent plutôt les garder auprès d’eux et solliciter une aide de la parentèle pour les dépenses scolaires. La raison principale évoquée est la maltraitance des enfants dans les ménages d’accueil où les engagements initiaux ne sont le plus souvent pas respectés. Ainsi, pour la plupart des participants, les coûts de la scolarisation de leurs enfants relèvent de leur responsabilité, ce qui les amène à développer de nouvelles stratégies pour y faire face.

Les stratégies de scolarisation

36 Du fait des contraintes financières, et afin de scolariser l’ensemble de leurs enfants, les familles adoptent différentes stratégies. Ainsi, les personnes interviewées pratiquent l’espacement des naissances et la limitation du nombre d’enfants, ont recours à l’épargne ou les prêts scolaires, font appel au travail des enfants pendant les vacances scolaires et réduisent les dépenses familiales de loisirs.

L’espacement des naissances et la limitation du nombre d’enfants

37 Plusieurs logiques sous-tendent l’espacement des naissances chez les participants interviewés parmi lesquelles le désir de mieux investir dans la scolarisation des enfants qui semble jouer un rôle prépondérant, notamment chez les plus jeunes (figure 1). En effet, certains d’entre eux disent avoir espacé suffisamment les naissances grâce à l’utilisation de la contraception moderne pour se préparer et aborder sereinement la scolarisation de leurs enfants, évitant d’en avoir plusieurs scolarisés en même temps dans le même cycle scolaire, notamment au secondaire où les frais sont relativement élevés. Pour eux, des naissances rapprochées engendreraient une multiplication des frais, hors de portée si les aînés et les cadets accédaient au collège presqu’au même moment.

Figure 1

Pourcentage de mots en bulles par groupe d’âges selon les raisons de l’espacement des naissances chez les participants interviewés

Figure 1

Pourcentage de mots en bulles par groupe d’âges selon les raisons de l’espacement des naissances chez les participants interviewés

Sources : Enquête qualitative 2014 et calculs des auteurs.

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« Si nous espaçons les naissances, c’est pour alléger les charges. Parce que si vous prenez le cas de mon premier fils, il fait la 6e. Sa scolarité fait 75 000 et quelques francs [14], le payement n’est déjà pas facile. Ça ne me donne donc pas le courage d’avoir de nombreux enfants, puisque mon travail [la maçonnerie] n’est pas régulier. C’est ce qui motive notre choix pour les espacements. Parce que de nos jours tu ne peux pas mettre un enfant au monde et refuser de l’envoyer à l’école. Même si c’est pour qu’il arrive ne serait-ce qu’en 6e avant de quitter l’école. »
(P7)

39 D’autres raisons non scolaires sont également à l’origine d’écarts d’âges importants entre les enfants dans l’échantillon des personnes interviewées. Il s’agit principalement de la préservation de la santé du nouveau-né, de la possibilité laissée à la mère de se reposer, de l’absence de conjoint à un moment donné et de l’infécondité secondaire pathologique.

40 Les raisons données par les interviewés quant à la limitation des naissances ou du nombre d’enfants sont multiples (figure 2). Parmi les principales évoquées, apparaît la scolarisation : au-delà de l’espacement des naissances, la limitation du nombre d’enfants semble provenir également d’un désir des parents de mieux investir dans la scolarisation de leur progéniture. En effet, quelques participants semblent en avoir anticipé les coûts.

Figure 2

Pourcentage de mots en bulles par groupe d’âges selon les raisons de la limitation des naissances chez les participants interviewés

Figure 2

Pourcentage de mots en bulles par groupe d’âges selon les raisons de la limitation des naissances chez les participants interviewés

Sources : Enquête qualitative 2014 et calculs des auteurs.

41

« Si tu as un enfant aujourd’hui qui ne va pas à l’école c’est un grand inconvénient. Moi j’ai trois enfants et ils vont tous à l’école et quand arrive le moment de payer, c’est dur […]. Si ça se trouvait qu’ils étaient plus que trois, ça va être un vrai problème. C’est pour cela que j’ai planifié comme ça. »
(P7)

42 Cependant, pour la grande majorité des participants, la décision de limiter le nombre d’enfants intervient au moment où ils éprouvent des difficultés à assurer convenablement les dépenses scolaires, surtout lorsque les aînés commencent à accéder au secondaire. Afin de pouvoir supporter ces coûts et être toujours en mesure de scolariser plus tard les plus jeunes qui n’ont pas encore atteint l’âge scolaire, plusieurs interviewés envisagent de ne plus avoir d’autres enfants.

43

« Ça suffit comme ça. Je ne veux plus d’enfant parce que déjà avec seulement les deux enfants qui vont à l’école c’est difficile. N’en parlons pas si on ajoute. »
(P5)

44

« Déjà moi j’ai pas mal d’enfants à payer la scolarité et pendant la rentrée scolaire j’ai des difficultés. Quand ceux qui n’ont pas encore l’âge d’aller à l’école vont venir s’ajouter, ce sera encore plus difficile. Donc, je pense que je dois arrêter comme ça. »
(P9)

45 Outre les coûts de la scolarisation des enfants, plusieurs autres raisons ont été évoquées : le coût de la vie (logement, alimentation, santé), la précarité de l’emploi, les difficultés vécues pendant l’enfance – notamment en tant qu’orphelin ou dans une famille nombreuse –, le besoin de la femme de se reposer suite à plusieurs accouchements souvent difficiles, l’absence du conjoint et la stérilité secondaire acquise par exemple par la ligature des trompes. Globalement, après avoir eu un certain nombre d’enfants, généralement deux ou trois issus d’une même mère et d’un même père, les participants interviewés semblent envisager un compromis entre le nombre d’enfants supplémentaires à avoir et le bien-être général du ménage, y compris la scolarisation. Cette stratégie reproductive reste néanmoins perturbée par des éléments d’ordre financier et culturel (la composition par sexe de la descendance, le remariage et la gémellité des dernières naissances).

46 La situation financière semble cependant ambivalente dans les comportements de fécondité. En effet, son amélioration à un moment donné paraît conduire la plupart des participants à envisager une naissance supplémentaire. A contrario, une dégradation les amènerait à observer une pause dans la procréation ou à envisager un arrêt définitif de la fécondité. Enfin, la survie des enfants a été très peu évoquée par les participants pour justifier leur forte fécondité, ce qui suggère que l’idée de faire le maximum d’enfants possible pour anticiper la mortalité (stratégie d’assurance) est marginale. Ce faible effet des risques perçus de la mortalité sur les comportements de fécondité des participants est à mettre en rapport avec la baisse substantielle de la mortalité des enfants au cours des dernières années, notamment à Ouagadougou [INSD, Macro International Inc., 2012].

Les autres stratégies de gestion de la scolarisation

47 Hormis l’espacement et la limitation des naissances – qui semblent être déterminés pour partie par le désir de mieux investir dans la scolarisation des enfants –, les participants interviewés ont recours à d’autres stratégies pour réaliser leurs aspirations à scolariser leur progéniture. Il s’agit principalement de l’épargne et des prêts scolaires, du recours au travail des enfants pendant les vacances et de la restriction des loisirs et du niveau de vie du ménage.

48 Quelques rares participants interviewés anticipent la scolarisation future de leurs enfants en distinguant les ressources allouées aux études de celles destinées aux autres besoins de la famille. Dans cette catégorie d’individus, certains, notamment ceux qui ont un revenu mensuel régulier, procèdent à l’ouverture d’un compte bancaire pour les enfants – séparément ou pour l’ensemble d’entre eux – ; d’autres, notamment ceux qui ont des revenus irréguliers, font de l’épargne informelle en cotisant chez eux ou dans les tontines [15]. Ces ressources financières sont utilisées par la suite pour payer les fournitures, les frais scolaires et des vêtements pour les enfants à la rentrée des classes. Enfin, d’autres participants, notamment certains salariés, ont recours aux prêts scolaires dans les banques ou dans les caisses populaires à chaque rentrée pour assurer les dépenses scolaires de leurs enfants.

49 Le recours au travail des enfants pendant les vacances est un autre moyen de financer les études. Pour certains participants interviewés, les congés scolaires ne sont pas considérés comme une période pendant laquelle les enfants scolarisés doivent se reposer à travers des voyages ou autres activités de détente, mais plutôt une occasion de les amener à faire des « petits boulots ». Si pour certains, occuper les enfants pendant les vacances permet d’éviter leur vagabondage, pour d’autres, le job de vacances de leurs filles et fils relève d’une nécessité, voire d’une obligation pour que ceux-ci puissent continuer leurs études à la prochaine rentrée scolaire. Les raisons évoquées font référence aux conditions économiques difficiles et au coût élevé de l’éducation. Ainsi, le travail des enfants permet de ramener quelques pièces de monnaie pendant les vacances, qui permettent au bout d’un certain temps, à défaut de financer l’ensemble des frais scolaires, de payer les fournitures ou des vêtements pour la reprise de l’école.

50

« Il y a un endroit au marché de Kilwin où les gens vont prendre des articles pour les vendre et le soir le propriétaire leur donne quelque chose. Pendant les vacances, mon enfant qui fait la 3e cette année y est allé pour vendre et je gardais son argent. Il a pu réunir 50 000 francs CFA et, à la rentrée scolaire, son père est allé payer une avance de la scolarité avec cet argent. Maintenant, nous allons nous débrouiller pour solder le reste après […]. »
(P14)

51 Quelques rares participants, assez jeunes, disent avoir limité leurs loisirs (fréquentation des maquis [16] ou boîtes de nuit, etc.) et s’être abstenus de meubler leur maison ou de s’acheter une mobylette originale – très coûteuse – comme leurs camarades, afin de mieux investir dans le bien-être de leurs enfants, dont leur scolarisation. De même, certains participants disent avoir quitté leur location en ville avec toutes ses commodités (électricité, eau courante, etc.) pour habiter dans les zones non loties, la raison évoquée étant certes la volonté d’acquérir un titre de propriété plus tard, mais aussi de faire des économies afin de mieux s’occuper de l’avenir de leurs enfants. D’autres participants – les plus nombreux – diminuent également certaines dépenses compressibles (les dépenses pendant les fêtes, les vivres, etc.) pour faire des économies, afin d’assurer les dépenses prioritaires du ménage telles que la scolarisation des enfants.

52

« Ici à Nonghin, même ceux qui ne peuvent même pas avoir à manger ne laissent pas leurs enfants à la maison. Même s’ils allaient acheter trois plats de maïs, ils préfèrent acheter un plat et demi et économiser l’autre plat et demi pour les frais de scolarité. Chacun veut mettre son enfant à l’école […]. »
(P20)

53

« Pour moi, si je calcule, j’ai déjà fait combien de fêtes ? Je ne me dérange plus pour une fête. Je ne réclame pas quoi que ce soit à mon mari pour une fête. Ça ne m’intéresse pas […]. Mon mari peut rester trois ans sans m’acheter un pagne […]. Il met les enfants devant. Et effectivement, les frais de scolarité sont chers. Si tu veux que l’enfant soit à l’école, qu’il mange, alors que nous tirons tout du marché, nous n’avons pas de grenier à la maison. Donc c’est difficile. Si tu veux du maïs et du riz, ah ! L’entretien des enfants n’est pas facile. Ce n’est pas facile. »
(P20)

Conclusion

54 Notre étude a montré qu’à Ouagadougou aujourd’hui la scolarisation des enfants est perçue comme une obligation parentale et qu’il y a un changement dans les coûts et bénéfices de l’éducation (allongement de la période de dépendance des enfants, renchérissement des coûts de la scolarité, effritement des solidarités familiales de soutien à la scolarisation). L’engouement pour la scolarisation des enfants dans la capitale du Burkina Faso avait déjà été révélé dans d’autres études antérieures [Yaro, 1995 ; Baux, 2007]. Depuis, l’intérêt des parents pour l’école n’a pas fléchi, et chacun cherche à offrir une instruction scolaire à ses enfants en dépit de capacités financières souvent très limitées.

55 Ouagadougou n’est pas encore une zone industrialisée, mais elle est tout de même caractérisée par une diversité d’activités professionnelles, relevant de l’administration, du commerce, de l’artisanat ou des secteurs dits « informels » tandis que l’agriculture est quasiment inexistante. Ainsi, la participation des enfants aux activités de leurs parents y est très faible. Déjà en 1993, seuls 15 % des adultes qui sont dans le commerce ou l’artisanat déclaraient que leurs enfants les assistaient ou les aidaient dans leur travail [Yaro, 1995].

56 La cherté de l’école et l’effritement des solidarités familiales de soutien à la scolarisation, relevés dans notre terrain, peuvent être observés à travers des études quantitatives qui se sont intéressées à la question [Yaro, 1995 ; Kamano et al., 2010 ; Bougma et al., 2014]. En effet, à la rentrée scolaire 1992-1993, 40 % des parents affirmaient déjà que l’école était très coûteuse. Ce jugement reposait sur le fait que les droits d’écolage [17] dans les établissements publics allaient de 1 000 à 2 000 francs CFA, auxquels s’ajoutaient les diverses cotisations et les frais de fournitures scolaires. En 1992, alors que la pression sur l’offre scolaire publique n’était pas aussi forte qu’aujourd’hui, les parents dépensaient 6 625 francs CFA pour un enfant scolarisé [Yaro, 1995]. En 2006, le coût moyen en milieu urbain au Burkina Faso était de 16 572 francs CFA pour le primaire, de 51 461 pour le post-primaire et de 77 810 pour le second cycle du secondaire [Kamano et al., 2010]. De même, la faible fréquence de l’entraide familiale pour la scolarisation a été également mise en évidence à Ouagadougou [Bougma et al., 2014], ce qui confirme la réorientation des ressources que nous avons décrite, vers la famille nucléaire plutôt que vers la parentèle élargie.

57 S’agissant maintenant de la prise en compte de ces perceptions, nos résultats révèlent que les parents intègrent les coûts de l’éducation des enfants dans leurs décisions de reproduction. Des mécanismes similaires ont été observés en milieu urbain au Sénégal et au Zimbabwe [LeGrand et al., 2003 ; Randall, LeGrand, 2004]. Contrairement à la théorie classique du compromis entre « quantité » et « qualité » des enfants [Becker, Lewis, 1973 ; Becker, Tomes, 1976], cette anticipation des coûts de la scolarisation de la progéniture dans les comportements reproducteurs n’est pas fondée sur une décision ex ante de la taille finale de la famille, mais semble plutôt se faire de manière séquentielle dans un contexte incertain, où le contrôle de la fécondité bénéficie d’une large adhésion – au moins dans la jeune génération – et où la scolarisation est devenue coûteuse et perçue comme extrêmement importante.

58 Après un certain nombre d’enfants, la grande majorité des parents réévaluent constamment leur situation au sens large (situation économique, composition par sexe et santé des enfants déjà nés, santé de la mère, coûts de la scolarité des enfants déjà scolarisés, etc.) avant d’envisager ou non un espacement ou une limitation des naissances. Cependant, même si le contrôle de la fécondité semble séquentiel pour une large majorité des participants de notre étude, il n’est pas exclu que les plus jeunes couples qui souhaitent investir davantage dans la scolarisation de leurs enfants (scolarité plus longue, enseignement de meilleure qualité, non-cumul de l’école et du travail, etc.) soient plus sensibles aux coûts de la scolarité à long terme et, par conséquent, soient plus enclins à opter pour une limitation ex ante de la taille finale de leur famille.

59 En conclusion, les coûts et bénéfices perçus de la scolarisation des enfants jouent un rôle prépondérant dans les stratégies reproductives à Ouagadougou. Convaincus de l’importance de l’école pour l’intégration sociale et professionnelle de leur progéniture, les parents semblent considérer la scolarisation comme une obligation qui s’impose à eux. Cependant, ces changements d’aspirations en faveur de l’école, qui semblent n’exclure personne, pas même les plus pauvres, se passent dans un contexte marqué par plusieurs mutations socio-économiques (renchérissement des coûts de la scolarité, longue période de dépendance des enfants aggravée par le chômage des diplômés, effritement des solidarités familiales de soutien à la scolarisation avec une réorientation des ressources parentales vers la famille nucléaire plutôt que vers la famille élargie, etc.).

60 La conjugaison de l’ensemble de ces facteurs tend à faire reposer les coûts de la prise en charge des enfants sur leurs parents biologiques, ce qui conduirait bon nombre de couples à espacer suffisamment les naissances et à en limiter leur nombre afin de réaliser leurs aspirations à scolariser leurs enfants. Ces nouvelles stratégies d’investissement scolaire par le contrôle de la fécondité, qui semblent être à la portée des couples, surtout avec l’expansion des méthodes contraceptives modernes, sont aussi limitées par des considérations d’ordre socioculturel qui priment souvent sur celles d’ordre financier : la composition par sexe de la descendance, la gémellité des dernières naissances et le remariage conduisent parfois à envisager une naissance supplémentaire à tout prix.

61 Cette situation incertaine amènerait les couples à contrôler séquentiellement leur fécondité et à développer d’autres stratégies (épargne formelle ou informelle, prêts scolaires, travail des enfants pendant les vacances, restriction des loisirs et du niveau de vie du ménage) pour gérer un tant soit peu les coûts de la scolarisation de leurs enfants, lesquels pourraient devenir insoutenables sans la mise en œuvre de stratégies reproductrices. Ainsi, la coexistence de l’ensemble des mécanismes évoqués, qui sont intimement liés aux changements dans les coûts et bénéfices de l’éducation, serait à la base de l’émergence de la relation négative observée entre le nombre d’enfants et leur scolarisation à Ouagadougou.

Annexes
Tableau 1

Profil sociodémographique des participants interviewés

Tableau 1
No Participant Sexe Âge Profession Statut marital Ethnie Religion Niveau d’éducation Nombre d’enfants nés vivants Langue d’interview T G F D P1 H 75 Sans emploi Polygame, trois femmes dont une est décédée Mossi M Aucun 22 10 12 7 Me P2 F 39 Vendeuse de riz Veuve, mais remariée avec le frère de son défunt mari Mossi M 4e 3 1 2 0 Me P3 H 43 Chauffeurmécanicien Monogame Mossi C 5e 2 2 0 0 Fr P4 F 53 Petit commerce de mil Mariée, mais abandonnée par son mari Mossi M Aucun 5 3 2 0 Me P5 F 26 Vendeuse de riz Mari polygame sans corésidence Mossi M CM2 3 1 2 0 Me P6 F 29 Femme au foyer Mari monogame Mossi M 7e année, franco-arabe 4 2 2 0 Me P7 H 41 Maçon Monogame Mossi C CP1 3 3 0 0 Me
Tableau 1
No Participant Sexe Âge Profession Statut marital Ethnie Religion Niveau d’éducation Nombre d’enfants nés vivants Langue d’interview T G F D P8 H 48 Chauffeur de taxi-moto Polygame, quatre femmes dont deux sont décédées Mossi M Aucun 8 4 4 0 Me P9 H 60 Boucher Polygame, trois femmes dont une a quitté le domicile conjugal en laissant ses 4 filles dans le ménage Mossi M 3e 12 4 8 0 Fr P10 F 53 Inspectrice de l’enseignement du premier degré Veuve Mossi C Terminale 4 3 1 0 Fr P11 F 59 Agent de télécommunication (retraitée) Veuve Bobo M CM2 3 1 2 0 Fr P12 F 53 Enseignante Divorcé Mossi C 3e 2 2 0 0 Fr P13 H 50 Enseignant Monogame Mossi C Terminale 6 3 3 0 Fr P14 F 41 Petit commerce de condiments Mariée à un monogame Mossi C CP1 7 2 5 0 Me
Tableau 1
No Participant Sexe Âge Profession Statut marital Ethnie Religion Niveau d’éducation Nombre d’enfants nés vivants Langue d’interview T G F D P15 H 58 Vigile et cordonnier Monogame Mossi M CM2 3 1 2 0 Me P16 F 32 Petit commerce Sans corésidence avec mari polygame Mossi C 4e 3 2 1 0 Fr P17 H 30 Menuiser Monogame Samo M CM2 2 1 1 0 Fr P18 F 40 Petit commerce Mariée à un monogame Mossi M Aucun 3 2 1 0 Me P19 H 35 Conducteur (minier) Monogame Mossi M Aucun 3 0 3 0 Fr P20 F 50 Femme au foyer Mariée à un monogame Mossi C Aucun 7 6 1 2 Me P21 F 53 Enseignante (secondaire) Mariée à un monogame Gourmantché C 3e 4 2 2 2 Fr P22 H 26 Petit entrepreneur de secrétariat et de traduction Monogame Peulh M CM2 + Licence en étude islamique 2 1 1 0 Me P23 H 54 Commerçant Polygame Mossi M Aucun 11 4 7 0 Me

Profil sociodémographique des participants interviewés

Notes : F = femme et H = homme ; C = chrétien et M = musulman ; T = total, G = garçon, F = fille et D = décès, Me = moore, Fr = français.
Sources : Enquête qualitative 2014.
Figure 3

Évolution du nombre de codes cumulés selon le numéro d’ordre des participants interviewés (critère de saturation des catégories)

Figure 3

Évolution du nombre de codes cumulés selon le numéro d’ordre des participants interviewés (critère de saturation des catégories)

Sources : Enquête qualitative 2014 et calculs des auteurs.

Notes

  • [*]
    Enseignant-chercheur, Institut supérieur des sciences de la population (ISSP), université Ouaga 1 Professeur Joseph Ki-Zerbo (ex-université de Ouagadougou).
  • [**]
    Directrice de recherche, Institut de recherche pour le développement (IRD), UMR 196 Centre population et développement (Ceped), université Paris-Descartes – IRD.
  • [***]
    Professeur titulaire en démographie, université de Montréal.
  • [****]
    Maître de conférences en démographie, Institut supérieur des sciences de la population (ISSP), université Ouaga 1 Professeur Joseph Ki-Zerbo (ex-université de Ouagadougou).
  • [1]
    Cet article présente des résultats du projet Demtrend – Conséquences des stratégies de fécondité et de la composition du ménage sur la scolarisation et le travail des enfants en milieu urbain au Burkina Faso, financé par la Fondation William et Flora Hewlett, l’Agence française de développement (AFD) et l’Institut de recherche pour le développement (IRD).
  • [2]
    À savoir l’évolution d’un régime de fécondité dite « naturelle » (non dirigée par les couples) vers un régime de fécondité « dirigée », quand les couples peuvent limiter les naissances grâce à la contraception. Cette transition s’accompagne d’un déclin des taux de fécondité.
  • [3]
    Le ratio de dépendance est défini comme le rapport du nombre d’individus supposés « dépendre » des autres pour leur vie quotidienne (enfants et personnes âgées) et le nombre d’individus capables d’assumer cette charge.
  • [4]
    En milieu rural, la fécondité a baissé seulement de 7,3 à 6,7 enfants par femme.
  • [5]
    Loi française de l’époque coloniale interdisant la « propagande » qui visait à promouvoir les méthodes contraceptives et l’avortement. Cette loi, qui était en vigueur au Burkina Faso jusqu’en 1985, prévoyait une peine sévère pour les personnes impliquées dans la conduite d’avortements illégaux, la promotion de politiques pour la prescription et la vente de contraceptifs, et la lutte pour l’augmentation de l’accès à la planification familiale.
  • [6]
    En 2010, le taux net de scolarisation (TNS) des enfants âgés de 6-11 ans était de 85,6 % à Ouagadougou, contre 70,9 % pour les autres villes et 39,4 % en milieu rural. Chez les enfants âgés de 12-18 ans, qui sont censés être inscrits au secondaire, le TNS était de 48,4 % à Ouagadougou, 40,6 % dans les autres villes et seulement 10,4 % en milieu rural [INSD, Macro International Inc., 2012].
  • [7]
  • [8]
    Les zones loties sont des quartiers formels tandis que les zones non loties sont des quartiers informels situés en périphérie, régis par le système foncier traditionnel et dénués d’infrastructures publiques (eau, électricité, assainissement, etc.).
  • [9]
    Le mooré est la langue des Mossi, ethnie majoritaire du Burkina Faso, et c’est la langue la plus couramment parlée à Ouagadougou.
  • [10]
    QDA Miner est un logiciel d’analyse des données qualitatives. Il permet non seulement le codage, l’annotation, l’exploration et l’analyse de petites et de grandes quantités de documents et d’images, mais aussi l’analyse des transcriptions d’entretiens individuels et de groupes de discussion.
  • [11]
    C’est-à-dire une école où les activités éducatives sont structurées dans le cadre d’un système scolaire ou universitaire et qui bénéficie d’une reconnaissance officielle des acquis (diplômes reconnus par l’État) à la fin de la formation. Les parents ont le choix entre ces écoles formelles ou bien des écoles non formelles (école coranique, centre d’alphabétisation, etc.).
  • [12]
    Voir le tableau 1 en annexes.
  • [13]
    Contrairement aux écoles classiques où le français (langue officielle du pays) est l’unique langue d’enseignement, les écoles franco-arabes sont des institutions scolaires confessionnelles où les langues d’enseignement sont l’arabe et le français. L’élève y apprend toutes les disciplines enseignées à l’école primaire à travers ces langues ainsi que l’instruction islamique en arabe uniquement.
  • [14]
    1 000 francs CFA = 1,52 euro.
  • [15]
    La tontine est une association de personnes qui, unies par des liens familiaux, d’amitié, de profession, de clan ou de région, se retrouvent à des périodes d’intervalles plus ou moins variables afin de mettre en commun leur épargne au bénéfice de tout un chacun, et cela à tour de rôle. Les participants versent régulièrement des cotisations de montant fixe à un fonds commun qui est distribué tour à tour à chacun des membres, désigné en général par tirage au sort. F. J. A. Bouman [1977] définit les tontines comme étant « des associations rotatives d’épargne et de crédit ».
  • [16]
    Les maquis sont de débits de boissons.
  • [17]
    L’écolage désigne en Afrique francophone ou en Suisse les frais de scolarité demandés aux écoliers.
Français

De nombreuses études quantitatives conduites récemment en Afrique subsaharienne mettent en évidence une corrélation négative entre le nombre d’enfants et leur scolarisation, mais les mécanismes à l’origine d’une telle relation restent méconnus. Cette étude utilise des données qualitatives produites par l’Observatoire de population de Ouagadougou pour explorer le rôle de la scolarisation des enfants dans les stratégies reproductives de leurs parents. Des entretiens semi-directifs et approfondis ont permis d’examiner les perceptions des femmes et des hommes sur les coûts et bénéfices de l’éducation de leur progéniture et de comprendre dans quelle mesure celles-ci entrent en compte dans leurs stratégies reproductives. Le discours des participants à l’enquête indique que cette relation négative entre le nombre d’enfants et leur scolarisation dans les quartiers périphériques de Ouagadougou est intimement liée aux changements dans ces coûts et bénéfices. L’article montre ainsi que les dépenses scolaires reposent dorénavant de façon presque exclusive sur les parents biologiques.

Mots-clés

  • fécondité
  • scolarisation
  • stratégies reproductives
  • stratégies éducatives
  • approche qualitative
  • Burkina Faso

Bibliographie

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Moussa Bougma [*]
  • [**]
    Directrice de recherche, Institut de recherche pour le développement (IRD), UMR 196 Centre population et développement (Ceped), université Paris-Descartes – IRD.
Marie-France Lange [**]
  • [***]
    Professeur titulaire en démographie, université de Montréal.
Thomas K. LeGrand [***]
  • [****]
    Maître de conférences en démographie, Institut supérieur des sciences de la population (ISSP), université Ouaga 1 Professeur Joseph Ki-Zerbo (ex-université de Ouagadougou).
Jean-François Kobiané [****]
  • [1]
    Cet article présente des résultats du projet Demtrend – Conséquences des stratégies de fécondité et de la composition du ménage sur la scolarisation et le travail des enfants en milieu urbain au Burkina Faso, financé par la Fondation William et Flora Hewlett, l’Agence française de développement (AFD) et l’Institut de recherche pour le développement (IRD).
Cette publication est la plus récente de l'auteur sur Cairn.info.
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Mis en ligne sur Cairn.info le 01/12/2016
https://doi.org/10.3917/autr.074.0023
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